Médiathèque baha'ie

Mémorial des Fidèles
'Abdu'l-Baha

Anecdotes sur la vie exemplaire de 69 baha'is
(traduit de l'anglais par Arlette Ala'i)


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Table des matières

Préfaces
1. Nabil-i-Akbar
2. Ismu'llahu'l-Asdaq
3. Mulla 'Ali-Akbar
4. Shaykh Salman
5. Mirza Muhammad-'Ali, l'Afnan
6. Haji Mirza Hasan, l'Afnan
7. Muhammad-'Aliy-i-Isfahani
8. Abdu'l-Salih, le Jardinier
9. Ustad Isma'il
10. Nabil-i-Zarandi
11. Darvish Sidq-'Ali
12. Aqa Mirza Mahmud et Aqa Rida
13. Pidar-Jan de Qazvin
14. Shaykh Sadiq-i-Yazdi
15. Shah-Muhammad-Amin
16. Mashhadi Fattah
17. Nabil de Qa'in
18. Siyyid Muhammad-Taqi Manshadi
19. Muhammad-'Ali Sabbaq de Yazd
20. 'Abdu'l-Ghaffar de Isfahan
21. 'Ali Najaf-Abadi
22. Mashhadi Husayn et Mashhadi Muhamad-i-Adhirbayjani
23. Haji 'Abdu'r-Rahim-i-Yazdi
24. Haji 'Abdu'llah Najaf-Abadi
25. Muhammad-Hadiy-i-Sahhaf
26. Mirza Muhammad-Quli
27. Ustad Baqir et Ustad Ahmad
28. Muhammad Hana-Sab
29. Haji Faraju'llah Tafrishi
30. Aqa Ibrahim-i-Isfahani et Ses Frères
31. Aqa Muhammad-Ibrahim
32. Zaynu'l-'Abidin Yazdi
33. Haji Mulla Mihdiy-i-Yazdi
34. Son Eminence Kalim (Mirza Musa)
35. Haji Muhammad Khan
36. Aqa Muhammad-Ibrahim Amir
37. Mirza Mihdiy-i-Kashani
38. Mishkin-Qalam
39. Ustad 'Ali-Akbar-i-Najjar
40. Shaykh 'Ali-Akbar-i-Mazgani
41. Mirza Muhammad, le Serviteur de la maison des pélerins
42. Mirza Muhammad-i-Vakil
43. Haji Muhammad-Riday-i-Shirazi
44. Husayn Effendi Tabrizi
45. Jamshid-i-Gurji
46. Haji Ja'far-i-Tabrizi et Ses Frères
47. Haji Mirza Muhammad-Taqi, l'Afnan
48. 'Abdu'llah Baghdadi
49. Muhammad-Mustafa Baghdadi
50. Sulayman Khan-i-Tunukabani
51. 'Abdu'r-Rahman, le Chaudronnier
52. Muhammad-Ibrahim-i-Tabrizi
53. Muhammad-'Aliy-i-Ardikani
54. Haji Aqay-i-Tabrizi
55. Qulam-'Aliy-i-Najjar
56. Jinab-i-Munib, que sur lui soit la Gloire du Très-Glorieux
57. Mirza Mustafa Naraqi
58. Zaynu'l-Muqarrabin
59. 'Azim-i-Tafrishi
60. Mirza Ja'far-i-Yazdi
61. Husayn-Aqay-i-Tabrizi
62. Haji 'Ali-'Askar-i-Tabrizi
63. Aqa 'Aliy-i-Qazvini
64. Aqa Muhammad-Baqir et Aqa Muhammad-Isma'il, le Tailleur
65. Abu'l-Qasim de Sultan-Abad
66. Aqa Faraj
67. L'Épouse du Roi des Martyrs
68. Shamsu'd-Duha
69. Tahirih
Glossaire
Notes


Préface

Mémorial des Fidèles, par 'Abdu'l-Baha, immortalise la vie de soixante-neuf baha'is qui étaient l'essence de la fidélité. En apparence, c'est une collection de brefs sketchs biographiques, mais il ne s'agit pas là des aspects transitoires de la vie humaine. C'est la qualité de l'âme, les attributs de l'esprit, la quintessence de l'humanité et le reflet divin dans l'homme qui est visée ici.

Ceux qui sont commémorés ici partagent une chose commune: ils sont poussés par leur amour pour Baha'u'llah. Si grande est cette force magnétique dans leur vie qu'ils traversent de vastes distances et surmontent toutes les barrières pour être avec Lui. Malgré les particularités du temps et du lieu, les lecteurs reconnaîtront d'éternels et universels types d'homme.

'Abdu'l-Baha ne dit presque rien à propos de lui-même dans ce livre. Mais certains évènements de la vie de ses compagnons sont entremêlés avec la sienne, offrant des aperçus de cette essence d'humanité et d'humilité qu'il était. Son amour observateur, chaleureux et tendre entoure les fidèles, et à travers eux il nous fournit des modèles nobles et héroïques. Ceci est un livre à savourer lentement, permettant au langage figuré de créer son propre esprit tandis que les paroles de 'Abdu'l-Baha dessinent la vallée de l'amour et de fidélité.

'Abdu'l-Baha (1844-1921) était le fils aîné de Baha'u'llah et Son Successeur choisi et l'Interprète Autorisé de Ses enseignements.

Calligraphie en forme d'oiseau:
Mishkin-Qalam, calligraphe renommé baha'i, est une des personnes exaltées dans ce livre. Il était le calligraphe principal de la Perse, jouissant d'une position spéciale parmi les ministres de la cour à Tihran. Finalement, il partagea l'emprisonnement avec Baha'u'llah dans la cité de Saint Jean d'Acre. Son dessin utilisé dans ce livre est un arrangement artistique de la phrase "Bismi'llahi'l-Bahiyyi'l- Abha" qui signifie "Au nom de Dieu, le Glorieux, le Plus Glorieux".

Préface à l'édition anglaise:

Voici un livre concernant des personnes qui essayèrent d'aller en prison plutôt que de s'en échapper, car ils étaient prisonniers d'un très grand amour. Leur amour était pour Baha'u'llah que le XIXème siècle a couvert de chaînes et qu'on a essayé de réduire au silence en l'enfermant finalement, dans la forteresse des Croisés à 'Akka. Comme l'oeil d'un cyclone, Il est le centre de ces récits, mais apparaît rarement - restant, comme le gardien Le décrivit, "transcendant dans Sa majesté, serein, imposant, inaccessiblement glorieux."

Qu'il soit un bijoutier de Baghdad, un plongeur ou un professeur qui ne peut plus supporter l'arrogance de ses compères, le lecteur se retrouvera certainement dans ces pages. Des mystiques, des féministes, des ecclésiastiques, des artisans, des princes marchands sont représentés. Même la jeunesse moderne occidentale est ici représentée, par exemple dans le chapitre concernant les derviches. C'est pour cela que ceci est plus que de simples annales des premiers disciples baha'is ; c'est en quelque sorte, un livre de prototypes ; et c'est une sorte de testament des valeurs auxquelles nous adhérons et désirées pour nous par l'Exemple Baha'i, valeurs tournées en dérision maintenant, mais - si la planète doit être un lieu sans risque pour l'humanité - indispensables. Ce sont des récits courts et simples, mais qui constituent un manuel de la façon de vivre et de mourir.
La tâche de traduire ces biographies en anglais m'a été confiée par le Gardien il y a plusieurs années, lorsque j'étais en pèlerinage au centre baha'i à Haifa. Peu de temps après, le Gardien m'envoya, à Tihran, le texte dont cette traduction a été réalisée. D'après la page de titre en persan, ce fut le premier livre baha'i à être imprimé à Haifa sous le Gardiennat. Une introduction en persan déclare que 'Abdu'l-Baha a écrit ce livre en 1915 et a donné la permission à M. A. Kahruba'i de le publier. Ce texte, daté de 1924, porte le sceau de l'Assemblée Baha'ie de Haifa. Une seconde page de titre, en anglais, décrit ce travail comme "un récit, de la plume de 'Abdu'l-Baha, de la vie de quelques-uns des premiers croyants qui s'éteignirent lors de sa vie", bien que cette oeuvre soit, en fait, la transcription de ses paroles.

Voici donc, environ un demi siècle après son ascension, un nouveau livre que 'Abdu'l-Baha offre au monde.

Nous nous demandons combien d'entre nous, si proches d'années incroyablement pénibles et difficiles, consacrerons notre temps non à nos propres mémoires mais à la vie de quelques soixante-dix compagnons, dont la plupart sont morts depuis longtemps, pour les sauver de l'oubli. 'Abdu'l-Baha était présent à beaucoup de ces scènes et cependant, il s'effaçait en permanence pour se dévouer à un compagnon, un si humble que les années seraient passées sans graver son nom dans l'histoire. Et si, pour le sceptique, ces croyants semblent meilleurs que les hommes ordinaires, nous devons nous rappeler que la présence de la Manifestation les a fait tels quels, et qu'ils sont regardés à travers les yeux du Maître - qui dit que l'oeil imparfait voit les imperfections, et qu'il est plus facile de faire plaisir à Dieu que de faire plaisir aux hommes.

Ce livre est donc un autre témoignage du penchant de 'Abdu'l-Baha pour la race humaine. L'amour qu'Il personnifiait n'était non pas aveugle, mais observateur, non pas impersonnel, mais chaleureux et tendre ; Il avait une attitude constante d'intérêt discret. Un tel amour venant d'un tel Etre ne s'arrête pas à la durée d'une vie. Il a quitté ce monde il y a un demi siècle, et la plupart de ceux qui soupiraient après lui si impatiemment, dont les ennemis disaient qu'ils n'étaient pas baha'is mais 'Abdu'l-Baha'is, ont maintenant disparu. Mais son amour est toujours là, pour des millions de personnes à venir.

Le traducteur
Keene, New Hampshire, Décembre 1969
Copywrite: Maison d'Editions Fada'il, Niger - email: mef @ intnet.ne
Traduit du persan vers l'anglais "Memorials of the Faithful" annoté par Marzieh Gail -
Traduction en français de Arlette Ala'i, approuvée par l'Assemblée Spirituelle Nationale des Baha'is du Niger - Édition, 2002




1. Nabil-i-Akbar

Photo: Aqa Muhammad-i-Qa'ini, connu sous le titre de Nabil-i-Akbar

Dans la ville de Najaf habitait, parmi les disciples du très connu mujtahid Shaykh Murtada, un homme sans égal. Il s'appelait Aqa Muhammad-i-Qa'ini. Plus tard, il reçut de la Manifestation le titre de Nabil-i-Akbar [i]. Cette âme éminente devint le personnage le plus important des disciples du mujtahid. Distingué parmi tous, il fut le seul à recevoir le titre de mujtahid. En effet, Shaykh Murtada n'a jamais plus voulu donner ce titre.

Il excellait non seulement en théologie mais dans d'autres branches de la connaissance comme les sciences humaines, la philosophie de l'illuminisme, les enseignements des mystiques et l'école des Shaykhis. C'était un homme universel, et à lui seul, une preuve convaincante. Quand ses yeux s'ouvrirent à la lumière de la direction divine et qu'il respira les parfums célestes, il devint une flamme de Dieu. Alors son coeur tressaillit au plus profond de lui-même et, dans un état de joie et d'amour, il rugit comme un léviathan sortant des profondeurs.

Il reçut son nouveau titre du mujtahid, inondé par les louanges. Puis, il quitta Najaf et arriva à Baghdad où il eut l'honneur de rencontrer Baha'u'llah. Là, il aperçut la lumière qui embrasait l'Arbre Saint sur le Sinaï. Bientôt, il fut dans un tel état qu'il ne pût prendre de repos ni le jour, ni la nuit.

Un jour, Nabil était agenouillé avec déférence devant Baha'u'llah sur le sol des appartements réservés aux hommes. A ce moment précis, Haji Mirza Hasan-'Amu, un collaborateur de confiance des mujtahids de Karbila rentra avec Zaynu'l-'Abidin Khan, le Fakhru'd Dawlih. En voyant Nabil à genoux avec tant d'humilité et de déférence, le Haji fut très surpris: "Monsieur", murmura-t-il, "que faites-vous ainsi?" Nabil répondit: "Je suis venu ici pour la même raison que vous". Les deux visiteurs ne pouvaient se remettre de leur surprise, car tout le monde savait que ce personnage était unique parmi les mujtahids et était le disciple préféré du renommé Shaykh Murtada.

Plus tard, Nabil-i-Akbar partit pour la Perse et alla au Khurasan. L'Émir de Qa'in, Mir 'Alam Khan, lui montra tout d'abord beaucoup de courtoisie et apprécia grandement sa compagnie. Si marquante était son estime que les gens sentirent combien l'Émir était captivé par lui. En effet, il était fasciné par l'éloquence, le savoir et les talents du maître. Nabil recevait les honneurs de tous car "les hommes suivent la foi de leurs rois".

Nabil resta quelque temps ainsi, estimé et apprécié, mais l'amour qu'il avait pour Dieu ne pouvait être caché. Il explosait de son coeur, l'enflammait et consumait ses efforts pour le cacher.

De mille façons, j'ai essayé
De cacher mon amour -
Mais comment pouvais-je, sur un tel bûcher ardent,
Ne pas m'enflammer!


Il apporta la lumière dans la région de Qa'in et convertit un grand nombre de gens. Et quand il fut connu par son nouveau nom, le clergé, envieux et malveillant, se leva et le dénonça, portant leurs calomnies jusqu'à Tihran afin que Nasiri'd-Din Shah se mette en colère. Terrifié par le Shah, l'Émir attaqua Nabil avec tout son pouvoir. Bientôt, la ville entière fut en effervescence et le peuple en furie se détourna de lui.

Cet amoureux épris de Dieu, jamais ne céda et résista à tous. Cependant, à la fin, ils le chassèrent. Ils chassèrent cet homme qui avait vu ce qu'eux n'avaient pas vu, et il alla à Tihran où il devint un fugitif, un sans logis.

Là, ses ennemis frappèrent encore. Il fut poursuivi par les hommes de garde; les gardes le cherchèrent partout, demandant après lui dans chaque rue, le chassant afin de l'attraper et de le torturer. Se cachant, il passait près d'eux comme le soupir de l'opprimé et montait sur les collines; ou encore, comme les larmes de ceux qui ont été trompés, il se glissait dans les vallées. Il ne pouvait plus porter le turban qui indiquait son rang ; aussi il se déguisait, portant un chapeau de laïque afin qu'ils ne puissent le reconnaître et le laissent tranquille.

En secret, de toutes ses forces, il continuait à propager la Foi et à fournir des preuves. Il était une lampe qui guidait de nombreuses âmes. Il était exposé au danger à tout moment, toujours vigilant et sur ses gardes. Le gouvernement n'abandonna jamais ses recherches et les gens ne cessèrent de discuter son cas.

Puis il partit pour Bukhara et 'Ishqabad, enseignant la Foi inlassablement dans toutes ces régions. Comme une bougie, il consumait sa vie, mais, malgré ses souffrances, il n'était jamais découragé, au contraire sa joie et son ardeur progressaient de jour en jour. C'était un prêcheur éloquent, un médecin habile, un remède pour chaque malade, un baume pour toutes les douleurs. Il guidait les illuministes par leurs propres principes philosophiques et, avec les mystiques, il prouvait l'Avènement divin parlant d'"inspiration" et de "vision céleste". Il pouvait convaincre les chefs Shaykhis en mentionnant les dernières paroles de leurs feux fondateurs Shaykh Ahmad et Siyyid Kazim, et convertissait des théologiens islamiques avec les textes du Qur'an et les traditions des Imams qui conduisent l'humanité. Il était un remède instantané pour le malade et un riche donateur pour le pauvre.

Il fut démuni de tout à Bukhara et, en proie à de nombreux troubles, jusqu'à ce que finalement, loin de sa terre natale, il mourut, se hâtant vers le Royaume où il n'existe aucune misère.

Nabil-i-Akbar fut l'auteur d'un essai magistral démontrant la vérité de la Cause, mais les amis ne l'ont pas retrouvé à ce jour. J'espère qu'un jour, il sera retrouvé et qu'il servira d'exhortation aux érudits. Il est vrai que dans ce monde éphémère, il fut la cible de chagrins innombrables; et, cependant, toutes ces générations de clergés puissants, ces shaykhs tels que Murtada et Mirza Habibu'llah et Ayatu'llah-i-Khurasani et Mulla Asadu'llah-i-Mazindarani, tous disparaîtront sans laisser aucune trace. Ils ne laisseront aucun nom derrière eux, aucun signe, aucun fruit. Aucune parole ne les mentionnera, aucun homme ne parlera d'eux. Mais, parce qu'il est resté ferme dans cette foi sacrée, parce qu'il a guidé des âmes et servi cette Cause et propagé sa renommée, cette étoile, Nabil, brillera à l'horizon d'une lumière permanente.

Il est clair que quelque soit la gloire gagnée en dehors de la cause de Dieu, elle finit toujours par devenir humiliation, et la tranquillité et le confort loin des sentiers de Dieu ne sont finalement que souci et tristesse. Une telle opulence est pénurie et rien de plus.

Il fut un signe de direction, un emblème de la crainte de Dieu. Pour cette foi, il donna sa vie et en mourant, il triompha. Il passa à côté du monde et de ses récompenses; il ferma les yeux sur le pouvoir et la richesse; il se libéra de toutes chaînes et entraves, et mit de côté toutes pensées de ce monde. De connaissance très étendue, à la fois mujtahid, philosophe, mystique et doué d'une grande intuition, il était également un homme de lettres accompli et un orateur hors pair. Il avait un esprit large et universel.

Loué soit Dieu, à la fin il devint le récipient de la grâce céleste. Sur lui soit la gloire de Dieu, le Très Glorieux. Que Dieu déverse la clarté du Royaume d'Abha sur son tombeau. Que Dieu l'accepte dans le paradis de la réunion, et l'abrite pour toujours dans le royaume du juste, inondé par un océan de lumière.


2. Ismu'llahu'l-Asdaq

Parmi les Mains de la cause de Dieu qui ont quitté cette vie et sont montées vers l'Horizon suprême, il y a Jinab-i-Ismu'llahu'l-Asdaq ainsi que Jinab-i-Nabil-i-Akbar. Il y en avait également d'autres comme Jinab-i-Mulla 'Ali-Akbar et Jinab-i-Shaykh Muhammad-Riday-i-Yazdi ou encore le très vénéré martyr Aqa Mirza Varqa.

Ismu'llahu'l-Asdaq fut réellement un serviteur du Seigneur depuis le début de sa vie jusqu'à son dernier souffle. Dans sa jeunesse, il rejoignit le cercle du regretté Siyyid Kazim et devint un de ses disciples. Il était réputé en Perse pour sa vie pure et devint connu sous le nom de Mulla Sadiq, le saint. C'était un être béni, un homme accompli, instruit, et très honoré. Les gens du Khurasan étaient très attachés à lui, car il était un grand érudit et parmi les plus réputés des théologiens, il était unique et sans égal. Comme enseignant de la Foi, il parlait avec une telle éloquence et un tel pouvoir extraordinaire, que ses auditeurs étaient conquis avec grande facilité.

Après qu'il fut arrivé à Baghdad et qu'il eut rencontré Baha'u'llah, je fus témoin un jour de l'événement suivant. Il était assis dans la cour du appartement des hommes, près du petit jardin. J'étais dans une des pièces, juste à l'étage supérieur, qui donnaient sur la cour. A ce moment-là, un prince persan, le petit-fils de Fath-'Ali Shah, arriva. Le prince lui dit: "Qui êtes-vous?" Ismu'llah répondit: "Je suis un serviteur de ce Seuil sacré. Je suis un des gardiens de cette porte". Et alors que j'écoutais d'en haut, il commença à enseigner la Foi. Tout d'abord le prince protesta violemment mais, en moins d'un quart d'heure, il protesta plus gentiment et avec bienveillance. Jinab-i-Ismu'llah l'avait calmé. Alors qu'au départ le prince avait démenti vivement ce qui était dit, et que son visage avait reflété nettement sa colère, son courroux s'était maintenant changé en sourire et il montrait une grande satisfaction d'avoir rencontré Ismu'llah et d'avoir écouté ce qu'il avait à dire.

Il enseignait toujours avec entrain et gaieté, et répondait gentiment et avec bonne humeur, même si la personne avec qui il parlait montrait un emportement passionné contre lui. Sa façon d'enseigner était excellente. Il était réellement Ismu'llah, le Nom de Dieu, pas pour sa renommée mais parce qu'il était une âme élue.

Ismu'llah avait en mémoire un grand nombre de traditions islamiques et maîtrisait les enseignements de Shaykh Ahmad et de Siyyid Kazim. Il accepta la Foi à Shiraz, à ses tout débuts, et fut très vite connu comme un croyant. Et parce qu'il commença à enseigner ouvertement et audacieusement, ils l'attachèrent et le menèrent dans les rues et les bazars de la ville. Même dans cette situation, tranquille et souriant, il continuait de parler aux gens. Il ne céda pas; il ne fut jamais silencieux. Quand ils le libérèrent il quitta Shiraz et alla au Khurasan et là, encore, il commença à propager la Foi, à la suite de quoi, en compagnie du Babu'l-Bab, il se dirigea vers le Fort Tabarsi. Là, il endura des souffrances intenses en tant que membre de ce groupe de prêts au sacrifice, ils le firent prisonnier au Fort et le remirent aux chefs de Mazindaran, pour le conduire ici et là dans des endroits divers et pour finalement le tuer dans une certaine région de cette province. Lorsque, enchaîné, Ismu'llah fut amené à l'endroit indiqué, Dieu mit dans le coeur d'un homme qu'il fallait le délivrer de la prison au milieu de la nuit et le guider vers un endroit où il serait en sécurité. Durant toutes ces épreuves angoissantes, il resta inébranlable dans sa foi.

Pensez, par exemple, que l'ennemi avait entièrement cerné le Fort et que, sans interruption, il lançait des boulets de canons depuis leurs pièces de siège. Les croyants, parmi eux Ismu'llah, restèrent dix-huit jours sans nourriture. Ils vivaient du cuir de leurs chaussures. Mais ce cuir se termina vite, et il n'eurent plus rien qu'un peu d'eau, ils buvaient une gorgée chaque matin et restaient affamés et éreintés dans leur Fort. Cependant, quand ils étaient attaqués, ils se remettaient immédiatement sur leurs pieds et montraient devant leurs ennemis un courage magnifique et une résistance étonnante, conduisant l'armée en dehors de leurs murs. La faim dura dix-huit jours. Ce fut une épreuve terrible. Tout d'abord, ils étaient loin de chez eux, entourés et isolés par leurs ennemis; de plus, ils étaient affamés; et par-dessus tout, il y avait les attaques soudaines de l'armée et les pluies d'obus qui éclataient au milieu du Fort. Dans de telles circonstances, garder une foi et une patience inébranlables est extrêmement difficile et endurer de telles afflictions un phénomène rare. Cependant, Ismu'llah ne faiblît pas sous le feu de l'épreuve. Une fois libéré, il enseigna avec plus d'ardeur que jamais, il passa chaque moment à appeler les gens vers le Royaume de Dieu. En Iraq, il parvint en présence de Baha'u'llah et, une autre fois encore dans la Plus Grande Prison, recevant de Lui grâce et faveur.

Il était comme une mer houleuse, un faucon prenant son essor. Son visage rayonnait, sa parole était éloquente, sa force et sa ténacité renversantes. Quand il ouvrait les lèvres pour enseigner, les preuves se déversaient; quand il chantait ou priait, de ses yeux les larmes coulaient comme d'un nuage de printemps. Son visage était lumineux, sa vie était spirituelle, ses connaissances à la fois acquises et innées; et célestes étaient son ardeur, son détachement pour le monde, sa droiture, sa piété et sa crainte de Dieu.

Le tombeau de Ismu'llah est à Hamadan. Plusieurs tablettes ont été révélées pour lui par la plume suprême de Baha'u'llah, y compris une tablette spéciale de visitation après son décès. Il fut un grand personnage, parfait en tout.

De tels êtres bénis ont maintenant quitté ce monde. Dieu merci, ils ne sont pas restés pour être témoins des agonies qui suivirent l'ascension de Baha'u'llah - des afflictions intenses; car les montagnes fermement enracinées en trembleront, en seront secouées et devant cela les collines très élevées se prosterneront.

C'était réellement Ismu'llah, le Nom de Dieu. Heureux celui qui se promènera autour de son tombeau, qui bénira son corps avec la terre de cette tombe. Que sur lui soient les salutations et les louanges dans le Royaume d'Abha.


3. Mulla 'Ali-Akbar

Photo: Mulla 'Ali-Akbar (Haji Akhund) assis à gauche et, Mirza Abu'l-Hasan (Haji Amin).

Une autre Main de la Cause était le vénéré Mulla 'Ali-Akbar, sur lui soit la gloire de Dieu, le Très-Glorieux. Au début de sa vie, cet illustre homme suivit des enseignements dans des institutions de haut niveau et travailla avec assiduité, jour et nuit, jusqu'à ce qu'il devienne pleinement approfondi dans les connaissances de l'époque, les études séculières, la philosophie et la jurisprudence religieuse. Il participait aux rencontres de philosophes, de mystiques et des shaykhis, traversant avec prévenance ces aires de la connaissance, de sagesse intuitive et d'illumination; mais il avait soif de l'eau de la source de vérité et avait faim du pain qui descendait du Ciel. Quels que soient ses efforts pour se perfectionner dans ces régions de l'esprit, il n'était jamais satisfait; il n'atteignait jamais le but de ses désirs; ses lèvres restaient sèches; il était confus, perplexe et avait l'impression qu'il était sorti de son chemin. La raison en était que dans tous ces cercles il n'avait trouvé aucune passion, aucune joie, aucune extase, pas le plus faible parfum d'amour.
Et en allant plus au fond de ces multiples croyances, il découvrit que du jour de l'avènement du Prophète Muhammad à son propre temps, de nombreuses sectes étaient nées avec des croyances différentes parmi elles; avec des opinions disparates, des buts divergents et des routes et des chemins innombrables. Chacune d'elles déclarant, pour une raison ou une autre, révéler la vérité spirituelle; chacune croyant qu'elle était la seule à suivre le chemin de la vérité - en dépit du fait que la mer muhammédique pouvait faire naître une grande marée et emporter toutes ces sectes loin au fond de l'océan. "Tu n'entendras d'eux aucun cri, même pas un murmure." [ii]

Celui qui réfléchit aux leçons de l'histoire apprendra que cette mer a levé des vagues sans nombre. Cependant à la fin chacune a été dissipée et a disparu comme une ombre passagère. Les vagues ont disparu mais la mer est toujours là. C'est pourquoi 'Ali Qabl-i-Akbar ne pouvait jamais apaiser sa soif, jusqu'au jour où il atteignit le rivage de Vérité et s'écria:

Voici la mer remplie à ras bord de trésors;
ses vagues lancent des perles sous le grand vent.
Enlevez votre robe et plongez, n'essayez pas de nager,
Ne vous faites pas une gloire en nageant -
plongez la tête la première.


Comme une fontaine, son coeur s'ouvrit et s'élança, compréhension et vérité commencèrent à jaillir de ses lèvres comme les eaux cristallines. Au début, avec humilité, avec pauvreté spirituelle, il emmagasina la nouvelle lumière. Seulement plus tard commença-t-il à la répandre. Car comme il a été si bien dit :

Pourra-t-il partager avec les autres le cadeau de la vie
Celui qui n'a jamais eu une part du cadeau de la vie?


Un enseignant doit poursuivre son chemin; il doit tout d'abord s'instruire lui-même et, ensuite instruire les autres. Si, lui-même continue de suivre le chemin des appétits et des désirs charnels, comment peut-il guider les autres vers les "signes évidents" [iii] de Dieu?

Cet homme honoré arriva avec succès à enseigner une multitude de personnes. Par amour de Dieu, il défia toute prudence en se hâtant vers les chemins de l'amour. Il devint comme un frénétique, un errant et un être que l'on prit pour fou. A cause de sa nouvelle Foi, à Tihran il fut bafoué par les riches et les pauvres. Quand il marchait dans les rues et le bazar, les gens le montraient du doigt, l'appelant un baha'i.

Chaque fois que des troubles éclataient, il était le premier à être arrêté. Il était toujours prêt et même s'y attendait car cela ne manquait jamais d'arriver.

Il fut enchaîné encore et encore, emprisonné et menacé par l'épée. La photo de cet être béni, avec celle du grand Amin, prise lorsqu'ils étaient enchaînés, servira d'exemple à celui qui a des yeux pour voir. Là, étaient assis ces deux hommes distingués, enchaînés, entravés, et pourtant recueillis, consentants, paisibles.

La situation fut telle qu'à la fin, lorsqu'il y avait une tumulte, Mulla 'Ali mettait son turban, revêtait son 'aba (manteau) et s'asseyait en attendant que ses ennemis se soulèvent, que les farrashes se dressent et que les gardes le jettent en prison. Mais, observez le pouvoir de Dieu! Malgré tout cela il restait en vie. "Vous reconnaîtrez celui qui sait et celui qui aime car vous le trouverez sec bien qu'immergé dans l'eau". C'est ainsi qu'il était. Le plus souvent sa vie ne tenait qu'à un fil; le profane malveillant l'attendait; partout il était connu comme un baha'i et cependant il était protégé contre tout danger. Il est resté sec dans les profondeurs de la mer, frais et en sécurité au coeur du feu, jusqu'au jour de sa mort.

Après l'ascension de Baha'u'llah, Mulla 'Ali continua, loyal au Testament de la lumière du monde, inébranlable dans l'alliance qu'il servit et proclama. Pendant la vie de la Manifestation, son désir ardent le fit se hâter vers Baha'u'llah, qui le reçut avec grâce et bonté et déversa sur lui des bénédictions. Puis, il retourna en Iran où il consacra tout son temps à servir la Cause.

Ouvertement en désaccord avec ses oppresseurs tyranniques, malgré le nombre de fois où ils le menacèrent, il les défiait. Jamais il ne fut vaincu. Tout ce qu'il avait à dire, il le disait. Il était une des Mains de la cause de Dieu, ferme, inébranlable, inflexible.

Je l'aimais beaucoup car il était merveilleux de discuter avec lui et un compagnon irremplaçable. Une nuit, il n'y a pas longtemps, je l'ai vu dans un rêve. Bien que sa carrure ait toujours été massive, dans le rêve il apparaissait plus large et plus corpulent que jamais. Il semblait qu'il revenait d'un voyage, je lui dis: "Jinab, vous avez bien grandi et êtes plus fort".

"Oui", répondit-il, "loué soit Dieu! J'ai été dans des endroits où l'air était frais et doux, et l'eau de pur cristal; le paysage était beau à voir, la nourriture délectable. Tout ceci me fut profitable aussi je suis plus fort que je ne l'ai jamais été et j'ai retrouvé l'enthousiasme de ma jeunesse. Les brises du Tout-Miséricordieux soufflaient sur moi et je passais tout mon temps à parler de Dieu. J'ai mis en avant ses preuves et enseigné sa foi". (La signification d'enseigner sa foi dans le monde futur est de répandre les douces saveurs de sainteté; cette action est la même qu'enseigner.) Nous avons parlé encore un peu et des personnes sont arrivées et il a disparu.

Son tombeau est à Tihran. Bien que son corps repose sous la terre, son esprit pur continue à vivre "au siège de la vérité, en présence du Roi puissant". [iv] Je souhaiterais rendre visite aux tombeaux des amis de Dieu, si cela était possible. Ce sont les serviteurs de la Beauté Bénie. Ils eurent des difficultés dans Son sentier, ils rencontrèrent peine et ennui, ils supportèrent les injures et souffrirent du danger. Sur eux soit la gloire de Dieu, le Très-Glorieux. Vers eux les salutations et les bénédictions. Sur eux la tendre miséricorde de Dieu et le pardon.


4. Shaykh Salman

Photo: Shaykh Salman

En 1266 A.H. (1849-1850), le messager de confiance, Shaykh Salman entendu pour la première fois les appels de Dieu et son coeur bondit de joie. Il était alors à Hindiyan. Irrésistiblement attiré, il marcha vers Tihran où, avec un amour ardent, il rejoignit secrètement les croyants. Un jour qu'il passait dans le bazar avec Aqa Muhammad Taqiy-i-Kashani, les farrashes le suivirent et découvrirent où il habitait. Le jour suivant, la police et les farrashes vinrent le chercher et le conduisirent chez le chef de la police.

"Qui êtes-vous?" demanda le chef.

"Je suis de Hindiyan" répondit Salman. "Je suis venu à Tihran et je me dirige vers le Khurasan pour faire le pèlerinage au tombeau de l'Imam Rida".

"Que faisiez-vous hier", demanda le chef, "avec cet homme en robe blanche?"

Salman répondit: "Je lui ai vendu un aba avant-hier et il devait me payer hier".

"Vous êtes étranger ici" dit le chef. "Comment pouviez-vous avoir confiance en lui?"

"Un homme de change a garanti le paiement" répliqua Salman. Il avait en tête le croyant respecté Aqa Muhammad-i-Sarraf (homme de change).

Le chef se tourna vers un de ses farrashes et dit: "Emmenez-le chez l'homme de change et faites des investigations".

Quand ils arrivèrent le farrash allait en tête. "Qu'est-ce que c'était que tout cela" dit-il. "A propos de la vente d'un aba et de la garantie du paiement. Expliquez-vous".

"Je ne sais rien à ce sujet" répondit l'homme de change.

"Venez par ici" dit le farrash à Salman. "Tout s'éclaircit finalement. Vous êtes un babi".

Le turban que Salman avait sur la tête était semblable à ceux portés à Shushtar et comme ils traversaient un carrefour, un homme de Shushtar sortit de son magasin. Il embrassa Salman et dit: "Où étiez-vous, Khajih Muhammad-'Ali ? Quand êtes-vous arrivé? Soyez le bienvenu".

Salman répondit: "Je suis arrivé il y a quelques jours et maintenant la police m'a arrêté".

"Qu'avez-vous contre lui" demanda le marchand au farrash. "Que cherchez-vous?"

"Il est babi" fut la réponse.

"Dieu me pardonne" dit l'homme de Shushtar. "Je le connais très bien, Khajih Muhammad-'Ali est un musulman craignant Dieu, un Shi'ih, un disciple fervent de l'Imam 'Ali". En plus, il donna une somme d'argent au farrash et Salman fut libre.

Ils rentrèrent dans le magasin et le marchand commença à demander à Salman ce qu'il devenait. Salman lui dit: "Je ne suis pas Khajih Muhammad-'Ali".

L'homme de Shushtar fut abasourdi. "Vous êtes exactement comme lui" s'exclama-t-il. "Vous êtes tous deux identiques. Cependant, puisque vous n'êtes pas lui, rendez-moi l'argent que j'ai donné au farrash".

Immédiatement Salman lui tendit l'argent, le quitta, se dirigea vers la porte de la ville et prit le chemin de Hindiyan.

Quand Baha'u'llah arriva en Iraq, le premier messager à être en sa sainte présence fut Salman, qui ensuite, retourna à Hindiyan avec des tablettes adressées aux amis.

Une fois par an, cet être béni prenait la route à pied pour rencontrer son Bien-Aimé, après quoi il reprenait la route portant des tablettes dans plusieurs villes telles Isfahan, Shiraz, Kashan, Tihran, etc.

Depuis l'an 69 jusqu'à l'ascension de Baha'u'llah en 1309 A.H. (1853-1892), Salman arrivait une fois par an apportant des lettres, partant avec des tablettes, délivrant fidèlement chacune à son destinataire. Chaque année pendant cette longue période, il parcourait à pied le trajet de Perse en Iraq ou à Andrinople ou à la Plus Grande Prison à 'Akka; il arrivait avec le désir et l'amour le plus grand et puis repartait une fois de plus.

Il avait un remarquable pouvoir d'endurance. Il voyageait à pied, s'étant imposé un régime d'oignons et de pain; et pendant tout ce temps, il bougea de telle façon que jamais il ne fût pris et il ne perdit jamais une seule lettre ni une seule tablette. Chaque lettre était délivrée avec soin; chaque tablette atteignait son destinataire. Maintes et maintes fois, à Isfahan, il fut soumis à de sévères épreuves mais il resta patient et reconnaissant sous toutes conditions et, obtint des non baha'is le surnom de "l'Ange Gabriel des Babis".

Durant sa vie entière, Salman rendit ce service important à la cause de Dieu, devenant ainsi le moyen de son expansion et contribuant au bonheur des croyants, apportant annuellement les divines bonnes nouvelles dans les villes et les villages de la Perse. Il était près du coeur de Baha'u'llah, qui le considérait avec une faveur et une grâce spéciales. Parmi les Ecrits sacrés, il y a des tablettes révélées en son nom.

Après l'ascension de Baha'u'llah, Salman resta ferme dans l'alliance, servant la Cause du mieux qu'il pouvait. Puis, comme avant, il se rendait, chaque année, à la Plus Grande Prison, délivrant le courrier des croyants et retournant en Perse avec les réponses. A la fin, à Shiraz, il dirigea son chemin vers le Royaume de gloire.

De l'aurore de l'histoire à nos jours, il n'y eut jamais un messager si digne de confiance; il n'y eut jamais un courrier comparable à Salman. Il laissa une postérité respectée à Isfahan qui, à cause des troubles actuels en Perse, sont en difficulté. Il est certain que les amis prendront soin d'eux.

Sur lui soit la gloire de Dieu, le Très-Glorieux, vers lui les salutations et les louanges.


5. Mirza Muhammad-'Ali, l'Afnan

A l'époque de Baha'u'llah, pendant les temps les plus pénibles dans la Plus Grande Prison, il n'était permis à aucun des amis de quitter la forteresse ni d'y rentrer de l'extérieur. "Bonnet de biais" [v] et le Siyyid [vi] habitaient près de la seconde porte de la ville, et de là ils épiaient continuellement, jour et nuit. Dès qu'ils voyaient un voyageur baha'i, ils s'empressaient d'aller chez le gouverneur et lui dire que le voyageur avait apporté des lettres et qu'il ramenait les réponses. Alors le gouverneur faisait arrêter le voyageur, prenait ses papiers, l'emprisonnait puis le jetait hors de la ville. Ceci devient une habitude coutumière avec les autorités et dura pendant longtemps - en réalité pendant neuf ans jusqu'à ce que, petit à petit, cette pratique fut abandonnée.

