Médiathèque baha'ie

L'ordre administratif de Baha'u'llah

Par Louis Hénuzet
(érudit baha'i qui fut professeur universitaire en étude comparée des religions ainsi que conseiller continental baha'i)


Table des matières

Introduction
1. SIGNIFICATION DE L'ORDRE ADMINISTRATIF
2. LES INSTITUTIONS DE L'ORDRE ADMINISTRATIF
3. LE GARDIENNAT ET LES MAINS DE LA CAUSE
4. LES INSTITUTIONS ADMINISTRATIVES
5. LA MAISON UNIVERSELLE DE JUSTICE
6. LES ASSEMBLEES NATIONALES ET LOCALES
7. FONDS BAHA'IS
8. LES MEMBRES DES INSTITUTIONS
9. LES LOIS DE BASE DE L'ORDRE ADMINISTRATIF
   9.1. L'autorité du "Covenant"
   9.2. La loi d'amour
   9.3. La loi de dévotion
   9.4. La pratique des qualités de justice, d'amabilité, de loyauté, de courtoisie, d'humilité et de patience
   9.5. La loi de consultation
   9.6. La loi d'unité
10. LA COMMUNAUTE BAHA'IE
11. CONCLUSIONS


Introduction

La première question qui se pose en pensant à l'ordre administratif de Baha'u'llah, c'est de le situer dans le cadre de la civilisation qui naîtra des enseignements de la nouvelle révélation.

La Tablette "Secret de la Civilisation divine" révélée par 'Abdu'l-Baha. nous enseigne que parmi les piliers de la civilisation divine qui s'appuient sur la triple fondation de la religion, de la justice et de la raison, deux piliers représentent les institutions; le premier les institutions exécutives; le second les institutions législatives et consultatives. "L'état est. ..basé sur deux forces, la force législative et la force exécutive. Le foyer de la puissance exécutive est le gouvernement, tandis que la puissance législative émane des savants, et si ce dernier pilier s'avérait déficient, comment l'état pourrait-il résister" [Secret of Divine Civilisation p. 37 -1ère édit. 1957]

Les nations qui s'intégreront dans l'orbite de la civilisation baha'ie seront donc dotées de gouvernements pour exécuter les lois et les décisions que les institutions législatives et consultatives prépareront et promulgueront. Ces lois trouveront leur fondement et leur justification dans la Loi divine révélée dans le Très Saint Livre. Nous lisons dans le testament d' 'Abdu'l-Baha:

"Cette Maison de Justice édicte des lois et le gouvernement les applique. Le corps législatif doit renforcer l'exécutif, l'exécutif doit aider et assister le corps législatif afin que, grâce à l'union et l'harmonie de ces deux forces, les bases de la justice et de l'équité puissent devenir solides et résistantes, et que toutes les régions de la terre soient semblables au paradis lui-même". [Testament d' 'Abdu'l-Baha., page 24]

Les institutions élues de l'ordre administratif tel que nous le connaissons actuellement seront ce corps législatif o En outre, elles arbitreront les conflits en devenant de véritables Maisons de Justice, locales, nationales ou universelle. Leur rôle, si important soit-il aujourd'hui pour la propagation de la Cause de Baha'u'llah, ne peut être comparé à celui qu'elles joueront dans l'avenir et dont la grandeur dépasse toute imagination. "Les assemblées locales actuelles ne sont que des institutions nées récemment, luttant, la plupart du temps, pour s'établir à la fois dans la communauté baha'ie et dans le monde. Comme telles, elles ne sont que les embryons des institutions majestueuses ordonnées par Baha'u'llah dans ses Ecrits. Ceci est également vrai pour les assemblées spirituelles nationales." [Lettre de la Maison Universelle de Justice à une assemblée nationale 30.6.1972]

Hippolyte Dreyfus écrivait déjà en 1909 dans son livre "Essai sur le Baha'isme": "La séparation de l'Eglise et de l'Etat, ne peut être qu'une formule provisoire, une étape momentanée dans la marche des sociétés. ..
Devant l'union des religions, l'Etat sera religieux: non pas qu'il doive donner à tous ses actes une teinte de mysticisme qui ne saurait cadrer avec la matérialité de leur objet. .., mais, la religion s'exerçant dans tous les actes de la vie, depuis le Chef de l'Etat jusqu'au plus humble fonctionnaire, chacun sera pénétré du caractère sacré de sa mission, et de la responsabilité qui lui incombe de la remplir conformément à la loi divine"
[Hippolyte Dreyfus: Essai sur le Baha'isme, p. 78, Paris, Lib. Leroux 1934]

C'est par une telle prise de conscience que le pouvoir exécutif s'harmonisera avec le caractère sacré des institutions administratives baha'ies, qui, à leur tour, occuperont leur place légitime dans la société future.

Dans son message d'avril 1955, Shoghi Effendi écrivait: "Puissent-ils (les croyants) hâter par leurs efforts, l'arrivée de cette consommation bénie qui verra les chaînes entravant le pro- grès de leur foi bien-aimée finalement se briser, son statut indépendant officiellement et universellement reconnu, ,Son sceptre établi sur le trône de l'autorité spirituelle et temporelle, l'éclat de sa gloire illuminer toute la terre, et son empire s'étendre à la planète toute entière" [Messages to the Baha'i World 1950-1957 by Shoghi Effendi, p. 85 Baha'i News n. 291, May 1955, p. 5].


1. SIGNIFICATION DE L'ORDRE ADMINISTRATIF

La technique est un élément important de la vie d'aujourd'hui. Pourtant la technique ne rend pas l'homme plus heureux et ne lui apporte pas la civilisation qu'il est en droit d'espérer.

La technique seule ne suffit donc pas. L'instrument sans l'artiste est impuissant et l'artiste sans âme ne séduit personne.

S'il est vrai que les institutions administratives sont difficile- ment efficaces lorsque la procédure est ignorée, cette procédure n'est pas l'essentiel et la procédure seule ne ferait de l'ordre administratif qu'un bel instrument doté de toutes les perfections, mais dont aucun son mélodieux ne sortirait. Les commentaires du Gardien sont sans équivoque: "L'administration de la Cause doit se concevoir comme un instrument et non se substituer à la spiritualité de la foi de Baha'u'llah... Elle devrait être considérée comme un canal par lequel les bénédictions promises puissent affluer et devrait se préserver de toute rigueur susceptible d'entraver ou d'emprisonner les forces libératrices de sa révélation." [Shoghi Effendi : World Order of Baha'u'llah, p. 2]

D'un autre côté, nous savons que l'ordre administratif fait partie intégrante de la révélation. Son origine divine lui donne toute son importance.

"Baha'u'llah n'a pas seulement insufflé dans l'humanité un esprit neuf et régénérateur. ..Il a clairement et spécifiquement établi, ce qui n'existe dans aucune dispensation du passé, un ensemble de lois, fondé des institutions spéciales et dispensé les éléments d'une économie divine." [Shoghi Effendi : World Order pp. 19-20]

Il est donc clair que l'esprit régénérateur de la révélation de Baha'u'llah travaille par le canal de son ordre administratif révélé. Pour les baha'is, cette constatation est des plus importante. Elle signifie que, même si les meilleures volontés se dépensent jusqu'au sacrifice, elles sont inopérantes si elles s'écartent des institutions, s'insurgent contre elles ou méconnaissent leurs directives.

L 'histoire des premières décades de l'âge formatif de la foi est révélatrice.

Des âmes pures, courageuses se sont levées jusqu'au martyre pour répandre la grande Lumière qui avait inondé leur coeur . Leur labeur n'a cependant produit que des résultats totalement disproportionnés avec l'effort consenti jusqu'au jour où les institutions administratives, construites sous la direction du Gardien, purent consolider les efforts des instructeurs baha'is et, par l'exécution de campagnes systématiques d'enseignement, établir la foi dans quelques pays et régions.

Refuser de s'imprégner de l'esprit de l'ordre administratif, se détacher de ses institutions ou se soustraire à une collaboration active avec ses organes, constituent la plus grande privation. La sève nouvelle monte à travers le tronc majestueux de l'ordre divin de Baha'u'llah, coule en toutes ses ramifications et atteint les petites feuilles que sont les croyants et qui vivent de la vie de l'arbre.

De même, les institutions se trouvent paralysées là où les croyants méconnaissent leur responsabilité essentielle qui est de vivre selon les préceptes et les ordonnances d'une part, d'enseigner individuellement et collectivement, d'autre part.

"Sans son (le croyant individuel) soutien continuel, généreux et donné de tout coeur, toute mesure adoptée, tout plan formulé par le corps qui représente sa communauté nationale, sont voués à l'échec. Le Centre Mondial de la foi est paralysé si les membres des communautés lui dénient leur soutien.
L'Auteur du plan divin se trouve arrêté dans son dessein si les instruments propres à son exécution viennent à manquer. La puissance inspiratrice de Baha'u'llah lui-même, le fondateur de la foi, est retirée de chaque individu qui faillit à sa responsabilité de se lever pour jouer son rôle"
. [Shoghi Effendi, cité par les Mains de la Cause dans leur message d'avri11960]

L'ordre administratif de Baha'u'llah est donc animé de l'esprit même de sa révélation. Les croyants ne peuvent s'épanouir dans son sein qu'à la condition de vivre ses principes et ses lois.
L'instrument, parfait en soi en raison de son origine, devient efficient dès le moment où il est utilisé avec la pleine conscience de ses possibilités (lois et principes) et la pleine connaissance de sa technique (procédure).
Les baha'is -non pas uniquement ceux qui ont été investis d'un mandat quelconque -doivent donc s'attacher à parfaire leur connaissance des lois de base et des règles de procédure. Ils apporteront ainsi à l' oeuvre commune toute la richesse du foisonnement de leurs idées, toute la variété de leurs aptitudes, toute l'énergie de leur dévouement individuel, et ils démontreront leur sens de l'abnégation et leur capacité de dompter leur tendance naturelle à l'orgueil, à l'indépendance et à la critique, au profit de l'harmonie collective.


2. LES INSTITUTIONS DE L'ORDRE ADMINISTRATIF

Les institutions baha'ies sont une partie inséparable de la révélation, soit qu'elles aient été ordonnées par Baha'u'llah lui- même, soit qu'elles soient l'oeuvre d' 'Abdu'l-Baha, du Gardien ou de la Maison Universelle de Justice. L'autorité d"Abdu'l-Baha est incontestable à cet égard. Elle découle du Livre des Lois :

"Quand l'océan de ma présence aura reflué et que le Livre de ma révélation sera achevé, tournez-vous vers celui que Dieu a désigné et qui est issu de l'Ancienne Racine. Ce verset sacré ne concerne nul autre que la Plus Grande Branche (' Abdu'l-Baha). Nous vous révélons ainsi miséricordieusement notre puissante Volonté et je suis le Miséricordieux, l'Omnipotent". [Kitab-i-Aqdas, cité dans World Order of Baha'u'llah p. 134]

Nul ne peut donc se prétendre baha'i, s'il conteste l'autorité et la mission des institutions car ce serait rejeter une partie de la révélation. Il est évident que la parole divine ne peut être pesée par notre intelligence. L'appel à notre raison n'a d'autre objet que de nous inciter à essayer de comprendre ce qui nous est ordonné, mais ne nous donne pas le droit de contester telle ou telle partie des versets sacrés. Reconnaissons au contraire que nous prenons trop facilement prétexte de raison pour ce qui n'est que faiblesse ou égoïsme.


3. LE GARDIENNAT ET LES MAINS DE LA CAUSE

Le Gardiennat a été instauré par ' Abdu'I-Baha dans son testament, qui a également désigné Shoghi Effendi comme premier Gardien.

Depuis l'ascension d' 'Abdu'I-Baha, Shoghi Effendi a représenté la seule institution qui soit revêtue du pouvoir de donner aux versets de la révélation une interprétation faisant autorité. Dans l'accomplissement de cette tâche, le Gardien était placé sous l'abri et la protection du Bab et de la Beauté Bénie. il ne s'agit pas là d'un dogn1e de croyance semblable à ceux instaurés par les conciles chrétiens, mais au contraire d'un phénomène parfaitement conciliable avec la raison et la logique.

Nul croyant ne peut douter de l'infaillibilité de la Manifestation de Dieu. 'Abdu'I-Baha, au chapitre XLV des "Leçons de St Jean d' Acre" nous défInit le caractère de cette infaillibilité qui est innée ou naturelle, en ce sens qu'elle découle de l'essence même de la réalité prophétique.

Dans le même chapitre, nous apprenons qu'il existe une infaillibilité d'une autre nature qu' 'Abdu'l-Baha qualifie d'infaillibilité conférée ou acquise qui n' est donc pas un attribut né de l'essence d'une réalité, mais est conférée à cette réalité par une cause extérieure.

L'essence du Gardiennat ou de la Maison Universelle de Justice, en tant que réalité phénoménale, n'est pas source d'infaillibilité, mais ces institutions, du fait qu' elles sont placées sous l'abri et la protection du Bab et de Baha'u'llah, se voient conférer le pouvoir de décider en suprême autorité et sous la garantie de la protection divine infaillible. C'est ainsi que l'autorité du Gardiennat a été établie par le Testament d' 'Abdu'l-Baha :

"Car il est, après' Abdu'I-Baha, le Gardien de la Cause de Dieu; et tous, les Afnans, les Mains de la Cause de Dieu et les bien-aimés du Seigneur, doivent lui obéir et se tourner vers lui. Celui qui lui désobéit, a désobéi à Dieu; celui qui se détourne de lui, s'est détourné de Dieu et celui qui le renie a renié Dieu, le Véritable" [Testament d' 'Abdu'I-Baha, p. 46].

Pour les baha'is, ce pouvoir du Gardien est évident et les faits ont démontré que la foi des croyants du début du Gardiennat, était entièrement fondée. Qui d'autre qu'une institution divine- ment inspirée eût pu conduire la Cause de Dieu de victoires en victoires et la faire triompher de toutes les embûches, y compris celle de l'ascension de Shoghi Effendi.

Le testament d' 'Abdu'I-Baha avait établi des règles strictes pour la succession du Gardien. En dehors d'un héritier ou d'un autre descendant de Baha'u'llah choisi du vivant du Gardien, le testament ne prévoyait aucun mode de succession. Personne ne peut s'arroger le droit d'interpréter le testament, si ce n'était Shoghi Effendi lui-même. il ne l'a pas fait en cette matière parce qu'il n'y avait pas lieu à interprétation. Baha'u'llah, en parlant de la prochaine Manifestation, n'a-t-il pas écarté toute parole sibylline en précisant qu'aucun sens particulier ne pouvait être recherché pour de telles paroles:

"Quiconque donne à ce verset une autre signification que celle qu'il offre de toute évider;ce, est, en vérité, privé de l'Esprit de Dieu et de sa miséricorde qui embrassent toutes choses créées" [Extraits des Ecrits de Baha'u'llah, p. 228] .

Pourquoi dès lors, 'Abdu'I-Baha, dans une succession qui concerne l'unité même du Covenant de Baha'u'llah, aurait-il laissé la place à des paroles ambiguës nécessitant des interprétations. Aussi est -ce trahir le testament que d'expliquer , par exemple, que le mot "Ghusn" (branche) qu'il contient, peut avoir une signification spirituelle. C'est trahir parce que c'est s'arroger un droit d'interprétation à nul autre conféré qu'à Shoghi Effendi.

Quant à Shoghi Effendi, il nous a laissé une poignante leçon d'obéissance. Son grand-père lui avait donné le droit incontestable d'interpréter les écrits à l'intention de ceux dont il devenait le guide unique et suprême, mais non le droit de légiférer sur ce qui n'était pas explicitement mentionné dans les textes, laissant ce droit à la Maison Universelle de Justice.
Si nous pouvions imaginer l'impensable, puisque nous croyons en l'infaillible inspiration qui animait le Gardien, il lui eût été facile de donner au testament une interprétation qui eût permis la désignation d'un successeur, ou même de décider de dispositions nouvelles.

Ni l'un ni l'autre de ces égarements n'a animé sa pensée. La cause de Baha'u'llah subsiste dans toute la pureté de sa révélation. Trente-six années de Gardiennat n'ont fait qu'aviver son éclat. N'est-ce pas là une preuve évidente de l'infaillible protection dont Shoghi Effendi était entouré ?

Et cette protection n'a pas cessé avec l'ascension de ce dernier.

Les Mains de la Cause, principaux régisseurs de la Cause de Dieu, étaient animés de Sa volonté et rayonnaient de Sa puissance.

On peut concevoir que, conduits par le souci de bien faire en assurant un successeur à Shoghi Effendi, ils eussent pu prendre une initiative q lie ne leur permettaient ni le testament d' 'Abdu'l-Baha, ni les directives du Gardien.
En vérité, la Cause de Dieu est bénie et Baha'u'llah a effacé du monde toute cause de discorde pour les âmes sincères. Les Mains, inspirées par la grâce qui entoure les Saints Tombeaux, ont respecté la lettre et l'esprit du testament d' 'Abdu'I-Baha en réaffirmant dans leur proclamation du 25 novembre 1957 :

"Lorsque cet organisme divinement ordonné (La Maison Universelle de Justice) sera appelé à l'existence, toutes les conditions de la foi seront réexaminées et les mesures nécessaires à son fonctionnement futur seront déterminées en consultation avec les Mains de la Cause".