C'était à cette période que l'Afnan, Haji Mirza Muhammad-'Ali - ce grand rameau de l'Arbre Saint (les Afnan sont les parents du Bab) - voyagea vers 'Akka, allant de l'Inde à l'Egypte, puis d'Egypte à Marseille. Un jour, j'étais sur le toit du caravansérail. Quelques amis étaient avec moi et je marchais de long en large. C'était au coucher du soleil. A ce moment, jetant un regard sur le rivage, je vis qu'une calèche approchait. "Messieurs" dis-je, "je sens qu'un être saint est dans cette calèche". Il était encore très loin, presque hors de vue.

"Allons à la porte" leur dis-je, "bien qu'ils ne nous laisseront pas passer, nous pouvons attendre jusqu'à ce qu'il arrive". Je pris une ou deux personnes avec moi et nous partîmes.

A la porte de la ville, j'appelais le gardien discrètement, lui donnais quelque chose et lui dit: "Une calèche arrive et je pense qu'elle emmène un de nos amis. Quand elle arrivera, ne la retenez pas et ne faites pas de rapport au gouverneur". Il me donna une chaise et je m'assis.

Entretemps, le soleil se coucha. Ils avaient fermé la porte principale, mais la petite porte était restée ouverte. Le gardien était à l'extérieur, la calèche atteignit la porte, le voyageur était arrivé. Quel visage radieux il avait! Il n'était rien d'autre que lumière de la tête au pied. Regarder juste son visage vous rendait heureux; il était si confiant, si rassuré, si enraciné dans sa foi et son expression était si joyeuse. En vérité, il était un être béni. Il était un homme qui progressait de jour en jour, qui élargissait, chaque jour sa certitude et sa foi, ses qualités lumineuses, son amour ardent. Il fit des progrès extraordinaires durant les quelques jours où il resta dans la Plus Grande Prison. A tel point que l'on pouvait déjà percevoir son esprit et sa lumière alors que sa calèche n'avait parcouru que la moitié du trajet entre Haifa et 'Akka.

Après qu'il eut reçu les bontés sans fin déversées sur lui par Baha'u'llah, il reçut l'instruction de partir et de voyager en Chine. Là, pendant une période considérable, il passa ses journées ne pensant qu'à Dieu et d'une manière conforme au bon plaisir divin. Plus tard il alla en Inde où il mourut.

L'autre Afnan révéré et les amis de l'Inde pensèrent qu'il était plus sage d'envoyer son corps béni en Iraq, apparemment à Najaf, près de la ville sainte; car les musulmans avaient refusé qu'il soit enterré dans leur cimetière, et son corps avait été placé, pour des raisons de sécurité, dans un emplacement provisoire. Aqa Siyyid Asadu'llah, qui était alors à Bombay, avait été chargé de transporter respectueusement son corps en Iraq. Il y avait des persans hostiles sur le bateau et quand ces gens atteignirent Bushihr, ils rapportèrent que le cercueil de Mirza Muhammad-'Ali, le babi, était transporté à Najaf pour être enterré dans la vallée de la paix, près de l'enceinte sacrée du Tombeau, et qu'une telle chose était intolérable. Ils essayèrent de retirer son corps béni du bateau mais ils échouèrent; voyez ce que les divins décrets cachés peuvent accomplir.

Son corps arriva à Basra. Et comme c'était une période où les amis devaient rester cachés, Siyyid Asadu'llah fut obligé d'agir comme s'il allait effectuer l'enterrement à Najaf, tout en espérant que, d'une façon ou une autre, il pourrait le faire près de Baghdad. Car, bien que Najaf soit une ville sainte et le sera toujours, les amis avaient choisi un autre endroit. Dieu, par conséquent, secoua nos ennemis pour empêcher l'enterrement à Najaf. Ils se pressèrent, attaquèrent le poste de quarantaine pour récupérer le corps et soit l'enterrer à Basra soit le jeter dans la mer ou dans le désert de sable.

L'affaire prit une telle importance qu'à la fin, il parut impossible de transporter le corps à Najaf et Siyyid Asadu'llah dut le transporter à Baghdad. Là aussi, il n'y avait aucun emplacement où le corps de l'Afnan pourrait être en sécurité loin des mains ennemies. Finalement, le Siyyid décida de le transporter au tombeau Persan de Salman le Pur [vii], à peu près à cinq farsakhs en dehors de Baghdad, et de l'enterrer à Ctesiphon, près du tombeau de Salman, à côté du palais des rois sassanides. Le corps y fut transporté et ce croyant de Dieu, avec respect, reposa dans un endroit sûr près du palais de Nawshiravan.

C'était le destin, qu'après une période de plus de treize cents ans, depuis le temps où le trône des anciens rois de Perse avait été écrasé et où il n'en restait aucune trace, excepté des décombres et des dunes de sable, que même la toiture du palais était fissurée de partout et cassée en deux, la moitié gisant sur le sol - cet édifice devait retrouver le faste royal et la splendeur des temps anciens. C'est en fait une grande arche. La largeur de son entrée est de cinquante deux pas et ses tours sont très hautes.

Ainsi la grâce et la faveur de Dieu enveloppèrent les persans d'une époque lointaine, de façon à ce que leur capitale en ruine soit reconstruite et à nouveau florissante. A cette fin, et avec l'aide de Dieu, les événements aboutirent à ce que l'Afnan fut enterré à cet endroit; et il n'y a aucun doute qu'une grande ville sera élevée sur cet emplacement. J'ai écrit plusieurs lettres à ce sujet, jusqu'à ce qu'enfin les restes bénis puissent reposer à cet endroit.

Siyyid Asadu'llah m'écrivait de Basra et je lui répondais. Un des fonctionnaires publics nous était entièrement dévoué et je lui ai demandé de faire tout ce qu'il pouvait. Siyyid Asadu'llah m'informa de Baghdad qu'il ne savait plus que faire et qu'il n'avait aucune idée de la tombe dans laquelle il pourrait mettre ce corps. "Où que je l'enterre", écrivit-il, "ils le sortiront encore de terre".

A la fin, loué soit Dieu, il reposa dans un endroit que le temps et encore la Beauté Bénie avaient préparé; à cet endroit honoré par ses pas où Il a révélé des tablettes, où les croyants de Baghdad avaient été en sa compagnie; cette même place où le Plus Grand Nom avait l'habitude de flâner. Comment cela a-t-il pu arriver? C'était dû à la pureté de coeur de l'Afnan. Sans cela, tous ces parcours et moyens n'auraient servi à rien. En vérité, Dieu est l'inspirateur du ciel et de la terre.

J'aimais beaucoup l'Afnan. Grâce à lui j'étais joyeux. J'ai écrit pour lui une longue tablette de visitation et l'ai envoyée avec d'autres papiers en Perse. L'emplacement de son tombeau est un des lieux saints où un Mashriqu'l-Adhkar magnifique sera construit. Si possible, l'arche actuelle du palais royal sera restaurée et deviendra la maison d'adoration. Les constructions auxiliaires de la maison d'adoration seront également érigées: l'hôpital, les écoles et l'université, l'école élémentaire, le refuge pour les pauvres et les indigents; ainsi que le refuge des orphelins et des démunis et la maison des voyageurs.

Dieu plein de grâce! Cet édifice royal était un certain temps splendidement paré de haut en bas. Mais aujourd'hui il y a des toiles d'araignées où des rideaux de brocard d'or pendaient, et à l'endroit où les tambours du roi battaient et ses musiciens jouaient, l'unique son est le cri strident des corbeaux. "C'est, en vérité, la capitale du royaume des hiboux, où tu n'entendras aucun bruit, sauf l'écho de ses appels répétés". C'est ainsi qu'étaient les casernes quand nous sommes arrivés à 'Akka. Il y avait quelques arbres à l'intérieur des murs, et sur leurs branches comme sur les bâtiments, les hiboux criaient toute la nuit. Combien inquiétant est l'ululement d'un hibou; combien il attriste le coeur.

Depuis sa plus tendre enfance jusqu'à ce qu'il devint âgé et démuni, ce rameau sacré de l'Arbre Saint, avec son visage souriant, brilla comme une lampe au milieu de tous. Puis il s'éleva et prit son essor vers la gloire immortelle et plongea dans l'océan de lumière. Sur lui soient les souffles de son Seigneur, le Très-Miséricordieux. Sur lui, enroulé dans les flots de grâce et de pardon, soient la miséricorde et la faveur de Dieu.


6. Haji Mirza Hasan, l'Afnan

Photo: Mirza Siyyid Hasan Afnan-i-Kabir (Haji Mirza Hasan, l'Afnan)

Parmi les plus éminents de ceux qui ont quitté leur pays pour se joindre à Baha'u'llah il y avait Mirza Hasan, le grand Afnan, qui durant ses derniers jours eut l'honneur d'émigrer et de recevoir la faveur et la compagnie de son Seigneur. L'Afnan, parent du Bab, a été spécifiquement nommé par la Plume Suprême comme un rejeton de l'Arbre Saint. Encore jeune enfant il reçut sa part de bonté du Bab et montra un attachement extraordinaire à cette Beauté éblouissante. Avant même d'atteindre l'adolescence, il fréquentait la société des érudits et commençait à étudier les sciences et les arts. Il méditait jour et nuit sur les questions spirituelles les plus abstraites, et réfléchissait avec émerveillement sur les signes puissants de Dieu comme écrits dans le Livre de Vie. Il devint même parfaitement versé dans les sciences matérielles telles que les mathématiques, la géométrie et la géographie; en bref il était très approfondi dans plusieurs matières, conversant parfaitement sur les pensées anciennes et celles des temps modernes.

Marchand de profession, il passait très peu de temps pendant la journée et la soirée à ses affaires, dévouant la plus grande partie de son temps aux discussions et aux recherches. Il était réellement un érudit, un grand atout de la cause de Dieu parmi les érudits de son temps. Avec quelques phrases concises, il pouvait résoudre des questions très complexes. Ses discours étaient brefs, mais en eux-mêmes une sorte de miracle.

Bien qu'il devint d'abord un croyant du temps du Bab, c'est du temps de Baha'u'llah qu'il s'enflamma. Alors son amour de Dieu brûla tout voile obstruant et toute pensée inutile. Il fit tout ce qu'il put pour propager la foi de Dieu, devenant connu partout pour son amour ardent pour Baha'u'llah.

Je suis perdu, O Amour, possédé et abasourdi,
Fou d'amour suis-je, sur toute la terre.
On m'appelle le premier parmi les fous,
Alors qu'autrefois j'étais premier pour mon esprit et ma valeur...


Après l'ascension du Bab il eut le plus grand honneur de servir et de veiller sur l'épouse révérée et sainte du Seigneur béni. Il était en Perse, pleurant sa séparation d'avec Baha'u'llah quand son fils distingué devint, par mariage, un membre de la sainte famille. L'Afnan en fut réjoui. Il quitta la Perse et se hâta vers les faveurs protectrices de son Bien-Aimé. C'était un homme étonnant à voir, son visage était si lumineux que même ceux qui n'étaient pas croyants avaient l'habitude de dire qu'une lumière céleste brillait de son front.

Il partit pour un temps et séjourna à Beyrouth où il rencontra le distingué savant Khajih Findik. Ce personnage fit l'éloge de l'érudition du grand Afnan dans divers cercles, affirmant qu'un être d'un tel savoir étendu et varié était rare dans tout l'orient.

Plus tard, l'Afnan retourna en Terre Sainte, s'installant près de la Résidence de Bahji et dirigeant toutes ses pensées vers les aspects de la culture humaine. La plupart du temps il s'occupait en cherchant à percer les secrets des cieux, contemplant dans leurs détails les mouvements des étoiles. Il avait un télescope avec lequel il faisait ses observations chaque nuit. Il vivait une vie heureuse, sans souci et le coeur léger.

Dans le voisinage de Baha'u'llah, ses jours étaient sereins, ses nuits lumineuses comme le premier matin du printemps.

Mais il y eut le départ de ce monde du Bien-Aimé. La sérénité de l'Afnan fut ébranlée, sa joie fut changée en tristesse. L'affliction suprême était sur nous, la séparation nous consumait, les jours autrefois lumineux devinrent sombres comme la nuit, et toutes ces roses des autres heures n'étaient maintenant que poussière et décombres. Il vécut encore très peu de temps, son coeur se consumant, ses yeux déversant des larmes. Mais il ne pouvait plus supporter l'absence de son Bien-Aimé, et peu de temps après son âme renonça à cette vie et vola vers la vie éternelle, passa au Ciel de la réunion permanente et fut plongée dans l'océan de lumière. Que sur lui soient la plus grande miséricorde, la bonté immense et toutes les bénédictions pendant des âges et des âges. Sa tombe honorée est à 'Akka, à Manshiyyih.


7. Muhammad-'Aliy-i-Isfahani

Muhammad-'Ali d'Isfahan était parmi les premiers croyants, guidé à la Foi dès le tout début. Il était un des mystiques, sa maison était, pour eux et pour les philosophes, un lieu de rencontre. Noble, à l'esprit élevé, il était un des citoyens les plus respectés d'Isfahan, et était un hôte et un refuge pour les étrangers, riches ou pauvres. Il parlait avec enthousiasme, avec d'excellentes dispositions, il était indulgent, courtois, généreux, un bon compagnon, et il était connu dans toute la ville comme quelqu'un qui appréciait la vie.

Puis il fut guidé vers la Foi et s'enflamma au feu de l'arbre du Sinaï. Sa maison devint un centre d'enseignement, dédiée à la gloire de Dieu. Jour et nuit les croyants s'attroupaient comme attirés par une lampe allumée par un amour céleste. Dans cette maison, pendant une longue période, les versets sacrés furent chantés et des preuves claires mises en évidence. Même si tout cela était largement connu, Muhammad-'Ali ne fut pas importuné, parce qu'il était un parent de l'Imam-Jum'ih d'Isfahan. Cependant, à la fin la situation devint telle que l'Imam-Jum'ih lui-même le renvoya en lui disant: "Je ne peux plus vous protéger. Vous êtes en grave danger. La meilleure chose pour vous est de partir d'ici et d' entreprendre un voyage." Alors, il quitta sa maison, partit en Iraq et entra en présence du Désiré du monde. Il y resta quelque temps, progressant chaque jour; il avait de très petits moyens pour vivre mais il était heureux et satisfait. Un homme avec d'excellentes dispositions, il était plein de bienveillance pour les croyants comme pour les autres.

Quand Baha'u'llah et sa suite quittèrent Baghdad pour Constantinople, Muhammad-'Ali en fit partie et continua avec lui jusqu'à la Ville des Mystères, Andrinople. Il n'était pas de ceux qui changent d'avis et il conserva son immuabilité de coeur caractéristique. Malgré ce qui put arriver, il resta le même. A Andrinople il était heureux, sous la protection de Baha'u'llah. Il fit quelques affaires qui, quoique insignifiantes, lui apportèrent étonnamment des revenus abondants.

D'Andrinople, Muhammad-'Ali accompagna Baha'u'llah jusqu'à la forteresse de 'Akka, y fut mis en prison et fut compté parmi les disciples captifs de Baha'u'llah pour le restant de sa vie, atteignant la plus grande des distinctions, être en prison avec la Beauté Bénie. Il passait ses jours en complète félicité. Là aussi, il eut une petite affaire qui l'occupait du matin jusqu'à midi. Les après-midi, il prenait son samovar, le pliait dans une poche de couleur sombre confectionnée d'une selle et allait quelque part dans un jardin ou une prairie ou dans les champs et prenait son thé. Quelquefois on le trouvait dans la ferme de Mazra'ih ou encore dans le Jardin de Ridvan ou bien dans la villa où il avait l'honneur d'être en présence de Baha'u'llah .

Muhammad-'Ali considérait avec attention chaque bénédiction qui traversait son chemin. "Comme mon thé est délicieux aujourd'hui!" disait-il. "Quel parfum, quelle couleur! Comme cette prairie est belle, et les fleurs si lumineuses!" Il avait l'habitude de dire que tout, même l'air et l'eau, avait leur propre parfum particulier. Pour lui, les jours s'écoulaient dans un délice indescriptible.

Même les rois n'étaient pas aussi heureux que ce vieil homme. Les gens disaient: "Il est complètement libéré du monde, il vit heureux." Sa nourriture s'avérait être aussi la meilleure et sa maison située dans le meilleur quartier de 'Akka. Dieu miséricordieux! Il était là, un prisonnier et cependant dans le confort, la paix et la joie.

Muhammad-'Ali avait plus de quatre-vingt ans quand finalement il partit vers la lumière éternelle. Il avait été le destinataire de plusieurs tablettes de Baha'u'llah et de bonté sans fin sous toutes les conditions. Sur lui soit la gloire de Dieu, le Très Glorieux. Sur lui les myriades de bénédictions célestes; que Dieu lui accorde toujours le bonheur éternel. Son tombeau resplendissant est à 'Akka.


8. 'Abdu's-Salih, le Jardinier

Parmi ceux qui ont émigré et étaient les compagnons dans la Plus Grande Prison, il y avait Aqa 'Abdu's-aliCette âme d'excellence, un enfant de premiers croyants, venait d'Isfahan. Son père au coeur noble mourut et cet enfant grandit orphelin. Il n'y avait personne pour l'élever ou en prendre soin et il était la proie de tous ceux qui choisissaient de lui faire du mal. A l'adolescence et étant plus âgé il chercha son Bien-Aimé. Il émigra dans la Plus Grande Prison et là, à Ridvan, eut l'honneur d'être nommé jardinier. Dans cette tâche il était sans égal. Dans sa Foi, aussi, il était inébranlable, loyal, digne de confiance; en ce qui concerne son caractère, il était l'incarnation du verset sacré. "Vous êtes d'une nature noble". [viii] C'est ainsi qu'il obtint la distinction d'être jardinier dans le jardin de Ridvan, et ainsi recevoir la plus grande bonté de tous: il était en présence de Baha'u'llah presque quotidiennement.

Car le Plus Grand Nom fut retenu prisonnier et enfermé dans la forteresse de 'Akka pendant neuf ans. A tout moment, à la fois dans la caserne et par la suite, à l'extérieur de la maison, la police et les farrashes Le gardaient sous surveillance constante. La Beauté Bénie vivait dans une très petite maison et Elle ne posa jamais le pied en dehors de cet étroit logis, car ses oppresseurs épiaient continuellement à la porte. Cependant, lorsque neuf années se furent écoulées, durée fixée et prédéterminée, et à cette époque, contre la volonté rancunière du tyran, 'Abdu'l-Hamid, et de tous ses subordonnés, Baha'u'llah sortit de la forteresse avec autorité et pouvoir, et s'installa dans un manoir au-delà de la ville.

Bien que la police du Sultan 'Abdu'l-Hamid fut plus dure que jamais, bien qu'il insista constamment sur l'emprisonnement strict de son Captif, la Beauté Bénie vivait maintenant, comme chacun sait, avec tout le pouvoir et la gloire. Baha'u'llah passait une partie de son temps dans le Manoir et aussi dans le village rural de Mazra'ih. De temps en temps, Il séjournait à Haifa et occasionnellement sa tente était plantée sur les hauteurs du mont Carmel. Les amis de partout se présentaient pour obtenir une audience. Les gens et les autorités gouvernementales étaient témoins de tout, cependant personne ne soufflait mot. Et ceci est un des plus grands miracles de Baha'u'llah: que Lui, un captif, se soit entouré d'une armure et exerce un pouvoir. La prison se changea en palace, la geôle elle-même devint un jardin d'Eden. Ceci ne s'était jamais produit auparavant dans l'histoire; aucun âge antérieur n'a été témoin d'une telle chose: qu'un homme emprisonné puisse se déplacer avec autorité et pouvoir: que quelqu'un d'enchaîné puisse porter la renommée de la cause de Dieu aussi haut, puisse gagner de splendides victoires à l'Est et à l'Ouest, et puisse, par sa plume Toute-Puissante, subjuguer le monde. Telle est le caractère distinct de cette suprême Théophanie.

Un jour, les dirigeants du gouvernement, les piliers du pays, les ulémas de la ville, les chefs mystiques et intellectuels vinrent au Manoir. La Beauté Bénie ne fit aucune attention à eux. Ils ne furent pas admis en Sa présence, et Il ne s'informa pas à leur sujet. Je m'assis avec eux et leur tint compagnie pendant plusieurs heures, puis ils retournèrent d'où ils étaient venus.

Bien que le décret royal décrivit spécialement que Baha'u'llah devait être un prisonnier solitaire dans la forteresse de 'Akka, dans une cellule, sous une garde perpétuelle, qu'Il ne devait jamais sortir, qu'Il ne devait jamais voir un seul des croyants, en dépit d'un tel décret, d'un tel ordre rigoureux, sa tente était dressée avec majesté sur les hauteurs du mont Carmel. Quelle plus grande manifestation de pouvoir pouvait-il y avoir, que de la prison même la bannière du Seigneur soit levée si haut et qu'elle flotte pour être vue du monde entier! Loué soit le Possesseur d'une telle majesté et puissance, loué soit-Il, Celui qui est armé du pouvoir et de la gloire, loué soit-Il, Celui qui a vaincu ses adversaires quand Il était captif dans la prison de 'Akka!

En résumé: 'Abdu's-Salih vivait sous une étoile favorable car il était régulièrement en présence de Baha'u'llah. Il se réjouissait de la distinction de servir comme jardinier pendant de nombreuses années et il fut toujours loyal, sincère et ferme dans sa foi. Il était humble en présence de tous les croyants, durant toute cette période il ne heurta ni n'offensa personne. Et finalement il quitta son jardin et se hâta vers la grâce sans limite de Dieu.

La Beauté Ancienne était très satisfaite de 'Abdu's-Salih et, après son ascension, révéla une tablette de visitation en son honneur, Il prononça une allocution le concernant qui fut transcrite et publiée avec d'autres Ecrits. Sur lui soit la gloire du Très Glorieux! Sur lui soient la douceur et les faveurs du Royaume élevé.


9. Ustad Isma'il

Ustad Isma'il, le constructeur, était encore un autre membre de cette compagnie bénie. Il était le contremaître des constructions du Farrukh Khan (Aminu'd-Dawlih) à Tihran, vivant heureux et prospère, un homme de rang élevé, bien vu de tous. Mais il donna son coeur à la Foi, et fut capturé par elle, jusqu'à ce que sa sainte passion consuma chaque voile qui l'en séparait. Puis, laissant toute précaution de côté, il fut connu dans tout Tihran comme un pilier des baha'is.

Au début, Farrukh Khan le défendit habilement. Mais le temps passant, il le convoqua et lui dit, "Ustad, vous m'êtes très cher, je vous ai donné ma protection et je me suis tenu à vos côtés autant que j'ai pu. Mais le Shah est au courant en ce qui vous concerne et vous savez quel tyran sanguinaire il est. J'ai peur qu'il ne vous attrape sans avertissement et ne vous pende. La meilleure chose pour vous est de partir en voyage. Quittez ce pays, allez ailleurs et fuyez ce danger".

Calme, heureux, Ustad quitta son travail, ferma les yeux sur ses biens et partit pour l'Iraq où il vécut dans la pauvreté. Il venait de se marier et aimait infiniment son épouse. La mère de sa femme arriva et par un moyen détourné obtint son autorisation pour ramener sa fille à Tihran, soit disant pour une visite. Aussitôt qu'elle atteignit Kirmanshah elle se rendit chez le mutjahid et lui dit que son gendre, ayant renié sa religion, sa fille ne pouvait être son épouse selon la loi. Le mutjahid arrangea le divorce et maria la fille à un autre homme. Quand cette nouvelle arriva à Baghdad, Isma'il, inébranlable comme toujours, se mit à rire. "Que Dieu soit loué", dit-il, "il ne me reste plus rien sur ce sentier. J'ai tout perdu, y compris mon épouse. J'ai pu Lui donner tout ce que je possédais".

Quand Baha'u'llah quitta Baghdad et voyagea vers Rumelia, les amis restèrent en arrière. Alors, les habitants de Baghdad se levèrent contre ces croyants sans défense, les envoyant comme captifs à Mossoul. Ustad était vieux et faible, mais il partit à pied sans provisions pour son voyage, traversa les montagnes et les déserts, les vallées et les collines, et enfin arriva à la Plus Grande Prison. Une fois, Baha'u'llah avait écrit pour lui un poème de Rumi et lui avait dit de se tourner vers le Bab et chanter les paroles comme une mélodie. Et comme il errait durant les longues nuits sombres, Ustad chantait ces vers:

Je suis perdu, O amour, obsédé et hébété,
Fou d'amour suis-je, sur toute la terre.
On m'appelle le premier parmi les fous,
Alors qu'autrefois j'étais le premier pour mon esprit et ma valeur.

O Amour, qui m'a vendu ce vin, [ix]
O Amour, pour qui je brûle et saigne,
Amour, pour qui je pleure et me consume -
Toi le Joueur de flûte, moi le roseau.

Si Tu désires que je vive,
A travers moi envoie ton souffle divin.
Le toucher de Jésus Tu me donneras
A moi, qui ait atteint l'âge de la mort.

Toi, la Fin et le Commencement,
Toi à l'intérieur et Toi à l'extérieur
De tous les yeux Tu te caches bien,
Et cependant dans tous les yeux Tu habites.


Il était comme un oiseau aux ailes brisées mais il avait ce chant qui lui permettait d'aller de l'avant vers son unique amour véritable. Furtivement il approcha de la forteresse et y entra mais il était exténué, épuisé. Il resta ainsi quelques jours puis il parvint en présence de Baha'u'llah, après quoi il dut chercher un logement à Haifa. Il se rendit à Haifa mais n'y trouva aucun havre, ni nid ou trou, ni eau, ni grain de maïs. Finalement, il fit son logement d'une cave en dehors de la ville. Il acquit un petit plateau sur lequel il installa des bagues en terre cuite et quelques dés à coudre, des épingles et autres breloques. Chaque jour, du matin à midi, il colportait tout cela, allant à l'aventure. Certains jours, ses gains se montaient à vingt paras [x], d'autres à trente; et quarante les meilleurs jours. Puis il allait chez lui dans sa cave et se contentait d'un morceau de pain. Toujours il exprimait ses remerciements, disant: "Loué soit Dieu que j'ai obtenu une telle faveur et une telle grâce; que j'ai été séparé de mes amis comme des étrangers, et que j'ai trouvé refuge dans cette cave. Maintenant je suis de ceux qui ont tout donné, pour acheter le Saint Joseph sur la place du marché. Quelle bonté pourrait être plus grande que celle-ci!"

Telle était sa condition quand il mourut. Tant et tant de fois on entendit Baha'u'llah exprimer combien Il était satisfait de Ustad Isma'il. Que les bénédictions l'entourent et que le regard de Dieu soit sur lui. Que les salutations soient avec lui ainsi que les louanges. Sur lui soit la Gloire du Très Glorieux.


10. Nabil-i-Zarandi

Photo: Nabil-i-Azam Muhammad-i-Zarandi


Un autre personnage qui émigra de son pays natal pour être près de Baha'u'llah était le grand Nabil [xi]. Dans la fleur de sa jeunesse, il fit ses adieux à sa famille à Zarand et avec l'aide divine commença à enseigner la Foi. Il devint le chef de l'armée des amoureux et dans sa recherche il quitta l'Iraq persan pour la Mésopotamie, mais ne put trouver celui qu'il cherchait. Car le Bien-Aimé était alors au Kurdistan, habitant dans une cave à Sar-Galu; et là, absolument seul sur cette vaste terre, sans compagnon, sans ami, sans une âme attentive, Il communiquait avec la beauté qui reposait dans son propre coeur. Toutes nouvelles de Lui étaient complètement interrompues; l'Iraq était éclipsé et en deuil.

Quand Nabil découvrit que la flamme qui avait été allumée et entretenue était presque éteinte, que les croyants étaient peu nombreux, que Yahya [xii] s'était glissé dans un trou où il restait engourdi et inerte, et qu'un froid hivernal eut pris le dessus, il se sentit obligé de partir pour Karbila. Amèrement affligé, Il resta là jusqu'à ce que la Beauté Bénie retourne du Kurdistan et prit le chemin de Baghdad. A ce moment il y eut une joie sans bornes; dans le pays, chaque croyant reprit goût à la vie; parmi eux il y avait Nabil, qui se précipita en présence de Baha'u'llah et devint le bénéficiaire de grandes faveurs. Maintenant, il passait ses journées dans la joie, écrivant des poèmes pour célébrer les louanges de son Seigneur. Il était un poète talentueux et son langage était très éloquent; c'était un homme de courage et enflammé d'un amour passionné.

Après un certain temps il retourna à Karbila, puis revint à Baghdad et de là alla en Perse. Parce qu'il était associé à Siyyid Muhammad, il fut induit en erreur et douloureusement affligé et éprouvé; mais comme les étoiles filantes, il devint un projectile qui chassa les idées sataniques [xiii], il repoussa les chuchotements néfastes et retourna à Baghdad, où il trouva le repos à l'ombre de l'Arbre Saint. Plus tard, on lui conseilla de visiter Kirmanshah. Il retourna encore une fois et pendant chaque voyage il put rendre un service.

Puis Baha'u'llah et sa suite quittèrent Baghdad, "le havre de Paix", pour Constantinople, la "Cité de l'islam". Après son départ, Nabil revêtit la robe de derviche et partit à pied, rattrapant le convoi sur la route. A Constantinople il reçut les instructions de retourner en Perse et d'y enseigner la cause de Dieu; de voyager également à travers tout le pays et d'informer les croyants des villes et des villages de tout ce qui s'était passé. Quand cette mission fut remplie, et que les tambours de "Ne suis-je pas votre Seigneur" eurent roulé - car c'était "l'année quatre-vingts" [xiv] - Nabil courut vers Andrinople en criant: "Oui en vérité, Tu es! Oui en vérité!" et "Seigneur, Seigneur, me voici!"

Il entra en la présence de Baha'u'llah et but le vin de l'obéissance et du respect. Alors il reçut les ordres spécifiques de voyager partout, et dans chaque région de lancer l'appel que Dieu s'était manifesté; de répandre la bonne nouvelle que le Soleil de Vérité s'était levé. Il était réellement en feu, conduit par un amour indocile. Avec une grande ferveur, il parcourait les pays, apportant le meilleur des messages et revivifiant les coeurs. Il s'enflammait comme une torche dans chaque assemblée, il était l'étoile de chaque réunion, à tous ceux qui venaient il tendait la coupe enivrante.

Il voyagea à un rythme forcené et enfin arriva à la Forteresse de 'Akka. En ces temps-là, les restrictions étaient exceptionnellement sévères. Les portes étaient closes, les routes étaient fermées. Portant un déguisement, Nabil arriva à la porte de 'Akka. Siyyid Muhammad et ses misérables complices se précipitèrent immédiatement chez le gouverneur et donnèrent des informations contre le voyageur. "Il est persan", ils rapportèrent "Il n'est pas, semble-t-il, un homme de Bukhara. Il est venu ici pour prendre des nouvelles de Baha'u'llah". Les autorités le chassèrent.

Nabil, désespéré, alla dans la ville de Safad. Plus tard il se rendit à Haifa où il s'installa dans une grotte sur le mont Carmel. Il vécut séparé des amis comme des étrangers, se lamentant nuit et jour, gémissant et chantant des prières. Là, il resta retiré du monde, et attendit que les portes s'ouvrent. Quand le temps prédestiné de la captivité prit fin, que les portes furent grandes ouvertes et que l'Opprimé sortit en beauté, avec majesté et gloire, Nabil se hâta vers Lui d'un coeur joyeux. Puis il devint lui-même comme une bougie, se consumant avec l'amour de Dieu. Jour et nuit, il chantait les louanges du Bien-Aimé des deux mondes et de ceux autour de son seuil, écrivant des versets sous la forme pentamètre et hexamètre. Il composait des poèmes lyriques et de longues odes. Presque quotidiennement il était admis en présence de la Manifestation. [xv]

Cela continua jusqu'au jour de l'ascension de Baha'u'llah. Face à cette affliction suprême, cette calamité écrasante, Nabil sanglota et trembla, poussa des cris vers le Ciel. Il découvrit que la valeur numérique du mot "shidad" - année de tension - était 309 et il fut évident que Baha'u'llah avait prédit ce qui venait d'arriver [xvi].

Complètement abattu, désespéré d'être séparé de Baha'u'llah, fiévreux, versant des larmes, Nabil était dans un tel état que quiconque le voyait était abasourdi. Il lutta mais son seul désir était de quitter cette vie. Il ne pouvait plus endurer la souffrance; son désir ardent l'embrasait; il ne pouvait plus supporter la douleur brûlante. Et ainsi il devint le roi des cohortes de l'amour, et il se jeta dans la mer.

Avant de se sacrifier, il écrivit, l'année de sa mort, un seul mot: "noyé." [xvii] Puis il donna sa vie pour le Bien-Aimé, et fut délivré de son désespoir et plus jamais éloigné.

Cet homme distingué était un érudit, un sage et très éloquent. Son génie inné était pure inspiration, son don poétique, comme une rivière de cristal. En particulier son poème "Baha, Baha!" fut écrit dans une véritable extase. A travers toute sa vie, depuis sa prime jeunesse jusqu'à ce qu'il soit faible et vieux, il passa tout son temps à servir et adorer le Seigneur. Il supporta les privations, il survécut à beaucoup d'infortunes, et souffrit d'afflictions. Il entendit des lèvres de la Manifestation des choses merveilleuses. Il vit les lumières du paradis; son plus cher désir fut réalisé. Et, à la fin, quand l'Astre du jour du monde se coucha, il ne put plus le supporter, et se jeta dans la mer. Les eaux du sacrifice se refermèrent sur lui; il fut noyé et il atteignit, enfin, le Très Haut.

Sur lui les bénédictions abondantes; sur lui la tendre miséricorde. Puisse-t-il gagner de grandes victoires, et une grâce évidente dans le Royaume de Dieu.


11. Darvish Sidq-'Ali

Aqa Sidq-'Ali était encore un de ceux qui avaient quitté leur pays natal, voyagé pour voir Baha'u'llah et avait été jeté en prison. C'était un derviche; un homme qui vivait libre et détaché des amis comme des étrangers. Il appartenait au monde des mystiques et était un homme de lettres. Il revêtit pendant un certain temps la robe de pauvreté, buvant le vin de la loi et suivant la voie [xviii], mais, contrairement aux autres sufis, il ne consacra pas sa vie au haschisch; au contraire, il se lava des vaines imaginations et ne rechercha que Dieu, parla à Dieu et suivit le chemin de Dieu.

Il avait un don de poésie et écrivait des poèmes de louanges à Celui que le monde avait opprimé et rejeté. Parmi ces poèmes, il y en a un qui fut écrit pendant son emprisonnement dans la caserne de 'Akka, dont le couplet principal dit:

Cent coeurs ont été pris au piège de Tes boucles
Et les coeurs pleuvent quand Tu secoues Ta chevelure.


Cette âme libre et indépendante découvrit, à Baghdad, la trace du Bien-Aimé introuvable. Il fut témoin du lever de l'Etoile du jour au-dessus de l'horizon de l'Iraq et reçut la bonté de ce lever de soleil. Il fut sous le charme de Baha'u'llah et fut envoûté par ce tendre compagnon. Bien qu'il fut un homme calme, conservant sa sérénité à tout moment, ses propres membres étaient comme de nombreuses langues criant leur message. Quand la suite de Baha'u'llah fut prête à quitter Baghdad, il supplia pour être autorisé à partir avec eux comme valet. Toute la journée, il marchait à côté du convoi et quand la nuit tombait, il s'occupait des chevaux. Il travaillait de tout son coeur. Ce n'est qu'à minuit passé qu'il regagnait son lit et s'allongeait pour se reposer; son manteau était son lit et une brique séchée au soleil son oreiller.

Pendant qu'il voyageait, rempli d'amour ardent, il chantait des poèmes et réjouissait tous les amis. Son nom était vraiment bien choisi [xix], car il n'était que pure candeur et vérité; il était l'amour même; il avait un coeur chaste et adorait Baha'u'llah. Dans sa haute position, celle de valet, il régnait comme un roi et avait plus de gloire que les souverains de la terre. Il était assidu au service de Baha'u'llah; en toute chose il était honnête et fidèle.

Le convoi des amoureux continua, atteignit Constantinople, passa à Andrinople et finalement arriva à la prison de 'Akka. Sidq-'Ali était présent tout le long du chemin, servant fidèlement son Commandeur.

Dans la caserne, Baha'u'llah réserva une soirée spéciale qu'Il consacra au derviche Sidq-'Ali. Il écrivit que chaque année, lors de cette nuit, les derviches devraient préparer un endroit de rencontre devant ressembler à un jardin de fleurs et se rassembler pour faire mention de Dieu.

Il continua en disant que les "derviches" ne sont pas ces personnes qui errent, passant leurs nuits et leurs jours en bagarres et en folie; mais ce terme, dit-Il, désigne plutôt ceux qui sont entièrement coupés de tous sauf de Dieu, qui s'attachent à ses lois, restent fermes dans sa foi, fidèles à son alliance et constants dans leur adoration. Ce n'est pas un nom pour ceux qui, comme disent les persans, errent comme des errants, désorientés, ont l'esprit perturbé, sont un fardeau pour les autres et les plus grossiers et les plus indécents de toute l'humanité. Cet éminent derviche passa sa vie entière sous la protection favorable de Dieu. Il était entièrement détaché de toutes les choses de ce monde. Il était prévenant dans son service, et servait les croyants de tout son coeur. Il était le serviteur de tous et fidèle au Seuil sacré.

Puis, vint l'heure à laquelle, non loin de son Seigneur, il déchira le vêtement de vie, et aux yeux physiques passa dans l'ombre, bien qu'aux yeux de l'esprit il se rendit vers ce qui est clair comme le jour. Alors, il s'assit là sur un trône de gloire éternelle. Il s'échappa de la prison de ce monde et planta sa tente en un lieu vaste et spacieux. Que Dieu le garde toujours près de Lui et le bénisse dans ce royaume mystique par la réunion éternelle et la vision béatifiée; Puisse-t-il être enveloppé de voiles de lumière. Sur lui soit la gloire de Dieu, le Très-Glorieux. Sa tombe demeure à 'Akka.


12. Aqa Mirza Mahmud et Aqa Rida

Photo: Mirza Mahmud Kashani
Photo: Muhammad Rida Shirazi, connu sous le titre de Aqa Rida


Ces deux âmes bénies, Mirza Mahmud de Kashan et Aqa Rida de Shiraz étaient comme deux lampes allumées par l'amour de Dieu avec l'huile de Sa connaissance. Entourés depuis leur enfance des faveurs divines, ils réussirent à rendre toutes sortes de services pendant cinquante cinq ans. Leurs services sont innombrables, incommensurables.

Quand la suite de Baha'u'llah quitta Baghdad pour Constantinople, Il fut accompagné par une grande foule. Sur le chemin, ils durent faire face à la famine. Ces deux âmes avançaient à grands pas à pied, en tête du howdah que montait Baha'u'llah et parcouraient sept à huit farsakhs chaque jour. Fatigués et affaiblis quand ils atteignaient l'endroit de halte; aussi épuisés qu'ils étaient, ils se mettaient immédiatement à préparer le repas, s'assurant le confort des croyants. Les efforts qu'ils faisaient dépassaient réellement ce que le corps peut supporter. Parfois ils ne dormaient pas plus de deux ou trois heures en vingt quatre heures; car, une fois que les amis avaient mangé, ils devaient ranger et laver la vaisselle et les ustensiles, ce qui les occupait jusqu'à minuit. Alors seulement ils allaient se reposer. Au lever du jour, ils se levaient, ramassaient toutes les affaires et se mettaient devant le howdah de Baha'u'llah. Voyez quel service indispensable ils étaient capables de rendre et pour quelle bonté ils avaient été choisis du début du voyage à Baghdad. A l'arrivée à Constantinople, ils marchaient près de Baha'u'llah; ils rendaient heureux chacun des amis; ils apportaient repos et confort à tous; ils préparaient tout ce qu'on leur demandait.

Aqa Rida et Mirza Mahmud étaient la véritable essence de l'amour de Dieu, entièrement détachés de tout sauf de Dieu. Pendant tout ce temps personne n'a jamais entendu l'un d'eux élever la voix.

Ils n'ont jamais blessé ni offensé personne. Ils étaient dignes de confiance, loyaux et fidèles. Sur eux Baha'u'llah répandit des bénédictions. Ils étaient continuellement en Sa présence et Il leur exprimait Sa reconnaissance. Mirza Mahmud était jeune quand il arriva de Kashan à Baghdad. Aqa Rida devint un croyant à Baghdad. Leur état spirituel était indescriptible.

Il y avait, à Baghdad, un groupe de sept croyants qui habitait dans une seule pièce étroite parce qu'ils étaient sans ressources. Ils pouvaient difficilement se maintenir en vie, mais ils étaient si spirituels, si heureux qu'ils se croyaient au Ciel. Parfois ils chantaient des prières tout le long de la nuit, jusqu'au lever du jour. Pendant la journée ils allaient travailler et à la tombée de la nuit l'un ramenait dix paras, un autre peut-être vingt paras, d'autres quarante ou cinquante. Ces sommes étaient dépensées pour le repas du soir. Certains jours, l'un d'entre eux gagnait vingt paras tandis que les autres ne gagnaient rien du tout. Celui qui avait l'argent achetait quelques dattes et les partageait avec les autres; c'était le dîner de sept personnes. Ils étaient parfaitement satisfaits de leur vie frugale, suprêmement heureux.

Ces deux hommes honorés vouaient leurs jours à tout ce qui était le meilleur pour la vie humaine: ils avaient des yeux qui voient; ils étaient intelligents et conscients; ils avaient des oreilles qui entendent, et avaient un langage pur. Leur unique désir était de satisfaire Baha'u'llah. Pour eux, rien d'autre que le service à Son Seuil sacré n'était un cadeau.

Après le temps de la suprême affliction, ils se consumaient de chagrin comme des bougies s'éteignant; ils attendaient la mort et restaient fermes dans l'alliance, travaillaient dur et bien à répandre la foi de l'Etoile du Matin.

Ils étaient des compagnons proches et fidèles de 'Abdu'l-Baha et on pouvait compter sur eux pour tout. Ils étaient toujours modestes, humbles, sans prétention, discrets. Durant cette longue période, ils n'ont jamais prononcé un mot les concernant eux-mêmes.

Et à la fin, pendant l'absence de 'Abdu'l-Baha, ils prirent leur envol pour le Royaume de gloire impérissable. J'étais très triste parce que je n'étais pas avec eux quand ils moururent. Bien qu'absent physiquement, j'étais présent par le coeur et j'étais en deuil: mais de l'extérieur je ne leur avais pas dit adieu; c'est pourquoi je suis peiné.

Que sur eux deux soient les salutations et les louanges, que sur eux soient la compassion et la gloire. Puisse Dieu leur donner un toit au Paradis, à l'ombre du Sadratu'l-Muntaha. Puissent-ils être immergés dans des rayons de lumière, juste derrière leur Seigneur, le Fort, le Tout-Puissant.


13. Pidar-Jan de Qazvin

Pidar-Jan était parmi ces croyants qui avaient émigré à Baghdad. C'était un homme saint d'un certain âge, amoureux du Bien-Aimé; dans le jardin de l'amour divin, il était comme une rose fraîchement éclose. Il arriva à Baghdad et passa ses journées et ses nuits en communion avec Dieu et chantant des prières et, tout en marchant sur la terre, il parcourait les hauteurs du Ciel.

Pour obéir à la loi de Dieu, il fit du commerce car il ne possédait rien. Il nouait quelques paires de chaussettes, les prenait sous son bras et les colportait à travers les rues et les bazars, mais les voleurs lui volaient sa marchandise. Finalement il fut obligé d'étendre ses chaussettes sur les paumes de ses mains ouvertes tout en marchant. Mais il se mettait alors à chanter des prières et, un jour, il eut la surprise de voir qu'on lui avait volé, devant ses yeux, les chaussettes posées sur ses deux mains. Ce monde lui paraissait trouble, car il voyageait dans un autre monde. Il vivait en extase; il était un homme ivre, aveuglé.

C'est ainsi qu'il vécut en Iraq pendant un certain temps. Presque quotidiennement il était admis en présence de Baha'u'llah. Son nom était 'Abdu'llah mais les amis lui donnèrent le titre de Pidar-Jan - Père chéri - car il était un père aimant pour tous. Finalement, sous l'attention protectrice de Baha'u'llah, il prit son envol vers le "trône de vérité, en présence du Roi puissant." [xx]

Puisse Dieu parfumer sa sépulture avec la pluie abondante de Sa miséricorde et jeter sur lui le regard de la compassion divine. Sur lui soient les salutations et louanges.


14. Shaykh Sadiq-i-Yazdi

Un autre de ceux qui émigrèrent à Baghdad était Shaykh Sadiq de Yazd, un homme très estimé, et aussi droit que son nom, Sadiq [xxi]. Il était un arbre très élevé dans les palmeraies du ciel, une étoile brillante dans les cieux de l'amour de Dieu.

Ce fut pendant la période de l'Iraq qu'il se hâta vers la présence de Baha'u'llah. Son détachement des choses de ce monde et son attachement à la vie de l'esprit sont indescriptibles. Il était l'amour incarné, la tendresse personnifiée. Jour et nuit, il se souvenait de Dieu. Absolument inconscient de ce monde et de tout, il s'appuyait continuellement sur Dieu, restant submergé en supplications et prières. La plupart du temps, des larmes coulaient de ses yeux. La Beauté Bénie le choisit pour des faveurs spéciales et chaque fois qu'Il portait Son attention vers Sadiq, Sa tendresse affectueuse se lisait clairement dans Ses yeux.

Un jour les nouvelles arrivèrent que Sadiq était mourant. Je me rendis à son chevet et le trouvai expirant son dernier souffle. Il souffrait d'occlusion intestinale, de douleurs abdominales et était enflé. Je courus chez Baha'u'llah et Lui décrivis dans quelle condition il était.

"Allez," dit-Il. "Placez votre main sur la partie distendue et dites ces mots: "O Toi le Guérisseur!" [xxii]

Je retournai. Je vis que la partie enflée avait la grosseur d'une pomme; elle était dure comme une pierre, en mouvement constant, bougeant et roulant comme un serpent. Je plaçai ma main dessus; me tournai vers Dieu et L'implorant humblement, répétai les mots, "O Toi le Guérisseur!". Instantanément l'homme malade se leva. L'occlusion intestinale disparut, l'enflure était partie.

Cet esprit personnifié vécut heureux à Baghdad jusqu'au jour où le convoi de Baha'u'llah dirigea son chemin en dehors de la ville. Comme abattu, Sadiq resta derrière dans cette ville. Mais son attente le meurtrit si passionnément qu'après l'arrivée de Baha'u'llah à Mosoul, il ne put endurer la séparation plus longtemps. Sans chaussures, sans chapeau, il courut sur les traces du courrier allant à Mosoul; il courut et courut jusqu'à ce que, dans cette plaine stérile, sans pitié pour lui-même, il tomba d'inanition.

Que Dieu lui donne à boire "d'une coupe de vin trempée dans la fontaine de camphre" [xxiii] et fasse descendre l'eau cristalline sur sa tombe. Dans ce désert, que Dieu parfume son corps de musc et y fasse descendre des rayons et des rayons de lumière.


15. Shah-Muhammad-Amin

Shah-Muhammad, qui avait le titre de Amin, le dépositaire, était parmi les premiers croyants et le plus profondément amoureux. Il avait écouté les paroles divines dans la fleur de sa jeunesse et avait tourné son visage vers le Royaume. Il avait écarté de son regard les voiles des vaines suppositions et avait atteint le désir de son coeur; ni les caprices courants parmi les hommes ni les reproches dont il était la cible ne le détournèrent. Il demeura stoïque et fit face à un océan de troubles, rendu fort par la puissance du jour de l'Apparition, il affronta ceux qui essayaient de le contrecarrer et de barrer son chemin. Plus ils cherchaient à installer le trouble dans son esprit et plus il devenait fort, plus ils le tourmentaient et plus il faisait de progrès. C'était un captif du visage de Dieu, esclave de la beauté du Très-Glorieux, une flamme de l'amour de Dieu, une fontaine de la connaissance de Dieu.

L'amour consumait son coeur ne lui laissant aucune tranquillité, et quand il ne put plus accepter l'absence de son Bien-Aimé il quitta sa ville natale, la province de Yazd. Le désert de sable était pour lui comme un tapis de soie sous ses pieds, il était léger comme le souffle du vent, il traversa les montagnes et les plaines sans fin jusqu'à ce qu'il se trouva à la porte de son Amour. Il s'était libéré du piège de la séparation et en Iraq il entra en présence de Baha'u'llah.

Son chemin vers la maison du Bien-Aimé de tous étant accompli, il fut vidé de toutes pensées, libéré de toutes préoccupations et devint le bénéficiaire de faveurs et de grâces sans limites. Il resta quelques jours en Iraq et reçut les instructions de retourner en Perse. Là il resta un certain temps, fréquentant les croyants. Son souffle pur stimula à nouveau chacun d'eux, les rendant plus attirés encore par la Foi et plus actifs et plus impatients qu'avant.

Plus tard il arriva à la Plus Grande Prison avec Mirza Abu'l- Hasan, le second Amin. Durant son voyage, il rencontra de sévères difficultés car il était extrêmement difficile de trouver un chemin pour la prison. Finalement il fut reçu par Baha'u'llah dans le bain public. Mirza Abu'l-Hasan était tellement accablé par la présence majestueuse de son Seigneur qu'il trembla, trébucha et tomba sur le sol ; sa tête fut blessée et le sang coula.

Amin, Shah-Muhammad, reçut le titre du Dépositaire et les bontés se déversèrent sur lui. Rempli d'empressement et d'amour, prenant avec lui les tablettes de Baha'u'llah, il se hâta de retourner en Perse, où, à tout moment, digne de confiance, il travailla pour la Cause. Ses services étaient remarquables, et il était une consolation pour les coeurs des croyants. Il était incomparable en terme d'énergie, d'enthousiasme et de zèle, et aucun homme ne pouvait l'égaler dans le service. Il était un havre parmi les gens, connu partout pour sa dévotion au Seuil sacré, largement acclamé par les amis.

Il ne se reposait jamais, même un instant. Il ne passa pas une nuit dans la facilité, ni ne se reposa sur l'oreiller du confort.

Il était continuellement en route, s'élançant comme le font les oiseaux, courant comme un cerf, invité du désert de la solitude, seul et rapide. Il apporta la joie à tous les croyants; à tous, sa venue apportait de bonnes nouvelles; pour chaque chercheur il était un symbole et un témoignage. Il était amoureux de Dieu, errant dans le désert de l'amour de Dieu. Comme le vent, il voyagea à travers les plaines, sans repos sur les hauteurs des collines. Il était dans un pays différent chaque jour et sur une autre terre à la tombée de la nuit. Il ne se reposa jamais, il ne resta jamais tranquille. Il était toujours debout pour servir.

Mais ils le firent prisonnier en Adhirbayjan, dans la ville de Miyandu'ab. Il fut la proie de quelques rustres kurdes, une bande hostile qui ne posèrent aucune question à l'homme innocent et sans défense. Croyant que cet étranger, comme les autres étrangers, voulait du mal au peuple kurde et le prenant pour un bon à rien, ils le tuèrent.

Quand les nouvelles de son martyr atteignirent la Prison, tous les prisonniers pleurèrent et versèrent des larmes pour lui, cet homme si résigné et sans défense comme il le fût pendant ses dernières heures. Même en présence de Baha'u'llah, les signes de tristesse étaient visibles. Une tablette, infiniment tendre, fut révélée par la Plume Suprême, commémorant l'homme qui mourut sur cette plaine désastreuse, et beaucoup d'autres tablettes le concernant furent envoyées.

Aujourd'hui, à l'ombre de la clémence de Dieu, il demeure dans les Cieux lumineux. Il communie avec les oiseaux de sainteté et est immergé dans la lumière à la cours de splendeurs. Son souvenir et les louanges à son nom se perpétueront à jamais, dans les pages des livres et sur la langue et les lèvres des hommes.

Que sur lui soient les salutations et les louanges! Que sur lui soit la gloire du Tout-Clément de Dieu.


16. Mashhadi Fattah

Mashhadi Fattah était l'esprit personnifié. Il était la dévotion même. Frère de Haji 'Ali-'Askar - de la même lignée - il connut la Foi par ce dernier. Comme les jumeaux, Castor et Pollux, tous les deux restèrent ensemble au même endroit et furent illuminés par la lumière de la foi.

Dans toutes choses, ils étaient unis comme un couple, ils partageaient la même certitude et la même foi, la même conscience et allèrent de l'Adhirbayjan à Andrinople, émigrant en même temps. Dans toutes les circonstances de leur vie, ils vécurent comme un seul individu; leur disponibilité, leur but, leur religion, leur caractère, leur comportement, leur foi, leur certitude, leur connaissance n'étaient qu'une. Même dans la Plus Grande Prison ils étaient continuellement ensembles.

Mashhadi Fattah possédait quelques marchandises; c'était tout ce qu'il avait dans le monde. Il les avait confiées à des personnes à Andrinople, mais plus tard ces gens peu vertueux disparurent avec ces marchandises. Ainsi, sur le chemin de Dieu, il perdit tout ce qu'il possédait. Il passait ses journées, pleinement content, dans la Plus Grande Prison. Il était d'un dévouement total; jamais personne n'entendit une syllabe venant de lui indiquant qu'il existait. Il était toujours dans un certain coin de la prison, méditant en silence, occupé dans le souvenir de Dieu; à tout moment vigilant et soucieux, en état de supplication.

Puis arriva l'Affliction suprême. Il ne put tolérer la souffrance du départ de Baha'u'llah, et après l'ascension de Baha'u'llah il mourut de douleur. Béni soit-il; encore béni soit-il. Heureuses nouvelles pour lui; encore, heureuses nouvelles pour lui. Que sur lui soit la gloire du Très-Glorieux.


17. Nabil de Qa'in

Cet homme distingué, Mulla Muhammad-'Ali [xxiv] fut un de ceux dont le coeur avait été attiré par Baha'u'llah avant la déclaration du Bab; ce fut à ce moment-là qu'il but le vin rouge de la connaissance des mains du Porteur de la coupe de grâce.

Un prince, le fils de Mir Asadu'llah Khan, prince de Qa'in, reçut l'ordre de rester à Tihran comme otage politique. Il était jeune, loin de l'affection de son père Bien-Aimé et Mulla Muhammad-'Ali était son tuteur et son gardien. Comme le jeune homme était un étranger à Tihran, la Beauté Bénie lui montra beaucoup de gentillesse. Plusieurs nuits le jeune prince fut invité dans la maison de Baha'u'llah et Mulla Muhammad-'Ali l'accompagnait. Cela se passait avant la déclaration du Bab.

Ce chef de tous les amis fidèles devint captivé par Baha'u'llah et il se mit à répandre Ses louanges partout où il allait. Après le chemin de l'islam, il racontait les grands miracles qu'il avait, de ses propres yeux, vu Baha'u'llah accomplir et les merveilles qu'il avait entendues. Il était en extase, brûlant d'amour. C'est dans cet état qu'il retourna avec le prince à Qa'in.

Plus tard, cet éminent érudit Aqa Muhammad de Qa'in (dont le titre était Nabil-i-Akbar) reçut le titre de mujtahid, docteur de la loi religieuse, par le Shaykh Murtada; il partit alors pour Baghdad, devint un disciple fervent de Baha'u'llah et retourna en Perse. Les chefs religieux et les mujtahids étaient bien conscients et reconnaissaient sa grande réussite académique, l'étendue de ses connaissances et son rang élevé. Quand il arriva à Qa'in, il commença ouvertement à enseigner la nouvelle Foi. Au moment où Mulla Muhammad-'Ali entendit le nom de la Beauté Bénie, immédiatement il accepta le Bab. "J'ai eu l'honneur," dit-il, "de rencontrer la Beauté Bénie à Tihran. A l'instant où je Le vis, je devins son esclave."

Dans son village de Sar-Chah, cet homme doué, à l'âme noble, commença à enseigner la Foi. Il guida sa propre famille ainsi que les autres, amenant un grand nombre à la loi de l'amour de Dieu, dirigeant chacun sur le sentier du salut.

Jusque-là il avait été un ami proche de Mir 'Alam Khan le gouverneur de Qa'in, lui avait rendu de nombreux services et avait apprécié le respect et la fidélité du gouverneur. Mais ce prince sans vergogne se tourna contre lui avec rage à cause de sa religion, confisqua ses biens et les pilla; car l'Amir était terrifié par Nasiri'd-Din-Shah. Il bannit Nabil-i-Akbar et ruina Nabil de Qa'in. Après l'avoir jeté en prison et torturé, il le jeta en dehors de la ville comme un mendiant sans domicile.

Pour Nabil, cette soudaine calamité était une bénédiction, le pillage de ses biens terrestres, l'expulsion dans le désert étaient comme une couronne royale et la plus grande faveur que Dieu pouvait lui accorder. Pendant un certain temps il resta à Tihran extérieurement comme un indigent sans domicile fixe mais intérieurement plein d'allégresse; car ceci est la caractéristique de chaque âme qui est ferme dans l'alliance.

Il avait accès à la haute société et connaissait la condition de plusieurs princes. Aussi en fréquenta-t-il certains et leur donna le message. Il était une consolation pour le coeur des croyants et une épée tranchante pour les ennemis de Baha'u'llah. Il était un de ceux dont nous lisons dans le Qur'an: "Pour la cause de Dieu ils travailleront dur; ils ne craindront pas l'accusation des accusateurs." [xxv] Jour et nuit, il travailla à promouvoir la Foi et de toute sa force propagea les signes de Dieu. Il buvait et buvait encore le vin de l'amour de Dieu. Il était tonitruant comme les nuages d'orage, sans repos comme les vagues de la mer.

L'autorisation arriva pour lui de visiter la Plus Grande Prison; car, à Tihran, il était devenu un homme banni. Tous étaient au courant de sa conversion; il n'avait ni prudence, ni patience, ni réserve; il ne se souciait de rien et ne dissimulait rien. Il était tout à fait intrépide et en terrible danger.

Quand il arriva à la Plus Grande Prison, les gardes hostiles le jetèrent dehors et, essayant toute possibilité, il ne trouva aucun moyen pour entrer. Il fut obligé d'aller vers Nazareth où il vécut pendant un certain temps comme un étranger, seul avec ses deux fils, Aqa Qulam-Husayn et Aqa 'Ali-Akbar, se désolant et priant. Finalement un plan fut imaginé afin de l'introduire dans la forteresse et il fut assigné à la prison où étaient enfermés les innocents. Il entra dans une telle extase qui ne peut être décrite et fut admis en présence de Baha'u'llah. Quand il entra et leva les yeux vers la Beauté Bénie, il fut ému, trembla et tomba inconscient sur le sol. Baha'u'llah prononça des paroles de bienveillance affectueuse envers lui et il se releva. Il passa quelques jours caché dans la caserne après quoi il retourna à Nazareth.

Les habitants de Nazareth s'étonnèrent à son sujet. Ils se disaient les uns aux autres que manifestement c'était un grand homme distingué dans son propre pays, un notable et d'un rang élevé; et ils se demandaient pourquoi il avait choisi un coin perdu du monde comme Nazareth et comment il pouvait être satisfait d'une telle pauvreté et d'une telle souffrance.

Quand, dans l'accomplissement de la promesse du Plus Grand Nom, les portes de la prison s'ouvrirent et tous les amis et voyageurs purent entrer et quitter la forteresse en paix et avec respect, Nabil de Qa'in voyagea pour voir Baha'u'llah une fois par mois. Cependant, selon Son commandement, il continua de vivre à Nazareth, où il convertit à la Foi un grand nombre de chrétiens; et là, il pleurait jour et nuit sur toutes les misères qui étaient faites à Baha'u'llah.

Ses moyens d'existence venaient du partenariat que nous avions fait ensemble. Je lui avais procuré un capital de trois krans [xxvi]; avec cette somme, il avait acheté des aiguilles et en avait fait son stock d'échange. Les femmes de Nazareth lui donnaient des oeufs en échange de ses aiguilles et ainsi il obtenait trente à quarante oeufs par jour; trois aiguilles pour un oeuf. Puis il vendait les oeufs et vivait des recettes. Comme il y avait une caravane quotidienne entre 'Akka et Nazareth, il contactait Aqa Rida chaque jour pour plus d'aiguilles. Gloire à Dieu ! Il survécut deux ans avec le capital initial et rendit grâce tout le temps. Vous pouvez vous rendre compte combien il était détaché des choses terrestres par ce fait. Les Nazaréens avaient l'habitude de dire qu'on voyait aux manières de ce vieil homme et à son attitude qu'il était très riche et que s'il vivait si modestement c'était uniquement parce qu'il était étranger cachant sa richesse derrière une affaire de commerce d'aiguilles.

Chaque fois qu'il se trouvait en présence de Baha'u'llah, il recevait encore plus de témoignages de faveur et d'amour. En toutes saisons il fut pour moi un ami proche et un compagnon. Quand j'avais de la peine, je le faisais demander et alors je me réjouissais rien qu'à sa vue. Combien ses conversations étaient merveilleuses, combien attrayante sa compagnie. Il avait un visage rayonnant, un coeur libre, libre de toutes attaches terrestres, allant toujours de l'avant. Vers la fin il s'installa dans la Plus Grande Prison et chaque jour, il se trouvait en présence de Baha'u'llah .

Un certain jour, marchant dans le bazar avec ses amis, il rencontra un fossoyeur appelé Haji Ahmad. Bien qu'en bonne santé, il s'adressa au fossoyeur et en riant lui dit: "Viens avec moi." Accompagné des croyants et du fossoyeur il se rendit à Nabiyu'llah Salih. Là, il dit: "O Haji Ahmad, j'ai une demande à vous faire; quand je quitterai ce monde pour le suivant, creusez mon tombeau ici, à côté de la Plus Pure Branche [xxvii]. Ceci est une faveur que je vous demande." Parlant ainsi il donna une somme d'argent à l'homme.

Ce même soir, peu de temps après le coucher du soleil, des nouvelles arrivèrent que Nabil de Qa'in était malade. J'allai immédiatement chez lui: Il était assis et parlait. Il était radieux, riant, plaisantant mais sans aucune raison la sueur coulait de son visage comme un torrent. A part cela il n'y avait rien d'anormal en lui. La transpiration continuait sans interruption; il s'affaiblit, se coucha sur son lit, et vers le matin il mourut.

Baha'u'llah parlait de lui avec beaucoup de grâce et d'affection et révéla un grand nombre de tablettes en son nom. La Beauté Bénie avait l'habitude, après la mort de Nabil, de rappeler son ardeur, la puissance de sa foi et de dire que c'était un homme qui L'avait reconnu, avant l'avènement du Bab.

Bienheureux celui qui a reçu ces merveilleux qualificatifs. "Que la félicité l'attende et une belle demeure... Et Dieu distinguera pour Sa miséricorde celui qu'Il voudra." [xxviii]


18. Siyyid Muhammad-Taqi Manshadi

Muhammad-Taqi était du village de Manshad. Il était encore très jeune quand il entendit parler de la Foi de Dieu. En sainte extase, son esprit alla vers le ciel et son coeur fut inondé de lumière. La grâce divine descendit sur lui; les appels de Dieu l'enchantèrent à un tel point qu'il quitta la paisible Manshad. Laissant sa famille et ses enfants, il partit à travers les montagnes et les plaines du désert, passa d'une halte à une autre, arriva au bord de la mer, traversa la mer et finalement gagna la ville de Haifa. De là il se pressa vers 'Akka et entra en présence de Baha'u'llah .

Dès le début il ouvrit une petite échoppe à Haifa et commença une affaire insignifiante. Cette affaire reçut les bénédictions de Dieu et prospéra. Ce petit coin devint le havre des pèlerins. A leur arrivée ainsi qu'à leur départ, les pèlerins étaient les invités du noble et généreux Muhammad-Taqi. Il aidait aussi à gérer les affaires des croyants et organisait leurs moyens de transport. Il prouva qu'il était d'un sérieux infaillible, loyal et honnête. Rapidement, il devint l'intermédiaire par qui les tablettes pouvaient être envoyées et le courrier des croyants arriver. Il rendait ce service avec une parfaite fiabilité, l'accomplissant de la meilleure manière, expédiant scrupuleusement et recevant la correspondance à tout moment. Chacun lui faisant confiance, il fut connu dans plusieurs parties du monde et reçut d'innombrables bontés de Baha'u'llah. Il était un trésor de justice et de droiture, entièrement libre de tout attachement aux choses de ce monde. Il s'était habitué à une vie détachée, ne transportant rien à manger ou pour dormir, sans confort ou paix. Il vivait seul dans une pièce unique, passait ses nuits sur une couche de feuilles de palmier et dormait dans un coin. Mais pour les voyageurs, il était une oasis dans le désert; pour eux, il avait les oreillers les plus moelleux et la meilleure table qu'il pouvait offrir. Il avait un visage souriant et de nature il était spirituel et serein.

Après que l'Etoile du Jour du Concours Suprême se soit levée, Siyyid Manshadi resta loyal à l'alliance, une épée tranchante confrontant les violateurs. Ils essayèrent toutes les ruses, toutes les supercheries, les moyens les plus subtils; c'est inimaginable combien ils lui montrèrent de reconnaissance et de quels honneurs ils le comblèrent, quelles fêtes ils préparèrent, quels plaisirs ils lui offrirent, tout cela pour essayer de briser sa foi. Cependant, chaque jour, il devenait plus fort que la veille, il continuait à être dévoué et fidèle, libre de toutes pensées indécentes et fuyant tout ce qui était contre l'alliance de Dieu. Quand, finalement, ils désespérèrent de changer sa décision, ils le harassèrent par tous les moyens possibles et complotèrent sa ruine financière. Il resta, cependant, la quintessence de la constance et de la fidélité.

Quand, à l'instigation des violateurs, 'Abdu'l-Hamid commença à s'opposer à moi, je fus obligé d'envoyer Manshadi à Port Saïd parce qu'il était trop connu parmi les gens comme le distributeur de notre courrier. Je dus alors lui retransmettre la correspondance par des intermédiaires qui n'étaient pas connus, pour qu'il continue à envoyer les lettres comme auparavant. De cette façon, les traîtres et les personnes hostiles ne purent prendre le courrier. Pendant les derniers jours de 'Abdu'l-Hamid, quand il y eut une commission d'investigation poussée par ces étrangers devenus familiers, qu'ils firent des plans pour déraciner l'Arbre saint; qu'ils furent déterminés de me jeter dans les profondeurs de la mer ou me bannir à Fezzan, et ceci était le plan qu'ils avaient décidé; et quand, en conséquence, la commission fit tout son possible pour obtenir quelques documents ou autres, ils échouèrent. Au milieu de tous ces tourments, avec toutes les pressions, les restrictions et les folles attaques de ces personnes qui étaient sans pitié comme Yazid [xxix], le courrier circula malgré tout.

Pendant de longues années, Siyyid Manshadi exécuta parfaitement son service à Port Saïd. Tous les amis sans exception étaient satisfaits de lui. Dans cette ville, il gagna la gratitude des voyageurs, rendit ceux qui avaient émigré éternellement reconnaissants, apporta la joie aux croyants locaux. Mais la grosse chaleur d'Egypte fut trop éprouvante pour lui; il dut se coucher et une fièvre foudroyante le libéra de la robe de vie. Il abandonna Port Saïd pour le Royaume des Cieux et s'éleva vers les demeures du Seigneur.

Siyyid Manshadi était l'essence de la vertu et de l'intelligence. Ses qualités et ses connaissance étaient tels qu'ils stupéfiaient les esprits les plus doués. Il n'avait de pensée que pour Dieu, n'avait aucun espoir que de gagner le bon plaisir de Dieu. Il était l'incarnation de l'écrit "fais de tous mes chants une unique louange à toi; gardes-moi pour toujours fidèle à ton service."

Puisse Dieu rafraîchir sa peine fiévreuse par la grâce de la réunion dans le Royaume, et guérir sa maladie avec le baume de son intimité dans le Royaume de toutes les beautés. Que sur lui soit la gloire de Dieu, le Plus Glorieux.


19. Muhammad-'Ali Sabbaq de Yazd

Photo: Aqa Muhammad-'Ali Sabbaq Yazdi

Dans sa jeunesse Muhammad-'Ali Sabbaq accepta la Foi en Iraq. Il déchira les voiles obscurs et les doutes, s'échappa de ses illusions et se hâta vers l'abri accueillant du Seigneur des seigneurs. Bien que paraissant extérieurement sans éducation car il ne savait ni lire ni écrire, il était un ami d'une intelligence vive et digne de confiance. Il fut amené en présence de Baha'u'llah par un des croyants et fut très vite connu largement du public comme un disciple. Il se trouva un coin où habiter, près de la maison de la Beauté Bénie, et matin et soir entra en présence de Baha'u'llah. Pendant un certain temps il fut extrêmement heureux.

Quand Baha'u'llah et sa suite quittèrent Baghdad pour Constantinople, Aqa Muhammad-'Ali, enflammé par l'amour de Dieu, fit partie du groupe. Nous atteignîmes Constantinople et comme le gouverneur nous obligea à nous installer à Andrinople, nous laissâmes Muhammad-'Ali dans la capitale turque pour aider les croyants lorsqu'ils venaient et traversaient la ville. Puis nous allâmes à Andrinople. Cet homme resta seul et il souffrit d'une grande détresse car il n'avait aucun ami, ni compagnon, ni personne pour s'occuper de lui.

Après deux ans il vint à Andrinople, cherchant refuge dans la tendre bonté de Baha'u'llah. Il alla travailler comme revendeur et quand la grande rébellion [xxx] débuta et que les oppresseurs conduisirent les amis à la plus grande adversité, il fut lui aussi parmi les prisonniers et fut exilé avec nous dans la forteresse de 'Akka.

Il passa beaucoup de temps dans la Plus Grande Prison, après quoi Baha'u'llah voulut qu'il parte pour Sidon, où il commença un commerce. Parfois il retournait à 'Akka et était reçu par Baha'u'llah mais le reste du temps il restait à Sidon. Il vécut respecté. C'était un homme en qui on avait confiance, un bienfait pour tous.

Quand l'Affliction suprême tomba sur nous, il retourna à 'Akka et passa le reste de ses jours près du tombeau sacré.

Tous les amis étaient satisfaits de lui et il était chéri par la sainte famille; dans cet état il monta vers la gloire éternelle, laissant sa famille dans le chagrin. C'était un homme gentil, un homme d'excellence; satisfait de ce que Dieu avait voulu pour lui, reconnaissant, un homme digne et qui souffrit beaucoup.

Que sur lui soit la gloire du Tout-Glorieux. Puisse Dieu faire descendre sur son tombeau parfumé à 'Akka des vagues de lumière céleste.


20. 'Abdu'l-Ghaffar de Isfahan

Photo: Aqa Husayn ashchi à gauche, Aqa 'Abdu'l-Ghaffar-i-Mahllati connu sous le titre de Aqa 'Abdu'l-Ghaffar-i- Isfahani à droite.

'Abdu'l-Ghaffar d'Isfahan était un autre de ceux qui avait quitté leur ville natale pour devenir nos voisins et compagnons de prison. C'était un homme très perspicace qui, pour ses affaires commerciales, avait voyagé en Asie Mineure pendant plusieurs années. Il fit un voyage en Iraq où Aqa Muhammad-'Ali de Sad (Isfahan) l'amena dans le refuge de la Foi. Très vite il déchira les voiles des illusions qui avaient aveuglé ses yeux et se leva, cherchant le salut dans le paradis de l'amour divin. Les voiles qui couvraient ses yeux étaient minces, presque transparents, et c'est pourquoi, au premier mot donné, il fut immédiatement délivré du monde des vaines imaginations et s'attacha à Celui que l'on peut voir clairement.

Pendant son voyage d'Iraq à la Grande Ville, Constantinople, 'Abdu'l-Ghaffar fut un compagnon proche et agréable. Il servit d'interprète pour le groupe entier car il parlait un turc excellent, une langue dans laquelle aucun des amis n'était compétent. Le voyage arriva calmement à sa fin et, dans la Grande Ville, il continua ce service, en compagnon et ami. La même chose se produisit à Andrinople et également quand, comme prisonnier, il nous accompagna dans la ville de Haifa.

Là, les oppresseurs décidèrent de l'envoyer à Chypre. Il fut terrifié et cria à l'aide car il désirait ardemment être avec nous dans la Plus Grande Prison. [xxxi] Quand il l'emmenèrent de force, du haut du bateau il se jeta dans la mer. Ceci n'eut aucun effet sur les rudes officiers. Après l'avoir repêché ils le gardèrent prisonnier sur le bateau, le retenant et l'amenant de force à Chypre. Il fut emprisonné à Famagusta mais d'une façon ou d'une autre il se débrouilla pour s'échapper et se précipiter à 'Akka. Là, se protégeant de la malveillance de nos oppresseurs, il changea son nom en 'Abdu'llah.

Abrité par l'affection de Baha'u'llah il passa ses jours tranquille et heureux.

Mais quand la grande Lumière du monde s'arrêta de briller pour toujours de l'Horizon Lumineux, 'Abdu'l-Ghaffar devint hors de lui et en proie à l'angoisse. Il n'avait plus de maison. Il partit pour Damas et y resta quelque temps, emprisonné dans sa tristesse, pleurant jour et nuit. Il devint de plus en plus faible. Nous envoyâmes Haji 'Abbas pour le soigner, lui donner un traitement et des soins et pour qu'il nous donne de ses nouvelles chaque jour. Mais 'Abdu'l-Ghaffar ne voulait d'autre que parler, sans cesse, à toute heure, avec son infirmier, et dire combien il languissait de partir dans le pays mystérieux de l'au-delà. Et, finalement, loin de chez lui, loin de son Amour, il partit pour le seuil sacré de Baha'u'llah.

C'était réellement un homme qui a souffert mais doux ; un homme au caractère bon, aux actes bons et aux belles paroles. Que salutations, louanges et la gloire du Tout-Glorieux soient sur lui. Son tombeau au doux parfum est à Damas.


21. 'Ali Najaf-Abadi

Il y avait aussi, parmi les émigrants et proches voisins, Aqa 'Ali Najaf-Abadi. Lorsque ce jeune homme spirituel écouta l'appel de Dieu, il plaça ses lèvres sur la coupe sacrée et vit la gloire de Celui qui parla sur le Mont. Et quand, par la grâce de la lumière, il acquit la connaissance positive, il se rendit à la Plus Grande Prison, où il fut témoin de la substance de la connaissance elle-même et arriva à la plus haute condition de l'indubitable vérité.

Pendant longtemps il resta autour et dans la ville sacrée; il devint le proverbial marchand Habibu'llah, et passa ses journées s'appuyant sur Dieu, en supplication et prière. C'était un homme doux, tranquille, ne se plaignant jamais, inébranlable; plaisant en toutes choses, digne de louanges. Il gagna l'approbation de tous les amis et fut accepté et reçu par la sainte famille. Durant ses derniers jours, quand il sentit qu'une fin heureuse lui était réservée, il se présenta une fois encore dans la Plus Grande Prison. Dès son arrivée, il se sentit malade, affaibli et passa son temps en suppliant Dieu. Le souffle de vie s'arrêta en lui, les portes de l'envol vers le Royaume suprême furent largement ouvertes, il tourna ses yeux loin de ce monde de poussière et partit vers le Lieu Saint.

'Ali Najaf-Abadi était tendre, au coeur sensible, à tout moment se souciant et se souvenant de Dieu, et vers la fin de sa vie, détaché, immaculé, libre de la contagion de ce monde. Avec douceur il abandonna son coin de cette terre et planta sa tente dans le monde d'en-haut. Que Dieu envoie sur lui les saveurs pures du pardon, illumine ses yeux de la vision de la beauté divine dans le Royaume des Splendeurs, et rafraîchisse son esprit par les vents au parfum de musc qui soufflent du Royaume d'Abha. Que sur lui soient les salutations et les louanges. Son corps doux et saint repose à 'Akka.


22. Mashhadi Husayn et Mashhadi Muhamad-i- Adhirbayjani

Mashhadi Husayn et Mashhadi Muhammad était tous deux de la province d'Adhirbayjan. Ils étaient des âmes pures qui firent le grand pas dans leur propre pays; ils se libérèrent des amis et des étrangers, s'échappèrent des superstitions qui les avaient aveuglés auparavant, renforcèrent leur déterminations et se courbèrent devant la grâce de Dieu, le Seigneur de vie. C'étaient des âmes bénies, loyales, immaculées dans la foi; évanescentes, soumises, pauvres, heureuses dans la volonté de Dieu, amoureuses de sa lumière directrice, se réjouissant du grand message. Ils quittèrent leur province et allèrent à Andrinople. Là, près de la ville sainte, ils habitèrent pour un certain temps dans le village de Qumruq-Kilisa. Le jour, ils suppliaient Dieu et communiaient avec Lui; la nuit, ils pleuraient, déplorant l'état de Celui que le monde avait rejeté.

Quand l'exil à 'Akka commença, ils n'étaient pas dans la ville et ainsi ne furent pas arrêtés. Le coeur lourd, ils poursuivirent dans cette région, répandant leurs larmes. Une fois qu'ils eurent obtenu un rapport exact de 'Akka ils quittèrent Rumelia et y allèrent: deux âmes excellentes, de loyaux fidèles de la Beauté Bénie. Il est impossible de dire combien leur coeur était pur, combien ils étaient fermes dans la Foi.