Entre-temps, du 4 novembre 1957 jusqu'à avril 1963, la source d'inspiration divine n'a pas cessé d'animer le corps entier des croyants. Elle se trouvait canalisée dans le plan de la croisade de dix ans.
En poursuivant inlassablement les buts définis par Shoghi Effendi, les Mains de la Cause et les institutions nationales d'une part, la masse des croyants d'autre part, ont conservé la vision du Gardien qui a continué à animer de son inspiration les progrès de la croisade. C'est aussi une vérification irréfutable de la promesse contenue dans le Covenant de Baha'u'llah.

Quant à l'institution des Mains de la Cause, elle a été définie également par ' Abdu'l-Baha, bien que créée par Baha'u'llah. Le Centre du Covenant a investi ce corps sacré de la double mission :

1) de diffuser les parfums divins, d'édifier les âmes des hommes, d'encourager l'étude, d'améliorer le caractère des hommes... [Testament d' 'Abdu'l-Baha, p. 21]

2) de protéger la Cause de Dieu contre ses ennemis [Testament d' 'Abdu'l-Baha, p. 19].

La responsabilité de cette double tâche a été confirmée explicitement par Shoghi Effendi dans son message du 4 juin 1957 :
"Divinement prescrite et investie, en vertu de l'autorité conférée par le testament du Centre du Covenant, d'une double fonction de protéger et de propager la foi de Baha'u'llah, l'institution des Mains de la Cause...", s'intègre dans l'ordre administratif.

La propagation et la protection de la Cause tombent aussi sous la responsabilité des assemblées. Mais il n 'y a pas de conflit d'autorité. Les assemblées prennent les décisions administratives qui s'imposent et les Mains de la Cause, aidés par leurs conseillers, assistent les assemblées par des consultations aussi fréquentes que possible, et d'autre part contribuent à libérer, dans la masse des croyants, les forces spirituelles nécessaires à l'exécution des tâches.

"L'assemblée spirituelle nationale est l'institution chargée de la responsabilité administrative des tâches pour la croisade de dix ans. Ni les Mains de la Cause, ni leurs conseils, n'ont de responsabilités administratives en ce qui concerne ce travail" [Lettre du Gardien à l'Assemblée Spirituelle Nationale des lies Britanniques du 22.7.1954].

Il va sans dire que l'institution des Mains et les corps auxiliaires n'ont pas non plus de pouvoirs législatifs puisque le Gardien lui-même ne les possédait pas.

Quant aux conseils auxiliaires, instaurés par le Gardien le 8 octobre 1952 pour la propagation de la foi et en octobre 1957 pour la protection de la foi, ils furent jusqu'en 1%81es représentants des Mains de la Cause. Leur mission était d'aider et de conseiller les Mains dans l'accomplissement de leur double fonction sacrée. lis étaient aux Mains, ce que des comités nationaux sont à une assemblée nationale. Les conseils auxiliaires n'avaient donc aucune autorité, ni pouvoir par eux-mêmes, ils travail- laient sous la directive et sous la responsabilité des Mains. Depuis la disparition de Shoghi Effendi se posait la question de savoir ce que deviendraient dans l'avenir de la Cause, les institutions des Mains et des corps auxiliaires. Leur développement futur, conformément aux indications du testament d' , Abdu'l-Baha et aux directives de Shoghi Effendi, devait être assuré par la Maison Universelle de Justice qui a tout pouvoir de légiférer sur ce qui n'est pas contenu dans les écrits.

En juin 1968, la Maison Universelle de Justice a décidé la création de corps de conseillers continentaux pour la propagation et la protection de la Cause. Si l'institution des Mains est appelée à disparaître parce que seul le Gardien pouvait les désigner, la pérennité de la fonction est assurée. Les conseils auxiliaires sont maintenant placés sous la direction de ces corps de conseillers continentaux, qui ont les mêmes fonctions que les Mains de la Cause dans la limite de leurs territoires respectifs. Les Mains continuent à assumer leurs fonctions sur un plan intercontinental.

Il nous reste à souligner l'importance de l'institution des Mains de la Cause dans la période de transition qui sépara la disparition du Gardien de l'élection de la Maison Universelle de Justice. Leur sens de la responsabilité, le souci qu'ils prenaient à respecter la lettre du testament et des interprétations du Gardien, leur crainte d'y ajouter quoi que ce soit qui n'apparaissait pas clairement, suffisent à engendrer le respect et la vénération de la communauté baha'ie.

Bien sûr, ce ne sont pas les hommes que nous vénérons. Qui, parmi les Mains, penserait à revendiquer une quelconque manifestation d 'honneur alors que Shoghi Effendi les avait si claire- ment refusées pour lui-même :
"...prier au nom du Gardien de la Cause, s'adresser à lui comme seigneur et maître, le qualifier de sainteté, rechercher sa bénédiction. ..équivaudrait au reniement des vérités fondamentales contenues dans notre foi bien-aimée" [Dispensation de Baha'u'llah par Shoghi Effendi, p. 93].

Si les hommes comptent en tant qu'amis chèrement aimés, les institutions qu'ils représentent sont sacrées. Elles sont vénérées en raison de leur origine, en fonction de la grandeur de leur tâche et en souvenir de leurs actions.
Le respect que nous accordons aux institutions des Mains de la Cause, des conseils continentaux et des conseils auxiliaires, découle aussi de notre compréhension du rôle qu'ils jouent et de la place qu'ils occupent dans l'ordre administratif.

A toutes les époques, les savants (1earned) ont joué un rôle essentiel dans l'organisation de la société, mais ils ont toujours été la cause de graves conflits. "Dans le passé, certaines personnes qui se sont considérées supérieures en savoir et ont occupé des positions élevées, ont causé la division. ..Ce sont ceux qui ont prétendu à la plus haute distinction pam1i les autres, qui sont devenus la source des conflits" [Lettre du Gardien à l' Assemblée Spirituelle Locale d'Istanbul 14.3.1927].

Le conflit est né de la confusion du "savoir" et du "pou- voir". Les savants se sont arrogés le droit d'interprétation. lis ont créé les dogmes, c'est-à-dire une conception humaine des vérités révélées. Comme les interprétations divergeaient, les "maîtres" et leurs disciples ont donné naissance aux sectes et aux schismes.

La foi baha'ie met défInitivement fin à cette situation. Les savants, c'est-à-dire les Mains de la Cause, les conseillers continentaux, les conseils auxiliaires ou tout autre personne faisant preuve de "savoir", ne peuvent donner des interprétations dogmatiques.

"Il n'y a plus aucune source d'interprétation dogmatique des textes sacrés dans la communauté baha'ie, car c'était une fonction spécifique du Gardiennat, qui a cessé avec la disparition de Shoghi Effendi" [Lettre de la Maison Universelle de Justice à un croyant, 17.11.1970].

"Même, en matière d'enseignement, les amis doivent comprendre que personne, en dehors du Maître et du Gardien, n'est autorisé à interpréter de manière dogmatique les écrits sacrés, mêmes si ces personnes, telles les Mains de la Cause, les membres des conseils continentaux, ou tout autre croyant, sont con- nues pour leur connaissance des enseignements, et même si, tout naturellement, nous donnons un certain poids à leurs commentaires des écrits" [Lettre de la Maison Universelle de Justice à l'Assemblée Spirituelle Nationale des lies Britanniques 19.5.1969]

De plus les savants, comme tels, ne détiennent pas le pouvoir . "Gloire à Dieu! La Plume de Gloire a écarté les vues intransigeantes et dictatoriales des érudits et des sages, supprimé les assertions individuelles comme critère d'autorité, même si elles viennent des plus parfaits et des plus savants, et ordonné que toutes questions soient référées à des centres autorisés et des assemblées spécifiées" [Lettre du Gardien à l'Assemblée Spirituelle Locale d'Istanbul 14.3.1927].

Les maux inhérents aux institutions des "savants" ont donc été écartés. Mais Baha'u'llah a donné à son ordre administratif tout le bénéfice qui découle de la connaissance et de la sagesse.

Certains savants, c'est-à-dire les Mains de la Cause, les conseillers continentaux et les conseils auxiliaires, se sont vu conférer des fonctions importantes dans cet ordre administratif, dans les limites définies par les textes qui ont été cités ci-avant.