Ils vivaient en dehors de 'Akka à Bagh-I-Firdaws, travaillaient comme fermiers et passaient leurs journées rendant grâce à Dieu de les avoir à nouveau rapprochés de la grâce et de l'amour. Mais ils étaient natifs d'Adhirbayjan, habitués au froid et ne pouvaient pas endurer la chaleur de cette région. De plus, ceci se passait durant nos premiers jours à 'Akka quand l'air était nocif et l'eau insalubre à l'extrême. Ils tombèrent tous les deux malades avec une forte fièvre. Ils vécurent leur maladie joyeusement, avec une grande patience. Pendant ces jours de maladie, malgré les assauts de fièvre, la violence de leurs maux, la grande soif, la fatigue, ils demeurèrent intérieurement en paix, se réjouissant des divines bonnes nouvelles. Et alors qu'ils rendaient grâce de tout leur coeur, ils quittèrent rapidement ce monde et entrèrent dans l'autre; ils s'échappèrent de cette cage et furent relâchés dans le jardin d'immortalité. Que sur eux soit la miséricorde de Dieu et puisse Dieu être satisfait d'eux. Sur eux les salutations et louanges. Puisse Dieu les porter dans le Royaume éternel, pour qu'ils puissent se réjouir de la réunion avec Lui et s'émerveiller des splendeurs du Royaume. Leurs deux tombeaux lumineux sont à 'Akka.


23. Haji 'Abdu'r-Rahim-i-Yazdi

Haji 'Abdu'r-Rahim de Yazd était une âme précieuse, vertueux et craignant Dieu dès son plus jeune âge. Il était connu parmi les gens comme un saint homme, sans égal dans le respect de ses devoirs religieux, attentionné dans tous ses actes. Sa foi religieuse très forte était un fait indiscutable. Il servait et louait Dieu jour et nuit, il était solide, doux, plein de compassion, un ami loyal.

Parce qu'il était entièrement préparé, au moment même où il entendit l'appel de l'Horizon suprême, les sons des tambours de la phrase "Ne suis-je pas votre Seigneur ?" - il s'écria immédiatement "Oui, en vérité". De tout son être il devint amoureux des splendeurs répandues par la Lumière du Monde. Ouvertement et audacieusement il commença à confirmer sa famille et ses amis. Ceci fut bientôt connu dans toute la ville; aux yeux des mauvais 'ulamas il était maintenant un objet de haine et de mépris. Encourant leur colère, il était méprisé par ces créatures aux passions indignes. Il fut molesté et harcelé ; les habitants se soulevèrent et les mauvais 'ulamas complotèrent sa mort. Les autorités gouvernementales également se montèrent contre lui, le traquèrent, lui firent même subir la torture. Ils le frappèrent avec des matraques et le fouettèrent. Cela continua jour et nuit.

Il fut forcé d'abandonner sa maison et de sortir de la ville, comme un errant, escaladant les montagnes, traversant les plaines, jusqu'à ce qu'il arriva en Terre Sainte. Mais il était si faible, si usé, que quiconque le voyait pensait qu'il était arrivé à son dernier souffle. Quand il arriva à Haifa, Nabil de Qa'in se précipita à 'Akka et me demanda de faire venir le Haji car il était agonisant et faiblissait rapidement.

"Laissez-moi aller à la résidence de Baji pour demander la permission de partir" dis-je. "Cela prendra trop de temps", dit-il, "et alors 'Abdu'r-Rahim ne verra jamais 'Akka. Je souhaite tant pour lui d'avoir cette bonté de voir 'Akka et mourir. Je vous supplie, envoyez-le chercher!"

Respectant son souhait, j'ai appelé 'Abdu'r-Rahim. Quand il est arrivé, je pouvais difficilement détecter un souffle de vie. Par moment il ouvrait les yeux mais il ne pouvait pas parler. Cependant, les douces saveurs de la Plus Grand Prison ramenèrent une étincelle de vie et son désir ardent de rencontrer Baha'u'llah ramena un peu de vie en lui. Je retournai le voir le lendemain matin et le trouvai joyeux et frais. Il demanda la permission d'être au service de Baha'u'llah. "Cela dépend" je lui répondis, "s'Il vous autorise à partir, et si Dieu veut, vous serez choisi pour ce cadeau le plus cher".

Quelques jours plus tard, la permission arriva, et il se hâta d'être en présence de Baha'u'llah. Quand 'Abdu'r-Rahim entra, l'esprit de vie souffla au-dessus de lui. A son retour, il était clair que cet Haji était devenu un Haji entièrement différent; il était resplendissant de santé. Nabil était sidéré et dit: "combien vivifiant pour un vrai croyant est l'air de la prison !"

Pendant quelque temps, 'Abdu'r-Rahim vécut dans les environs. Il passait son temps se souvenant et priant Dieu ; il chantait des prières et prêtait grande attention à ses devoirs religieux. Ainsi il voyait peu de gens. Ce serviteur faisait très attention à ses besoins et lui prescrivit un régime léger. Mais tout se termina avec l'ascension de Baha'u'llah. Alors il y eut l'angoisse et le bruit de grands pleurs. Son coeur en feu, ses yeux remplis de larmes, il se battait faiblement pour bouger; ainsi ses jours passèrent, et il languissait de ce monceau de détritus qu'était le monde. Finalement il quitta la douleur de la séparation, se hâta vers le royaume de Dieu, et rejoignit l'assemblée de la splendeur divine dans le Royaume des Lumières.

Que les salutations et les louanges et la miséricorde inexprimable soient sur lui. Puisse Dieu répandre sur son tombeau les rayons du Royaume mystérieux.


24. Haji 'Abdu'llah Najaf-Abadi

Une fois devenu croyant, Haji 'Abdu'llah quitta sa Perse natale, se hâta en Terre Sainte et sous la grâce protectrice de Baha'u'llah trouva la paix dans son coeur. C'était un homme confiant, loyal et ferme; sûr des bontés infinies de Dieu; d'un excellent caractère.

Il passait ses journées en compagnie des autres croyants. Puis, pour un certain temps, il alla à Ghawr, près de Tibériade, où il devint fermier, labourant le sol et consacrant une grande partie de son temps à la prière, en communion avec Dieu. C'était un homme remarquable, à l'esprit élevé et immaculé.

Plus tard, il revint de Ghawr et s'installa près de Baha'u'llah à Junayna et fut souvent en Sa présence. Ses yeux étaient fixés vers le Royaume d'Abha; parfois il pleurait et gémissait, d'autres fois il se réjouissait, heureux parce qu'il avait réalisé son désir le plus grand. Il était entièrement détaché de tout sauf de Dieu, heureux dans la grâce de Dieu. Il restait en éveil la plus grande partie de la nuit, restant dans un état de prière. Puis la mort vint à l'heure indiquée, et dans l'ombre protectrice de Baha'u'llah, il s'éteignit, se hâtant loin de ce monde de poussière vers le haut firmament, s'élançant vers la terre secrète. Que sur lui soient les salutations, la miséricorde et les louanges dans la proximité de son Seigneur exalté.


25. Muhammad-Hadiy-i-Sahhaf

Le relieur Muhammad-Hadi était encore un de plus parmi ceux qui avaient émigré et s'étaient installés près de Baha'u'llah. Cet homme était d'Isfahan et, en tant que relieur et enlumineur, il n'avait pas son pareil. Quand il s'abandonna à l'amour de Dieu, il fut exalté et sans peur sur le chemin. Il abandonna sa maison et entreprit un voyage pénible, passant par des épreuves extrêmes d'un pays à un autre jusqu'à ce qu'il arrive en Terre Sainte et devint prisonnier. Il se posta à la porte sacrée, la balayant soigneusement et faisant le guet. Grâce à ses efforts constants, la cour devant la maison de Baha'u'llah fut continuellement balayée, arrosée et immaculée.

Souvent, Baha'u'llah jetait un oeil sur cet endroit, il souriait et disait: "Muhammad-Hadi a fait de la cour devant cette prison une entrée nuptiale d'un palais. Il a apporté beaucoup de plaisir à tous les voisins et il a gagné leurs remerciements".

Quand le balayage, l'arrosage et le nettoyage étaient terminés, il commençait le travail d'enluminure et de reliure des différents livres et tablettes. Ainsi les jours passaient, son coeur heureux en la présence du Bien-Aimé de l'humanité. C'était une âme merveilleuse, il était droit, fidèle, digne de la bonté d'être uni avec son Seigneur et libre de la contagion du monde.

Un jour il vint vers moi et se plaignit d'une maladie chronique. "Je souffre de frissons et de fièvre depuis deux ans", dit-il, "les docteurs m'ont prescrit une purge et de la quinine. La fièvre s'est arrêtée quelques jours, puis elle est revenue. Ils m'ont donné plus de quinine mais la fièvre revient. Je suis fatigué de cette vie et ne puis plus faire mon travail. Aidez-moi !"

"Quelle nourriture aimez-vous le plus?" lui demandai-je. "Que mangeriez-vous de bon appétit ?" "Je ne sais pas" répondit-il. En plaisantant, je nommai les mets différents. Alors que je nommais la soupe d'orge avec du petit-lait (ash-I-kashk), il dit: "Très bien ! Mais à condition qu'il y ait de l'ail braisée dedans!"

Je donnai les instructions pour qu'on lui prépare cette soupe et je partis. Le lendemain, il se présenta et me dit: "J'ai mangé un grand bol de soupe. Puis j'ai mis ma tête sur l'oreiller et me suis endormi paisiblement jusqu'au matin."

En bref, après cela il fut en parfaite santé pendant environ deux ans.

Un jour, un croyant vint me voir et me dit: "Muhammad-Hadi est brûlant de fièvre." Je courus à son chevet et le trouvai avec une fièvre de 42°C. Il était presque inconscient. "Qu'a-t-il fait ?" demandais-je. "Quand il devint fiévreux", fut la réponse, "il dit qu'il savait ce qu'il devait faire. Et il se remplit de soupe d'orge avec du petit lait et de l'ail braisé; et voilà le résultat."

Je fus stupéfait de voir le travail du destin. Je leur dis: "Parce qu'il y a deux ans, il avait été purgé et son système entièrement vidé, parce qu'il avait grand envie de ce plat et sa maladie n'était que frissons et fièvre, j'avais prescrit la soupe d'orge. Mais cette fois, avec la nourriture variée qu'il a prise sans appétit et particulièrement une grosse fièvre, il n'y avait aucune raison pour diagnostiquer la condition chronique de la fois précédente. Comment a-t-il pu manger la soupe !" Ils répondirent "c'était le destin!" Les choses étaient allées trop loin, on ne pouvait plus sauver Muhammad-Hadi.

C'était un homme de petite taille, de rang et d'esprit nobles. Son coeur était pur, son âme lumineuse. Durant tout le temps où il servit au Seuil sacré, il fut aimé de tous les amis et choisi par Dieu. De temps en temps, un sourire sur ses lèvres, la Beauté Bénie lui parlait, exprimant bonté et grâce.

Muhammad-'Ali fut toujours loyal, et il considérait toute chose autre que le bon plaisir de Dieu comme des fictions et des fables, rien de plus. Béni soit-il pour ce cadeau qui lui fut accordé, heureuses nouvelles à lui pour l'endroit où il devra reposer; puisse cela le rendre heureux, cette coupe de vin remplie à la fontaine de camphre, et puissent tous ses efforts recevoir les grâces et être acceptées de Dieu. [xxxii]


26. Mirza Muhammad-Quli

Photo: Mirza Muhammad-Quli, frère loyal de Baha'u'llah

Jinab-i-Mirza Muhammad-Quli [xxxiii] était un frère loyal de la Beauté Bénie. Ce grand homme était connu depuis son enfance pour sa grandeur d'âme. Il venait à peine de naître quand son distingué père mourut, et c'est ainsi que, du début à la fin de ses jours, il passa sa vie dans les bras protecteurs de Baha'u'llah. Il était détaché de toutes pensées égoïstes, répugnait tous sujets sauf ceux qui concernaient la sainte Cause. Il fut élevé en Perse par les soins de Baha'u'llah, de même en Iraq, fut particulièrement chéri de Lui. En présence de Baha'u'llah, c'était lui qui servait le thé; et il était au service de son frère à tout moment, jour et nuit. Il était toujours silencieux, Il était fermement attaché à l'alliance symbolisée par la phrase: "Ne suis-je pas votre Seigneur ?" Il était entouré d'amour et de bonté; jour et nuit il avait accès à la présence de Baha'u'llah; il était toujours patient et tolérant, jusqu'à ce qu'à la fin, il atteigne l'apogée de la faveur et du consentement divins.

Il garda toujours sa propre façon de vivre. Il voyagea en compagnie de Baha'u'llah; d'Iraq à Constantinople, il était avec le convoi et aux escales, sa tâche était de monter les tentes. Il servait avec la plus grande assiduité et ne connaissait ni léthargie ni fatigue. Aussi bien à Constantinople que plus tard dans la Terre du Mystère, à Andrinople, il continua dans la même et invariable condition.

Il fut exilé dans la forteresse de 'Akka avec son Seigneur sans égal, condamné par ordre du sultan à la prison à vie. [xxxiv] Mais il accepta dans le même esprit tout ce qui venait sur son chemin - confort et tourment, souffrance et répit, maladie et santé; avec éloquence il remerciait la Beauté Bénie pour Ses bontés, prononçant des louanges avec un coeur libre et un visage qui brillait comme le soleil.

Chaque matin et chaque soir il était au service de Baha'u'llah, s'en réjouissait, soutenu par Sa présence. Et le plus souvent il restait silencieux.

Quand le Bien-Aimé de toute l'humanité partit pour le Royaume des splendeurs, Mirza Muhammad-Quli resta ferme dans l'alliance, fuyant les ruses, les malices et l'hypocrisie qui apparurent alors, se consacrant entièrement à Dieu, en supplications et prières. A ceux qui voulaient écouter, il donnait des avis sages; appelait à se souvenir des jours de la Beauté Bénie et se désolait du fait que lui-même était toujours en vie. Après le départ de Baha'u'llah, il ne respirait pas facilement; il ne restait en compagnie de personne et s'isolait la plupart du temps, seul dans son petit refuge, brûlant du feu de la séparation. Jour après jour il devint de plus en plus faible, plus fatigué jusqu'à ce que finalement il monta vers le monde de Dieu. Que sur lui soit la paix! Que sur lui soient louanges et miséricorde dans les jardins du paradis. Son tombeau lumineux est à Naqib, près de Tibériade.


27. Ustad Baqir et Ustad Ahmad

Egalement parmi ceux qui avaient quitté leur pays natal, il y avait deux charpentiers, Ustad Baqir et Ustad Ahmad. Ces deux charpentiers étaient frères, de pure lignée, natifs de Kashan. A partir du moment où tous deux devinrent croyants, ils se soutinrent mutuellement. Ils prêtèrent l'oreille à la voix de Dieu, et à Son cri de "Ne suis-je pas votre Seigneur?" Ils répondirent: "Oui, en vérité!"

Pendant un temps, ils restèrent dans leur pays, préoccupés par le souvenir de Dieu, caractérisé par la foi et la connaissance, respectés de l'ami et de l'étranger, réputés pour leur droiture et leur honnêteté, pour leur vie simple et leur crainte de Dieu. Quand l'oppresseur étendit ses mains contre eux et les fit souffrir au delà de toute endurance, ils émigrèrent en Iraq sous la protection de Baha'u'llah. C'étaient deux âmes des plus bénies. Ils restèrent un certain temps en Iraq, priant en toute humilité et suppliant Dieu. Puis Ustad Ahmad partit pour Andrinople, tandis que Ustad Baqir resta en Iraq et fut emprisonné à Mosul. Ustad Ahmad continua avec le groupe de Baha'u'llah vers la Plus Grande Prison, et Ustad Baqir émigra de Mosul à 'Akka. Les deux frères étaient sous la protection de Dieu et libres de tout attachement terrestre. Dans la prison, ils travaillèrent à leur métier, restant ensemble loin de l'ami et de l'étranger. Tranquilles, dignes, confiants, forts dans leur foi, protégés par le Tout-Miséricordieux, ils passaient leurs jours heureux. Ustad Baqir mourut le premier et fut suivi par son frère peu de temps après.

Tous deux étaient des croyants fermes, loyaux, patients, reconnaissants à tout moment, suppliant continuellement Dieu avec humilité, leurs visages tournés vers Sa direction. Pendant ce long séjour dans la prison, ils ne furent jamais négligents dans leur tâche, jamais fautifs. Ils étaient continuellement joyeux, car ils avaient bu largement à la sainte coupe; et, quand ils s'élevèrent au-dessus de ce monde, les amis les pleurèrent et demandèrent que par la grâce de Baha'u'llah, ils soient choisis et pardonnés. Ces deux êtres étaient entourés de bonté et divinement nourris, et la Beauté Bénie était très satisfaite par tous les deux ; avec cet approvisionnement pour leur voyage, ils partirent pour le monde futur. Que sur eux deux soit la gloire de Dieu, le Très-Glorieux! Que chacun ait un siège de vérité [xxxv] dans le Royaume de splendeurs.


28. Muhammad Hana-Sab

Cet homme digne et de haut rang, Aqa Muhammad, était un de ceux qui abandonnèrent leur maison et devinrent les premiers croyants. Dès le début, il fut largement connu comme un amoureux de la Plus Grande Lumière. Il était alors à Isfahan et ferma les yeux sur ce monde et sur l'autre [xxxvi] et les ouvrit sur la beauté de Celui Qui est la personnification de tout ce qui est digne d'amour. [xxxvii]

Aqa Muhammad ne pouvait plus rester immobile car il avait pris vie par les souffles de Dieu chargés de musc; son coeur était illuminé, il pouvait sentir le saint parfum, il avait un oeil pour voir, une oreille pour entendre. Il dirigea un certain nombre d'âmes, restant fidèle et loyal à la grande Cause. Il endura de terribles persécutions et tourments mais ne faiblit jamais. Puis il trouva grâce aux yeux du Roi des Martyrs et devint un serviteur fidèle de l'Aimé des Martyrs [xxxviii], à son service pendant plusieurs années. Il était fervent dans son travail et à plusieurs occasions le Roi des Martyrs lui exprima sa satisfaction en disant: "Cet homme est une de ces âmes qui sont en paix ; il est, en vérité, heureux avec son Seigneur et Lui est agréable. [xxxix] Sa foi est parfaite, il aime Dieu, il a un bon caractère et mène une bonne vie. Il est aussi un compagnon agréable et très éloquent."

Après que le Roi des Martyrs ait été mis à mort, Aqa Muhammad resta un certain temps à Isfahan, se consumant de chagrin pour lui. Finalement, il émigra dans la Plus Grande Prison où il fut reçu par Baha'u'llah et gagna le grand honneur de balayer le sol du seuil sacré. Il était patient, tolérant, un ami et un compagnon sincère. Puis la suprême Affliction tomba sur nous, et Aqa Muhammad était dans une telle tristesse qu'il était incapable de se reposer un seul instant. Chaque matin, il se levait et balayait le sol devant la maison de Baha'u'llah, les larmes coulant comme la pluie, chantant des prières tout en travaillant.

Quel être saint il était, quel grand homme ! Il ne put supporter la séparation très longtemps, mourut et se hâta vers le monde des lumières, vers l'assemblée où la beauté de Dieu est dévoilée. Que Dieu fasse descendre sur son tombeau les rayons du royaume de pardon et calme son esprit dans le coeur du paradis ! Que Dieu exalte son rang dans les jardins d'en haut ! Son brillant tombeau est à 'Akka.


29. Haji Faraju'llah Tafrishi

Faraju'llah de Tafrish est encore un de ceux qui quittèrent leur maison pour vivre dans l'entourage de Baha'u'llah. Cet être béni était dès son jeune âge un serviteur de Baha'u'llah et avec son père très estimé, Aqa Lutfullah, il émigra de Perse à Andrinople. Aqa Lutfullah était un croyant loyal, aimant avec dévotion la Beauté Bénie, patient, il a souffert pendant longtemps, entièrement indifférent à ce monde et ses vanités, il vivait heureux dans l'entourage de Baha'u'llah et alors humblement au Seuil sacré, d'un coeur contrit, il abandonna cette vie éphémère et s'éleva vers les royaumes infinis. Son corps au doux parfum est à Andrinople.

En ce qui concerne Haji Faraju'llah, il vécut dans cette ville jusqu'au jour où les oppresseurs sans merci bannirent Baha'u'llah à 'Akka et, en Sa compagnie, le Haji alla à la Plus Grande Prison. Plus tard, lorsque les difficultés diminuèrent, il prit une affaire, devint un associé de Muhammad-'Ali d'Isfahan. Pendant quelques temps, ses affaires prospérèrent et il était heureux. Puis il reçut l'ordre de partir et de voyager en Inde où il resta une longue période avant de s'envoler pour les jardins du pardon, et entrer dans l'enceinte de la miséricorde inexprimable.

Ce serviteur de la Beauté Bénie était avec les croyants dans leurs afflictions et leurs calamités; il a eu sa part de tristesse. Les faveurs de Baha'u'llah le récompensèrent et il se réjouissait de cette grâce sans limite. Il était, parmi les compagnons, un associé proche des amis, et il avait un coeur docile. Bien que son corps fut menu et maladif, il était reconnaissant, l'acceptait, était patient et endurait les épreuves sur le sentier de Dieu. Que sur lui soient les salutations et les louanges, puisse-t-il recevoir les récompenses et les bénédictions célestes. Que sur lui soit la gloire de Dieu, le Très-Glorieux ! Sa sépulture est à Bombay, en Inde.


30. Aqa Ibrahim-i-Isfahani et Ses Frères

Il y avait, parmi ceux qui avaient émigré et étaient venus s'installer en Terre Sainte, Aqa Ibrahim, un des quatre frères très honorés: Muhammad-Sadiq, Muhammad-Ibrahim, Aqa Habibu'llah et Muhammad-'Ali. Ces quatre frères vivaient à Baghdad avec leur oncle paternel, Aqa Muhammad-Rida, connu sous le nom de 'Arid. Ils vivaient tous dans la même maison et restaient ensemble nuit et jour. Comme les oiseaux, ils partageaient l'unique nid et ils étaient toujours frais et plein de grâce comme des fleurs par terre.

Lorsque la Beauté Ancienne arriva en Iraq, leur maison était voisine de la Sienne et ainsi ils avaient la joie de Le voir quand Il allait et venait. Petit à petit, les manières du Seigneur des coeurs, ce qu'Il faisait et ce qu'Il ne faisait pas, et la vue de son visage aimant firent leur effet. Ils commencèrent à avoir soif de la Foi et cherchèrent Sa grâce et Ses faveurs. Ils se présentaient à la porte de Sa maison comme des fleurs s'ouvrant et rapidement ils furent amoureux de la lumière venant de son regard, captifs par la beauté de ce cher compagnon. Ils n'eurent besoin d'aucun enseignant. D'eux-mêmes, ils virent à travers les voiles qui les avaient aveuglés et parvinrent au désir suprême de leurs coeurs.

Comme l'avait demandé la Beauté Bénie, Mirza Javad de Turshiz alla chez eux une nuit. Mirza Javad avait à peine ouvert la bouche qu'ils acceptèrent la Foi. Ils n'hésitèrent pas un seul instant car ils étaient entièrement réceptifs. Comme le dit le verset Qur'anique: "L'huile qui pourrait s'enflammer, même si le feu ne la touche pas! C'est la lumière sur la lumière." [xl] Ce qui signifie que l'huile est si bien préparée, si prête à être enflammée, qu'elle prend presque feu d'elle-même, bien qu'il n'y ait aucune flamme à proximité; ce qui signifie que la capacité de foi de celui qui le mérite peut être si grande que la lumière jaillit sans la communication d'un simple mot. C'est ainsi qu'il en était avec ces hommes au coeur pur; en vérité, ils étaient loyaux, fermes, et si dévoués à Dieu.

L'aîné, Muhammad-Sadiq accompagna Baha'u'llah d'Iraq à Constantinople et de là à Andrinople où il vécut heureux pendant un certain temps, près de son Seigneur. Il était humble, tolérant, reconnaissant; il avait toujours le sourire aux lèvres; il avait le coeur léger et son âme remplie d'amour pour Baha'u'llah. Plus tard, il reçut l'ordre de retourner en Iraq car sa famille y était et il resta dans cette ville un certain temps, rêvant et se souvenant.

Puis un grand drame se produisit, les quatre frères et leur noble oncle furent emprisonnés. Victimes de représailles, captifs, ils furent amenés à Mosoul. L'oncle Aqa Muhammad-Rida était un vieil homme, à l'esprit illuminé, au coeur spirituel, un homme détaché de toutes les choses de ce monde. Il avait été très riche en Iraq, profitant du confort et des plaisirs mais maintenant à Hadba - Mosoul - il devint la principale victime parmi les prisonniers et souffrit d'un affreux dénuement. Il fut destitué mais resta digne, patient, content et reconnaissant. Gardant pour lui-même un endroit à l'écart, il loua Dieu nuit et jour jusqu'à sa mort. Il donna son coeur à l'amour de son coeur, se détacha des chaînes de ce monde inconstant et s'éleva vers le Royaume éternel.

Que Dieu le plonge dans les eaux du pardon, le fasse entrer dans le jardin de Sa compassion et de Son bon plaisir, et le garde au paradis jusqu'à la fin des temps.

En ce qui concerne Muhammad-Sadiq, lui aussi, à Mosoul, fut sujet aux difficultés dans le sentier de Dieu. C'était aussi une âme calme, contente avec son Seigneur et Lui étant agréable. Finalement lui aussi répondit à la voix du Roi de Gloire: "Seigneur, me voici !" et en vint à accomplir ses versets: "O toi dont l'âme est en repos, retourne vers ton Seigneur, content et lui étant agréable. Entre parmi Mes serviteurs, entre dans Mon paradis." [xli]

Et Muhammad-'Ali, une fois libéré de sa captivité se hâta de Mosoul vers la Terre Sainte. Là, il vécut à proximité de la Grâce inépuisable. Bien qu'il connut de grandes épreuves, son coeur était en paix. En ce qui concerne son frère Ibrahim, mentionné ci-dessus, lui aussi vint de Mosoul à 'Akka mais dans une région proche. Là, avec patience, calme, satisfaction, mais avec difficultés, il s'engagea dans les affaires tout en pleurant l'ascension de Baha'u'llah jour et nuit. Humblement et avec contrition, son visage tourné vers les royaumes mystérieux de Dieu, il épuisa sa vie. Finalement, consumé par les années, ne pouvant pratiquement plus se déplacer, il arriva à Haifa où il trouva un coin dans l'hospice des voyageurs et passa son temps humblement, appelant Dieu, Le suppliant, offrant ses prières. Petit à petit rongé par l'âge, sa personne commença sa dissolution et finalement se dévêtit du vêtement de la chair et, avec un esprit sans voile, s'envola vers les royaumes du Très-Miséricordieux. Il fut transporté de cette sombre vie vers l'air lumineux et fut plongé dans une mer de lumière. Que Dieu illumine son tombeau de larges rayons et apaise son esprit par les brises de la compassion divine! Que sur lui soient la miséricorde de Dieu et Son bon plaisir.

En ce qui concerne Aqa Habibu'llah, lui aussi fut fait prisonnier en Iraq et fut banni de Mosoul. Pendant longtemps, il vécut dans cette ville, sujet aux épreuves mais demeura heureux et sa foi grandissait de jour en jour. Lorsqu'il y eut la famine à Mosoul, la vie fut encore plus dure pour les étrangers mais dans le souvenir de Dieu, leur coeur resta serein [xlii] et leur âme se nourrit de la nourriture du Ciel. Ainsi, ils endurèrent tout avec une patience étonnante. Les gens s'étonnaient de voir ces étrangers au milieu d'eux, ni affligés ni terrifiés, continuant de rendre grâce jour et nuit. "Quelle impressionnante confiance en Dieu ont-ils !" disaient-ils.

Habib était un homme d'une immense patience et d'un coeur joyeux. Il s'habitua à l'exil et vécut dans un état d'amour ardent. Après le départ de Baghdad, les prisonniers de Mosoul étaient constamment mentionnés par Baha'u'llah; avec beaucoup d'égard pour eux, Il manifesta Ses grâces infinies. Quelques années plus tard, Habib se hâta vers la miséricorde de Dieu et trouva un nid et un refuge sur les branches de l'Arbre céleste. Là, dans le paradis de tous les délices, avec les chants merveilleux, il déversa ses louanges à son Seigneur de bonté.


31. Aqa Muhammad-Ibrahim

Muhammad-Ibrahim, qui portait le titre de Mansur - le victorieux - était un chaudronnier. Cet homme de Dieu, un autre parmi les émigrants et les compagnons, était natif de Kashan. Dans sa jeunesse, il reconnut la nouvelle lumière et bût à la coupe sacrée qui est "trempée dans la fontaine de camphre" [xliii]. Il était un homme agréable, plein de zèle et de joie de vivre. Aussitôt que la lumière de la foi fut allumée dans son coeur, il quitta Kashan, alla à Baghdad et fut honoré d'être en présence de Baha'u'llah.

Aqa Muhammad avait un don de poète et il faisait des vers comme un collier de perles. A Zawra, c'est à dire Baghdad, la Demeure de Paix, il était en bons termes avec les amis et les étrangers, faisant toujours son possible pour montrer beaucoup de gentillesse à tous. Il amena ses frères de Perse à Baghdad, ouvrit un magasin d'artisanat et se consacra au bien-être des autres. Lui aussi fut fait prisonnier et fut exilé de Baghdad à Mosoul, après quoi il alla à Haifa, où, jour et nuit, humblement, il chantait des prières et des supplications et concentrait ses pensées vers Dieu.

Il resta longtemps à Haifa, servant avec succès les croyants et, avec beaucoup d'humilité et de discrétion vérifiait les besoins des voyageurs. Il se maria dans cette ville et eut de beaux enfants. Pour lui, chaque jour était une nouvelle vie et une nouvelle joie, et quel que soit l'argent qu'il gagnait il le dépensait pour les étrangers et les amis. Après la mort du Roi des Martyrs il écrivit une élégie pour commémorer ce croyant qui était tombé sur le champ du martyr et récita son ode en présence de Baha'u'llah; les vers étaient si touchants que tous ceux qui étaient présents pleurèrent et les voix s'élevèrent tristement.

Aqa Muhammad continua de vivre sa vie au but élevé, sans changer sa condition intérieure, avec ferveur et amour. Il accueillit la mort riant comme une rose soudainement éclose et criant: "Me voici !" Ainsi, il quitta Haifa, l'échangeant pour le monde supérieur. De cette étroite bande de terre, il se hâta vers le Bien-Aimé, sortant de cet amas de poussière pour planter sa tente dans un bel endroit resplendissant. Que les bénédictions soient sur lui et qu'il soit sous un meilleur toit. [xliv] Puisse Dieu le couvrir de miséricorde. Puisse-t-il reposer sous le tabernacle du pardon et être amené dans les jardins du Ciel.


32. Zaynu'l-'Abidin Yazdi

Zaynu'l-'Abidin de Yazd était un des émigrants qui mourut sur le chemin de la Terre Sainte. Lorsque, à Manshad, cet homme dévoué entendit pour la première fois la parole de Dieu, il entra dans une vie sans repos. Une passion sacrée le remua. Son âme naquit de nouveau. La lumière de la direction s'éclaira à la lampe de son coeur, l'amour de Dieu déclencha une révolution en son fort intérieur. Transporté par l'amour de la beauté du Bien-Aimé, il quitta sa maison qui lui était très chère et partit pour la Terre désirée.

Comme il voyageait avec ses deux frères, heureux à l'espoir de la rencontre qu'il allait faire, il s'arrêtait sur chaque colline, dans chaque plaine, village et hameau pour visiter les amis. Mais la grande distance qui s'étendait devant lui se changea en une mer de difficultés et, bien que son esprit languissait, son corps s'affaiblit et finalement il tomba malade et devint faible, alors qu'il n'avait même pas de toit.

Bien que malade, il ne renonça pas à son voyage et ne modifia pas ses décisions. Il possédait une incroyable volonté et était déterminé. Mais sa maladie s'aggravait chaque jour jusqu'à ce que finalement, il prit son envol vers la miséricorde de Dieu et abandonna son âme à un désir insatisfait.

Bien que, vu de l'extérieur il n'ait jamais vidé la coupe de la rencontre, jamais vu la beauté de Baha'u'llah, malgré tout il obtint le vrai esprit de la communion spirituelle. Il est compté comme un de ceux qui arrivèrent en Sa présence et pour lui, la récompense pour ceux qui parvinrent en Sa présence est certaine et décrétée. Il avait une âme d'acier, il était fidèle, dévoué et vrai. Tout en lui était droiture et son unique désir était d'adorer son Seigneur. Il marcha sur les sentiers de l'amour. Il était connu de tous pour sa grande loyauté et ses intentions pures. Puisse Dieu remplir pour lui la coupe de la réunion dans un pays merveilleux, le faire entrer dans le Royaume éternel et consoler ses yeux par la vue des lumières de ce Royaume mystérieux.


33. Haji Mulla Mihdiy-i-Yazdi

Mulla Mihdi de Yazd était encore un de ceux qui abandonnèrent leur pays natal. Bien qu'en apparence cet excellent homme ne fasse pas partie des personnes instruites, il était expert dans les traditions sacrées musulmanes et un interprète éloquent des textes transmis oralement.

Persévérant dans ses dévotions, connu pour ses pratiques pieuses, ses veillées en communion avec Dieu ; son coeur était illuminé et il était spirituel de pensée et d'âme. Il passait la plus grande partie de son temps à se recueillir, à réciter les prières obligatoires, à confesser ses faiblesses et à supplier le Seigneur. Il était un de ceux qui comprennent les mystères et un confident de grande droiture. Comme enseignant de la Foi, il n'était jamais en manque de mots, se donnait libre court, racontant les textes et traditions sacrés les uns après les autres.

Quand les nouvelles le concernant se répandirent dans la ville et qu'il fut connu partout, par les princes comme par les pauvres, sous son nouveau nom, librement il déclara son adhésion et alors fut publiquement en disgrâce. Puis les sataniques ulémas de Yazd se levèrent et publièrent un décret de peine de mort. Comme le mujtahid Mulla Baqir de Ardikan refusa de confirmer la sentence de mise à mort émise par ces sombres religieux, Mulla Mihdi resta vivant mais dut quitter sa ville natale. Avec ses deux fils, l'un, le futur grand martyr Jinab-i-Varqa, et l'autre Jinab-i-Husayn, il partit pour le pays du Bien-Aimé. Sur son chemin, dans chaque ville et village, il répandit la Foi, fournissant des arguments et des preuves clairs, se rapportant et interprétant les traditions sacrées et les signes évidents [xlv]. Il ne se reposait pas même un moment, partout il répandait le parfum de l'amour de Dieu et diffusait les souffles frais de sainteté. Et il inspirait les amis, les rendant impatients d'enseigner les autres à leur tour et de se surpasser en connaissance.

C'était une grande âme avec un coeur fixé sur la beauté de Dieu. Du jour où il fut créé et vint au monde, son unique pensée fut de consacrer tous ses efforts à acquérir la grâce pour le jour où il naîtrait dans l'autre monde [xlvi]. Son coeur était illuminé, sa pensée spirituel, son âme aspirant à sa destination céleste. Il fut emprisonné sur son chemin et en traversant le désert et montant et descendant les montagnes, il supporta des souffrances terribles et sans fin. Mais la lumière de la foi brillait de ses yeux, dans sa poitrine l'amour brûlait et ainsi il passait joyeusement les frontières jusqu'à ce qu'il atteignît Beyrouth. Il resta quelques jours dans cette ville, malade, nerveux, impatient. Son désir ardent grandit et son agitation était telle que malgré sa faiblesse et sa maladie, il ne pouvait plus attendre. Il partit à pied pour la maison de Baha'u'llah. Ses pieds étaient meurtris et blessés parce qu'il n'avait pas de bonnes chaussures pour le voyage, sa maladie empirait; il pouvait difficilement bouger mais il continuait malgré tout. On ne sait comment, il arriva au village de Mazra'ih et là, près de la résidence, il mourut. Son coeur trouva son Bien-Aimé au moment où il ne pouvait plus supporter la séparation. Laissons les amoureux être avertis par son histoire; laissons-les savoir comment il joua avec sa vie dans son désir ardent pour la Lumière du Monde. Que Dieu lui donne à boire d'une coupe débordante dans les jardins éternels; dans l'assemblée suprême, que Dieu répande sur son visage les rayons de lumière. Que la gloire du seigneur soit sur lui. Son tombeau sacré est à Mazra'ih, à côté de 'Akka.


34. Son Eminence Kalim (Mirza Musa)

Photo: Mirza Musa

Jinab-i-Mirza Musa était le véritable frère de Baha'u'llah et dès sa tendre enfance il fut élevé sous l'aile protectrice du Plus Grand Nom. Il but l'amour de Dieu dans le lait de sa mère; encore nourrisson il montrait un attachement extraordinaire pour la Beauté Bénie. A tout moment il était l'objet de la grâce, la faveur et l'amour divins. Après la mort de son distingué père, Mirza Musa fut élevé par Baha'u'llah, grandissant vers la maturité dans le havre de ses soins. Jour après jour, la servitude et la dévotion de ce jeune grandissaient. En tout, il vivait selon les commandements et il était entièrement coupé de toutes pensées de ce monde. Comme une lampe éclairée, il brillait dans cette maison. Il ne désirait ni rang ni fonction, et n'avait aucun but terrestre. Son seul désir était de servir Baha'u'llah et pour cette raison, il ne se séparait jamais de son frère. Qu'importe les tourments infligés, sa loyauté égalait la cruauté des autres, car il avait bu le vin de l'amour inaltérable. Puis la voix se fit entendre, criant de Shiraz et d'une seule déclaration de Baha'u'llah son coeur fut rempli de lumière et, d'une seule rafale qui souffla sur les jardins de la foi, il en captura le parfum. Immédiatement, il commença à servir les amis. Il m'était très attaché et était continuellement soucieux de mon bien-être. A Tihran il passait jours et nuits à propager la Foi et, petit à petit, devint très connu de tous; il passait généralement son temps en compagnie des âmes bénies. Puis, Baha'u'llah quitta Tihran, voyagea en Iraq et parmi ses frères, Aqay-i-Kalim [xlvii] et Mirza Muhammad-Quli furent les deux qui restèrent en sa compagnie. Ils se détournèrent de la Perse et des persans, et fermèrent leurs yeux au confort et à la paix; dans le sentier de l'Aimé ils choisirent de tout leur coeur d'accepter les calamités qui leur seraient destinées. Ainsi ils arrivèrent en Iraq.

Pendant les jours durant lesquels Baha'u'llah avait disparu de la vue, c'est-à-dire, quand Il était en voyage au Kurdistan, Aqay-i-Kalim vécut au bord d'une abîme; sa vie était constamment en danger, et chaque jour qui passait était pire que la veille; malgré tout, il supporta tout et n'eut pas peur. Quand enfin la Beauté Bénie revint du Kurdistan, Aqay-i-Kalim reprit son poste au Seuil sacré, rendant tous les services qu'il lui était possible de rendre.

Aussi, fut-il connu partout. Quand Baha'u'llah quitta Baghdad pour Constantinople, Aqay-i-Kalim était avec Lui et continua de Le servir durant le voyage et il en fit de même de Constantinople à Andrinople. C'est pendant son séjour dans cette ville qu'il détecta l'odeur de rébellion chez Mirza Yahya. Jour et nuit, il essayait de le faire changer de conduite mais tout était inutile. Au contraire, il était étonnant de voir comment, comme un poison mortel, les tentations et les suggestions sataniques de Siyyid Muhammad agissaient sur Mirza Yahya de façon telle que Aqay-i-Kalim abandonna finalement tout espoir. Il ne cessa jamais d'essayer, pensant que, d'une manière ou d'une autre, il pourrait arrêter la tempête et secourir Mirza Yahya du gouffre. Son coeur était rongé par le désespoir et la peine. Il essaya tout ce qu'il savait. Finalement il dut admettre la vérité de ces paroles de Sana'i:
Si vous portiez mon amour à l'idiot
Ou pensiez que mes secrets puissent être dévoilés
A celui qui n'est pas sage -
Alors au sourd jouez de la harpe et chantez
Ou placez-vous devant l'aveugle et tenez
un miroir devant ses yeux.


Quand tout espoir disparut, il stoppa toute relation en disant: "O mon frère, si d'autres sont dans le doute concernant cette affaire, vous et moi connaissons la vérité. Avez-vous oublié l'amour de Baha'u'llah et comment Il nous a élevés tous les deux? Quel soin Il prit de vos leçons et votre calligraphie; comment, constamment, Il surveillait votre orthographe et votre dissertation et vous encourageait à apprendre les différents styles de calligraphie; Il guidait même votre main de ses propres doigts bénis. Qui ne sait pas combien Il vous a favorisé, comment Il vous a élevé dans son giron. Est-ce que ce sont vos remerciements pour toute sa tendresse - que vous conspiriez avec Siyyid Muhammad et désertiez l'abri de Baha'u'llah? Est-ce là votre loyauté? Est-ce là la réponse à tout Son amour?" Malgré tout, les mots n'eurent aucun effet, au contraire, les jours passant, Mirza Yahya révélait de plus en plus son intention cachée. Puis, finalement, la rupture finale arriva.

D'Andrinople, Aqay-i-Kalim suivit le convoi de Baha'u'llah jusqu'à la forteresse de 'Akka. Son nom était spécialement indiqué dans le décret du sultan, et il était condamné au bannissement perpétuel [xlviii]. Dans la Plus Grande Prison il consacra tout son temps à servir Baha'u'llah et eut l'honneur d'être continuellement en présence de son frère, tenant aussi compagnie aux croyants; jusqu'au jour où il quitta ce monde de poussière et se hâta vers le monde saint, mourant avec humilité et pénitence en suppliant son Seigneur.
Pendant la période de Baghdad le bien connu Ilkhani, fils de Musa Khan-i-Qazvini eut, par Siyyid Javad-i-Tabataba'i, une audience avec Baha'u'llah. A cette occasion, Siyyid Javad plaida de la part de Ilkhani en ces termes: "Cet Ilkhani, 'Ali-Quli Khan, quoique pécheur et être d'une longue vie de passions, s'est maintenant repenti. Il se tient devant vous, regrettant sa conduite passée et à compter de ce jour il ne fera pas, même un souffle, qui soit contraire à votre bon plaisir. Je vous prie d'accepter son repentir, donnez-lui votre grâce et vos faveurs." Baha'u'llah répondit: "Parce qu'il vous a choisi comme intermédiaire, je vais cacher ses péchés et je ferai le nécessaire pour apporter confort et paix à son esprit."
Ilkhani était un homme de grande fortune mais il avait tout dilapidé dans les plaisirs de la chair. Il était maintenant dans la misère à un tel point qu'il n'osait même pas sortir de sa maison car les créanciers l'attendaient pour lui tomber dessus. Baha'u'llah lui dit d'aller chez 'Umar Pasha, le gouverneur de Damas et d'obtenir de lui une lettre de recommandation pour Constantinople. Ilkhani obéit et reçut toute l'assistance du gouverneur de Baghdad.
Après le désespoir, il commença à espérer à nouveau et partit pour Constantinople. Lorsqu'il arriva à Diyarbakr [xlix], il rédigea une lettre de la part de deux marchands arméniens. "Ces deux personnes vont partir pour Baghdad" disait sa lettre. "Elles m'ont montré beaucoup de courtoisie et m'ont demandé une lettre de recommandation. Je n'avais aucun refuge ou abri excepté votre bonté; aussi je vous supplie de leur montrer de l'indulgence." L'adresse écrite sur l'enveloppe était: "A Son Eminence Baha'u'llah, le Chef des babis".
Les marchands présentèrent cette lettre à Baha'u'llah à l'entrée du pont et lorsqu'Il demanda de quoi il s'agissait, leur réponse fut: "A Diyarbakr, Ilkhani nous a donné les détails de cette Cause". Puis ils L'accompagnèrent jusqu'à sa maison. Quand la Beauté Bénie entra dans les appartements de la famille, Aqay-i-Kalim était là pour Le rencontrer. Baha'u'llah s'écria: "Kalim, Kalim! La renommée de la cause de Dieu a atteint les portes de Diyarbakr!" Et Il était souriant, jubilant. Mirza Musa était un vrai frère de la Beauté Bénie; c'est pourquoi il resta fidèle jusqu'à la fin, dans toutes les circonstances. Que sur lui soient les louanges et les salutations et le souffle de vie et de gloire; que sur lui soient la miséricorde et la grâce.


35. Haji Muhammad Khan

Haji Muhammad Khan était un autre de ceux qui abandonnèrent leur maison et vinrent s'installer près de Baha'u'llah. Cet homme distingué, natif de Sistan, était un baloutchi. Quand il était encore très jeune, il s'enflamma et devint un mystique - un 'arif ou disciple. En derviche errant, entièrement désintéressé, il quitta sa maison et, suivant la règle derviche, voyagea à la recherche de son murshid, le guide parfait. Car il languissait, comme les derviches qalandar disaient, de découvrir "le prêtre Mage" ou le guide spirituel. Partout il continua ses recherches. Il parlait à toutes les personnes qu'il rencontrait. Mais ce qu'il attendait c'était le doux parfum de l'amour de Dieu, et ceci, il ne pouvait le détecter chez qui que ce soit, gnostiques ou philosophes, ou même membres de la secte des shaykhis.
Tout ce qu'il pouvait voir chez les derviches c'était leur barbe épaisse et leurs mains tendues en signe de mendicité. Ils étaient "derviches" - pauvres en tout sauf en Dieu - de nom seulement; tout ce qui leur importait, lui semblait-il, était ce qui tombait dans leurs mains. Il ne trouva aucune illumination parmi les illuminés; il n'entendit rien venant d'eux que des disputes oisives. Leur grandiloquence n'était pas de l'éloquence et leurs subtilités n'étaient que figures sinueuses de discours. La vérité ne se trouvait pas là; la profondeur de la signification intérieure était absente. Car la vraie philosophie est celle qui produit des récompenses d'excellence et parmi ces érudits on ne pouvait trouver aucun de ces fruits; à la pointe de leur accomplissement, ils sont devenus les esclaves du vice, menant une vie d'insouciance et s'abandonnant à des plaisirs personnels condamnables. Pour lui, ils étaient dépourvus de tout ce qui constituait l'élévation, la qualité qui distingue le genre humain.

En ce qui concernait le groupe des shaykhis, leur essence avait disparu, il ne restait que le fond; le coeur était parti, laissant la coquille derrière; la plus part de leurs dialectiques s'étaient évanouies et ne restait maintenant que le superflu.

C'est à ce même moment qu'il entendit l'appel du Royaume de Dieu, il cria "Oui, en vérité!" et il partit comme le vent du désert. Il voyagea de longues distances, arriva à la Plus Grande Prison et fut en présence de Baha'u'llah. Quand ses yeux tombèrent ce visage brillant, instantanément il se soumit. Il retourna en Perse afin de pouvoir rencontrer ces gens qui disaient être les disciples de la Voie, ces anciens amis qui cherchaient la Vérité et de pouvoir discuter avec eux, comme sa loyauté et son devoir le demandaient. Allant et venant, le Haji se dévoua à chacun de ses amis, les rassembla et laissa chacun entendre la nouvelle chanson du Ciel. Il atteignit sa ville natale et mit les affaires familiales en ordre, subvenant aux besoins de chacun, prévoyant leur sécurité, leur bonheur et leur confort. Après cela il leur dit au revoir. A sa famille, sa femme, ses enfants et petits-enfants il dit: "Ne cherchez pas après moi, n'attendez pas mon retour."

Il prit un équipage et partit loin; il traversa les montagnes, les plaines, cherchant et trouvant les mystiques, ses amis. Lors de son premier voyage, il alla chez Mirza Yusuf Khan (Mustawfiyu'l-Mamalik) à Tihran. Quand il eut dit ce qu'il avait à dire, Yusuf Khan fit un voeu et déclara que si son voeu se réalisait, il croirait; le voeu était celui d'avoir un fils. Si une telle bonté lui arrivait, Yusuf Khan serait convaincu. Le Haji rapporta cela à Baha'u'llah et reçut une promesse ferme en réponse.
Ainsi, quand Haji rencontra Yusuf Khan lors de son deuxième voyage, il le trouva avec un enfant dans les bras. "Mirza," cria Haji, "loué soit Dieu! Votre test a démontré la Vérité. Vous avez pris votre oiseau de joie au piège." "Oui," répondit Yusuf Khan, "la preuve est claire, je suis convaincu. Cette année, lorsque vous irez vers Baha'u'llah, dites-lui que j'implore Sa grâce et Sa faveur pour cet enfant afin qu'il puisse être protégé par la garde protectrice de Dieu."
Puis Haji Muhammad arriva près du futur martyr bienheureux, le Roi des Martyrs, et lui demanda d'intercéder, afin que lui, le Haji, puisse être autorisé à garder la porte de Baha'u'llah. Le Roi des Martyrs envoya sa demande par écrit, après quoi Haji Khan arriva à la Plus Grande Prison et construisit sa maison dans le voisinage de son Ami Bien-Aimé. Il se réjouit de cet honneur pendant de longues années et plus tard, dans le jardin de Mazra'ih, il fut très fréquemment en présence de Baha'u'llah. Après que le Bien-Aimé eût quitté ce monde, Haji Khan resta fidèle à l'Alliance et au Testament, fuyant les hypocrites.
Finalement, pendant l'absence de votre serviteur, parti en voyage en Europe et en Amérique, le Haji prit son chemin vers l'hospice des voyageurs au Haziratu'l-Quds et là, à côté du mausolée du Bab, il prit son envol pour le monde d'en haut. Puisse Dieu rafraîchir son esprit avec l'air parfumé du musc du paradis d'Abha et les douces saveurs de sainteté qui soufflent du Ciel le plus élevé. Que sur lui soient les salutations et les louanges. Son tombeau lumineux est à Haifa.


36. Aqa Muhammad-Ibrahim Amir

Muhammad-Ibrahim Amir venait de Nayriz. C'était une personne bénie; il était comme une coupe remplie du vin rouge de la foi. Au temps où il fut attiré par le tendre amour, il était dans la fleur de la jeunesse. Puis, il fut une proie pour les oppresseurs, et après l'agitation de Nayriz et toutes les souffrances, ses persécuteurs mirent la main sur lui. Trois farrashes attachèrent ses bras et ses mains derrière son dos, mais l'Amir, doué d'une grande force, cassa ses liens, empoigna un poignard à la ceinture d'un farrash, se sauva et alla en Iraq. Là il s'engagea à écrire les versets sacrés et plus tard eut l'honneur de servir au Seuil sacré. Constant et fidèle, il travaillait jour et nuit. Pendant le voyage de Baghdad à Constantinople, puis à Andrinople et à la Plus Grande Prison, il était toujours là pour rendre service. Il se maria avec la servante de Dieu, Habibih, qui servait aussi au Seuil sacré et sa fille Badi'ih devint la compagne de Husayn-Aqa Qahvih-chi. L'Amir resta ferme dans le service pendant toute sa vie, mais après l'ascension de Baha'u'llah, sa santé déclina et finalement il quitta ce monde de poussière et se hâta vers le monde sans tâche d'en haut. Puisse Dieu illuminer le lieu où il repose des rayons du Royaume le plus élevé. Que sur lui soient les salutations et les louanges. Son tombeau lumineux est à 'Akka.


37. Mirza Mihdiy-i-Kashani

Cet homme honoré, Mirza Mihdi, était de Kashan. Pendant sa jeunesse, sous la tutelle de son père, il avait étudié les sciences et les arts, et était devenu très habile dans l'écriture de la prose et des vers ainsi que dans la calligraphie de style shikastih [l]. Il se distinguait de ses camarades car il les dépassait d'une tête et des épaules. Encore enfant, il apprit l'avènement du Seigneur, s'enflamma et devint un de ceux qui "donnèrent tout pour acheter Joseph". Il était le chef des chercheurs, le seigneur des amoureux; avec éloquence, il commença à enseigner la Foi et à prouver l'authenticité de la Manifestation. Il fit des convertis, et parce qu'il languissait de Dieu, il devint la risée de Kashan, dénigré par ses amis comme par les étrangers, exposé aux injures de ses fidèles compagnons.
L'un disait: "Il a perdu l'esprit". Et un autre: "Il est une disgrâce publique. La chance s'est retournée contre lui. C'est un homme mort". Les tyrans le raillèrent et ne lui épargnèrent rien. Quand la vie devint insoutenable et qu'une guerre ouverte éclata, il quitta sa ville natale et voyagea en Iraq, le centre de la nouvelle lumière, où il put être en présence du Bien-Aimé de toute l'humanité. Il resta là quelque temps en compagnie des amis, composant des vers qui chantaient les louanges de Baha'u'llah. Plus tard, il reçut l'ordre de retourner chez lui et alla vivre pendant un certain temps à Kashan. Mais il était toujours tiraillé par l'amour ardent et ne pouvait supporter la séparation. Il retourna donc à Baghdad, amenant avec lui sa soeur Bien-Aimée, la troisième épouse [li].
Là, il resta sous la bienveillante protection de Baha'u'llah jusqu'au départ pour Constantinople, mais il reçut les directives de rester derrière et de garder la maison sacrée. Infatigable, consumé par l'amour, il attendit. Quand les amis furent bannis de Baghdad vers Mosoul, il fut parmi les prisonniers, une victime parmi les autres. Avec les plus grandes difficultés, il atteignit Mosoul où de nouvelles calamités l'attendaient; il fut malade presque tout le temps, rejeté et sans ressources. Cependant, il endura tout cela pendant une longue période, fut patient, garda sa dignité en rendant grâce continuellement.
Finalement, il ne put accepter l'absence de Baha'u'llah plus longtemps. Il demanda la permission, reçut l'autorisation de partir et prit la route pour la Plus Grande Prison. La route était longue et dure et il souffrit cruellement pendant le voyage, lorsqu'il arriva dans la prison de 'Akka, il était épuisé et usé jusqu'aux os. C'était à l'époque où la Beauté Bénie était emprisonnée dans la citadelle, au centre des casernes. Malgré la terrible fatigue, Mirza Mihdi y passa quelques jours pleins de joie. Pour lui, les calamités étaient des faveurs, les tribulations étaient la providence divine, le châtiment, la grâce abondante; car il endurait tout cela dans le sentier de Dieu cherchant à gagner son bon plaisir. Sa maladie s'aggrava; de jour en jour, il s'affaiblit; puis, à la fin, sous la grâce protectrice, il prit son vol vers l'inépuisable miséricorde du Seigneur.

Ce noble personnage avait été honoré parmi les hommes, mais pour l'amour de Dieu, il perdit son nom et son honneur. Il subit de nombreuses infortunes sans jamais se plaindre. Il était toujours satisfait des décrets de Dieu et marchait sur le sentier de la résignation. Le regard de faveur de Baha'u'llah était sur lui; il était près du Seuil divin. Ainsi, du début de sa vie jusqu'à la fin, il demeura dans le même état intérieur: immergé dans un océan de soumission et de consentement. "O mon Seigneur, prends moi, prends moi!" aurait-il pu crier, jusqu'à ce qu'il prit son élan vers le monde qu'aucun homme ne voit. Que Dieu lui permette de sentir les doux parfums de sainteté du paradis le plus élevé, et le rafraîchisse avec la coupe du vin cristallin tempéré à la fontaine de camphre [lii]. Que sur lui soient les salutations et les louanges. Sa tombe se trouve à 'Akka.


38. Mishkin-Qalam

Photo: Mishkin-Qalam

Parmi les exilés, les voisins et les prisonniers, il y avait aussi un second Mir 'Imad [liii], l'éminent calligraphe Mishkin-Qalam [liv]. Il maniait une plume de musc noir, et son front rayonnait de la Foi. Il était parmi les plus remarqués des mystiques et il avait un esprit fin et subtil. La renommée de ce voyageur spirituel s'étendait sur toutes les régions. Il était le premier calligraphe de Perse et bien connu de tous les grands; il jouissait d'une position spéciale parmi les ministres de la cour de Tihran, et parmi eux sa réputation était solidement établie [lv]. Il était connu à travers toute l'Asie Mineure; sa plume faisait l'admiration de tous les calligraphes, car il était expert dans tous les styles de calligraphie. Il était, en plus, un astronome qualifié.

Cet homme de grande distinction entendit parler de la Foi à Isfahan et c'est ainsi qu'il partit afin de rencontrer Baha'u'llah. Il traversa de grandes distances, parcourut des kilomètres, escalada des montagnes, traversa les déserts et la mer, jusqu'à ce qu'enfin, il arrive à Andrinople. Là, il atteignit des sommets de foi et d'assurance; là, il but le vin de la certitude. Il répondit aux appels de Dieu, entra en présence de Baha'u'llah, atteignit l'apogée en étant reçu et accepté. Maintenant, il était titubant et allait de ci de là comme un ivrogne dans son amour pour Dieu, et à cause de son désir violent et ardent, son esprit paraissait ailleurs. Son esprit pouvait s'élever puis tomber à nouveau; il semblait éperdu. Il passa un certain temps sous la grâce protectrice de Baha'u'llah et chaque jour de nouvelles bénédictions étaient déversées sur lui. Pendant ce temps, il produisait de splendides calligraphies; il écrivait le Plus grand Nom, "Ya Baha'u'l-Abha, ô Toi la Gloire du Très-Glorieux", avec une merveilleuse adresse, dans des formes différentes et les envoyait un peu partout [lvi].

Puis on lui demanda d'entreprendre un voyage à Constantinople et de s'installer avec Jinab-i-Sayyah. Lorsqu'il arriva dans cette grande ville, les dirigeants turques et persans le reçurent avec beaucoup d'honneur, captivés par son art de la calligraphie. Cependant, il commença courageusement et avec éloquence à enseigner la Foi. L'ambassadeur persan le prit en embuscade; il se rendit chez les vizirs du sultan et calomnia Mishkin-Qalam. "Cet homme est un agitateur", leur dit l'ambassadeur, "envoyé ici par Baha'u'llah pour causer le trouble et semer la discorde dans cette grande ville. Il a déjà réussi sur un grand nombre et il a l'intention d'en assujettir encore plus. Ces baha'is ont mis la Perse sens dessus dessous; maintenant ils ont commencé dans la capitale de la Turquie. Le gouvernement persan en a tué 20 000, espérant que par cette tactique il éteindrait les feux de la sédition." "Vous devriez vous rendre compte du danger, bientôt cette chose perverse enflammera la Turquie. Elle consumera la moisson de votre vie; elle brûlera le monde entier. Alors vous ne pourrez plus rien faire car il sera trop tard." En fait, cet homme calme et soumis, dans cette ville de l'Asie Mineure, était occupé uniquement à sa calligraphie et à son adoration à Dieu. Il avait essayé d'amener non pas la sédition, mais l'amitié et la paix. Il cherchait à réconcilier les disciples des différentes fois, non de les conduire vers la désunion. Il était au service des étrangers et aidait à éduquer les gens d'ici. Il était un refuge pour le malheureux et une corne d'abondance pour le pauvre. Il invitait tous les nouveaux venus à l'unité de l'humanité, il évitait l'hostilité et la méchanceté.

Cependant, l'ambassadeur persan exerçait un énorme pouvoir et il avait maintenu des contacts étroits avec les ministres depuis longtemps. Il avait de l'influence sur un grand nombre de personnes, les réunissait dans des réunions diverses et leur faisait croire toutes sortes de mensonges sur les croyants. Encouragés par les oppresseurs, des espions commencèrent à entourer Mishkin-Qalam. Puis, selon les instructions de l'ambassadeur, ils apportaient leurs rapports au premier ministre, spécifiant que l'individu en question essayait de créer le trouble jour et nuit, qu'il était un faiseur de trouble, un rebelle et un criminel. A la suite de cela, ils le mirent en prison puis l'envoyèrent à Gallipoli où il rejoignit notre propre compagnie de victimes.

Ils l'envoyèrent à Chypre et nous dans la prison de 'Akka. Sur l'île de Chypre, Jinab-i-Mishkin fut retenu prisonnier dans la citadelle de Famagusta et il resta dans cette ville comme captif de l'année 85 à 94.

Quand Chypre sortit des mains de la Turquie, Mishkin-Qalam fut libéré et se dirigea vers son Bien-Aimé dans la ville de 'Akka et là, il vécut entouré de la grâce de Baha'u'llah, faisant de merveilleuses calligraphies et les envoyant partout. Il avait tout le temps l'esprit joyeux, illuminé de l'amour de Dieu comme une bougie brûlant de vie. Il était une consolation pour tous les croyants.

Après l'ascension de Baha'u'llah, Mishkin-Qalam resta loyal, solidement établi dans le l'Alliance. Il se dressa devant les violateurs comme une épée brandie. Il n'y allait jamais à moitié avec eux: il n'avait peur de personne hormis Dieu; pas un seul instant il n'hésita, jamais il ne faiblit dans le service.

Après l'ascension, il fit un voyage en Inde où il s'associa avec les amoureux de la vérité. Il passa là-bas un certain temps, faisant de nouveaux efforts chaque jour. Lorsque j'appris qu'il n'était plus utile, je le fis venir et il revint dans la Plus Grande Prison, à la joie des croyants qui se sentaient bénis de l'avoir à nouveau avec eux. Il était à tout moment mon proche compagnon. Il avait une conversation éblouissante et un amour intense. Il était un recueil de toutes les perfections: croyant, confident, serein, détaché du monde, un compagnon sans égal, un homme d'esprit et son caractère était comme un jardin en fleurs. Pour l'amour de Dieu, il abandonna toutes les bonnes choses; il ferma les yeux au succès, il ne désirait ni confort ni repos, il ne cherchait aucune richesse, il désirait uniquement être libre de la souillure du monde. Il n'avait aucune attache à cette vie, mais passait ses jours et ses nuits en supplication et communion avec Dieu. Il était toujours souriant, pétillant de joie, il était l'esprit personnifié, l'amour incarné. Pour sa sincérité et sa loyauté il n'avait aucun égal, ni pour sa patience et son calme intérieur. Il était le désintéressement même, vivant du souffle de l'esprit.

S'il n'avait pas été amoureux de la Beauté Bénie, s'il n'avait pas placé son coeur dans le Royaume de Gloire, il aurait pu posséder tous les plaisirs de ce monde. Où qu'il aille, ses nombreux styles de calligraphie étaient des atouts considérables et ses grandes oeuvres lui apportaient attention et respect aussi bien des riches que des pauvres. Mais il était désespérément amoureux du vrai Amour de l'homme, et ainsi il était libre de toutes ces autres attaches, et pouvait flotter et monter dans le ciel infini de l'esprit.

Finalement, pendant mon absence, il quitta ce monde sombre et étroit et s'élança vers la terre des lumières. Là, dans la miséricorde infinie du havre de Dieu, il trouva les récompenses illimitées. Que sur lui soient les louanges et les salutations et la tendre grâce du Compagnon suprême.


39. Ustad 'Ali-Akbar-i-Najjar

Ustad 'Ali-Akbar, l'ébéniste [lvii], était compté parmi les justes, il était un prince de droiture. Il était un des premiers croyants de Perse et un membre actif de cette compagnie. Dès le début de la Cause, en confident fidèle, il délia sa langue pour proclamer la Foi. Il s'informa sur les preuves et étudia les écrits à fond. Il était également un poète talentueux, écrivant des vers en forme d'éloges à Baha'u'llah.

Exceptionnellement habile dans son métier, Ustad faisait un travail très ingénieux, travaillant le bois de telle façon que par sa complexité et sa précision, il ressemblait à de la mosaïque. Il était aussi un expert en mathématiques, résolvant et expliquant des problèmes difficiles.

De Yazd, cet homme vénéré voyagea en Iraq où il eut l'honneur d'être en présence de Baha'u'llah et reçut des grâces abondantes. La Beauté Bénie versa des faveurs sur Ustad 'Ali qui était en Sa présence presque chaque jour. Il était un de ceux qui furent exilés de Baghdad à Mosoul et qui endurèrent de dures épreuves. Il resta longtemps à Mosoul dans des circonstances extrêmement difficiles mais résigné à la volonté de Dieu, toujours en prière et en supplication et rendant toujours grâce.

Finalement il vint de Mosoul en Terre Sainte et là, sur le tombeau de Baha'u'llah, il méditait et priait. Dans l'obscurité de la nuit, affecté et inquiet, il se lamentait et pleurait; quand il suppliait Dieu son coeur brûlait avec lui; ses yeux se remplissaient de larmes et il élevait la voix et chantait. Il était entièrement détaché de cet amas de terre, de ce monde mortel. Il le fuyait, il ne demandait qu'une chose: prendre son essor; et il espérait que la récompense promise allait venir. Il ne pouvait pas accepter que la Lumière du Monde ait disparu, et ce qu'il recherchait c'était le paradis de la réunion avec Lui, et l'ardent désir de ses yeux était la gloire du Royaume d'Abha. Finalement, ses prières furent exaucées et il s'éleva vers le monde de Dieu, à l'endroit du rassemblement des splendeurs du Seigneur des seigneurs.

Que sur lui soient les bénédictions et les louanges de Dieu, et puisse Dieu l'amener dans la demeure de paix, comme Il l'a écrit dans son livre. "Pour eux il y a une demeure de paix avec leur Seigneur." [lviii] "Et à ceux qui Le servent, Dieu est débordant de bonté." [lix]


40. Shaykh 'Ali-Akbar-i-Mazgani

Photo: Shaykh 'Ali-Akbar-i-Mazgani, fils de Shahid-i-Mazgani.

Ce chef des âmes libres, des errants de l'amour de Dieu, n'était qu'un enfant quand, à Mazgan, il fut allaité au sein de la grâce. Il était un enfant de l'éminent érudit, Shaykh-i-Mazgani; son noble père était un des citoyens dirigeants de Qamsar, près de Kashan et il n'avait pas d'égal en termes de piété, de sainteté et de crainte de Dieu. Ce père avait toutes les qualités qui méritent les louanges; de plus, ses manières étaient plaisantes, ses dispositions bonnes, il était un excellent compagnon et il était réputé pour tout cela. Quand il rejeta toute contrainte et déclara ouvertement sa foi, les hommes sans foi, amis ou étrangers, lui tournèrent le dos et commencèrent à comploter sa mort. Mais il continua de propager la Cause, d'alerter le coeur des gens et d'accueillir les nouveaux venus avec autant de bienveillance qu'avant. Puis, à Kashan, la renommée de sa foi très profonde s'étendit aussi haut que la Voie Lactée. Alors les agresseurs sans pitié se levèrent, s'emparèrent de ses biens et le tuèrent.

'Ali-Akbar, le fils de celui qui avait donné sa vie sur le chemin de Dieu ne pouvait plus vivre dans cette ville. S'il était resté, lui aussi, comme son père, aurait été assassiné. Il resta quelque temps en Iraq et eut l'honneur d'être en présence de Baha'u'llah. Puis, il retourna en Perse, mais de nouveau, il languissait de voir Baha'u'llah et, avec sa femme, il prit la route à travers les déserts et les montagnes, parfois à cheval, parfois à pied, parcourant des miles, passant d'une berge à l'autre, et enfin il atteignit le lieu saint, et à l'ombre de l'Arbre divin, il trouva la sécurité et la paix.

Quand la beauté du Désiré quitta ce monde, 'Ali-Akbar resta loyal à l'Alliance et prospéra sous la grâce de Dieu. Ses dispositions et cet immense amour qui vibrait dans son coeur le poussaient à écrire de la poésie, à composer des vers et des ghazals, mais il ne connaissait ni la mesure, ni les rimes:

J'avais prévu de faire un poème mais mon Bien-Aimé m'a dit,
"Ne prévois que ceci: que tes yeux ne voient que Moi."


Son coeur, plein d'amour et en extase désirait les royaumes de son Seigneur compatissant; consumé par un amour brûlant, il quitta finalement ce monde et planta sa tente dans le monde de l'au-delà. Puisse Dieu envoyer sur sa tombe, du Royaume de son pardon, une pluie abondante [lx] de bénédictions, qu'Il lui accorde une grande victoire et le comble de ses bienfaits dans les profondeurs du Ciel.


41. Mirza Muhammad, le Serviteur de la maison des pélerins

Ce jeune de Dieu était d'Isfahan et, dès son jeune âge, fut connu par les chefs religieux de la ville pour sa grande intelligence. Il était de bonne naissance, sa famille était connue et respectée, et il était un érudit accompli. Il avait étudié la philosophie et l'histoire, les sciences et les arts, mais il avait soif du secret de la réalité et de la connaissance de Dieu. Sa soif fiévreuse ne fut pas apaisée par les arts et les sciences, cependant limpides comme l'eau. Il continuait à chercher et chercher, provoquant des débats en rassemblant des hommes instruits jusqu'à ce que finalement, il découvrit la signification de son rêve ardent, et l'énigme, le secret inviolable, se dévoila devant lui. Soudain il saisit le parfum des fleurs fraîches des jardins de la Splendeur de Dieu et son coeur fut illuminé par les rayons du Soleil de Vérité. Alors qu'avant il était comme un poisson hors de l'eau, maintenant il était arrivé à la source de vie éternelle; avant il était un papillon nocturne en recherche, maintenant il avait trouvé la bougie allumée. En vrai chercheur de vérité, il fut immédiatement revivifié par les suprêmes Bonnes Nouvelles; les yeux de son coeur furent illuminés par la nouvelle aurore de direction. Le feu de l'amour divin était si aveuglant qu'il détourna le visage de sa vie, de sa tranquillité, et de ses bienfaits et prit la route pour la Plus Grande Prison.

A Isfahan, il avait profité de tout le confort et la vie avait été agréable. Mais son désir pour Baha'u'llah le libéra de toute attache. Il parcourut de longs miles, souffrit d'intenses difficultés, échangea un palais pour une prison, et dans la forteresse de 'Akka assista les croyants, entra en présence de Baha'u'llah et Le servit. Lui qui avait été servi, servait maintenant les autres; lui qui avait été le maître, était maintenant le serviteur, lui qui avait été un chef, était maintenant un captif. Il n'avait ni repos, ni loisirs jour et nuit. Pour les voyageurs, il était un refuge véritable; pour les émigrants, un compagnon sans égal. Il servait au-delà de ses forces, car il était rempli d'amour pour les amis. Les voyageurs lui étaient dévoués et les émigrants reconnaissants. Il était tout le temps silencieux car il était toujours occupé.

Puis l'affliction suprême s'abattit sur nous et l'absence de Baha'u'llah fut insupportable. Mirza Muhammad ne pouvait pas rester silencieux, jour et nuit il se consumait; d'une tristesse brûlante, son foie et son coeur étaient atteints d'une angoisse fiévreuse et son corps ne put plus le supporter. Il pleurait et suppliait jour et nuit, languissant de partir vers cette terre inconnue.

"Seigneur, délivrez-moi, délivrez-moi de cette absence, laissez-moi boire à la coupe de la réunion, et trouvez-moi une place dans l'abri de Votre miséricorde, Seigneur des seigneurs!"

Finalement, il quitta ce monde de poussière, la terre, et prit son envol vers le monde qui n'a pas de fin. Puisse-t-il lui faire du bien, que la coupe déborde de la grâce de Dieu, puisse-t-il manger de bon appétit de cette nourriture qui donne vie au coeur et à l'âme. Que Dieu le conduise à la fin de ce voyage heureux et lui donne une part abondante des cadeaux qui seront alors accordés. [lxi]


42. Mirza Muhammad-i-Vakil

Mirza Muhammad-i-Vakil était un des captifs qui furent envoyés de Baghdad à Mosoul. Cette âme vertueuse était parmi ceux qui devinrent croyants à Baghdad. C'est là qu'il bût à la coupe de la résignation, à la volonté de Dieu, et chercha son repos à l'ombre de l'Arbre céleste. C'était un homme à l'esprit élevé et donnant confiance. Il était aussi extrêmement capable et un administrateur énergique dans les affaires importantes, réputé en Iraq pour ses sages conseils. Après être devenu croyant, il reçut le titre de Vakil - député. Voici comment cela se passa:

Il y avait un notable à Baghdad du nom de Haji Mirza Hadi, un bijoutier. Il avait un fils distingué, Aqa Mirza Musa, qui avait reçu de Baha'u'llah le titre de "Lettre de l'Eternité". Ce fils était devenu un croyant inébranlable. En ce qui concerne son père, le Haji, il était un être magnifique réputé pour sa générosité princière non seulement en Perse et en Iraq mais jusqu'en Inde. Au début, il était ministre persan; mais quand il vit comment Fath-'Ali Shah regardait les richesses matérielles, particulièrement les richesses matérielles des ministres persans et comment il s'emparait de tout ce qu'ils avaient accumulé et comment, non content de la confiscation de leurs possessions et meubles de valeur, il les punissait et les torturait de droite et de gauche, appelant cela une pénalité légale - le Haji redouta que lui aussi puisse être projeté dans l'abîme. Il abandonna sa position de ministre ainsi que sa maison et s'enfuit à Baghdad. Fath-'Ali Shah exigea que le gouverneur de Baghdad, Davud Pasha, le rapatria, mais le Pasha était un homme de courage et le Haji était mondialement connu pour ses capacités. Pour cela, le Pasha le respectait. Il l'aida et le Haji monta une affaire de bijouterie. Il vivait avec pompe et splendeur, comme un grand prince. Il était un des hommes les plus remarquables de son temps, car dans son palais il menait une vie de plaisir et d'opulence, mais il laissait derrière cette pompe, ce style et cette suite pour s'occuper de ses affaires et réaliser de gros profits.

La porte de sa maison était toujours ouverte. Les turques, les persans, les voisins, les étrangers des pays lointains, tous étaient ses hôtes honorés. La plupart des grands persans, quand ils venaient en pèlerinage aux tombeaux sacrés, s'arrêtaient dans sa maison où ils trouvaient un banquet servi et tout le luxe à leur portée. Le Haji était plus distingué que le grand Vizir de Perse; il surpassait tous les ministres par sa magnificence et, comme les jours passaient, il distribuait encore plus de largesse à tous ceux qui venaient et allaient. Il était la fierté des persans dans tout l'Iraq, la gloire de ses compatriotes. Même aux ministres turques et aux grands de Baghdad, il distribuait cadeaux et faveurs; et il n'avait pas d'égal pour son intelligence et sa perception.

A cause de son âge avancé, vers la fin de ses jours, les affaires de Haji déclinèrent. Cependant, il ne fit aucun changement dans sa façon de vivre. Exactement comme avant, il continua de vivre avec élégance. Les gens lui empruntaient beaucoup et ne remboursaient jamais. Une d'entre eux, la mère de Aqa Khan Mahallati, lui emprunta 100 000 tumans [lxii] et ne lui rendit pas un penny car elle mourut peu de temps après. Le Il-Khan, 'Ali-Quli Khan, était un autre débiteur; un autre était Sayfu'd-Dawlih, un fils de Fath-'Ali Shah; une autre, Valliyyih, une fille de Fath-'Ali Shah; ce ne sont que quelques exemples parmi d'autres, parmi les Émirs turcs et les grands de Perse et d'Iraq. Toutes ces dettes restèrent impayées et irrécouvrables. Malgré tout, cet homme éminent et princier continua de vivre exactement comme avant.

Vers la fin de sa vie, il développa un amour remarquable pour Baha'u'llah et très humblement entra en sa présence. Je me rappelle qu'un jour, il dit à la Beauté Bénie que vers l'année 1250, Mirza Mawkab, le fameux astrologue, visitait les tombeaux. "Un jour, m'a-t-il dit," continua le Haji: "Mirza, je vois une conjonction étrange et unique des étoiles. Cela ne s'est jamais vu avant. Cela prouve qu'un événement capital va prendre place et je suis certain que cet événement ne peut être que la venue du Qa'im promis."

Telle était la situation de cet illustre prince quand il mourut, laissant comme héritiers un fils et deux filles. Pensant qu'il était toujours aussi riche, les gens s'imaginèrent que ses héritiers allaient hériter des millions, car chacun connaissait son train de vie. Le représentant diplomatique persan, les derniers mujtahids et le perfide juge, aiguisèrent leurs dents. Ils provoquèrent une dispute entre les héritiers pour obtenir des gains substantiels. Avec cette idée à l'esprit, ils firent tout leur possible pour ruiner les héritiers, l'idée étant de mettre les héritiers nus, alors que le diplomate persan, les mujtahids et le juge accumuleraient les butins. Mirza Musa était un croyant dévoué; ses soeurs, cependant, étaient d'une autre mère, et elles ne connaissaient rien de la Cause. Un jour, les deux soeurs, accompagnées du gendre de feu Mirza Siyyid Rida, vinrent dans la maison de Baha'u'llah. Les deux soeurs entrèrent dans les appartements de la famille pendant que le gendre s'installait dans les salles publiques de réception. Les deux filles dirent à Baha'u'llah: "l'envoyé persan, le juge et les mujtahids sans foi nous ont détruits. Vers la fin de sa vie, le feu Haji ne faisait confiance en personne excepté en Vous. Nous mêmes avons été insouciantes et nous aurions dû rechercher votre protection; de toute façon, nous sommes venues maintenant implorer votre pardon et votre aide. Notre espoir est que vous ne nous renvoyiez pas désespérées, et que par votre faveur et votre soutien nous serons sauvées. Daignez alors étudier notre cas et oublier nos fautes."