"L'existence d'institutions d'un rang si exalté, comprenant des personnes qui jouent un rôle aussi vital sans avoir pour autant une autorité législative, administrative ou judiciaire, qui, d'autre part, sont totalement dépourvues de fonctions sacerdotales et ne détiennent aucun droit à formuler des interprétations dogmatiques, est une caractéristique de l'administration baha'ie qui n'a pas son parallèle dans les religions du passé. La nouveauté et la singularité de ce concept, le rendent difficile à comprendre. Ce n'est que dans la mesure où la communauté baha'ie se développera et où les croyants pourront arriver à analyser la structure administrative de cette communauté, sans se laisser influencer par les concepts du passé, que l'on comprendra dans sa juste mesure, l'interdépendance vitale des "dirigeants" et des "savants" dans la foi et que l'on reconnaîtra complète- ment la valeur inestimable de leur interaction." [Lettre de la Maison Universelle de Justice aux corps des conseillers et aux assemblées nationales du 24.4.1972]


4. LES INSTITUTIONS ADMINISTRATIVES

Que la paix du monde dépende de la création d'une institution mondiale destinée à gérer la communauté universelle des nations, ne fait plus l'objet d'aucun doute. Deux tentatives humaines ont donné aux hommes leur dose d'espérances et de désillusions. Nous n'avons pas à nous appesantir sur les faibles- ses des entreprises humaines et l'attitude des baha'is doit refléter leur respect pour les bonnes volontés qui ont animé certains pro- moteurs des institutions internationales de ce XXe siècle. Mais ils savent qu'il ne peut en découler qu'une "Moindre Paix", c'est-à-dire un équilibre précaire maintenu en stabilité par des mesures sans cesse changeantes. Car la "PLUS GRANDE P AIX", celle des coeurs fraternels, repose sur la loi divine et sera garantie par des institutions universelles qui s'inspireront de cette loi et reflèteront l'esprit de l'ordre administratif au sommet duquel se trouve la Maison Universelle de Justice.

"Baha'u'llah... a dispensé les éléments d'une économie divine. Ces éléments sont destinés à promouvoir une société future modèle. En somme c'est l'instrument suprême qui permettra d'établir la "Plus Grande Paix" et le seul agencement possible qui unifie le monde et fasse une réalité d'un règne de droiture et de justice sur la terre" [Shoghi Effendi : World Order of Baha'u'llah, pp.19-20].


5. LA MAISON UNIVERSELLE DE JUSTICE

"Cet ordre administratif, à mesure qu'il se répandra et se consolidera, prouvera qu'il est digne d'être reconnu non seule- ment comme le noyau, mais encore comme le modèle du nouvel ordre mondial destiné à englober, dans la plénitude des temps, l'humanité tout entière" [Shoghi Effendi : World Order of Baha'u'llah, p. 144].

Il semble que l'on peut déduire de cette phrase que les institutions mondiales qui assureront la paix future s'inspireront de la constitution de la Maison Universelle de Justice. Elles devront appuyer leur autorité sur une constitution de base. On peut s'imaginer que cette constitution sera d'abord élaborée par un premier parlement mondial s'instaurant assemblée constituante à l'instar des parlements nationaux qui ont vu le jour au cours des XIXe et XXe siècles. De tels efforts, louables et importants en soi, ne pourront toutefois instaurer que la "Moindre Paix". Un jour viendra, cependant, où la révélation de Baha'u'llah triomphera pour devenir la base commune de la majorité des peuples. La loi spirituelle qui est la quintessence de cette révélation ne sera plus seulement le fondement des institutions de la communauté baha'ie, mais aussi la fondation de la civilisation mondiale tout entière.

Or la loi spirituelle a deux sources :

1) les ordonnances révélées par Baha'u'llah, commentées et interprétées par ' Abdu'l-Baha et Shoghi Effendi ;

2) les décisions de la Maison Universelle de Justice.

Dans la période de la "Plus Grande Paix", le législateur suprême sera donc la Maison Universelle de Justice.
Ces quelques lignes suffisent à démontrer toute la grandeur et toute l'importance de cette institution suprême de l'ordre divin révélé. Cette importance est corroborée par les dispositions du testament d' 'Abdu'l-Baha.

"Toutes questions doivent être référées à cet organisme. C'est lui qui doit promulguer toutes les ordonnances et les règlements qui ne seraient pas explicités par le saint texte... C'est par cet organisme que tout problème difficile sera résolu" [Testament d' 'Abdu'l-Baha, p. 10].
"Tout ce que la Maison Universelle décide a la même portée que le texte lui-même" [Testament d' 'Abdu'I-Baha, p. 20].

Cette institution diffère essentiellement des institutions inter- nationales de création humaine :

1) Son autorité découle de la loi divine.

2) Elle constitue une institution parfaitement unie, affranchie des tendances nationales car ses membres n'ont pas à justifier de leurs décisions envers les assemblées nationales qui les ont élus. n apparaît clairement qu'une des lacunes des organisations internationales telles que nous les connais- sons, est leur asservissement aux intérêts nationaux. Les représentants des gouvernements ne sont pas libres de se prononcer selon leur conscience, mais doivent obéir stricte- ment aux ordres de leurs gouvernements qui eux-mêmes sont asservis à leurs propres intérêts.
Et pourtant, ce système faussé à la base, a donné des résultats positifs en maintes circonstances. N'y a-t-il pas là une preuve que les principes révélés par Baha'u'llah, en l'occurrence celui de l'union des peuples, apportent des améliorations même lorsqu'ils sont appliqués dans les limitations et les erreurs humaines. A fortiori, ces principes seront-ils efficaces quand l'esprit qui les anime, inspirera aussi les institutions. Tel est le secret de la réussite de l'ordre administratif de Baha'u'llah.

3) Sa représentation est réellement universelle, car elle est élue par toutes les assemblées nationales du monde sans qu'il y ait de distinction entre petites ou grandes nations, entre nations soi-disant évoluées ou sous-développées, entre races ou nationalités.

4) La Maison Universelle de Justice est placée, tout comme l'était le Gardien, sous la protection de Baha'u'llah.

Une tâche, des plus importantes, de la Maison Universelle de Justice sera donc de promouvoir les principes spirituels de la "Plus Grande Paix" .Ella aura sans doute dans l'avenir , à se prononcer sur tous les grands problèmes de l'humanité. Nul doute en effet, que ces problèmes soulèvent des aspects qui dépassent le cadre de l'organisation matérielle de la société, parce qu'ils ont trait au caractère fondamental de l'être humain. Celui-ci n'est pas seulement un être de chair , rattaché physique- ment à une civilisation matérielle, si parfaite puisse-t-elle être, il est avant tout un être spirituel dont la destinée est liée au monde de l'esprit.

Ce monde de l'esprit anime le monde matériel et s'exprime par la religion. Or la religion est à la fois la révélation et l'expression particulière que prend celle-ci dans l'histoire. Seule donc une institution prévue dans la révélation et chargée par celle-ci de se prononcer sur l'évolution des besoins spirituels de l'homme, en tant que créature divine plongée dans l'existence phénoménale, pourra assurer le lien entre le spirituel et le matériel.

Une fois de plus, nous voyons comment dans la "Plus Grande Paix", la Maison Universelle de Justice sera le législateur suprême, car elle sera la seule institution à pouvoir défInir les fondements d'une civilisation spirituelle en tout ce qui n'aura pas été expressément révélé.

Comment espérer que les conditions d'une telle émancipation de l'homme et de la civilisation soient possibles dans un monde qui est toujours soumis à la violence et à l'égoïsme matérialiste. il importe seulement que le message révélé se répande dans les coeurs des hommes pour que ceux-ci s'imprègnent des sentiments d'obéissance et d'altruisme, qui constituent leur vraie libération. Cette tâche d'éducation universelle sera aussi l'oeuvre, la première en date, de la Maison Universelle de Justice, aidée en cela par toutes les institutions nationales et locales baha'ies, et par tous les croyants dont l'esprit sera entretenu par les Mains de la Cause et les institutions chargées de la propagation et de la protection de la foi.

La condition première du succès est l'efficacité des moyens et celle-ci dépend surtout de l'unité d'action. Aussi voyons-nous la Maison Universelle de Justice prendre toutes les dispositions pour assurer l'unité d'action des institutions baha'ies et des croyants, comme l'avait fait le Gardien.