En guise de réponse, la Beauté Bénie déclara qu'une intervention dans des affaires de ce genre Lui était répugnante. Malgré tout, elles continuèrent à Le supplier. Elles restèrent toute une semaine dans les appartements familiaux, suppliant matin et soir des faveurs et des grâces. " Nous ne lèverons pas notre tête de ce Seuil," disaient-elles," nous chercherons refuge dans cette maison; nous resterons ici, à la porte de Celui qui garde les anges, jusqu'à ce qu'Il daigne étudier nos intérêts et nous sauver des oppresseurs."

Chaque jour, Baha'u'llah les conseillait, disant: "Les affaires de cette sorte sont dans les mains des mujtahids et des autorités du gouvernement. Nous ne nous occupons pas de telles affaires." Mais elles continuaient avec leurs impertinences, insistant, implorant, mendiant de l'aide. Or, la maison de Baha'u'llah était dépouillée des choses terrestres et ces dames, habituées au meilleur de toutes choses pouvaient difficilement être satisfaites avec du pain et de l'eau. La nourriture devait leur être procurée à crédit. En bref, de tous côtés, il y avait des problèmes.

Finalement un jour Baha'u'llah me convoqua en Sa présence. "Ces dames estimées", dit-Il, "avec toutes leurs exactions nous ont mis dans un dérangement considérable, Il n'y a pas d'autre solution, vous devez vous occuper de ce cas. Mais vous devez résoudre cette affaire compliquée dans son intégralité et en un seul jour."

Le matin suivant, accompagné de Aqay-i-Kalim, je me rendis dans la maison de feu Haji. Nous appelâmes des experts et ils prirent tous les bijoux dans l'appartement du premier étage; les livres de dépenses et de comptes concernant les propriétés furent placés dans une seconde pièce; les meubles de valeur et les objets d'art de la maison dans une troisième. Un certain nombre de bijoutiers arrivèrent et évaluèrent les pierres. D'autres experts évaluèrent la maison, les magasins, les jardins, les bains. Dès qu'ils commencèrent leur travail, je sorti et postai quelqu'un dans chaque pièce afin que les experts puissent finir leurs tâches. Il était déjà presque midi. Alors nous primes le déjeuner, après quoi les experts durent diviser tout en deux parts égales afin que les lots puissent être assignés; une part serait celle des filles et l'autre, celle du fils Mirza Musa [lxiii]. Puis, je partis me coucher car j'étais malade. Dans l'après-midi je me levai, pris du thé et repartis pour les appartements familiaux de la maison. Là, je vis que les choses avaient été divisées en trois parts. Je leur dis: "Mes instructions étaient que tout soit divisé en deux parts. Comment cela se fait-il qu'il y ait trois parts?" Les héritiers et d'autres parents me répondirent: "Une troisième part doit être mise de côté. C'est pourquoi nous avons tout divisé en trois parts. Une part est pour Mirza Musa, une pour les deux filles et la troisième que nous mettons à votre disposition; cette troisième part est la part du défunt et vous pouvez la dépenser comme bon vous semble."

Très troublé, nous leur dîmes: "Il n'en est pas question. Ceci, vous ne pouvez pas le demander, car cela ne peut être accompli. Nous avons donné notre parole à Baha'u'llah que même pas une pièce en cuivre ne serait acceptée." Mais eux aussi jurèrent qu'il ne pouvait en être autrement, qu'ils n'accepteraient aucune autre condition.

Ce serviteur répondit: "Pour l'instant, laissons cela. Y a t-il d'autres différents entre vous?" "Oui" dit Mirza Musa "qu'est devenu l'argent qui restait?" Demandant le montant, il répondit: "Trois cent mille tumans." Les filles dirent: "Il y a deux possibilités, soit cet argent est dans la maison, dans quelque coffre, ou enterré quelque part ou alors il est entre d'autres mains. Nous allons donner la maison et tout son contenu à Mirza Musa. Nous deux allons quitter la maison, avec rien que nos voiles. Quoi qu'il se passe, nous, à partir de maintenant, sommes d'accord. Si l'argent est ailleurs, il a sans aucun doute, été déposé dans les mains de quelqu'un de confiance et cette personne très au courant de l'abus de confiance, traitera honorablement avec nous et le rendra plutôt que de s'enfuir avec. Mirza Musa doit établir une preuve satisfaisante de ce qu'il dit; sa revendication seule n'est pas une preuve." Mirza Musa répondit: "Tous les biens étaient entre leurs mains, je ne savais rien de ce qui se passait je n'en avais aucune indication. Ils ont fait ce qu'ils ont voulu."

En bref, Mirza Musa n'avait aucune preuve évidente de sa revendication. Il ne pouvait que demander: "Est-il possible que le feu Haji n'ait aucun fonds en espèces?" Comme la revendication était sans preuve, je pensais que poursuivre conduirait au scandale et ne produirait rien de valable. En conséquence, je leur demandais: "Distribuez les lots." En ce qui concerne la troisième part, je demandais de la mettre dans un appartement séparé, de le fermer et de poser une scellé sur la porte. J'apportai la clé à Baha'u'llah. "La tâche est terminée" dis-je. "Cela a été accompli uniquement par vos confirmations. Autrement cela n'aurait pu être terminé avant un an. Cependant, il y a une difficulté." Je décrivis en détail la revendication de Mirza Musa et l'absence de preuve. Puis je dis: "Mirza Musa a de lourdes dettes. Même s'il dépense tout ce qu'il a, malgré tout, il ne pourra pas rembourser tous ses créanciers. Donc, le mieux est que Vous-même acceptiez la demande des héritiers comme ils persistent dans leur offre, et donniez cette part à Mirza Musa. Alors, il pourra finalement se libérer de ses dettes et avoir encore quelque chose."

Le jour suivant, les héritiers vinrent et implorèrent la Beauté Bénie afin que j'accepte la troisième part. "Ceci est hors de question" leur dit-Il. Puis ils Le supplièrent et L'implorèrent d'accepter cette part et de la dépenser à des fins charitables selon son propre choix. Il répondit: " Il y a une seule raison pour laquelle Je peux accepter cette somme." Ils dirent: "Cela ne nous regarde pas, même si Vous la faites jeter dans la mer. Nous ne lâcherons pas le pan de votre vêtement et nous ne cesserons pas de Vous importuner jusqu'à ce que Vous accédiez à notre demande." Alors Il leur dit: "Maintenant, J'ai accepté cette troisième part et Je l'ai donnée à Mirza Musa, votre frère, mais à une condition: qu'à partir de ce jour, il ne parle plus d'aucune revendication contre vous." Les héritiers remercièrent avec profusion. Et ainsi, ce cas lourd et difficile fut réglé en un seul jour. Il ne laissa aucune plainte, aucun tumulte, aucune nouvelle dispute.

Mirza Musa fit de son mieux pour me remettre des bijoux mais je refusais. Finalement, il demanda que j'accepte une bague. C'était une bague précieuse, sertie d'un rubis rouge grenade, en forme de sphère et unique. Il y avait des diamants sertis autour de la pierre centrale. Ceci aussi, je le refusais, bien qu'à cette époque je ne possédais ni 'aba sur mon dos, ni rien à me mettre excepté une tunique de coton qui était une antiquité, ni une seule pièce de cuivre. Comme aurait dit Hafiz: " Une bourse vide mais dans notre manche, un trésor."

En remerciements pour les bontés qu'il avait reçues, Mirza Musa offrit à Baha'u'llah tout ce qu'il possédait; les vergers, les terres, les propriétés, mais cela fut refusé. Puis, il demanda aux 'ulamas d'Iraq d'intervenir en sa faveur. Ils se pressèrent chez Baha'u'llah et le supplièrent d'accepter les cadeaux présentés. Il refusa catégoriquement. Respectueusement, ils Lui dirent: "Si Vous n'acceptez pas, bientôt, Mirza Mussa les éparpillera à tous vents. Pour son bien, il ne devrait pas avoir accès à sa richesse."

Puis, de sa propre main, Mirza Musa rédigea l'acte des cadeaux, selon les cinq credos en arabe et en persan; il en fit deux copies et choisit des 'ulamas comme témoins. Parmi certains 'ulamas de Baghdad, il choisit le fameux érudit 'Abdu's-Salam Effendi et le très connu Siyyid Davud Effendi. Il présenta l'acte des cadeaux à Baha'u'llah. La Beauté Bénie leur dit: "Nous nommons Mirza Musa lui-même comme notre fondé de pouvoir."

Après le départ de Baha'u'llah pour Rumelia, Mirza Musa, avec un billet à ordre, acheta du gouvernement les titres de Hindiyyih, un district près de Karbila et perdit beaucoup, près de 100 000 tumans. Le gouvernement confisqua ses biens et les vendit pour presque rien. Quand cela fut raconté à Baha'u'llah, Il dit: "Ne parlez pas de ça, jamais plus. Ne proférez plus un seul mot sur ces biens." Pendant ce temps il y eut l'exil d'Andrinople pour 'Akka. Mirza Muhammad alla rendre visite aux autorités gouvernementales et leur dit: "Je suis l'avocat de Baha'u'llah. Ces biens n'appartiennent pas à Mirza Musa. Comment se fait-il que vous les ayez pris?" Mais il n'avait aucun document pour le prouver car l'acte des cadeaux était à 'Akka et donc le gouvernement rejeta sa demande. Cependant, au cours du déroulement de cette affaire, il fut connu de tous comme Mirza Muhammad l'avocat. C'est ainsi qu'il reçut ce titre.

Quand nous étions à Andrinople, Mirza Musa envoya une bague de rubis, par l'intermédiaire de Siyyid 'Ali-Akbar. La Beauté Bénie nous dit de l'accepter.

Après que nous fûmes arrivés à 'Akka, les croyants tombèrent malades et gisaient sur leur lit, souffrants. J'envoyais la bague en Inde à un des amis lui demandant de la vendre le plus rapidement possible et de nous envoyer le montant à 'Akka pour être dépensé pour les malades. Cet individu béni ne nous envoya jamais un penny. Deux années plus tard, il écrivit qu'il avait vendu la bague pour vingt-cinq livres et avait dépensé cette somme avec les pèlerins. Alors que cette bague avait une si grande valeur ! Je ne portais pas plainte. Au contraire, je louais Dieu, Le remerciant que pas un grain de poussière de toute cette richesse ne se fut posé sur mon vêtement. Mirza Muhammad fut fait prisonnier et envoyé de Baghdad à Mosoul, où il fut en proie à de terribles maux. Il avait été riche; dans le sentier de Dieu, il était maintenant pauvre. Il avait joui de la facilité et du confort; maintenant, pour l'amour de Dieu, il souffrait peine et ennuis. Il vécut un certain temps à Mosoul, suppliant, résigné et seul. Puis, séparé de tout sauf de Dieu, irrésistiblement attiré par les douces brises du Seigneur, il s'éleva de ce sombre monde vers la terre de lumière. Que sur lui soient les salutations et les bénédictions. Puisse Dieu envoyer sur lui les eaux du pardon, et ouvrir devant son tombeau les portes du Ciel.


43. Haji Muhammad-Riday-i-Shirazi

Haji Muhammad-Rida venait de Shiraz. Il était un homme de grande spiritualité, humble, repentant, il était l'incarnation de la sérénité et de la foi. Quand l'appel de Dieu s'éleva, cette âme assoiffée se précipita dans le refuge de la grâce céleste. Aussitôt qu'il entendit les appels, "Ne suis-je pas ton Seigneur?" il s'écria: "Oui, en vérité!" [lxiv] et devint comme une lampe guidant les pas des hommes.

Pendant longtemps, il servit l'Afnan Haji Mirza Muhammad-'Ali et fut son loyal et proche compagnon, homme de confiance en toutes choses. Plus tard, voyageant dans différents pays, il arriva en Terre Sainte et là, en toute humilité et soumission, il inclina la tête devant le seuil sacré et fut honoré d'entrer en présence de Baha'u'llah dont il but les bontés sans fin dans le creux des mains. Pendant un certain temps, il resta là, veillant sur Baha'u'llah presque chaque jour, entouré de la faveur et de la grâce saintes. Il était d'un caractère extraordinaire et vivait selon les commandements de Dieu; tranquille et résigné et, dans sa soumission à la volonté de Dieu, il était le désintéressement même. Il n'avait aucun besoin personnel, aucun sentiment d'attachement à ce monde éphémère. Son seul désir était de plaire à son Seigneur, son seul espoir, de marcher dans le sentier sacré.

Ensuite, il alla à Beyrouth, servant l'honorable Afnan dans cette ville. Il vécut de cette façon assez longtemps, retournant encore et encore en Terre Sainte afin d'être en présence de Baha'u'llah et de contempler la plus grande Beauté. Plus tard, à Sidon, il devint malade. Ne pouvant entreprendre le voyage à 'Akka, d'un parfait consentement et contentement, il s'éleva vers le Royaume d'Abha et fut immergé dans l'océan de lumière. Des bontés sans fin furent accordées en sa mémoire par la Plume Suprême. Il fut, en effet, un des loyaux serviteurs, un fidèle, un solide pilier au service de Baha'u'llah. De nombreuses fois, de la bouche de la Beauté Bénie, nous avons entendu ses louanges. Que sur lui soient les salutations et les louanges et la gloire du Très-Glorieux. Sur lui la compassion et la plus grande miséricorde du Seigneur des Cieux. Son tombeau lumineux est à Sidon près du lieu appelé la station de Saint Jean.


44. Husayn Effendi Tabrizi

Ce jeune était de Tabriz et il était rempli de l'amour de Dieu, comme une coupe remplie à ras de vin rouge. Dans la fleur de sa jeunesse, il quitta la Perse et voyagea en Grèce, gagnant sa vie comme marchand; jusqu'au jour où, guidé par la bonté divine, il alla de Grèce à Smyrna et là, il reçut les bonnes nouvelles d'une nouvelle Manifestation sur terre. Il s'exclama, transporté de joie, enivré par la mélodie du nouveau message. Il laissa derrière lui son commerce, partit à la rencontre du Seigneur de son coeur, et entra en présence de Baha'u'llah. Pendant quelque temps, en gardien et compagnon fidèle, il servit la Beauté Bénie. Puis, il reçut les instructions de chercher un logement dans la ville de Haifa.

Là, fidèlement, il s'occupa des croyants et sa maison fut une escale pour les voyageurs baha'is. Il avait des dispositions excellentes, un merveilleux caractère et des buts spirituels très élevés. Il était amical avec les amis et les étrangers; il était aimable avec les gens de toutes les nations et ne désirait que le bien.

Lorsque la plus grande Lumière s'éleva vers le Royaume d'en haut, Husayn Effendi Lui resta fidèle, ferme et inébranlable; et, comme avant, il continua d'être un ami proche des amis. Ainsi, il vécut pendant une longue période. Il se sentait mieux que les rois de la terre. Il devint le beau-fils de Mirza Muhammad-Quli, frère de la Beauté Bénie, et resta paisible et serein pendant un certain temps. Précautionneusement, il évita toute occasion de tomber dans l'erreur, car il appréhendait que la tempête des afflictions puisse monter en furie, se soulever encore plus haut et balayer plus d'une âme vers le gouffre insondable. [lxv] Il soupirait et se lamentait, car cette peur était en lui continuellement. A la fin, il ne put supporter le monde plus longtemps et, de ses propres mains, déchira le vêtement de la vie.

Louanges soient sur lui et les salutations et la miséricorde de Dieu et l'accueil divin. Puisse Dieu lui pardonner et lui permettre d'entrer au Ciel, le paradis qui domine tout le reste. Son tombeau est à Haifa.


45. Jamshid-i-Gurji

Le vaillant Jamshid-i-Gurji, qui venait de Géorgie mais avait grandi dans la ville de Kashan, était encore un autre émigrant. C'était un jeune fidèle, digne de confiance, avec un grand sens de l'honneur. Lorsqu'il entendit parler de la naissance d'une nouvelle foi et s'éveilla aux nouvelles que le Soleil de Vérité avait levées à l'horizon de la Perse, il fut rempli d'une sainte extase, il espéra et aima. Le feu nouveau brûla au loin les voiles de l'incertitude et du doute qui l'avaient entouré; la lumière de la vérité envoyait ses rayons, la lampe de direction brûlait devant lui.

Il resta en Perse pendant un certain temps, puis partit pour Rumelia qui était dans le territoire ottoman et, dans la terre du Mystère, Andrinople, il eut l'honneur d'être en présence de Baha'u'llah. C'est ici que cette rencontre eut lieu. Sa joie et sa ferveur étaient sans limite. Plus tard, sur ordre de Baha'u'llah, il fit le voyage à Constantinople avec Aqa Muhammad-Baqir et Aqa 'Abdu'l-Ghaffar. Dans cette ville, les tyrans l'emprisonnèrent et l'enchaînèrent.

L'ambassadeur persan dénonça Jamshid et Ustad Muhammad-'Ali-i-Dallak comme des chefs ennemis et des combattants. Il décrivit Jamshid comme le Rustam [lxvi] du jour, tandis que Muhammad-'Ali, selon l'envoyé, était un lion vorace. Ces deux hommes respectés furent d'abord emprisonnés et mis en cage, puis ils furent chassés, sous escorte, du territoire turc à la frontière persane. Ils devaient être remis au gouvernement persan et crucifiés et les gardes étaient menacés de punitions terribles s'ils relâchaient leur vigilance et laissaient les prisonniers s'échapper. Pour cette raison, à chaque étape, les victimes étaient gardées dans un endroit inaccessible. Une fois, ils furent jetés dans un puits et souffrirent l'agonie tout au long de la nuit. Le matin suivant, Jamshid cria: "Ô vous, qui nous oppressez ! Sommes-nous le Prophète Joseph, que vous nous ayez jetés dans ce puits? Souvenez-vous comment Il s'est levé du puits aussi haut que la pleine lune ? Nous aussi nous marchons dans le sentier de Dieu, nous aussi nous sommes ici pour son amour et nous savons que ces profondeurs sont les hauteurs du Seigneur."

Arrivés à la frontière persane, Jamshid et Muhammad-'Ali furent remis entre les mains des chefs kurdes pour être envoyés à Tihran. Les chefs kurdes virent que les prisonniers étaient innocents, aimables et bien disposés, qu'ils étaient devenus une proie pour leurs ennemis. Au lieu de les diriger vers la capitale, ils les libérèrent. Joyeux, les deux hommes se hâtèrent à pied, retournèrent vers Baha'u'llah et trouvèrent une maison proche de la Plus Grande Prison.

Jamshid passa quelques temps en totale félicité, recevant la grâce et les faveurs de Baha'u'llah, étant toujours admis en Sa présence. Il était tranquille et en paix. Les croyants se sentaient bien avec lui, et il se sentait bien avec Dieu. C'est dans ces conditions qu'il entendit l'ordre céleste: "Ô toi, âme qui est au repos, retourne vers ton Seigneur, soit heureux avec Lui et soit Lui agréable." [lxvii] Et au cri de Dieu: "Reviens!" il répondit: "Oui, en vérité!" Il s'éleva de la Plus Grande Prison vers les Cieux; il monta vers un Royaume pur et lumineux, loin du monde de poussière. Que Dieu l'assiste dans la compagnie céleste [lxviii], l'amène au paradis des splendeurs, et le garde dans les jardins divins, qu'il vive éternellement. Que les salutations et les louanges soient sur lui. Son tombeau, doux comme le miel, est à 'Akka.


46. Haji Ja'far-i-Tabrizi et Ses Frères

Ils étaient trois frères, tous de Tabriz: Haji Hasan, Haji Ja'far et Haji Taqi. Ces trois personnages étaient comme des aigles s'envolant; ils étaient trois étoiles de la Foi, vivant dans la lumière de l'amour de Dieu.

Haji Hasan était un croyant des premiers jours; il avait cru dès la première aurore de la nouvelle Lumière. Il était plein d'ardeur, de passion. Après sa conversion, il voyagea partout, à travers les villes et les villages de Perse, et son souffle remuait les coeurs des âmes impatientes. Puis, il partit pour l'Iraq et au moment du premier voyage de son Bien-Aimé, arriva en Sa présence. Après avoir aperçu cette merveilleuse Lumière, il fut transporté au royaume des splendeurs; il fut incandescent, devint un esclave languissant d'amour. A ce moment, il fut enjoint de retourner en Perse. C'était un colporteur, un vendeur de petites marchandises et il voyageait de ville en ville.

Au deuxième voyage de Baha'u'llah en Iraq, Haji Hasan eut très envie de Le revoir et là, à Baghdad, il fut une fois de plus ébloui par sa présence. Le plus souvent, lorsqu'il voyageait en Perse puis revenait, ses pensées se concentraient sur l'enseignement et la promotion de la Cause. Son affaire s'effondra, ses marchandises furent enlevées par des voleurs, et ainsi, comme il le dit lui-même, son fardeau lui fut enlevé - il fut débarrassé. Il évitait toutes contraintes terrestres. Il était attiré comme par un aimant; il était désespérément et follement amoureux du tendre Compagnon, de Celui qui est le Bien-Aimé des deux mondes. Partout, il était connu pour l'extase dans laquelle il était et fit l'expérience d'étranges états. Parfois, avec une grande éloquence, il enseignait la Foi, démontrant les preuves des versets sacrés et des saintes traditions et apportant des arguments profonds et faciles à accepter. Ses auditeurs faisaient des commentaires sur le pouvoir de son esprit, sur sa sagesse et son assurance. Mais il y avait d'autres fois où l'amour soudainement l'enflammait et alors, il ne pouvait rester tranquille un seul instant. A ces moments, il pouvait sauter et danser, ou encore, d'une voix forte, il pouvait crier un verset des poètes ou une chanson. Vers la fin de ses jours, il devint un ami proche de Jinab-i-Munib; tous deux échangeaient des confidences et chacun portait plus d'une mélodie dans sa poitrine.

Lors du dernier voyage des amis, il alla en Adhirbayjan, et là, oubliant la prudence, il lança le cri du Plus Grand Nom: "Ya Baha'u'l-Abha!". Ici, les incroyants, joignant leur force à celles de leurs familles, attirèrent cet innocent, cet homme en extase, loin dans un jardin. D'abord ils le questionnèrent et écoutèrent ses réponses. Il parla ouvertement; il exposa les vérités secrètes de la Foi et présenta les preuves concluantes que l'Avènement était en effet passé. Il récita des versets du Qur'an et des traditions données par le prophète Muhammad et les saints Imams.

Après cela, avec un amour ardent et une extase languissante, il se mit à chanter. C'était une mélodie Shahnaz qu'il chanta; les mots venaient des poètes, pour dire que le Seigneur était arrivé. Et ils le tuèrent: ils répandirent son sang. Ils étirèrent et hachèrent ses membres et cachèrent son corps sous la terre.

En ce qui concerne Haji Muhammad-Ja'far, le bien né, lui aussi, comme son frère, fut enchanté par la Beauté Bénie. C'est en Iraq qu'il entra en présence de la Lumière du monde et lui aussi prit feu avec l'amour divin et fut transporté par les rafales de Dieu. Comme son frère, il était vendeur de petites marchandises, toujours en voyage d'un lieu à un autre. Lorsque Baha'u'llah quitta Baghdad pour la capitale de l'islam, Haji Ja'far était en Perse et lorsque la Beauté Bénie et sa suite s'arrêtèrent à Andrinople, Ja'far et Haji Taqi, son frère, arrivèrent dans cette ville venant de l'Adhirbayjan. Ils trouvèrent un endroit et s'installèrent. Nos oppresseurs étendirent alors des mains arrogantes pour envoyer Baha'u'llah dans la Plus Grande Prison et ils interdirent aux croyants d'accompagner le véritable Adoré, car c'était leur but d'amener la Beauté Bénie dans cette prison avec un très petit nombre de Ses gens. Quand Haji Ja'far vit qu'il avait été exclu du groupe des exilés, il prit un rasoir et se trancha la gorge [lxix]. La foule exprima sa douleur et son horreur et les autorités permirent alors à tous les croyants de partir avec Baha'u'llah - ceci grâce à la bénédiction de l'acte d'amour de Ja'far.

Ils recousirent sa blessure mais personne ne pensait qu'il pouvait être sauvé. Ils lui dirent "Pour le moment, vous devriez rester où vous êtes. Si votre gorge guérit, vous serez envoyé avec votre frère. Soyez sûr de cela." Baha'u'llah aussi donna des instructions afin que ceci soit fait. Ainsi, nous laissâmes Ja'far à l'hôpital et partîmes pour la prison de 'Akka. Deux mois plus tard, lui et son frère Haji Taqi arrivèrent à la forteresse et rejoignirent les autres prisonniers. Le Haji en pleine santé devint plus amoureux, plus ardent chaque jour qui passait. Du crépuscule à l'aube, il restait éveillé, chantant des prières, répandant des larmes. Puis, une nuit, il tomba du toit du caravansérail et monta au Royaume des miracles et des signes.

Haji Taqi, né sous une bonne fortune, était, en toutes choses, un véritable frère pour Haji Ja'far. Il vivait dans la même condition spirituelle mais était plus calme. Après la mort de Haji Ja'far, il resta seul dans une pièce. Il était le silence même. Il s'asseyait là, seul, correctement et courtoisement, même pendant la nuit. Une fois, au milieu de la nuit, il escalada le toit pour chanter des prières. Le matin suivant, ils le trouvèrent là où il était tombé, sur le sol près du mur. Il était inconscient et ils ne purent dire si cela était un accident ou s'il s'était jeté lui-même du toit. Quand il revint à lui, il dit: "J'étais fatigué de cette vie, et j'ai essayé de mourir. Pas un seul instant je souhaite m'attarder dans ce monde. Priez afin que je puisse partir."

Ceci est donc l'histoire de la vie de ces trois frères. Tous trois étaient des âmes en repos; toutes trois étaient heureuses avec leur Seigneur, cherchant Son plaisir [lxx]. Ils étaient des flammes; ils étaient des captifs de la Foi; ils étaient purs et saints. Et donc, détachés du monde, tournant leurs visages vers le Royaume le plus élevé, ils s'envolèrent. Puisse Dieu les envelopper du vêtement de sa grâce dans le Royaume du pardon, et les immerger dans les eaux de sa miséricorde pour toujours. Que salutations et louanges soient sur eux.


47. Haji Mirza Muhammad-Taqi, l'Afnan

Photo: Haji Mirza Muhammad-Taqi, l'Afnan.

Parmi ces âmes droites qui sont des entités lumineuses et des réflexions divines, il y avait Jinab-i-Muhammad-Taqi l'Afnan. [lxxi] Son titre était Vakilu'd-Dawlih. Cet éminent rameau était une ramification de l'Arbre saint; un excellent caractère était allié à une noble lignée. Sa parenté était une vraie parenté. Il était parmi ces âmes qui, après une lecture du Livre de la Certitude, devinrent croyants, enchantés par les douces saveurs de Dieu, se réjouissant à la récitation de Ses versets. Son excitation était telle qu'il criait, "Seigneur, Seigneur, me voilà!" Joyeusement, il quitta la Perse et se hâta vers l'Iraq. Parce qu'il était rempli d'amour, il courut à travers les montagnes et les étendues désertes, ne s'arrêtant pas pour se reposer jusqu'à ce qu'il arriva à Baghdad.

Il entra en présence de Baha'u'llah et obtint la faveur de Le voir. Quelle sainte extase il eut, quelle ferveur, quel détachement du monde! C'était indescriptible. Son visage béni était si avenant, si lumineux que les amis en Iraq lui donnèrent un nom: ils l'appelèrent "l'Afnan de tous les délices." Il était réellement une âme bénie, un homme qui méritait d'être vénéré. Il ne manqua jamais à son devoir, du début de sa vie jusqu'à son dernier soupir. Au début de sa vie, il devint amoureux des douces saveurs de Dieu et à la fin, il avait rendu un immense service à la cause de Dieu. Sa vie fut vertueuse, sa parole agréable, ses actions louables. Il n'a jamais échoué en servitude, en dévotion et tout ce qu'il entreprenait il le faisait avec empressement et joie. Sa vie, sa conduite, ce qu'il faisait, ce qu'il laissa non terminé, ses relations avec les autres, tout était une façon d'enseigner la Foi et servait comme exemple, comme un avertissement aux autres.

Après avoir eu l'honneur de rencontrer Baha'u'llah à Baghdad, il retourna en Perse où il enseigna la Foi avec beaucoup d'éloquence. Et ceci était sa façon d'enseigner; avec de l'éloquence, une plume prompte, un excellent caractère, des mots plaisants, des moyens et des actions justes. Même ses ennemis confirmaient son esprit élevé et ses qualités spirituelles et disaient: "Il n'y a personne qui puisse être comparé à cet homme pour ses paroles et ses actes, sa droiture, sa fidélité et sa foi profonde ; il est unique en toutes choses; quelle pitié qu'il soit baha'i!" Ce qui veut dire: "Quelle pitié qu'il ne soit pas comme nous, pervers, sans souci, pêcheurs, absorbés par la sensualité, les créatures de nos passions!" Dieu aimable! Ils virent de leurs propres yeux, qu'au moment où il connut la Foi, il fut transformé, fut coupé du monde, commença à émettre les rayons provenant du Soleil de vérité; et malgré tout, ils ne surent pas profiter de son exemple.

Pendant son séjour à Yazd, apparemment, il était engagé dans des occupations commerciales mais, en réalité, il enseignait la Foi.

Son but unique était d'exalter la parole de Dieu, son unique souhait, de propager les douces saveurs divines, son unique pensée, de se rapprocher de plus en plus des demeures du Seigneur. Il n'y avait d'autres souvenirs sur ses lèvres que les versets de Dieu. Il était l'incarnation du bon plaisir de Baha'u'llah; un point naissant de la grâce du Plus Grand Nom. Plusieurs fois, Baha'u'llah exprima à ceux qui étaient près de Lui son extrême satisfaction de l'Afnan. En conséquence, chacun fut certain que, dans l'avenir, il commencerait quelque tâche de haute importance. Après l'ascension de Baha'u'llah, l'Afnan, loyal et fidèle à l'Alliance, rendit encore plus de services que dans le passé; ceci, en dépit de nombreux obstacles, d'un poids accablant de travail, et d'une variété infinie d'affaires, toutes demandant son attention. Il abandonna son confort, ses affaires, ses biens, ses propriétés, ses terres, se hâta vers 'Ishqabad et prépara la construction du Mashriqu'l-Adhkar, ceci était un service de très grande envergure car il fut alors le premier individu à ériger une maison d'adoration Baha'ie, le premier constructeur d'une maison d'adoration pour unifier l'humanité. Avec l'assistance des croyants de 'Ishqabad, il réussit à relever le flambeau. Pendant longtemps, il n'eut aucun repos. Jour et nuit, il pressait les croyants. Eux aussi dépensèrent leurs efforts et firent des sacrifices au-dessus et au-delà de leur pouvoir; et l'édifice de Dieu s'éleva, et la nouvelle de sa construction se répandit d'Est en Ouest. L'Afnan dépensa tout ce qu'il possédait pour élever cette construction, à part une somme insignifiante qu'il garda. Ceci est la façon de faire un sacrifice. C'est ce que signifie être fidèle.

Ensuite, il voyagea en Terre Sainte et là, à côté de cet endroit où les anges élus circulent, sous la protection du mausolée du Bab, il passait ses jours, saint et pur, suppliant et implorant le Seigneur. Les louanges de Dieu étaient toujours sur ses lèvres, et il chantait des prières avec sa voix et son coeur. Il était merveilleusement spirituel, étrangement brillant. Il était une de ces âmes qui, avant même que le battement du tambour de "Ne suis-Je pas votre Seigneur?" ait retenti, tambourina: "Oui, en vérité, Vous L'êtes!" [lxxii] C'était pendant la période en Iraq, pendant les années entre soixante-dix et quatre-vingts de l'Hijra qu'il prit feu et aima la Lumière du monde, soutint la gloire naissante de Baha'u'llah et fut témoin de l'accomplissement des paroles, " Je suis Celui qui vit dans le Royaume de Gloire d'Abha!"

L'Afnan était un homme extraordinairement heureux. Chaque fois que j'étais triste, je le rencontrais et au même instant, ma joie revenait. Loué soit Dieu, que finalement, près du mausolée du Bab, il se hâta dans la lumière du Royaume d'Abha. Mais sa perte peina profondément 'Abdu'l-Baha.

Sa tombe lumineuse est à Haifa à côté du Haziratu'l-Quds, près de la cave d'Élie. Là, un tombeau doit y être élevé, bien et solidement construit. Que Dieu répandre sur sa tombe les rayons du paradis des splendeurs et mélanger la poussière sainte aux pluies qui tombent des refuges du compagnon exalté. Que sur lui soit la gloire du Très-Glorieux.


48. 'Abdu'llah Baghdadi

Quand il était très jeune, les gens pensaient que 'Abdu'llah Baghdadi était un libertin, se consacrant uniquement au plaisir. Il était regardé par tous comme le jouet de désirs excessifs, se mirant dans ses passions physiques. Mais à l'instant où il devint croyant, il fut transporté par les douces saveurs de Dieu et connut une nouvelle naissance. Il se trouva dans une étrange extase, complètement transformé. Il avait été de ce monde, maintenant il appartenait au Ciel; il avait vécu dans la chair, maintenant il vivait dans l'esprit; il avait marché dans les ténèbres, maintenant il marchait dans la lumière. Il avait été l'esclave de ses sens, maintenant il était un serviteur de Dieu. Avant il avait été argile et faïence, maintenant il était une perle de grande valeur; il avait été une pierre terne et sans lustre, maintenant c'était un rubis éclatant.

Même parmi les non croyants, les gens étaient étonnés du changement. Qu'avait-il pu arriver à ce jeune, ils voulaient savoir; comment cela était-il arrivé que soudainement il se soit détaché du monde et devienne ardent et dévoué? "Il était souillé, corrompu," disaient-ils, "aujourd'hui, il est chaste et sobre." Il avait sombré dans ses appétits, mais maintenant c'est une âme pure vivant une vie de droiture. Il avait laissé le monde derrière lui. Il a mis fin à la fête, renvoyé les noceurs et plié la nappe du banquet. Son esprit est préoccupé par l'amour."

En bref, il laissa ses plaisirs et ses biens et partit à pied pour 'Akka. Son visage était devenu si brillant, sa nature si lumineuse, que c'était une joie de le regarder. J'avais l'habitude de dire: "Aqa 'Abdu'llah, dans quelle condition êtes-vous?" Et il répondait à cet effet: " J'étais dans l'obscurité, maintenant, grâce à la Beauté Bénie, je suis dans la lumière. J'étais un tas de poussière, Il m'a changé en un sol fertile. J'étais constamment tourmenté, je suis maintenant paisible. J'étais amoureux de mes chaînes, Il les a cassées. J'étais avide de ceci et de cela, maintenant je m'accroche au Seigneur. J'étais un oiseau dans une cage, Il m'a délivré. Aujourd'hui, bien que je vive dans le désert et que la terre nue me serve de lit et d'oreiller, cela me semble de la soie. Dans les temps anciens, mon dessus de lit était de satin et mon âme était au supplice. Maintenant je suis sans toit et heureux."

Mais son coeur brûlant se déchira quand il vit combien Baha'u'llah était persécuté, comment Il souffrait avec patience. 'Abdu'llah désirait mourir pour Lui. Et c'est ainsi qu'il offrit sa vie pour son tendre Compagnon et se hâta loin de ce monde de ténèbres, vers le pays de lumière. Sa lumineuse tombe est à 'Akka. Que sur lui soit la gloire du Très-Glorieux; que sur lui soient la miséricorde, la grâce du Seigneur.


49. Muhammad-Mustafa Baghdadi

Muhammad-Mustafa était une lumière brûlante. Il était le fils du fameux érudit Shaykh Muhammad-i-Shibl; il habitait en Iraq et, depuis son plus jeune âge, il était de toute évidence unique et au delà de toute comparaison; sage, courageux, louable en tout, il était connu partout. Dès son enfance, guidé par son père, il avait allumé la lumière de la Foi dans la chapelle de son coeur. Il s'était débarrassé des voiles gênants de l'illusion, avait regardé avec des yeux clairvoyants, avait reconnu les nouveaux grands signes de Dieu et, sans se soucier des conséquences, avait crié fort: "La terre est éclairée par la lumière de son Seigneur!" [lxxiii].

Dieu de grâce! L'opposition était puissante et le jugement permanent. Tous les amis étaient terrifiés, cachant leur foi où qu'ils soient. Dans une telle période, cette personnalité intrépide s'occupa courageusement de ses affaires et comme un homme, fit face à chaque tyran. Cette honorable personne était l'unique individu qui, dans les années soixante-dix, fut très connu en Iraq pour son amour pour Baha'u'llah. Quelques autres âmes, alors à Baghdad et dans ses environs, s'étaient cachés dans tous les coins et recoins et, emprisonnés dans leur propre léthargie, y étaient restés. Mais cet admirable Muhammad-Mustafa allait et venait courageusement, fièrement comme un homme, et les gens hostiles avaient peur de l'attaquer à cause de sa force physique et de son courage.

Après le retour de Baha'u'llah de son voyage au Kurdistan, la force virile et la prestance de cet individu courageux avaient encore augmenté. Chaque fois que l'autorisation de partir était accordée, il allait vers Baha'u'llah écouter de ses lèvres les témoignages de faveur et de grâce. Il était le dirigeant parmi tous les amis en Iraq et après la grande séparation, lorsque le convoi du Bien-Aimé partit pour Constantinople, il resta loyal et fidèle et fit face à l'ennemi. Il se consacra au service, et ouvertement, publiquement, observé de tous, enseigna la Foi.

Aussitôt que la déclaration de Baha'u'llah "Celui que Dieu rendra manifeste" [lxxiv] fut connue partout, Muhammad-Mustafa, étant parmi ces âmes qui étaient devenues des croyants avant cette déclaration, et avant que l'appel soit entendu, cria: "En vérité, nous croyons!" Car même avant cette déclaration, la vraie lumière avait percé les voiles qui avaient enfermé les peuples du monde, afin que chaque oeil retienne la splendeur et chaque âme languissante puisse voir son Bien-Aimé.