Nous comprenons donc pourquoi la Maison Universelle de Justice :

- doit élucider les données législatives reçues de Baha'u'llah, d' 'Abdu'I-Baha et de Shoghi Effendi, afin d'en assurer, dans la communauté baha'ie, la compréhension et l'application ;

- doit légiférer en matière de détails lors de l'application des lois révélées, afin de les compléter ;

- doit légiférer sur toute question nouvelle posée par le développement de la communauté mondiale afin d'unifier l'action de toutes les institutions et d'assurer leur pérennité ;

- doit élaborer les plans d'expansion de la cause ;

- devra en fin légiférer sur toute question, non définie dans le texte, intéressant la communauté mondiale des hommes dans son accession à la civilisation spirituelle qui est sa destinée véritable.

Baha'u'llah dans ses premières lettres aux Souverains a appelé le monde à reconnaître sa mission, à accepter son ordre universel et à instaurer ainsi la "Très Grande Paix". Cette proclamation a été faite à Andrinople en 1868.
Comme les Souverains et les peuples du monde ont négligé de répondre à cet appel, Baha'u'llah leur a adressé une seconde proclamation de la prison de St Jean d'Acre. Puisqu'ils avaient refusé d'établir la "Très Grande Paix", il leur enjoignit de s'attacher, au moins, à la moindre paix, en réglant leurs différends par une conférence de la paix où seraient définis les rapports internationaux. Les affaires mondiales pourraient ainsi trouver une première solution sous la forme d'un gouvernement mondial disposant d'un parlement mondial... Pendant la "Moindre Paix", c'est ce parlement qui légifèrerait sur les aspects matériels des problèmes humains à l'échelle planétaire. Il définirait les frontières, limiterait les armements, dresserait les plans d'une économie mondiale en assurant une répartition judicieuse des moyens de production, en permettant une libre circulation des biens et des personnes, en réconciliant le capital et le travail. C'est lui aussi qui promulguerait les systèmes universels de monnaie, de mesure, de communication et de langage.

L'exécution d'une oeuvre aussi gigantesque serait confiée à une série d'instances constituant le pouvoir exécutif international, contrôlé par le parlement.

Le pouvoir judiciaire serait exercé par une cour de justice internationale qui jugerait en dernier ressort, les conflits internationaux, et disposerait d'une force de police internationale pour exécuter ses jugements, au besoin par la force.

Dans la mesure où les institutions internationales actuelles se transformeront pour devenir ce gouvernement mondial souhaité par Baha'u'llah, la paix commencera à régner sur la terre.

Mais lorsque la subordination du temporel au spirituel sera acceptée par le monde, lorsque le pouvoir temporel sera aussi exercé par la Maison Universelle de Justice, lorsque celle-ci légifèrera au profit de l'exécutif mondial, ce sera la pleine réalisation d'un avenir heureux. Ce sera la "Plus Grande Paix".

Alors sera réalisée la loi de l'Aqdas dans toute sa plénitude : "Il a ordonné et établi la Maison de Justice qui est investie d'une fonction politique aussi bien que religieuse, réalisant l'union intime de l'Eglise et de l'Etat... Cette Maison Internationale de Justice sera désignée et organisée par les Maisons de Justice du monde entier, et le monde tout entier sera sous son administration" [Discours d"Abdu'l-Baha à New-York, le 2.12.1912].


6. LES ASSEMBLEES NATIONALES ET LOCALES

L'ordre divin de Baha'u'llah ne présente encore aujourd'hui qu'une forme à ses débuts. n émerge cependant de l'obscurité en raison de la multiplication spectaculaire du nombre de centres dans tous les continents et l'éclosion d'un très grand nombre d'assemblées spirituelles tant locales que nationales. Si le fonctionnement de ces institutions est encore parfois au stade de l'expérimentation, le sérieux avec lequel elles entreprennent leur tâche, la grandeur de leur mission, le rôle qu'elles joueront dans un avenir proche, nous inclinent à reconsidérer attentivement ce qu'un spectateur superficiel pourrait juger avec négligence.

Nous ne reviendrons pas sur le caractère sacré de leur origine, mais nous mettrons en parallèle leur comportement avec celui des associations humaines, grandes ou petites.

Ces dernières sont déterminées par d'importants facteurs :

1) le rôle des personnalités :

Combien d'associations humaines ne sont-elles pas dominées par une ou plusieurs personnes qui concentrent l'autorité dans leurs mains. Qu'il s'agisse de gouvernements, de sociétés privées ou d'associations publiques (partis, syndicats), la volonté ou le caprice de quelques-uns fait souvent la loi de tous. il en résulte fatalement la lutte pour le pouvoir.

2) l'influence des intérêts :

Que le bien-être des masses soit une préoccupation secondaire des gouvernants, n'est un secret pour personne. Ce bien-être est subordonné à d'autres impératifs: triomphe d'idéologies politiques ou économiques, suprématie nationale ou raciale, consolidation de puissances financières etc.

Tels sont les mobiles qui guident généralement les actes de ceux qui conduisent le monde d'aujourd'hui et pour assouvir leurs appétits, ces puissants disposent d'une technique en pro- grès croissant. il faut pourtant que la technique soit au service du monde, mais en vue du bien social et non pour se satisfaire elle,-même ou pour faire triompher les passions.

Grande donc est la tâche qui attend les assemblées spirituelles baba 'les qui se mettent au service de leurs communautés, qui prennent en mains tous les intérêts communs et recherchent la justice.

C'est pourquoi ces assemblées ne doivent pas être des associations de techniciens, ni d'intellectuels, ni de financiers, mais des corps d'hommes d'élite choisis en fonction de leur valeur spirituelle et morale.

Ces assemblées baha'ies doivent aborder les problèmes qui leur sont soumis dans le climat spirituel du "service", s'entourant de l'inspiration des Textes Sacrés. Et chaque fois que les techniques modernes seront un moyen de promouvoir plus de justice, plus de bien-être, elles y recourront avec efficacité.

Jusqu'à présent, les assemblées nationales et locales ont consacré la plupart de leurs efforts à la propagation de la Cause. Elles ont porté tout le poids des responsabilités administratives dans l'exécution des grandes croisades d'enseignement.

Il en sera encore ainsi pendant un certain temps, mais nous savons qu'elles se transformeront petit à petit en maisons nationales ou locales de justice. "L'importance. ..mieux, la nécessité absolue d'établir ces assemblées locales, devient évidente lorsque nous réalisons que, dans les jours à venir , elles évolueront en Maisons de Justice locales, et que, dès à présent, elles constitueront la base solide sur laquelle la structure du testament du Maître va prendre forme dans l'avenir" [Shoghi Effendi, Baha'i Administration, p. 37].

Ces quelques réflexions devraient nous inciter à adopter vis-à- vis de ces institutions l'attitude qui convient. En aucun cas, nous ne pouvons nous arrêter aux hommes qui les composent. La grandeur ou la faiblesse de ceux-ci, leur compétence ou leurs limitations, sont ici secondaires. Si nous accordons à ces membres d'assemblées la même affection qu'à tous les baha'is, nous ne pouvons les hisser sur un pavois, car ce serait la route vers la création d'une nouvelle caste privilégiée. Eux-mêmes doivent montrer leur détachement en se présentant comme les plus humbles serviteurs de la Cause.

Quant à l'assemblée, elle est une réalité en soi, indépendante des individus. Elle a droit à notre plus grand respect, à notre obéissance. Nous devrions en parler avec déférence, répondre à son appel avec diligence, nous présenter à elle avec humilité, exécuter ses décisions avec empressement et surtout considérer sa désapprobation comme la plus grave des sanctions spirituelles.

Ecoutons Shoghi Effendi nous citer 'Abdu'l-Baha dans "Dieu passe près de nous" : p. 321 :
"Ces assemblées spirituelles sont aidées par l'Esprit de Dieu. Leur défenseur est' Abdu'I-Baha. n étend ses ailes au-dessus d'elles. Est-il meilleure sollicitude que celle-là ? Ces assemblées spirituelles sont de brillantes lampes et des jardins célestes dont les effluves de sainteté se répandent en toutes régions et dont les lumières de connaissance brillent sur toutes choses créées. D'elles, l'esprit de vie coule à torrents dans toutes les directions. Elles sont vraiment, en tout temps et en toute circonstance, les puissantes sources du progrès de l'homme".


7. FONDS BAHA'IS

L'argent en lui-même n'est qu'un instrument. Lorsqu'il est mis au service d'une oeuvre élevée, il acquiert la noblesse par les bontés qu'il dispense. C'est pourquoi, l'auteur de la révélation a voulu que les fonds trouvent leur place dans l'ordre administratif et soient placés sous l'autorité et la responsabilité des organes de gestion :

1) L'ensemble des fonds internationaux, alimentés par les ressources énoncées par le Livre des Lois, ou suivant les directives d' 'Abdu'I-Baha et du Gardien, assure, sous le contrôle de la Maison Universelle de Justice, la réalisation de tous les objectifs poursuivis par la communauté du Plus Grand Nom.