Alors, de toutes ses forces, Muhammad-Mustafa se leva pour servir la Cause. Il ne se reposa ni le jour ni la nuit. Après que la Beauté Ancienne fût partie pour la Plus Grande Prison; après que les amis eussent été faits prisonniers à Baghdad et envoyés à Mosoul; après l'hostilité d'ennemis hors du commun et l'opposition du peuple de Baghdad, il n'hésita pas et continua à rester ferme. Il s'écoula ainsi une longue période. Mais sa nostalgie pour Baha'u'llah et le tourment dans son coeur étaient tels qu'il prit le chemin seul pour la Plus Grande Prison. Il arriva pendant la période d'extrêmes restrictions et eut l'honneur d'entrer en présence de Baha'u'llah.

Alors, il demanda la permission de trouver un logement quelque part dans les environs de 'Akka, et eut l'autorisation de résider à Beyrouth. Là, il s'installa et servit la Cause fidèlement, aidant tous les pèlerins qui arrivaient et repartaient. C'était un excellent serviteur, un hôte généreux et aimable et il se sacrifiait pour s'occuper de leurs affaires quand ils passaient par là. Pour cette raison, il devint très connu partout.

Quand le Soleil de Vérité fut couché et la Lumière des cohortes célestes fut montée, Muhammad-Mustafa resta fidèle à l'alliance. Il se tint si ferme contre les agitateurs qu'ils n'osaient souffler mot. Il était comme une étoile filante, un missile lancé contre les démons; [lxxv] une épée vengeresse contre les violateurs. Pas un seul des violateurs n'osait passer dans la rue où il vivait et s'ils le rencontraient ils étaient comme ceux décrits dans le Qu'ran: "muets, sourds, aveugles: ainsi ils ne rebrousseront pas le chemin de l'erreur! [lxxvi]" Il était la vraie incarnation de: "L'accusation de l'accusateur ne le fera pas dévier du sentier de Dieu et la terrible puissance de l'offenseur ne le fera pas trembler."

Vivant de la même façon qu'avant, il aida les croyants d'un esprit libre et avec une intention pure. De tout son coeur, il aida les voyageurs en route vers la Terre Sainte, ceux qui étaient venus pour tourner autour de ce lieu encerclé par la compagnie céleste. Plus tard, il déménagea de Beyrouth à Iskandarun et il resta quelque temps, jusqu'à ce que, comme attiré par un aimant vers le Seigneur, détaché de tout autre que Lui, se réjouissant de ses bonnes nouvelles, se tenant ferme à la corde que nul ne peut sectionner, il monta sur les ailes de l'esprit vers son Compagnon exalté.

Puisse Dieu l'élever vers le Ciel, vers l'amitié de la gloire [lxxvii]. Puisse Dieu l'amener dans la terre des lumières, le royaume mystérieux, l'assemblée des splendeurs célestes, Seigneur tout puissant. Que sur lui soit la gloire du Tout-Glorieux.


50. Sulayman Khan-i-Tunukabani

Photo: Sulayman Khan-i-Tunukabani (Jamal Effendi) avec un enfant birman (de Birmanie, identité inconnue).

Sulayman Khan était l'émigrant et le pionnier qui avait reçu le titre de Jamali'd-Din. Il était né au Tunukaban, dans une vieille famille de cette région. Il fut bercé dans la richesse, élevé dans la facilité et dans un luxe confortable. Dès son plus jeune âge, il eut de hautes ambitions et de nobles buts, il était l'honneur et l'aspiration personnifiés. Au début, il souhaitait dépasser tous ses compagnons et atteindre un rang élevé. Pour cette raison, il quitta sa ville natale et se rendit à la capitale, Tihran, où il espérait devenir un chef, surpassant le reste de sa génération.

Cependant, à Tihran, les parfums de Dieu attirèrent et il écouta les invocations du Bien-Aimé. Il fut sauvé des angoisses d'un rang élevé; de tout vacarme et fracas, gloire, pompe et palais, de ce tas de poussière, le monde. Il brisa ses chaînes et par la grâce de Dieu, découvrit la paix. Pour lui, maintenant le siège de l'honneur n'était pas différent de l'endroit où les gens laissaient leurs chaussures à l'entrée et le poste élevé une chose vite oubliée. Il était purifié de la tâche de vivre, son coeur était tranquille car il avait brisé les chaînes qui le retenaient à la souillure de la vie.

Revêtant les vêtements de pèlerin, il partit à la rencontre de son ami Bien-Aimé et arriva dans la Plus Grande Prison. Là, pendant un certain temps, il se reposa à l'ombre de la protection de la Beauté Ancienne; il eut l'honneur d'entrer en présence de Baha'u'llah et d'écouter les enseignements formidables de ses saintes lèvres. Lorsqu'il eut respiré l'air parfumé, lorsque ses yeux furent illuminés et ses oreilles en harmonie avec les paroles du Seigneur, il eut la permission de faire un voyage en Inde et d'enseigner les vrais chercheurs de vérité.

Confiant son coeur à Dieu, amoureux des douces saveurs de Dieu, enflammé par l'amour de Dieu, il partit pour l'Inde. Là, il erra et chaque fois qu'il atteignait une ville, il lança l'appel du Grand royaume et délivra les bonnes nouvelles que l'Orateur de la Montagne était arrivé. Il devint un des fermiers de Dieu, semant la sainte graine des enseignements. Sa semence fut fructueuse. Par lui, un nombre considérable d'âmes trouvèrent leur chemin dans l'Arche du salut. La lumière des conseils divins s'était étendue sur ces âmes et leurs yeux étaient illuminés par la possession des puissants signes de Dieu. Il devint le point central de toute réunion, l'invité honoré. Encore de nos jours, en Inde, les résultats de Sa présence bénéfique sont visibles et ceux qu'il a enseignés, maintenant, à leur tour, guident d'autres vers la Foi.

Après son voyage en Inde, Sulayman Khan revint vers Baha'u'llah mais, lorsqu'il arriva, l'ascension avait déjà eu lieu. Alors, sans interruption, il versa des larmes et son coeur fut inondé de peine. Mais il demeura fidèle à l'alliance, bien enraciné dans le paradis.

Peu de temps avant son Ascension, Baha'u'llah avait dit: "Si quelqu'un va en Perse et peut s'arranger pour le transmettre, ce message doit être délivré à Aminu's-Sultan [lxxviii] (le premier ministre): "Vous avez fait le nécessaire pour aider les prisonniers; gracieusement vous leur avez rendu un grand service; ce service ne sera pas oublié. Soyez assuré qu'il vous apportera l'honneur et enverra des bénédictions sur vos affaires. O Aminu's-Sultan! Chaque maison qui est construite tombera en ruine un jour, excepté la maison de Dieu; Elle grandira davantage et sera mieux protégée de jour en jour. Aussi, servez la cour de Dieu de toute votre force afin que vous puissiez découvrir le chemin vers un foyer au paradis et trouver un édifice qui durera éternellement." Après le départ de Baha'u'llah, ce message fut remis à Aminu's-Sultan.

En Adhirbayjan, le clergé turc avait terrassé Aqa Siyyid Asadu'llah, l'avait poursuivi à Ardabil et avait planifié de répandre son sang; mais le gouverneur, par une ruse, s'arrangea pour le sauver de la bastonnade et de la mort: il envoya la victime enchaînée à Tabriz et de là la fit conduire à Tihran. Aminu's-Sultan vint aider le prisonnier et dans son propre ministère, donna à Asadu'llah un sanctuaire. Un jour que le premier ministre était malade, Nasiri'd-Din Shah vint lui rendre visite. Le ministre expliqua alors la situation et prodigua des éloges sur son captif; tant et tant que lorsque le Shah partit, il montra beaucoup de bienveillance envers Asadu'llah, et prononça des mots de consolation. Ceci, alors que quelque temps auparavant, le captif aurait été pendu haut et court pour orner quelque potence et abattu avec un fusil.

Après un certain temps, Aminu's-Sultan perdit les faveurs du souverain. Haï, en disgrâce, il fut banni à la ville de Qum. Sur quoi ce serviteur envoya Sulayman Khan en Perse, portant une prière et une lettre écrites de ma main. La prière implorait l'aide de Dieu, sa bonté et son secours pour le premier ministre tombé, afin qu'il puisse, de cet endroit oublié, retrouver les faveurs. Dans la lettre, nous avions écrit très clairement: "Soyez prêt pour retourner à Tihran. Bientôt l'aide de Dieu arrivera; la lumière de grâce brillera sur vous à nouveau; avec une complète autorité vous vous retrouverez libre et premier ministre. Ceci est la récompense pour les efforts que vous avez faits pour un homme qui était oppressé." Cette lettre et cette prière sont, aujourd'hui, entre les mains de la famille de Aminu's- Sultan.

De Tihran, Sulayman Khan voyagea à Qum, et selon ses instructions, alla vivre dans une cave du tombeau de l'Immaculée [lxxix]. La famille de Aminu's-Sultan y vint en visite; Sulayman Khan demanda des nouvelles du ministre déchu et exprima le désir de le rencontrer. Lorsque le ministre fut informé de ceci, il fit venir Sulayman Khan. Plaçant toute sa confiance en Dieu, Sulayman Khan se hâta vers la maison du ministre et, le rencontrant en privé, lui présenta la lettre de 'Abdu'l-Baha. Le ministre se leva et prit la lettre avec un extrême respect.

Puis, s'adressant au Khan, il dit: "J'ai perdu tout espoir. Si ce désir est satisfait, je me lèverai pour servir; je protégerai et soutiendrai les amis de Dieu." Il exprima sa gratitude, sa reconnaissance et sa joie et ajouta: "Loué soit Dieu, j'ai encore de l'espoir; je pense que grâce à Son aide mon rêve deviendra réalité."

En bref, le ministre prit l'engagement de servir les amis et Sulayman Khan prit congé. Le ministre souhaita lui donner une somme d'argent pour les dépenses de son voyage, mais Sulayman Khan refusa et malgré l'insistance du ministre, il ne voulut rien accepter. Le Khan n'avait pas encore atteint la Terre Sainte lors de son voyage de retour, que Aminu's-Sultan fut rappelé de l'exil et immédiatement renommé premier ministre. Il accepta cette position, dirigea avec toute son autorité, et au début il soutint les croyants, mais vers la fin, dans le cas des martyrs de Yazd, il fut négligent. Il n'aida ni ne protégea les éprouvés d'aucune façon, n'écouta pas leurs appels répétés, jusqu'à ce qu'ils furent tous mis à mort. Par conséquent, il fut lui-même renvoyé, il devint un homme ruiné; ce drapeau qui avait flotté si fièrement fut retourné et ce coeur plein d'espoir désespéré.

Sulayman Khan vécut en Terre Sainte près du tombeau autour duquel tourne l'assemblée exaltée. Il resta avec les croyants jusqu'au jour de la mort inéluctable, quand il partit pour la demeure de Celui qui vécut et ne mourut pas. Il tourna le dos à ce monceau de poussière, le monde, et se hâta vers le pays de lumière. Il brisa sa cage d'être contingent et prit son essor vers le royaume sans fin et sans lieu. Puisse Dieu l'immerger dans les eaux de sa miséricorde, faire tomber sur lui la pluie de son pardon, et lui accorder la grâce abondante. Que sur lui soient les salutations et les louanges.


51. 'Abdu'r-Rahman, le Chaudronnier

Cet homme était patient et avait beaucoup d'endurance, il était natif de Kashan. Il était un des tout premiers croyants. Il n'avait pas encore de duvet sur son visage quand il but à la coupe de l'amour de Dieu, vit de ses propres yeux la table céleste devant lui et reçut la foi et sa part de grâce abondante.

Très peu de temps après, il quitta sa maison et partit pour le jardin de roses qu'était Baghdad, où il obtint l'honneur d'être en présence de Baha'u'llah. Il resta quelque temps en Iraq et gagna une couronne de faveur sans fin; il était en présence de Baha'u'llah et souvent, il L'accompagnait à pied jusqu'aux tombeaux des deux Kazims; c'était sa plus grande joie.

'Abdu'r-Rahman fut parmi les prisonniers exilés à Mosoul et plus tard il se traîna jusqu'à la forteresse de 'Akka. Ici, il vécut béni par Baha'u'llah. Il avait un petit commerce insignifiant mais il était content, heureux et en paix. Ainsi, marchant dans le sentier de la droiture, il vécut jusqu'à l'âge de quatre-vingt ans, où avec sérénité, il prit son essor vers le seuil de Dieu. Puisse le Seigneur l'entourer de sa bonté et de sa compassion, et le vêtir du vêtement du pardon. Son tombeau lumineux est à 'Akka.


52. Muhammad-Ibrahim-i-Tabrizi

Cet homme noble et d'esprit élevé était le fils du respecté 'Abdu'l-Fattah qui était dans la prison de 'Akka. Apprenant que son père était en captivité, il arriva très rapidement à la forteresse afin que lui aussi puisse partager ses afflictions. C'était un homme sage, compréhensif, et troublé par le vin de l'amour de Dieu, mais possédant un calme et une sérénité extraordinaires.

Il avait hérité du caractère de son père et l'on pouvait réellement dire en parlant de lui "tel père, tel fils". Pour cette raison, pendant une longue période, il trouva la joie dans l'entourage de la présence divine, jouissant d'une grande paix. Pendant la journée, il exerçait son commerce, et le soir il venait en toute hâte à la porte de la maison pour être avec les amis. Il était près de tous ceux qui étaient dévoués et fidèles, il était courageux, reconnaissant à Dieu, sobre et chaste, dans l'attente et dépendant de la bonté et de la grâce du Seigneur. Il fit briller la lampe de son père, illumina la famille de 'Abdu'l-Fattah et laissa des descendants pour lui succéder dans ce monde éphémère.

Il fit toujours ce qui lui était possible pour apporter le bonheur aux croyants, il fut toujours très sensible à leur bien-être. Il était plein de sagesse, sérieux et inébranlable. Par la grâce de Dieu, il demeura loyal jusqu'à la fin et profond dans la foi. Puisse Dieu lui donner à boire à la coupe du pardon; qu'il puisse recevoir continuellement la bonté et le bon plaisir de la source de Dieu. Puisse Dieu l'élever aux hauteurs du don divin. Son tombeau aux doux parfums est à 'Akka.


53. Muhammad-'Aliy-i-Ardikani

Dans la fleur de sa jeunesse, Muhammad-'Ali, l'illuminé, entendit l'appel de Dieu, et perdit son coeur pour la grâce céleste. Il entra au service de l'Afnan, rejeton de l'arbre saint, et vécut heureux et satisfait. C'est ainsi qu'il arriva dans la ville de 'Akka et fut, pendant un certain temps, présent au seuil sacré, gagnant une couronne de gloire éternelle. Le regard de la grâce et de la faveur de Baha'u'llah était sur lui. Il servit d'un coeur loyal. Il avait une nature heureuse, un visage avenant, il était un homme croyant, un chercheur expérimenté et éprouvé.

Pendant les jours de Baha'u'llah, Muhammad-'Ali demeura ferme, et après l'affliction suprême, son coeur ne succomba pas car il avait bu le vin de l'alliance et ses pensées étaient fixées sur les bontés de Dieu. Il partit pour Haifa et vécu en bon croyant près du Haziratu'l-Quds, à côté du tombeau sacré sur le Mont Carmel, jusqu'à son dernier souffle, quand la mort vint et le tapis de sa vie terrestre fut enroulé et mis de côté.

Cet homme était un serviteur fidèle au seuil sacré, un vrai ami pour les croyants. Tous étaient très satisfaits de lui, le trouvant un compagnon excellent, gentil et doux. Puisse Dieu le secourir dans son royaume élevé, lui donner un toit dans le royaume d'Abha, et lui envoyer la grâce abondante des jardins du Ciel - lieu de la rencontre, lieu de la contemplation mystique de Dieu. Ses restes aux parfums d'ambre sont à Haifa.


54. Haji Aqay-i-Tabrizi

Tôt dans sa jeunesse, cet homme spirituel qui venait de Tabriz, perçut la connaissance mystique et but le vin capiteux de Dieu. Il resta inébranlable à jamais dans la Foi pendant toutes ces années, sans soutien. Il vécut pendant un certain temps en Adhirbayjan, amoureux du Seigneur. Quand il fut largement connu dans le voisinage comme celui qui porte le nom de Dieu, les gens ruinèrent sa vie. Ses proches et ses amis se détournèrent de lui, trouvant chaque jour une excuse nouvelle pour le chasser. Finalement il abandonna sa maison, prit sa famille et s'enfuit à Andrinople. Il arriva pendant l'emprisonnement de la période d'Andrinople et fut fait prisonnier par les oppresseurs.

Parmi nous, les errants sans domicile, et sous la protection de la Beauté Ancienne, il arriva à la Plus Grande Prison et fut un confident et un compagnon, humble et fidèle, partageant avec nous les calamités et les tribulations. Plus tard, lorsque les restrictions furent un peu relâchées, il entreprit un commerce et, grâce à la bonté de Baha'u'llah, vécut confortablement et en paix. Mais son corps était affaibli par les épreuves antérieures et toutes les souffrances, ses facultés s'étaient détériorées; il tomba malade, sans espoir de guérison; et non loin de Baha'u'llah, à l'ombre de sa protection, il se hâta de ce monde sans importance vers les Cieux élevés, de cet endroit sombre vers le pays des lumières.

Puisse Dieu le plonger dans les eaux du pardon. Puisse Dieu l'amener dans les jardins du paradis et le protéger éternellement. Ses cendres pures reposent à 'Akka.


55. Qulam-'Aliy-i-Najjar

Cet homme, menuisier et expert dans son métier, venait de Kashan. En ce qui concerne la foi et la certitude, il était comme une épée tirée de son fourreau. Il était très connu dans sa propre ville comme un homme droit, fidèle et digne de confiance. Il était de grande intelligence, sobre et chaste. Lorsqu'il devint croyant, son ardent désir de rencontrer Baha'u'llah ne put être apaisé. Rempli d'un grand amour, il quitta la terre de Kaf (Kashan) et partit pour l'Iraq où il vit la splendeur du soleil levant.

C'était un homme calme, patient, tranquille, presque renfermé. A Baghdad, il exerçait son métier, était en contact avec les amis et était soutenu par la présence de Baha'u'llah. Pendant un certain temps, il vécut un bonheur complet et en paix. Puis, ceux qui avaient été fait prisonniers furent envoyés à Mosoul, il fut parmi les victimes et comme eux, exposé au courroux des oppresseurs. Il resta en captivité pendant longtemps et lorsqu'il fut libéré, il alla à 'Akka. Là aussi il fut l'ami des prisonniers et dans la forteresse, il continua son métier. Selon son habitude, il était enclin à la solitude, capable de rester loin des amis et des étrangers et la plupart du temps vivait isolé.

Puis l'épreuve suprême, la grande désolation nous surprit. Qulam-'Ali se chargea de la menuiserie du tombeau sacré, déployant tout son talent. A ce jour, le toit de verre qui est sur la cour intérieure du mausolée de Baha'u'llah demeure le produit de son art. Il était un homme au coeur de pur cristal. Son visage brillait, son état intérieur était constant; à aucun moment il ne fut d'humeur instable ou changeante. Il fut inébranlable, aimant et fidèle jusqu'à son dernier souffle.

Après quelques années en cette compagnie, il s'éleva vers le voisinage de la miséricorde compréhensive de Dieu, et devint un ami pour ceux qui habitent dans les Cieux élevés. Il eut l'honneur de rencontrer Baha'u'llah dans les deux mondes. Ceci est la faveur la plus précieuse, le plus cher de tous les cadeaux. Que sur lui soient les salutations et les louanges. Son tombeau lumineux est à 'Akka.


56. Jinab-i-Munib, que sur lui soit la Gloire du Très-Glorieux

Son nom était Mirza Aqa et il était l'esprit personnifié. Il venait de Kashan. Pendant l'époque du Bab, il fut attiré par les doux parfums de Dieu et c'est alors qu'il s'enflamma. C'était un homme jeune, beau, plein de charme et de grâce. C'était un calligraphe hors pair, un poète; il possédait également une très belle voix. Il était sage et perspicace, inébranlable dans la foi de Dieu, une flamme d'amour de Dieu, séparé de tout sauf de Dieu.

Pendant les années où Baha'u'llah résidait en Iraq, Jinab-i-Munib quitta Kashan et se hâta en Sa présence. Il alla vivre dans une maison petite et humble, pouvant à peine subsister et se mit à entreprendre d'écrire les paroles de Dieu. Sur son front, on pouvait voir clairement les faveurs de la Manifestation. Dans tout ce monde mortel, il ne possédait qu'une chose, sa fille; et même elle, il la laissa en Perse lorsqu'il se pressa d'aller en Iraq.

A l'époque où, avec pompe et cérémonie, Baha'u'llah et sa suite quittaient Baghdad, Jinab-i-Munib accompagna le groupe à pied. Le jeune homme avait été connu en Perse pour sa vie facile et agréable et son amour du plaisir; bien que connu aussi pour être, d'une certaine façon, doux et délicat et avoir sa propre façon d'agir. On peut comprendre aisément ce qu'a dû supporter une telle personne, allant à pied de Baghdad à Constantinople. Cependant, il accomplit joyeusement les miles du désert et passa ses jours et ses nuits à chanter des prières, communiant avec Dieu et L'implorant.

Il fut pour moi, pendant ce voyage, un compagnon proche. Certaines nuits nous marchions chacun d'un côté du howdah de Baha'u'llah, et la joie que nous éprouvions était indescriptible. Certaines de ces nuits il chantait des poèmes; parmi ceux-ci il chantait les odes de Hafiz comme celui qui commence ainsi
"Venez, laissez-nous éparpiller ces roses, laissez-nous verser ce vin" [lxxx]

et cet autre:

Même si nous nous agenouillons devant notre roi,
Nous sommes les rois de l'étoile du matin.
Nous ne changeons pas de couleurs,
Nous sommes des lions rouges, des dragons noirs!


La Beauté Bénie, au moment de son départ de Constantinople, ordonna à Jinab-i-Munib de retourner en Perse pour promulguer la Foi. Il y retourna donc et pendant une longue période, rendit des services incomparables, particulièrement à Tihran. Puis il retourna de Perse à Andrinople, et fut à nouveau en présence de Baha'u'llah, se réjouissant du privilège d'être près de lui. Au moment de la grande catastrophe, c'est-à-dire, de l'exil à 'Akka, il fut fait prisonnier sur ce sentier et voyagea, maintenant faible et malade, avec le groupe de Baha'u'llah.

Il avait été frappé par un mal sévère et était très faible. Cependant, il n'accepta pas de rester en arrière à Andrinople où il aurait pu recevoir un traitement car il désirait sacrifier sa vie et tomber aux pieds de son Seigneur. Nous voyageâmes jusqu'à ce que nous atteignîmes la mer. Il était alors si faible qu'il fallut trois hommes pour le soulever et le transporter dans le bateau. Une fois qu'il fut à bord, son état s'aggrava et le capitaine insista pour que nous le fassions descendre du bateau, mais grâce à notre insistance, il attendit d'arriver à Smyrne. A Smyrne, le capitaine s'adressa au colonel Umar Bayk, l'agent du gouvernement qui nous accompagnait et lui dit: "Si vous ne le faites pas descendre à terre, je vais le faire par la force parce que le bateau ne peut accepter de passagers dans cet état."

Nous fûmes donc obligés d'amener Jinab-i-Munib à l'hôpital de Smyrne. Faible comme il était, incapable de prononcer un mot, il se traîna devant Baha'u'llah, s'étendit à ses pieds et pleura. Sur le visage de Baha'u'llah il y avait aussi une douleur intense.

Nous transportâmes Jinab-i-Munib à l'hôpital, mais les fonctionnaires ne nous donnèrent qu'une heure. Nous l'avons couché, lui avons posé sa douce tête sur l'oreiller; nous l'avons tenu et l'avons embrassé plusieurs fois. Puis ils nous ont obligés à partir. Vous pouvez imaginer dans quel état nous sommes partis. Chaque fois que je pense à ce moment, les larmes coulent; mon coeur est lourd et je me rappelle ce qu'il était. Un grand homme, extrêmement sage, fidèle, modeste et sérieux et il n'y avait personne comme lui pour sa foi et sa certitude, personne avec à la fois de telles perfections intérieures, extérieures, spirituelles et physiques. C'est pour cela qu'il reçut une bonté et une grâce sans fin.

Son tombeau est à Smyrne mais il est isolé et déserté. Quand cela sera possible, les amis devront le chercher et ses cendres, qui ont été négligées, devront être transportées dans un mausolée [lxxxi] très fréquenté afin que les pèlerins qui s'y rendront puissent respirer le doux parfum de son dernier lieu de repos.


57. Mirza Mustafa Naraqi

Mirza Mustafa faisait partie de ce groupe des grandes âmes pures, c'était un citoyen dirigeant de Naraq et un des premiers croyants. Son visage brillait de l'amour de Dieu. Son esprit s'intéressait aux anémones des significations mystiques, clair comme des prairies et des parterres de fleurs.

C'est au temps du Bab qu'il posa ses lèvres sur la coupe enivrante de la vérité spirituelle et qu'il ressentit un étrange tumulte dans son cerveau, un ardent désir dans son coeur. Dans le sentier de Dieu, il jeta tout ce qu'il possédait, perdit tout, abandonna sa maison, sa famille, son bien-être physique, la paix de l'esprit. Comme un poisson sur le sable, il lutta pour atteindre l'eau de la vie. Il arriva en Iraq, rejoignit les amis de son âme et entra en présence de Baha'u'llah. Pendant quelque temps, il habita en Iraq, joyeux et content, recevant la bonté infinie. Puis il fut renvoyé en Perse, où il servit la Foi au maximum de sa capacité. C'était un homme entier et accompli, dévoué, ferme comme une montagne, sain et fidèle. Dans toute cette agitation et cet affolement, les hurlements des chiens sauvages étaient pour lui comme les bourdonnements des mouches; les épreuves et les peines reposaient son esprit. Quand éclata le feu des afflictions, il en émergea tel l'or scintillant.

Le jour où le convoi de Baha'u'llah quitta Constantinople pour Andrinople, Mirza Mustafa arrivait de Perse. Il n'y eut aucune opportunité pour lui de s'approcher de Baha'u'llah excepté une fois lorsqu'il reçut les instructions de retourner en Perse. Il eut l'honneur d'être reçu à ce moment là.

Quand Mirza Mustafa arriva en Adhirbayjan, il commença à propager la Foi. Jour et nuit, il restait dans un état de prière, et là, à Tabriz il but à la coupe débordante. Sa ferveur s'accrut, son enseignement souleva un tumulte. Puis, l'érudit éminent, le renommé Shaykh Ahmad-i-Khurasani, vint en Adhirbayjan et tous deux joignirent leurs forces. Le résultat fut un tel feu spirituel irrésistible qu'ils enseignèrent la Foi ouvertement et publiquement, et le peuple de Tabriz se mit en colère.

Les farrashes les chassèrent et prirent Mirza Mustafa. Mais les oppresseurs dirent: "Mirza Mustafa avait deux grandes boucles de cheveux. Celui-ci ne peut pas être notre homme." Alors, Mirza Mustafa ôta son chapeau et les boucles de cheveux se répandirent. "Voyez!" leur dit-il "C'est moi." Ils l'arrêtèrent. Ils le torturèrent ainsi que Shaykh Ahmad jusqu'à ce que finalement, ces deux grands hommes aient bu à la coupe de la mort et martyrs, se soient hâtés vers l'horizon suprême.

A l'endroit où ils devaient être tués, Mirza Mustafa cria: "Tuez-moi le premier, tuez-moi avant Shaykh Ahmad afin que je ne le vois pas répandre son sang!"

Leur grandeur fut toujours rapportée dans les écrits de Baha'u'llah. Ils reçurent, de lui plusieurs tablettes, et après leur mort, il décrivit avec sa plume exaltée, les douleurs qu'ils avaient endurées.

De sa jeunesse jusqu'à sa vieillesse, cet homme illustre, Mirza Mustafa avait dévoué sa vie entière au service dans le sentier de Dieu. Aujourd'hui, il repose dans le royaume Très-Glorieux, près de la miséricorde ineffable de Dieu, parfaitement heureux, célébrant la louange de son Seigneur. Que les bénédictions soient sur lui et qu'il soit en bonne demeure [lxxxii]. Que sur lui se déversent les nouvelles joyeuses venant du Seigneur des seigneurs. Que Dieu lui accorde une place exaltée dans cette assemblée élevée.


58. Zaynu'l-Muqarrabin

Cet homme distingué était un des plus grands parmi les compagnons du Bab et les aimés de Baha'u'llah. Lorsqu'il vivait selon les principes de l'islam, il était déjà connu pour sa pureté et sa sainteté. Il avait du talent et avait de grandes capacités dans beaucoup de domaines. Il était le chef et l'exemple spirituel de toute la population de Najaf-Abad, et les personnalités de cette région lui montraient un respect sans borne. Lorsqu'il parlait, son opinion était adoptée; lorsqu'il prononçait un jugement, celui-ci prenait effet; car il était connu comme le modèle et l'autorité en dernier ressort.

Aussitôt qu'il apprit la déclaration du Bab, il cria, du plus profond de son coeur: "Ô notre Seigneur! Oui, nous avons entendu la voix de quelqu'un qui appelait. Il nous appelait à la Foi - croyez en votre Seigneur! - et nous avons cru. [lxxxiii]" Il se dépouilla de tous les voiles qui faisaient obstacle, ses doutes se dissipèrent, il commença à célébrer et à glorifier la Beauté promise par les anciens. Dans sa propre maison et à Isfahan, il se fit remarquer en déclarant ouvertement et à tous que le promis si longtemps désiré était apparu. Les hypocrites se moquèrent de lui, le maudirent et le tourmentèrent. Quant aux autres qui l'avaient vénéré avant, "la masse comme un serpent dans l'herbe", ils se levèrent maintenant pour lui nuire. Chaque jour apporta une nouvelle cruauté, un nouveau tourment de la part de ses oppresseurs. Il endura tout et continua d'enseigner avec grande éloquence. Il resta fidèle, inflexible quand leur courroux augmenta. Il tenait dans sa main une coupe remplie de bonnes nouvelles divines, offrant à tous ceux qui venaient, ce souffle impétueux de la connaissance de Dieu. Il n'était absolument pas effrayé, ne connaissait rien du danger et suivait rapidement le saint sentier du Seigneur.

Cependant, après l'attentat contre le Shah, il n'y avait aucun abri nulle part; pas un soir, pas un matin sans intense affliction. Et comme sa présence à Najaf-Abad à un tel moment représentait un grand danger pour les croyants, il quitta ce lieu et partit en Iraq. C'était la période où la Beauté Bénie était au Kurdistan, lorsqu'Il s'était retiré et vivait dans une grotte à Sar-Galu, que Jinab-i-Zayn arriva à Baghdad. Mais ses espérances furent détruites, son coeur se désola car tout était silencieux; il n'y avait aucun mot de la cause de Dieu, ni mention ni renommée; il n'y avait aucune réunion, aucun appel n'avait été lancé. Yahya, accablé de peur, avait disparu dans un sombre endroit caché. Engourdi, mou il s'était rendu invisible. Jinab-i-Zayn essayant autant qu'il le put, ne trouva pas une seule âme. Il rencontra une seule fois son excellence Kalim. Mais c'était à une période où les croyants étaient très prudents, aussi, il partit pour Karbila. Là, il resta quelque temps et s'occupa en recopiant les Ecrits, après quoi il retourna chez lui à Najaf-Abad. Là, les persécutions et les attaques insensées de ses ennemis implacables étaient difficilement supportables.

Mais lorsque la trompette sonna une deuxième fois [lxxxiv], il retrouva la vie. Son âme répondit à la nouvelle de la révélation de Baha'u'llah ; au son du tambour: "Ne suis-je pas votre Seigneur?" son coeur tambourina en retour: "Oui, en vérité! [lxxxv]" Avec éloquence, il enseigna de nouveau, utilisant les preuves rationnelles et historiques pour prouver que Celui que Dieu rendra manifeste - le Promis du Bab - était apparu. Il était comme des eaux rafraîchissantes pour ceux qui avaient soif, et pour les chercheurs une réponse claire du royaume d'en haut. Dans ses écrits et ses paroles il était le premier parmi les justes, dans ses élucidations et ses commentaires, un puissant signe de Dieu.

En Perse, sa vie était en grand péril; et comme rester à Najaf aurait troublé les agitateurs et entraîné des émeutes, il se hâta vers Andrinople, cherchant refuge en Dieu, et criant en marchant, "Seigneur, Seigneur, me voici!" Revêtu de l'habit des pèlerins, il parvint à la ville tant attendue, à la Mecque de son coeur. Pendant quelque temps il demeura en présence de Baha'u'llah après quoi il reçut l'ordre de partir avec Jinab-i-Mirza Ja'far-i-Yazdi pour propager la Foi. Il retourna en Perse et commença à enseigner avec grande éloquence, afin que la bonne nouvelle de l'avènement du Seigneur résonne vers les cieux élevés. En compagnie de Mirza Ja'far, il voyagea partout, dans les villes florissantes et en ruine, répandant les bonnes nouvelles que la Beauté Bénie était maintenant manifeste.

Une fois encore, il retourna en Iraq où il fut le centre de toutes les réunions, remplissant de joie les auditeurs. A tout moment, il donnait de sages conseils; à tout moment il était consumé par l'amour de Dieu.

Lorsque les croyants furent fait prisonniers en Iraq et bannis à Mosoul, Jinab-i-Zayn devint leur chef. Il resta quelque temps à Mosoul, une consolation pour les autres, résolvant leurs nombreux problèmes. Il embrasa le coeur des gens et les fit s'aimer les uns les autres. Plus tard, il demanda l'autorisation de servir Baha'u'llah; quand celle-ci fut accordée, il arriva à la prison et eut l'honneur d'être en présence de son Bien-Aimé. Alors, Il se consacra à l'écriture des versets sacrés et à encourager les amis. Il ne fut qu'amour pour les émigrants, et réchauffa les coeurs des voyageurs. Il ne se reposa pas un seul instant et reçut, chaque jour, une nouvelle grâce et bonté alors qu'il copiait les Ecrits baha'is avec le plus grand soin.

Depuis son jeune âge jusqu'à son dernier souffle, cet homme éminent n'a jamais failli au service de la Manifestation. Après l'ascension, il fut consumé par une telle peine, une telle angoisse, de telles larmes que, les jours passant, il s'affaiblit. Il resta fidèle à l'alliance et fut un compagnon proche de ce serviteur de la Lumière du Monde mais il languissait de quitter cette vie et attendait son départ chaque jour. Finalement, serein et heureux, se réjouissant des nouvelles du Royaume, il prit son essor vers cette terre mystérieuse. Là, il fut délivré de toute peine et sur le lieu de rassemblement des splendeurs, il fut immergé dans la lumière.

Que sur lui soient les salutations et les louanges du Royaume lumineux, la gloire du Tout-Glorieux du Royaume d'en-haut, et une joie immense dans ce Royaume éternel. Puisse Dieu lui donner une position exaltée dans le paradis d'Abha.


59. 'Azim-i-Tafrishi

Photo: Mirza Nasru'llah-i-Tafrishi.

Cet homme de Dieu était du district de Tafrish. Il était détaché du monde, sans peur, indépendant des proches aussi bien que des étrangers. Il était un des premiers croyants et appartenait à la compagnie des fidèles. C'est en Perse qu'il eut l'honneur de devenir croyant et commença à aider les amis; il fut un serviteur pour chaque croyant, une aide sincère pour chaque voyageur. Il arriva en Iraq avec Musay-i-Qumi - que sur lui soit la gloire de Dieu - reçut sa part de bonté de la Lumière du Monde et eut l'honneur d'être en présence de Baha'u'llah, de Le servir et de devenir l'objet de faveurs et de grâces.

Après un certain temps, 'Azim et Haji Mirza Musa retournèrent en Perse où 'Azim continua à rendre service aux amis, purement par amour de Dieu. Sans gages ni appointements, il fut au service de Mirza Nasru'llah de Tafrish pendant de nombreuses années, sa foi grandissant chaque jour. Puis, Mirza Nasru'llah quitta la Perse pour Andrinople avec Jinab-i-'Azim et entra en présence de Baha'u'llah. Il continua à servir avec amour et loyauté, purement par amour de Dieu; et lorsque le convoi partit pour 'Akka, 'Azim eut le privilège d'accompagner Baha'u'llah et il entra dans la Plus Grande Prison.

Dans la prison, il fut choisi pour servir la famille; il devint porteur d'eau à l'intérieur ainsi qu'à l'extérieur. Il entreprit de nombreuses tâches pénibles dans la caserne. Il ne prenait aucun repos ni le jour ni la nuit. 'Azim - "le grand, le magnifique" - avait un caractère magnifique. Il était patient, supportant la souffrance, indulgent, évitant la souillure de ce monde. Et comme il était le porteur d'eau de la famille, il eut l'honneur d'être en présence de Baha'u'llah chaque jour.

Il fut un bon compagnon pour tous les amis, une consolation pour leurs coeurs; il apporta le bonheur à tous, aux présents comme aux absents. Plusieurs fois on entendit Baha'u'llah exprimer son approbation à son sujet. Il garda toujours le même état intérieur; il était constant, jamais sujet au changement. Il paraissait toujours heureux. Il ne connaissait pas la signification de la fatigue. Il n'était jamais découragé. Quand on lui demandait un service, il le rendait immédiatement. Il était fidèle et ferme dans sa foi, un arbre qui grandit dans la douceur du jardin parfumé de Dieu.

Après avoir servi la sainte famille pendant de nombreuses années, il se hâta loin de cette vie éphémère, tranquille, serein, se réjouissant des nouvelles du royaume, pour aller vers le monde qui ne meurt jamais. Tous les amis pleurèrent sa mort, mais la Beauté Bénie adoucit leur coeur car il prodigua des grâces et des louanges sur celui qui était parti.

Que la miséricorde soit sur 'Azim du royaume de la compassion divine; que la gloire de Dieu soit sur lui, à la nuit tombée et au lever du soleil.