2) Chaque assemblée nationale ou locale gère également une série de fonds répondant chacun à un but particulier . L'ensemble de ces buts constitue le plan d'activité de ces assemblées. L'alimentation de ces fonds est une nécessité dont la réalité doit entrer dans la conscience de chaque croyant. Une partie de sa responsabilité envers Dieu et Baha'u'llah consiste donc à contribuer à ces fonds.

"Nous devons être comme la fontaine ou la source qui se vide continuellement jusqu'à se tarir et qui est perpétuellement alimentée par un invisible afflux. Donner continuellement pour le bien de ses semblables, sans crainte de la pauvreté et confiant dans l'infaillible générosité de la Source de toute richesse et de tout bien -tel est le secret d'une vie équitable" [Shoghi Effendi, Baha'i Procedure p. 9, Baha'i News sept. 1926].

"Chaque serviteur consciencieux et sincère de Baha'u'llah qui a le désir de voir progresser Sa Cause, a l'obligation sacrée de contribuer spontanément et généreusement à l'accrois- sellent du fonds" [Shoghi Effendi, Baha'i Administration, p. 41].

Celui qui néglige de répondre à cet appel se prive d'une partie des bénédictions promises au vrai croyant et les institutions responsables doivent instruire les amis sans leur imposer de contrainte. "Si des appels d'un caractère général, exprimés avec tact, d'un ton digne et expressif, sont bien accueillis en toutes circonstances, il doit cependant être laissé à la discrétion de chaque croyant consciencieux de décider de la nature, du montant et de la destination de sa contribution pour la propagation de la Cause" [Shoghi Effendi, Baha'i Administration, p. 101].


8. LES MEMBRES DES INSTITUTIONS

Nous avons déjà fait la distinction fondamentale entre les institutions baha'ies et ceux qui les composent. il est important de revenir à ces derniers pour souligner qu'ils n'ont pas de privilèges particuliers, ni d 'honneurs spéciaux, mais au contraire, des responsabilités que seules des qualités exceptionnelles permettent de remplir :

'Abdu'l-Baha, cité dans Baha'i Administration p. 21-22 dit :
"Les principales conditions requises pour ceux qui délibèrent entre eux sont la pureté d'intention, le rayonnement de l'esprit, le détachement de tout hormis Dieu, l'attirance vers sa divine Essence, l'humilité et la modestie à l'égard de ses bien-aimés, la patience et l'endurance dans les difficultés, et la soumission devant son Trône élevé".

Aucune considération matérielle ne doit donc retenir l'électeur lorsqu'il pose l'acte sacré du vote. Cet acte doit en effet être considéré comme un devoir sacré et être accompli comme tel.

Contrairement aux procédés employés dans le monde, les élections baha'ies doivent se faire dans un pieux recueillement, sans propagande électorale préliminaire ni présentation de candidats.

"L'électeur ne votera que pour ceux que la prière et la réflexion l'auront engagé à soutenir" [Shoghi Effendi, Baha'i Administration p. 126].

Nous avons en outre la garantie que le choix final sera vraiment sélectif.

En effet, chaque croyant doit obligatoirement émettre neuf voix pour l'élection des assemblées. De ces neuf voix, seuls celles émises selon l'esprit des textes cités ci-avant, ont des chances de se retrouver sur la majorité des bulletins et toutes les voix émises éventuellement sur la base de considérations personnelles se perdront dans un étalement improductif. De plus, l'organisme administratif chargé de diriger et contrôler l'élection, a le devoir de chercher les moyens d ' empêcher que les "voies du monde" n'exercent leur influence pernicieuse sur les élections baha'ies qui doivent se dérouler dans une atmosphère exceptionnelle de spiritualité et de prières.

Quant aux élus, ils devront se garder de connaître un senti- ment de gloire, mais se forcer à plus d'humilité encore en s'imprégnant de la grandeur de leurs responsabilités. il leur sera ainsi possible d' entrer dans la salle du conseil en suivant l'injonction d" Abdu'I-Baha :

"La première condition est l'amour absolu et l'harmonie parmi les membres de l'assemblée... La deuxième condition: lis doivent, lorsqu'ils se réunissent, tourner leur visage vers le Royaume d'en haut et demander l'aide du domaine de Gloire" [Shoghi Effendi, Baha'i Administration p. 22].

Et si l'un d'entre eux est cause de discorde ou d'opposition, qu'il sache qu'il commet la plus grave des offenses parce qu'il détruit partiellement l'oeuvre de Dieu.

"Chaque fois que l'assemblée tiendra compte de ce principe, elle sera de Dieu, sinon elle s'égarera et restera soumise à la désaffection engendrée par le mal" ['Abdu'I-Baha cité dans : Shoghi Effendi, Baha'i Administration, p. 22].

Quant à ceux qui ne sont pas élus et surtout ceux qui ne sont pas réélus, ils doivent se garder de tout sentiment de déception et de toute critique. Ce sera là la mesure de leur détachement car l'élection ou la désignation à un mandat quelconque appelle le croyant au service et non à l'honneur .


9. LES LOIS DE BASE DE L'ORDRE ADMINISTRATIF

Sans doute vous attendez-vous à trouver maintenant un exposé technique étalant un mécanisme juridique et une réglementation semblables à ces codes interminables qui hantent le cerveau des hommes de loi de notre époque.

Détrompez-vous ! Les lois essentielles de l'ordre divin de Baha'u'llah sont des lois spirituelles. Quant aux règles de fonctionnement des institutions, elles appartiennent au domaine secondaire et changeant de la procédure.

Nous allons évoquer dans ce chapitre les lois spirituelles qui sont la fondation sur laquelle repose l'ordre administratif et qui assurent sa supériorité sur toute organisation humaine.

Ces lois comme vous le verrez, s'adressent à l'individu. Elles régissent son comportement à tout échelon de la vie communautaire. Chaque baha'i doit s'en inspirer aussi bien lorsqu'il participe aux fêtes des 19 jours que lorsqu'il siège dans une institution ou dans un comité.

Comprendre ces lois, les appliquer constamment doit être l'idéal de chaque baha'i. En poursuivant un tel but, il deviendra l'être spirituel à l'image du Père Céleste, destinée qu'a voulue pour lui le Créateur et que lui ont enseignée progressivement les prophètes au cours des âges. Baha'u'llah couronne aujourd'hui cet enseignement par des données claires et précises.

L'individu devenant par une telle éducation, digne du "Royaume", assure le parfait fonctionnement des institutions qui, à leur tour, dispensent l'enseignement aux générations pré- sentes et futures. Cette réciprocité est essentielle, elle garantit l'épanouissement spirituel simultané de l'individu et de la société. Elle est la voie qui conduit du chaos actuel au "Royaume" de demain.


9.1. L'autorité du "Covenant"

Nous avons déjà longuement exposé l'origine divine de cette autorité. il en résulte que les institutions ne sont pas responsables de leurs décisions envers les instances inférieures mais envers l'organisme supérieur de la hiérarchie institutionnelle. L'autorité suprême est détenue par la Loi révélée dans le Livre des Lois et les tablettes du Covenant. Cette révélation est immuable pour toute la durée de la dispensation baha'ie. Seule une manifestation future pourra y apporter des modifications.

En vertu d'une disposition de la Loi fondamentale, la Maison Universelle de Justice détient le pouvoir législatif le plus élevé pour tout ce qui n'est pas explicite dans le texte. Son autorité n'est limitée que par la Loi fondamentale qu'elle ne peut modifier ni contredire. L'observance de cette règle est assurée par la promesse garantie par Baha'u'llah. La Maison Universelle sera affranchie de l'erreur parce qu'elle possède l'infaillibilité conférée en étant placée sous la protection directe du Verbe manifesté. Cette promesse est inscrite dans le testament d' 'Abdu'l-Baha. Toute décision que prendra la Maison Universelle de Justice aura dès lors la même force obligatoire que les dispositions du Livre des Lois. La seule différence est que celles-ci sont immuables pour toute la durée de la dispensation baha'ie, tandis que les premières sont temporaires et susceptibles de changements. La Maison Universelle légifère à l'échelle mondiale ou dans toute matière concernant plusieurs assemblées nationales (futures Maisons secondaires de Justice). Pour toutes les matières à caractère national, l'autorité de légiférer est donnée à l'assemblée nationale. Seule la Maison Universelle de Justice peut inflfll1er ces décisions.

La même relation existe pour les assemblées locales envers leur assemblée nationale, en ce qui concerne les décisions à prendre à l'échelle locale. Les assemblées locales ne sont donc pas responsables envers la masse des croyants formant la communauté, mais envers leur assemblée nationale.

Une telle autorité est nécessaire pour supprimer définitivement la faiblesse de nos systèmes démocratiques qui n'ont abouti qu'à la division politique et à la lutte entre partis.

Elle n'est toutefois pas arbitraire car elle s'exerce dans le cadre des lois spirituelles qui lui confèrent d'autre part, une orientation constante vers la justice et le bien social.

Tous les croyants doivent vivre à l'abri de cette autorité. C'est par le libre choix de leur volonté qu'ils se placent sous sa protection car ils reconnaissent en elle la Volonté de Dieu. Nous com- prenons maintenant pourquoi Baha'u'llah a fait de son ordre administratif une partie intégrante de sa révélation. II a conféré à celui-ci toute l'autorité de son covenant et en a fait une arche de salut pour l'humanité.


9.2. La loi d'amour

Le principe de toute vie est amour depuis la cohésion du minéral jusqu'à la spiritualisation de l'humain. Le but de la révélation de Baha'u'llah est l'épanouissement de la communauté mondiale, par la création sur la terre d'une civilisation harmonieuse. Cette harmonie est la forme de l'amour à l'échelle de la communauté. Or l'instrument destiné à produire cette civilisation est l'ordre administratif. II est évident que ceux qui en assument le fonctionnement, doivent manifester la loi d'amour. Cela signifie que les membres des institutions baha'ies doivent être individuellement imprégnés de l'amour pour leurs frères dans la communauté. Cet amour, ils l'exprimeront, non par des mots, mais par des actes: servir la communauté.

Entre eux règnera la plus parfaite harmonie. Disons même que la sagesse de leurs décisions sera à la mesure de leur amour réciproque.


9.3. La loi de dévotion

Nul ne peut prétendre à la perfection. II y a donc une sorte de tension constante entre la faiblesse de la nature humaine d'une part, et les qualités exigées des membres des institutions d'autre part. Mais la Main de Dieu est posée sur les institutions qu'Il a révélées par Son Messager. La Main de Dieu transforme la faiblesse en puissance. II importe donc que les institutions travail- lent dans une atmosphère constante de contact avec l'esprit divin de Baha'u'llah. Elles se tourneront souvent en prière vers le concours céleste et l'oeuvre, même celle de pauvres mortels, n'en sera pas moins celle de Dieu telle qu'il l'a voulue pour notre époque dans le cadre de la civilisation d'unité.


9.4. La pratique des qualités de justice, d'amabilité, de loyauté, de courtoisie, d'humilité et de patience

Tous les baha'is se tourneront vers la personnalité d' 'Abdu'l-Baha qui fut un modèle de perfection et dont la vie tout entière a été une expression d'amour .L'amour de ses semblables, nous l'avons dit, ne s'affIrme pas par des mots, mais par des actes. C'est la pratique des vertus qui garantit l'épanouissement de l'amour. L'orgueilleux heurte ses semblables, l'injuste les blesse, le déloyal perd leur confiance, l'impatient les irrite.

Les vertus d'humilité, de justice, de loyauté, de patience et de courtoisie, au contraire, forcent l'affection. Rien de plus réel, dès lors, que cette obligation faite à ceux qui veulent construire l'ordre administratif de Baha'u'llah de s'efforcer de pratiquer, dans leurs relations réciproques, et dans leurs relations avec la communauté, les vertus que nous avons énoncées.


9.5. La loi de consultation

La consultation est la caractéristique même de l'ordre administratif de Baha'u'llah. Toute la vie de la communauté est régie par la consultation. Et pourtant nous n'en parlons qu'en cinquième lieu. C'est pour bien montrer qu'il ne suffit pas de prononcer le mot magique de consultation pour tout résoudre.

Il faut, au contraire, que la consultation se déroule dans le respect des lois spirituelles qui non seulement créent le climat propice à la consultation, mais lui donnent toute son efficacité.

"Le principe de consultation, qui constitue une des lois de base de l'administration, devrait s'appliquer à toute activité baha'ie qui affecte les intérêts collectifs de la Foi, car c'est par une coopération et par un échange continuel d'idées et de pensées que la Cause pourra le mieux sauvegarder et promouvoir ses intérêts. L'initiative individuelle, l'habilité et les ressources personnelles, quoique indispensables, sont absolument incapables d'accomplir une tâche aussi grande si elles ne sont pas soutenues et enrichies par l'expérience et la sagesse collectives du groupe" [Shoghi Effendi : Baha'i News Nov. 1933, p. 3].

Tous les baha'is sont appelés à participer à la consultation à l'échelle communautaire, au cours des fêtes des 19 jours. Les idées qui découlent de ces échanges de vues sont ensuite traitées par les institutions locales, nationales, voire internationales, pour aboutir à des décisions. n importe que les assemblées apportent le plus grand soin à examiner tout ce qui leur est sou- mis, soit par les recommandations collectives de la communauté, soit par les individus.

Grâce à la consultation, pratiquée dans le climat de prière, d'amour et de vertu, les idées personnelles sont offertes sans que quiconque puisse insister sur son propre point de vue. Les avis qui paraissent opposés au départ, finissent par se concilier grâce à la consultation. La décision sera, dès lors, la décision de l'institution, et non celle d'un ou de plusieurs individus par opposition à d'autres individus.

Pour bien comprendre ce mécanisme, il faut préciser certains détails relatifs à la loi de consultation et se référer à la sixième loi, qui est celle de l'unité.

Les détails de fonctionnement de la consultation appartiennent surtout à la procédure. C'est pourquoi il est utile que les amis qui pratiquent la consultation, surtout au sein des institutions, connaissent bien cette procédure.

Il est impossible de commenter ici les règles de procédure. n suffIra de quelques remarques générales.

Le caractère de la procédure est essentiellement différent de celui des lois. Les lois constituent la base indestructible de l'ordre administratif, elles sont d'inspiration divine. La procédure est de création humaine, bien qu'inspirée par le pouvoir révélateur. Par exemple, le Gardien a chargé l'Assemblée Nationale des Etats-Unis de dresser un premier ensemble de règles que nous trouvons dans les statuts de l'assemblée nationale et des assemblées locales. Lui-même en a approuvé les termes. C'est cette approbation par celui qui fut placé par 'Abdu'I-Baha sous l'infaillible protection de la Beauté Bénie, qui donne à cet ensemble un caractère d'authenticité. Le Gardien lui-même a, dans le cadre de ses nombreux messages, arrêté plusieurs points de procédure. Enfin, des règles de procédure, obligatoires pour toutes les institutions, seront édictées par la Maison Universelle de Justice. Dans les limites de leur pays respectif, les assemblées nationales les appliquent en les adaptant à des besoins particuliers. Ce qui est important, toutefois, c'est le carat ère temporaire et flexible de ces règles. Le Gardien a toujours limité la procédure à son minimum indispensable, et la Maison Universelle de Justice ne manque pas de perpétuer cette sagesse, afin d'éviter l'étranglement de l'esprit de la consultation par une accumulation de ces règles. De plus, les règles périmées doivent être abrogées pour être remplacées par d'autres s'adaptant aux besoins nouveaux. Nous voudrions aussi évoquer le rôle des officiers et les relations de ceux-ci avec les croyants.

Il existe une hiérarchie dans la foi, une hiérarchie d'institutions, mais non une hiérarchie de personnes, même si les individus occupent des rangs différents. Les membres des institutions élues n'ont aucune place dans cette hiérarchie. Si le président d'une assemblée préside la consultation, ce n'est nullement en vertu d'une autorité hiérarchique, mais uniquement en vertu de sa fonction. Toutefois, les amis participant à la consultation doivent accepter la discipline de la consultation. ils ne prendront la parole qu'après en avoir reçu la permission du président. Celui-ci ne peut d'ailleurs la leur refuser. U arrive souvent que certains amis parlent trop longuement et répètent leur argumentation. Il appartient au président de les maintenir dans la limite de ce qui est juste et raisonnable.

En vertu de la courtoisie, les amis veilleront à exprimer leurs points de vues sans passion, avec des mots qui ne heurtent pas. Le président veillera à ce que cette modération soit observée. De même, l'orateur sera écouté avec attention et bienveillance. Personne ne devra chercher des intentions cachées ou des allusions personnelles. Chacun, au contraire, recevra le bénéfice de sa bonne foi et de sa bonne volonté. Lorsque les avis sont proches les uns des autres, la consultation est facile et l'unanimité peut se faire rapidement. il n'en est pas toujours ainsi. Dieu merci, car de la divergence des avis, jaillit la lumière. Néanmoins, une application sage de la procédure devient alors nécessaire afin d'éviter les décisions hâtives ou d'aboutir dans la confusion. Lorsque les avis sont partagés, on procédera utilement par le dépôt d'une motion. La correction progressive des termes de la motion par voie d'amendements successifs conduit générale- ment à une décision qui recueille l'unanimité et devient vraiment la décision de l'institution et non celle d'un ou plusieurs individus. On voit, une fois de plus, comment la technique peut se mettre au service de l'esprit, sans pour cela devenir l'essentiel qui demeure dans la loi de la consultation et dans la volonté des membres de se conformer à cette loi.

Disons, pour terminer ce court exposé, que les membres ne sont liés, au moment du vote, par aucun impératif autre que leur conscience. lis devront peser les éléments apportés par la consultation en toute liberté et s'affranchir de leurs désirs ou penchants personnels afin d'émettre le vote que leur conscience leur dicte selon la justice et le dévouement au bien communautaire. Dans les cas graves, le vote sera préparé par la prière a fm que toute trace d'égoïsme soit éliminée.


9.6. La loi d'unité

"Si, à la suite d'une consultation, une décision est prise à l'unanimité, tant mieux ; mais si, Dieu nous en garde, des différences d'opinions s'élèvent, une majorité de voix doit prévaloir" ['Abdu'I-Baha cité dans : Baha'i Administration pp. 21-22].

Cette loi d'unité est également très importante. Elle demande du baha'i une grande maîtrise de soi et une constante discipline.

a) La loi d'unité au sein de l'assemblée

Lorsqu'une décision est prise à la majorité, elle n'en demeure pas moins la décision de l'assemblée comme
si l'unanimité s'était faite. Tous doivent collaborer à sa réalisation dans l'unité, et les critiques au sein ou en
dehors de l'assemblée sont pernicieuses. Qu'un membre de l'assemblée se permette de dire, même à son
meilleur ami et confidentiellement, qu'il ne partage pas l'avis de la majorité, est une atteinte grave à la loi d'unité.

Et pourtant les assemblées peuvent se tromper. Comment rectifier ? Lorsqu'un ou plusieurs membres s'aperçoivent qu'une décision engendre des résultats négatifs, le devoir leur commande de se taire en dehors de l'assemblée, mais de porter à la connaissance de l'assemblée en session, les faits nouveaux qui interviennent.

L'assemblée prendra, alors, en conformité avec les lois qui ont été énoncées, les mesures qui s'imposent.
"S'ils sont d'accord sur un sujet, même s'ils ont tort, c'est mieux qu'être en désaccord et avoir raison. S'ils sont d'accord et que, tous sont dans l'erreur, comme cela s'est fait dans l'unité, la vérité sera révélée et le mal changé en bien" ['Abdu'I-Baha, Baha'i World Faith p, 411].

b) La loi d'unité au sein de la communauté

Pour les membres de la communauté baha'ie, la loi d'unité est une conséquence de l'autorité du Covenant. Chacun doit la plus parfaite obéissance aux institutions. Cette obéissance n'est pas une soumission aveugle mais une acceptation raisonnée de la mission dont sont investies les assemblées. Cette obéissance implique l'interdiction des critiques en dehors des moyens prévus par la procédure de la consultation.

b.1) Les affaires collectives :

Les décisions prises par les assemblées sont portées à la connaissance de la communauté par le bulletin, les rap- ports aux fêtes ou d'autres moyens. Ces décisions sont très souvent la suite des recommandations qui ont été émises au cours des fêtes antérieures. Les baha'is doivent savoir que la discussion est close lorsque la décision est prise et qu'elle ne peut être réouverte qu'en présence de faits nouveaux reconnus par la majorité.
D'autre part, le baha'i qui ne partage pas le point de vue exprimé par la décision, ne peut pas formuler de critiques si celles-ci ne sont fondées que sur les faits connus par l'assemblée.
D'autre part, le baha'i qui connaît des faits nouveaux, susceptibles de modifier l'optique de la décision, a non seulement le droit, mais l'obligation de les faire connaître soit au cours de la fête, soit en s'adressant directe- ment à l'assemblée. De toute façon, il ne peut essayer de faire prévaloir son point de vue, contre celui de la majorité.

b.2) Les affaires privées :

Ces affaires sont traitées confidentiellement entre l'assemblée et les parties intéressées. Ni les membres de l'assemblée, ni les parties elles-mêmes ne peuvent s'en entretenir , ni en entretenir des tiers, en dehors des sessions. Une telle attitude sera de la médisance, condamnée si sévèrement par Baha'u'llah.
Lorsque tous les éléments sont constitués et que l'assemblée statue, ses décisions lient les parties. C'est en ces matières que progressivement les assemblées locales et nationales deviendront de véritables maisons de justice.
Mentionnons pour terminer, le recours toujours possible à l'instance supérieure. Un tel recours ne suspend en aucune façon le respect de la décision intervenue, en attendant que celle-ci soit confIrmée ou infirmée par l'instance supérieure. C'est dans un tel cas que la loi d'unité est la plus difficile à observer.

Telles sont les lois spirituelles qui servent de fondation solide à l'ordre administratif de Baha'u'llah. Certes, les institutions n ' ont pas encore atteint le degré de maturité et de perfection qui garantissent toujours des décisions sages et pertinentes. N'oublions cependant pas qu'elles se développeront dans cette voie dans la mesure où tous les baha'is leur feront confiance et les entoureront de leur respect.

Soyons persuadés que la rapidité de leur mûrissement dépend moins des individus qui les composent que de l'esprit de ceux qui les entourent.

En tout cas, elles sont l'expression de la volonté divine pour ce jour et toute civilisation qui voudrait se construire en opposition avec elles serait l'oeuvre de l'homme en opposition avec l'oeuvre d'inspiration divine. y a-t-il le moindre doute quant à l'issue d'un tel égarement ?

"Les préceptes révélés par Dieu constituent le moyen le plus élevé pour le maintien de l'ordre dans le monde et pour la sécurité de ses habitants" [Extraits des Ecrits de Baha'u'llah, p. 218].


10. LA COMMUNAUTE BAHA'IE

Nous ne voudrions pas terminer ces lignes sans évoquer cette masse de plus en plus impressionnante de croyants qui rejoignent le communauté du plus Grand Nom. Certes les institutions sont animées de l'Esprit de Baha'u'llah pour triompher de tous les obstacles. n n'en demeure pas moins vrai que chaque croyant occupe sa place dans la communauté et que son épanouissement spirituel, moral et intellectuel apporte à l'oeuvre une part que l'on ne peut sous-estimer.

De l'étendue de son sacrifice, dépendent les progrès de l'enseignement. De la pureté de son amour, découle l'harmonie des communautés.

Son obéissance active et consciente assure l'efficacité de l'unité de la Cause.

Enfin et surtout, sa constante participation à la consultation écarte définitivement la sclérose des institutions.

Nul baha'i, digne de ce nom, ne peut donc se soustraire au privilège sacré de participer aux fêtes des 19 jours. Cette institution révélée par le Bab et conf1rInée par Baha'u'llah est le plus sûr garant de la constante adaptabilité de l'ordre administratif aux besoins de la civilisation en évolution.

Où les institutions puiseraient -elles leur contact intime avec la masse des croyants -contacts qui font tellement défaut au sein des institutions décadentes de notre époque -si ce n'est par les consultations fréquentes aux fêtes des 19 jours ? Comment ces institutions pourraient-elles assumer leur rôle sacré si un fossé venait à se creuser entre elles-mêmes et les individus, leurs problèmes, leurs besoins.


11. CONCLUSIONS

De la dispensation baha'ie, naîtra l'ordre mondial de Baha'u'llah qui implantera la Plus Grande Paix et fusionnera toutes les nations de la terre en une communauté universelle reconnaissant la révélation de Baha'u'llah comme la base même de la civilisation nouvelle.

Cette communauté sera structurée par un ordre administratif dont les caractéristiques et les institutions principales sont conte- nues dans la révélation elle-même et dont la forme se dessine déjà, bien qu'à l'état embryonnaire, dans la communauté baha'ie actuelle.

Le jour viendra où le monde n'aura plus d'autre issue pour échapper à sa complète désintégration, que de se tourner vers cette arche nouvelle de l'alliance divine.

(Publication approuvée par l'Assemblée Nationale des baha'is de Belgique
Maison d'Editions Baha'ies 205, rue du Trône 1050 Bruxelles -Belgique - D/1547/1981/84)


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