60. Mirza Ja'far-i-Yazdi

Ce chevalier au champ de bataille était un des plus instruits des chercheurs de vérité, très versé dans beaucoup de branches de la connaissance. Pendant longtemps il fréquenta les écoles, se spécialisant dans les fondements de la religion et la jurisprudence religieuse, et faisant des recherches en philosophie et métaphysique, la logique et l'histoire, la théologie et la tradition islamique [lxxxvi]. Cependant, il commença à noter que ces gens étaient arrogants et satisfaits d'eux-mêmes, et ceci le repoussa. C'est alors qu'il entendit le cri du rassemblement suprême, et sans un instant d'hésitation, il éleva sa voix et cria, "Oui, en vérité!" et il répéta les mots, "Ô notre seigneur! Nous avons entendu la voix de Celui qui appela. Il nous appela à la foi - 'croyez en votre Seigneur' - et nous avons cru. [lxxxvii]"

Quand il vit le grand tumulte et les émeutes à Yazd, il quitta sa ville natale et alla à Najaf, la ville noble; là, par mesure de sécurité, il se mêla aux érudits religieux, devint connu parmi eux pour sa grande connaissance. Puis, écoutant la voix de Baghdad, il s'y hâta et changea sa façon de s'habiller. C'est-à-dire qu'il mit sur sa tête le chapeau d'un laïque et alla travailler comme menuisier pour gagner sa vie. Une fois, il alla à Tihran, revint et, abrité par la grâce de Baha'u'llah, fut patient et satisfait, se réjouissant de son habit de pauvreté. Malgré sa grande connaissance, il était humble, effacé, modeste. Il restait silencieux à tout moment et fut un bon compagnon pour tous.

Pendant le voyage d'Iraq à Constantinople, Mirza Ja'far fut un membre de la suite de Baha'u'llah, pourvoyant aux besoins des amis. Il fut un partenaire pour ce serviteur. Quand nous arrivions à une escale, les croyants, fatigués par de longues heures de voyage, se reposaient ou dormaient. Mirza Ja'far et moi-même allions ici et là dans les villages avoisinants pour trouver de l'avoine, de la paille et autres provisions pour la caravane. [lxxxviii] Comme il y avait la famine dans la région, parfois il arriva que nous errions de village en village de midi jusqu'à la moitié de la nuit. Nous faisions tout notre possible pour nous procurer ce qui était disponible puis nous retournions au convoi.

Mirza Ja'far était patient et acceptait la souffrance, c'était un serviteur fidèle au seuil sacré, un serviteur pour tous les amis, travaillant jour et nuit, un homme silencieux, frugal en parole, dépendant entièrement de Dieu en toutes choses. Il continua à servir à Andrinople jusqu'au bannissement à 'Akka où lui aussi fut fait prisonnier. De cela, il en était reconnaissant, offrant continuellement ses remerciements et disant: "Louez soit Dieu! Je suis dans l'arche en pleine charge! [lxxxix]"

La prison était pour lui un jardin de roses et son étroite cellule, un endroit large et parfumé. Alors qu'il était dans les casernes, il devint dangereusement malade et dût rester au lit. Il souffrit de nombreuses complications jusqu'à ce qu'à la fin le docteur abandonna et ne lui rendit plus visite. Alors, l'homme malade rendit son dernier souffle. Mirza Aqa Jan courut chez Baha'u'llah annoncer sa mort. Non seulement le malade avait cessé de respirer mais son corps était déjà inerte. Sa famille se rassembla autour de lui, le pleurant, versant des larmes amères. La Beauté Bénie dit: "Allez, chantez la prière de Ya Shafi - O toi, le guérisseur - et Mirza Ja'far retrouvera la vie. Très rapidement, il sera aussi bien qu'avant." Je vins au pied de son lit. Son corps était froid et tous les signes de la mort étaient présents. Doucement, il commença à s'étirer; bientôt il put remuer ses membres et en moins d'une heure, leva sa tête, s'assit et commença à rire et à plaisanter.

Il vécut encore longtemps après, occupé comme toujours à servir les amis. Servir était pour lui un point d'honneur; pour tous il fut un serviteur. Il fut toujours modeste et humble, invoquant Dieu, rempli d'espoir et de foi jusqu'au plus haut degré. Finalement, pendant qu'il était dans la Plus Grande Prison, il abandonna cette vie terrestre et prit son envol pour la vie au-delà.

Sur lui les salutations et les louanges; que sur lui soient la gloire du Très Glorieux, et les regards favorables du Seigneur. Son tombeau lumineux est à 'Akka.


61. Husayn-Aqay-i-Tabrizi

Cet homme, qui était proche du seuil sacré, était le fils respecté de 'Ali-'Askar-i-Tabrizi. Rempli d'amour ardent, il arriva à Andrinople de Tabriz avec son père, et selon son propre désir, se rendit avec joie et espoir dans la Plus Grande Prison. Dès le jour de son arrivée dans la forteresse de 'Akka, il prit en charge le service du café et servit les amis. Cet homme accompli était si patient, si docile que, pendant plus de quarante ans, malgré les difficultés extrêmes (car jour et nuit, amis et étrangers affluaient aux portes), il s'occupa de chaque personne qui arrivait, les aidant toutes fidèlement. Pendant toute cette période Husayn-Aqa ne blessa aucune âme, et personne ne se plaignit jamais de lui. Ceci était réellement un miracle, et personne d'autre n'aurait pu réussir un tel exploit dans le service. Il était toujours souriant, attentif aux tâches qui lui étaient confiées, connu comme un homme de confiance. Il était inébranlable dans la cause de Dieu, fier et fidèle; pendant les périodes de difficultés, il fut patient et il endura la souffrance.

Après l'ascension de Baha'u'llah, les feux des épreuves jaillirent et un tourbillon de profanation démolit l'édifice. Ce croyant, en dépit de son lien proche de parenté, resta loyal, montrant une telle force et fermeté et reflétant les paroles: "Dans la cause de Dieu, il ne doit pas avoir peur du blâme de celui qui condamne [xc]" Il n'hésita pas un seul instant, ne vacilla pas dans sa foi, et il resta ferme comme une montagne, fier comme une citadelle imprenable, et s'enracina profondément.

Les briseurs de l'alliance emmenèrent sa mère chez eux où sa fille habitait. Ils firent tout leur possible jusqu'à un point inconcevable pour déstabiliser sa foi: ils lui prodiguèrent les faveurs et s'adressèrent à elle avec gentillesse, cachant le fait qu'ils avaient brisé l'alliance. Finalement, cette servante respectée de Baha'u'llah sentit l'odeur de profanation, sur quoi elle quitta immédiatement le manoir de Bahji et retourna rapidement à 'Akka." Je suis la servante de la Beauté Bénie", dit-elle "et loyale à l'alliance et au testament. Même si mon gendre était un prince du royaume, que cela pourrait-il m'apporter? Je ne suis pas celle qu'on persuade par la gentillesse et des marques d'affection. Je ne suis pas intéressée par les marques extérieures d'amitié de ceux qui sont l'incarnation des désirs égoïstes. Je me range du côté de l'alliance et je reste fidèle au testament." Elle ne voulut pas accepter de rencontrer à nouveau les briseurs de l'alliance; elle se libéra complètement d'eux et tourna son visage vers Dieu.

En ce qui concerne Husayn-Aqa, il ne se sépara jamais de 'Abdu'l-Baha. Il avait la plus haute considération pour moi et fut constamment mon compagnon, aussi sa mort fut une épreuve terrible. Même maintenant, à chaque fois que je pense à lui, je suis en peine et pleure sa perte. Mais, Dieu soit loué, cet homme de Dieu, pendant les jours de la Beauté Bénie, resta à tout instant proche de Sa maison et fut l'objet de Son bon plaisir. A maintes reprises on entendit Baha'u'llah dire que Husayn-Aqa était né pour remplir ce service.

Après quarante années de service il abandonna ce monde de passage et prit son essor vers les royaumes de Dieu. Que les salutations, les louanges et la miséricorde du Seigneur de toute bonté soient sur lui. Que son tombeau soit entouré des lumières qui descendent du compagnon exalté. Son tombeau est à 'Akka.


62. Haji 'Ali-'Askar-i-Tabrizi

Le distingué 'Ali-'Askar était un marchand de Tabriz. Il était très respecté en Adhirbayjan par tous ceux qui le connaissaient et reconnu pour sa spiritualité, son sérieux. sa piété et sa foi profonde. Tous les habitants de Tabriz reconnaissaient son excellence et louaient son caractère et sa façon de vivre, ses qualitéset ses talents. C'était un des premiers croyants et un des plus remarquables.

Dès que la première trompette eut retenti, il défaillit, et à la seconde sonnerie, il fut éveillé à une nouvelle vie [xci]. Il devint une bougie se consumant de l'amour de Dieu, le meilleur arbre dans les jardins d'Abha. Il dirigea toute sa famille, ses proches et ses amis vers la foi et avec succès, rendit de nombreux services; mais la tyrannie du faible le poussa dans une phase d'épreuves et il fut assailli chaque jour par de nouvelles afflictions. Cependant, il ne se relâcha pas et ne fut pas découragé; au contraire, sa foi, sa certitude et son abnégation augmentèrent. Finalement il ne put plus supporter sa terre natale. Accompagné de sa famille, il arriva à Andrinople et là, en proie à des difficultés financières mais content, il passa ses journées avec dignité, patience, soumission et rendant grâce.

Puis il prit de petites marchandises avec lui d'Andrinople et partit pour la ville de Jum'ih-Bazar afin de gagner sa vie. Ce qu'il avait avec lui était insignifiant, mais malgré cela, il fut attaqué par des voleurs. Quand le consul de Perse apprit cela, il fit un rapport au gouvernement, statuant une somme énorme pour la valeur des marchandises volées. Par chance, les voleurs furent rattrapés en possession de fonds considérables. Il fut décidé d'enquêter. Le consul appela Haji 'Ali-'Askar et lui dit: "Ces voleurs sont très riches. Dans mon rapport au gouvernement, j'ai écrit que le montant du vol était important. En conséquence, vous devez assister au procès et certifier conformément à ce que j'ai écrit."

Le Haji répondit: "Votre honneur, Khan, les marchandises volées avaient une très petite valeur. Comment puis-je rapporter quelque chose qui n'est pas vraie? Quand ils vont me questionner, je donnerai les faits exacts. Je considère que ceci est mon devoir uniquement."

"Haji," dit le consul, "nous avons une opportunité en or; vous et moi pouvons en profiter ensemble. Ne laissez pas une telle chance qui se produit une fois dans une vie passer entre vos mains."

Le Haji répondit: "Khan, comment pourrais-je régler cela avec Dieu? Laissez-moi être moi-même. Je dirai la vérité et rien que la vérité."

Le consul était hors de lui. Il commença à menacer 'Ali-'Askar. "Voulez-vous me faire passer pour un menteur?" cria-t-il. "Voulez-vous que je sois la risée de tous? Je vous mettrai en prison, je vous ferai bannir, je ne vous épargnerai aucun tourment. A cet instant même, je vais vous remettre entre les mains de la police et je vais leur dire que vous êtes un ennemi de l'état et que vous devez avoir les mains liées et être amené à la frontière de Perse."

Le Haji sourit. "Jinab-i-Khan," dit-il, "j'ai donné ma vie pour la vérité. Je n'ai plus rien. Vous me demandez de mentir et donner un faux témoignage. Faites de moi ce que vous voulez; je ne me détournerai pas du droit chemin."

Quand le consul vit qu'il n'y avait rien à faire pour que 'Ali-'Askar certifie un mensonge, il dit: "Le mieux, alors, est que vous quittiez cet endroit, pour que je puisse informer le gouvernement que le propriétaire des marchandises n'est plus visible et qu'il est parti. Autrement, je serai mis en disgrâce."

Le Haji retourna à Andrinople sans dire un mot concernant ses marchandises volées, mais le fait fut publiquement connu et causa une surprise considérable.

L'excellent et rare vieil homme fut capturé à Andrinople avec les autres et il accompagna la Beauté Bénie dans la forteresse de 'Akka, cette prison de tristesse. Avec toute sa famille, il fut prisonnier dans le sentier de Dieu pendant de nombreuses années. Il rendait toujours grâce, car la prison était pour lui un palais et la captivité une raison de se réjouir. Pendant toutes ces années, il ne fut connu que pour les remerciements et les louanges qu'il ne cessait d'exprimer. Plus la tyrannie des oppresseurs était grande, plus il était heureux. Maintes fois, on entendit Baha'u'llah parler de lui avec une gentillesse affectueuse et dire: "Je suis satisfait de vous." Cet homme, qui était l'esprit personnifié, resta constant, fidèle et joyeux jusqu'à la fin. Après un certain nombre d'années, il échangea ce monde de poussière pour le Royaume qui est sans souillure et son influence spirituelle marqua profondément la postérité.

Par définition, c'était le compagnon proche de 'Abdu'l-Baha. Un jour, au début de notre temps en prison, je me hâtai vers le coin de la caserne où il vivait - cette cellule qui était son nid miteux. Là, il était couché, avec une forte fièvre et délirant. Sa femme était couchée à sa droite, tremblante et secouée de frissons. A ses pieds il y avait sa fille, Fatimih, brûlante de fièvre typhoïde. Derrière eux, son fils Husayn-Aqa, était étendu avec la fièvre scarlatine; il avait oublié le persan et il n'arrêtait pas de crier en turc: "Mon corps est en feu!" Aux pieds du père, une autre fille était couchée, profondément malade et de l'autre côté du mur, il y avait son frère, Mashhadi Fattah, délirant de fièvre. Alors que dans cet état, les lèvres de 'Ali-'Askar étaient en train de remuer, il rendait grâce à Dieu et exprimait sa joie.

Loué soit Dieu! Il est mort dans la Plus Grande Prison, toujours patient et reconnaissant, toujours digne et ferme dans sa foi. Il s'éleva dans les retraites du Seigneur, le Compatissant. Que sur lui soient la gloire du Très-Glorieux, les salutations et les louanges; que sur lui soient éternellement la miséricorde et le pardon.


63. Aqa 'Aliy-i-Qazvini

Cet homme éminent avait des ambitions et des buts élevés. Il était constant à l'extrême, loyal et fermement enraciné dans sa foi. Il était parmi les premiers et les plus grands des croyants. A l'aurore du nouveau jour de direction, il devint amoureux du Bab et commença à enseigner. Du matin jusqu'à la nuit, il travaillait à son métier et presque toutes les nuits il invitait les amis à dîner. En étant de cette façon l'hôte des amis dans l'esprit, il guida de nombreux chercheurs à la Foi, les attirant avec la mélodie de l'amour de Dieu. Il était incroyablement constant, énergique et persévérant.

Puis, l'air chargé de parfum commença à se faire sentir des jardins du Très-Glorieux et il prit feu à la flamme nouvellement allumée. Ses illusions et ses fantaisies furent brûlées et il se leva pour proclamer la cause de Baha'u'llah. Chaque nuit il y avait une réunion, une causerie qui égalait les fleurs dans leurs parterres. Les versets étaient lus, les prières chantées, les bonnes nouvelles de la plus grande des apparitions étaient partagées. Il passait la plus grande partie de son temps à apporter gentillesse aux amis comme aux étrangers; il était un être magnanime aux mains et au coeur ouverts.

Le jour arriva où il se dirigea vers la Plus Grande Prison et arriva avec sa famille à la forteresse de 'Akka. Il avait été affligé de nombreuses difficultés pendant son voyage, mais son impatience de voir Baha'u'llah était telle qu'il trouva facile d'endurer les calamités; et ainsi il parcourut des milliers de kilomètres, cherchant un abri dans la grâce protectrice de Dieu. Au début, il avait des moyens, la vie était confortable et plaisante. Plus tard, cependant, il fut destitué et subit de terribles épreuves. La plupart du temps sa nourriture se composait de pain, rien d'autre; au lieu du thé, il buvait l'eau du ruisseau. Cependant, il restait heureux et satisfait. Sa grande joie était d'être en présence de Baha'u'llah; la réunion avec son Bien-Aimé était une grande bonté; sa nourriture était de regarder la beauté de la Manifestation; son vin d'être avec Baha'u'llah. Il était toujours souriant, toujours silencieux; mais en même temps, son coeur criait, bondissait et dansait. Souvent, il était avec 'Abdu'l-Baha. Il était un ami excellent et un camarade heureux, merveilleux; chéri par Baha'u'llah, respecté par les amis, fuyant le monde, croyant en Dieu. Il n'y avait aucune inconstance en lui, son état intérieur était toujours le même: stable, constant, fermement enraciné comme les collines.

Chaque fois que je me le rappelle et me souviens de cette patience, de cette sérénité, de cette loyauté, de ce contentement, involontairement je me vois demandant à Dieu de déverser ses bontés sur Aqa 'Ali. Les malheurs et les calamités tombaient toujours sur cet homme très estimé. Il était toujours malade, continuellement sujet à de nombreuses afflictions physiques. Ceci était dû à un épisode où, étant chez lui, servant la Foi à Qazvin, il fut attrapé par des malveillants et frappé brutalement sur la tête. Il en supporta les conséquences jusqu'à l'heure de sa mort. Ils abusèrent de lui et le torturèrent de plusieurs façons en pensant qu'il était permis de lui infliger toutes sortes de cruauté; alors que son unique crime était d'être devenu croyant, et son unique faute d'avoir aimé Dieu. La condition de Aqa 'Ali était telle que décrite en vers par le poète :

Par les hiboux, le royal faucon est cerné.
Ils déchirèrent ses ailes, bien qu'il n'ait commis aucune faute.
"Pourquoi" ainsi le narguent-ils, "vous rappelez-vous
Ce royal poignet, ce palais où vous viviez?"
C'est un oiseau bienveillant. Ce crime qu'il a commis,
Excepté pour la beauté, quelle était la faute de Joseph ?


En bref, cet homme a passé son temps dans la prison de 'Akka, priant, suppliant, tournant son visage vers Dieu. Une bonté infinie l'enveloppait; il était chéri par Baha'u'llah, la plus grande partie du temps en Sa présence et inondé de grâce infinie. C'était cela sa joie et son plaisir, son immense bonne fortune, son plus cher désir.

Puis l'heure fixée, le crépuscule de ses espoirs tomba sur lui, et son tour arriva où il dut s'envoler dans le royaume invisible. Abrité sous la protection de Baha'u'llah, il partit rapidement pour cette terre mystérieuse. Que les salutations les bénédictions et la miséricorde du Seigneur de ce monde et du monde à venir soient sur lui. Puisse Dieu illuminer son lieu de repos des rayons du Compagnon d'en-haut.


64. Aqa Muhammad-Baqir et Aqa Muhammad-Isma'il, le Tailleur

C'étaient deux frères qui, dans le sentier de Dieu, captifs avec les autres, furent enfermés dans la forteresse d'Akka. Ils étaient les frères de feu Pahlavan Rida. Ils quittèrent la Perse, émigrèrent à Andrinople, se hâtant vers la bienveillance affectueuse de Baha'u'llah; et sous sa protection, ils arrivèrent à Akka.

Pahlavan Rida - que la miséricorde, les bénédictions et les splendeurs de Dieu soient sur lui, louanges et salutations soient sur lui - était un homme en apparence sans instruction, dépourvu de connaissances. C'était un marchand et comme ceux qui étaient arrivés tout au début, il rejeta tout par amour pour Dieu, atteignant en un bond les étendues de la connaissance. Il fit partie de ceux des premiers temps. Il devint soudainement si éloquent que les gens de Kashan furent ébahis. Par exemple, cet homme en apparence sans éducation, se dirigea chez Haji Muhammad-Karim Khan à Kashan et émit cette question: "Monsieur, êtes-vous le quatrième pilier? Je suis un homme qui a soif de vérité spirituelle et brûle d'apprendre au sujet du quatrième pilier." [xcii]

Comme un certain nombre de dirigeants politiques et militaires étaient présents, le Haji répondit: "Loin de nous cette pensée! J'évite tous ceux qui me considèrent comme le quatrième pilier. Je n'ai jamais fait une telle déclaration. Quiconque a dit que je l'ai faite a menti, que la colère de Dieu soit sur lui!"

Quelques jours plus tard, Pahlavan rencontra le Haji et lui dit: "Monsieur, je viens juste de finir votre livre, Irshadu'l-'Avam (guide pour l'ignorant). Je l'ai lu de la première à la dernière page. Vous dites que chacun a l'obligation de connaître le quatrième pilier ou le quatrième support; en vérité, vous le considérez comme un ami chevalier du Seigneur de l'âge [xciii]. C'est pourquoi je désire ardemment le reconnaître et l'accepter. Je suis certain que vous êtes bien renseigné à son sujet. Montrez-le moi, je vous en prie."

Le Haji était en colère. Il dit: "Le quatrième pilier n'est pas une fiction. Il est un être pleinement visible de tous. Comme moi, il a un turban sur la tête, il porte un 'aba, et a une canne dans sa main". Pahlavan lui sourit. "Sans paraître impoli" dit-il, "il y a donc contradiction dans l'enseignement de votre honneur. Tout d'abord vous dites une chose, puis vous en dites une autre."

Furieux, le Haji répliqua: "Maintenant, je suis occupé. Nous discuterons de cela à un autre moment. Aujourd'hui, je dois vous demander de m'excuser."

Ainsi Rida, un homme considéré comme étant illettré, était capable, en une discussion, de surpasser un tel érudit "Quatrième pilier". Dans la phrase de 'Allamiy-i-Hilli, il le terrassa avec le quatrième support [xciv].

Chaque fois que ce courageux champion de la connaissance commençait à parler, ses auditeurs s'émerveillaient; et il demeura, jusqu'à son dernier souffle, le protecteur et l'aide de tous les chercheurs de vérité. A la fin, il fut connu partout en tant que baha'i, devint un errant et monta au royaume d'Abha.

En ce qui concerne ses deux frères, par la grâce de la Beauté Bénie, après avoir été fait prisonniers par les tyrans, ils furent jetés dans la Plus Grande Prison, où ils partagèrent le lot de ces errants sans abri. Ici à 'Akka, pendant les premiers jours, avec un complet détachement, avec un amour ardent, ils se hâtèrent vers le Royaume Très-Glorieux. Car nos oppresseurs impitoyables, à peine étions-nous arrivés, nous emprisonnèrent tous à l'intérieur de la forteresse dans les casernes des soldats et fermèrent toutes les issues afin que nul ne puisse venir ou partir. A cette époque l'air de 'Akka était pollué et chaque étranger, à peine arrivé, tombait malade. Muhammad-Baqir et Muhammad-Isma'il s'écroulèrent frappés par une maladie violente et il n'y avait ni docteur ni médicament; ces deux lumières personnifiées moururent la même nuit, dans les bras l'une de l'autre. Ils s'élevèrent dans le royaume immortel, laissant les amis les pleurer pour toujours. Il n'y avait rien d'autre que des pleurs cette nuit-là.

Quand le jour se leva, nous avons voulu transporter leurs saints corps. Les oppresseurs nous dirent: "Il est interdit de sortir de la forteresse. Vous devez nous remettre ces deux corps. Nous les laverons, les ensevelirons et les enterrerons. Mais avant tout, vous devez payer pour cela." Nous n'avions pas d'argent. Il y avait un tapis de prière qui avait été placé sous les pieds de Baha'u'llah. Il prit ce tapis et dit: "Vendez-le. Donnez l'argent aux gardes." Le tapis de prières fut vendu pour 170 piastres [xcv] et cette somme leur fut remise. Mais les deux corps ne furent jamais lavés pour leurs funérailles ni ensevelis dans leurs draps; les gardes creusèrent seulement un trou dans la terre et les y jetèrent tels quels dans les vêtements qu'ils portaient; ainsi, même maintenant, leurs deux tombeaux ne font qu'un et comme leurs âmes sont unies dans le Royaume d'Abha, leurs corps sont ensembles ici, sous la terre, chacun tenant l'autre dans une étroite étreinte.

La Beauté Bénie déversa ses bénédictions sur ces deux frères. Vivants, ils furent entourés de sa grâce et de ses faveurs; morts, ils furent immortalisés dans Ses tablettes. Leur tombeau est à 'Akka. Que les salutations et les louanges soient sur eux. Que la gloire du Très-Glorieux et la miséricorde de Dieu et sa bénédiction soient sur eux.


65. Abu'l-Qasim de Sultan-Abad

Abu'l-Qasim de Sultan-Abad, un autre parmi les prisonniers, était le compagnon de voyage de Aqa Faraj. Tous les deux étaient sans prétention, loyaux et dévoués. Quand leurs âmes furent revenues à la vie par les brises de l'esprit de foi, ils se hâtèrent de Perse vers Andrinople, car la cruauté sans répit du malveillant était telle qu'ils ne pouvaient plus rester dans leur propre maison. A pied, libres de toute attache, ils se dirigèrent par les plaines et les collines, cherchant leur chemin à travers les petites rivières et les déserts de sable. Combien de nuits ne purent-ils dormir, restant à découvert, sans endroit où reposer leurs têtes; sans rien à boire ni à manger, avec pour lit la terre nue, et pour nourriture les herbes du désert. Tant bien que mal, ils se traînèrent et s'arrangèrent pour atteindre Andrinople. Il advint qu'ils arrivèrent pendant les derniers jours dans cette ville et furent faits prisonniers avec les autres et, en compagnie de Baha'u'llah, voyagèrent jusqu'à la Plus Grande Prison.

Abu'l-Qasim tomba violemment malade du typhus. Il mourut en même temps que ces deux frères, Muhammad-Baqir et Muhammad-Isma'il, et son corps pur fut enterré en dehors de 'Akka. La Beauté Bénie témoigna de la gratitude à son égard et tous les amis se lamentèrent sur ses afflictions et le pleurèrent. Que sur lui soit la gloire du Tout Glorieux.


66. Aqa Faraj

Dans toutes ces situations, Aqa Faraj fut le compagnon de Abu'l-Qasim. Quand, en Iraq persan, il entendit le vacarme causé par l'avènement de la plus grande lumière, il fut remué et trembla, applaudit, cria en exultation et se hâta vers l'Iraq. Rempli de joie, il entra en présence de son saint Seigneur. Il fut accueilli avec une amitié affectueuse et eut avec bonheur l'honneur de servir Baha'u'llah. Puis il retourna à Sultan-Abad, porteur des bonnes nouvelles.

Là, les malveillants attendaient et les troubles éclatèrent, avec pour résultat que le saint Mulla-Bashi et quelques autres croyants qui n'avaient personne pour les défendre furent frappés et mis à mort. Aqa Faraj et Abu'l-Qasim, qui avaient pu se cacher, partirent rapidement pour Andrinople, pour tomber en fin de compte, avec les autres et avec leur Bien-Aimé, dans la prison de 'Akka.

Ensuite Aqa Faraj eut l'honneur de servir la Beauté Ancienne. Il servit au seuil sacré à tout moment et fut un soutien pour les amis. Pendant les jours de Baha'u'llah, il fut son loyal serviteur et un proche compagnon pour les croyants et il en fut ainsi après le départ de Baha'u'llah. Il resta fidèle à l'alliance et dans le domaine du service, fut solide comme un chêne; un homme noble et supérieur, patient devant l'adversité, satisfait en toutes circonstances.

Solide dans sa foi et dans sa piété, il quitta cette vie et tourna son visage vers le Royaume de Dieu afin de devenir l'objet de grâce sans fin. Que sur lui soient la miséricorde de Dieu et ses bénédictions dans son paradis. Sur lui, salutations et louanges dans les prairies du paradis.


67. L'Épouse du Roi des Martyrs

Parmi les femmes qui quittèrent leur pays natal, il y eut l'affligée Fatimih [xcvi] Begum, veuve du Roi des Martyrs. Elle fut une feuille sainte de l'arbre de Dieu. Dès le début de sa jeunesse, elle fut assaillie par un nombre incalculable d'épreuves. D'abord, il y eut la catastrophe qui frappa son noble père aux environs de Badasht, quand, après de terribles souffrances, il mourut dans un caravansérail désert, une mort difficile, sans aide et loin de chez lui.

L'enfant resta orpheline, et en désarroi jusqu'à ce que, par la grâce de Dieu, elle devint l'épouse du Roi des Martyrs. Mais parce qu'il était connu partout comme un baha'i, qu'il était un amoureux passionné de Baha'u'llah, un homme éperdumment amoureux et enthousiaste, et parce que Nasiri'd-Din Shah avait soif de sang, les personnes hostiles persistaient dans leurs embuscades, chaque jour faisaient un rapport contre lui et le calomniaient à nouveau, commençaient une nouvelle clameur et préparaient de nouvelles ruses. Pour cette raison, sa famille n'était jamais sûre pour sa sécurité, mais vivait angoissée continuellement, prévoyant et appréhendant l'heure de son martyr. La famille était connue partout comme baha'ie; leurs ennemis, des tyrans au coeur de pierre; leur gouvernement inflexiblement et en permanence contre eux; leur souverain régnant assoiffé de sang.

On peut s'imaginer comment pouvait être la vie d'une telle famille. Chaque jour, il y avait un nouvel incident, plus de désarroi, une autre agitation et ils ne pouvaient pas respirer en paix. Puis, il fut martyrisé. Le gouvernement démontra une brutalité et une sauvagerie à un tel degré que la race humaine en pleura et trembla. Tous ses biens furent emportés et pillés et sa famille manqua même du pain quotidien.

Fatimih passait ses nuits à pleurer: jusqu'au lever du jour, ses seuls compagnons étaient des larmes. Chaque fois qu'elle contemplait ses enfants, elle soupirait, s'usant comme une bougie se consumant en chagrin. Mais ensuite elle remerciait Dieu et disait: "Béni soit le Seigneur, ces agonies, ces fortunes brisées sont sur le compte de Baha'u'llah, pour son cher amour." Elle se remémorait la famille sans défense du martyr Husayn et quelles calamités ils avaient eu le privilège d'endurer dans le sentier de Dieu. Et comme elle réfléchissait à ces événements, son coeur bondissait et elle pleurait, "Béni soit Dieu ! Nous aussi sommes devenus des compagnons de la famille du prophète. " [xcvii]

Comme la famille était aux abois, Baha'u'llah leur demanda de venir à la Plus Grande Prison afin que, à l'abri dans cet entourage d'abondante grâce, ils puissent être dédommagés de tout le passé. Là, pendant un certain temps, ils vécurent, joyeux, reconnaissants et louant Dieu. Et quand le fils du Roi des Martyrs, Mirza 'Abdu'l- Husayn, mourut en prison, sa mère, Fatimih, l'accepta, se résigna à la volonté de Dieu, ne se lamenta pas ni pleura et ne prit pas le deuil. Elle ne prononça pas un seul mot pour exprimer son chagrin.

Cette servante de Dieu était infiniment patiente, digne et réservée, et à tout moment reconnaissante. Mais Baha'u'llah quitta ce monde et cela fut l'affliction suprême, la souffrance ultime, et elle ne put en endurer davantage. Le choc et l'inquiétude étaient tels que, comme un poisson enlevé de l'eau, elle se tordit sur le sol, trembla et fut secouée comme si tout son corps tremblait jusqu'à ce qu'à la fin elle prit congé de ses enfants et mourut. Elle s'éleva vers l'ombre de la miséricorde de Dieu et fut plongée dans un océan de lumière. Que sur elle soient les salutations et les louanges, la compassion et la gloire. Puisse Dieu adoucir sa dernière demeure des ondées de sa miséricorde céleste; puisse-t-Il honorer sa demeure à l'ombre du Sadratu'l-Muntaha [xcviii].

Il est Dieu ! [xcix]

Tu vois, O mon seigneur, l'assemblée de Tes aimés, la compagnie de Tes amis, réunis autour de Ton tombeau suffisant à tous, et dans le voisinage de Ton jardin exalté, un jour parmi les jours de la fête de Ridvan - ce temps béni quand Tu es apparu sur le monde, déversant les lumières de Ta sainteté, étendant les rayons lumineux de Ton unicité et es sorti de Baghdad avec une majesté et un pouvoir enveloppant toute l'humanité; avec une gloire qui a fait que tous se sont prosternés devant Toi, que toutes les têtes se sont inclinées, chacun s'est courbé et le regard de chaque homme s'est baissé. Ils T'ont appelé pour se souvenir de Toi et Te mentionner, leurs coeurs sont heureux par les lumières de Tes faveurs, leurs âmes sont rétablies par les évidences de Tes dons, mentionnant Ta louange, tournant leurs visages vers le Royaume, suppliant humblement vers Tes domaines d'en-haut.

Ils sont assemblés ici pour commémorer Ta brillante et sainte servante, une feuille de Ton arbre vert du paradis, une réalité lumineuse, une essence spirituelle, qui toujours implore Ta tendre compassion. Elle naquit dans les bras de la divine sagesse et elle se nourrit au sein de la certitude; elle grandit dans le berceau de la Foi et se réjouit dans le sein de Ton amour, Ô Miséricordieux, Ô Compatissant Seigneur ! Et elle devint une femme dans une maison d'où les douces saveurs de l'unité furent répandues partout. Mais, alors qu'elle n'était encore qu'une petite fille, la misère tomba sur elle dans Ton chemin, et le malheur l'assaillit, Ô Toi le Bienfaiteur, et dans sa jeunesse sans défense, elle but à la coupe de la tristesse et de la souffrance, par amour de Ta beauté, Ô Toi Celui qui pardonne!

Tu sais, Ô mon Dieu, les calamités qu'elle a endurées avec joie dans Ton chemin, les épreuves qu'elle a affrontées dans Ton amour, avec un visage qui irradiait de joie. Combien de nuits fut-elle éveillée implorant humblement Ton Royaume céleste pendant que les autres étaient étendus sur leur lit de repos. Combien de jours son coeur fut-il harcelé par ce qui était advenu à Tes saints pendant que les gens étaient en sécurité dans la citadelle de Tes soins protecteurs.

O mon Seigneur, ses jours et ses années passèrent et chaque fois qu'elle voyait la lumière du matin, elle pleurait sur les malheurs de Tes serviteurs, et quand les ombres du soir tombaient elle pleurait, suppliait et se consumait dans une angoisse fiévreuse pour ce qui était arrivé à Tes serviteurs. Et elle se leva avec toutes ses forces pour Te servir, pour implorer le ciel de Ta miséricorde et avec humilité, Te supplier et reposer son coeur sur Toi. Et elle arriva voilée dans la sainteté, ses vêtements purifiés par l'essence de Ton peuple, et elle entra dans le mariage avec Ton serviteur sur lequel Tu avais conféré Tes cadeaux les plus riches et en qui Tu avais révélé les pavillons de Ta miséricorde infinie et sur le visage de qui, dans Ton Très-Glorieux Royaume, Tu as fait briller la lumière éternelle. Elle épousa celui que Tu as logé dans l'assemblée de réunion, uni à la Compagnie d'en-haut; celui à qui Tu as fait manger de toutes les nourritures célestes, celui sur qui Tu as déversé Tes bénédictions, à qui Tu as accordé le titre: "Roi des Martyrs".

Et elle resta pendant quelques années sous la protection de cette lumière manifeste; et de toute son âme elle servit à Ton Seuil, sainte et lumineuse; préparant la nourriture et un endroit pour que tous Tes bien-aimés qui arrivaient puissent se reposer et dormir. Elle n'avait aucune autre joie que celle-là. Réservée et humble, elle allait au devant de chacune de Tes servantes, se soumettant à la volonté de chacune, servant chacune de tout son coeur, de toute son âme et de tout son être, par amour pour Ta beauté et cherchant à gagner Ton bon plaisir. Jusqu'à ce que sa maison fut connue par Ton nom et la renommée de son mari fut entendue partout, comme quelqu'un T'appartenant et la terre de Sad (Isfahan) fut secouée, exultant de joie, à cause des bénédictions continuelles de Ton puissant champion; et les herbes parfumées de Ta connaissance et les roses de Ta bonté commençaient à bourgeonner et une grande multitude fut amenée dans les eaux de Ta miséricorde.

Alors l'ignoble et l'ignorant parmi Tes créatures se levèrent contre lui et avec tyrannie et malice, ils prononcèrent sa mort; et dépourvus de justice avec un terrible abus d'autorité, ils versèrent son sang immaculé. Sous l'épée scintillante, ce noble personnage Te criait: "Loué sois-Tu, O mon Dieu, que le Jour promis Tu m'as aidé à atteindre cette grâce manifeste; que Tu as rougi la poussière avec mon sang versé sur Ton sentier, afin qu'il fasse pousser des fleurs écarlates. La faveur et la grâce sont Tiennes de m'accorder ce cadeau que je désirais le plus au monde. Merci à Toi qui m'as secouru et confirmé et m'as fait boire à cette coupe qui était remplie à la fontaine de camphre [c] - le Jour de la Manifestation, des mains du porteur de la coupe du martyr dans l'assemblée des délices. En vérité, Tu es Celui qui est plein de grâce, le Généreux, le Dispensateur."

Et après qu'ils l'eurent tué, ils envahirent sa maison princière. Ils attaquèrent comme des loups affamés, comme des lions en chasse et ils saccagèrent, mirent à sac et pillèrent, prenant les meubles luxueux, les ornements et les bijoux. Elle était en péril, abandonnée, son coeur blessé et brisé. Cet assaut violent avait pris place quand les nouvelles de son martyr s'étaient répandues et les enfants pleuraient quand la peur frappa leurs coeurs; ils gémissaient et versaient des larmes, et les sons de deuil jaillirent de cette splendide demeure, mais il n'y avait personne pour les pleurer, il n'y avait personne pour avoir pitié d'eux. Il y avait plutôt la nuit de la tyrannie qui devenait plus profonde autour d'eux et les flammes brûlantes de l'injustice qui flambaient plus hautes encore qu'auparavant; il n'y avait aucun supplice que les malfaiteurs ne leur aient pas fait endurer, aucune agonie qui ne leur ait été épargnée. Et cette sainte feuille resta avec ses enfants dans les griffes de leurs oppresseurs, faisant face à la malice de l'insouciant, sans personne pour leur servir de bouclier.

Et les jours passèrent durant lesquels les larmes étaient ses seules compagnes, les pleurs ses camarades; l'angoisse son seule partenaire, où elle n'avait rien que la douleur pour amie. Et cependant dans ces souffrances, Ô mon Seigneur, elle ne cessa de T'aimer; elle ne Te négligea pas, Ô mon Bien-Aimé, dans ces épreuves brûlantes. Bien que les désastres se suivirent les uns après les autres, bien que les tribulations l'encerclèrent, elle les supporta toutes patiemment, elle les endura toutes, pour elle c'étaient des cadeaux et des faveurs, et dans sa grande agonie - O Toi le Seigneur des noms les plus beaux - Tes louanges étaient sur ses lèvres.

Puis elle abandonna sa patrie, son repos, son refuge et abri et prenant ses enfants, comme l'oiseau elle prit son envol vers cette terre brillante et sainte pour pouvoir faire son nid et chanter Tes louanges comme les oiseaux le font et s'occuper dans Ton amour de toutes ses forces et Te servir de tout son être, de toute son âme et de tout son coeur. Elle était modeste devant chacune de Tes servantes, humble devant chaque feuille du jardin de Ta cause, préoccupée par Ton souvenir, séparée de tout excepté de Toi-même.

Et ses pleurs s'élevaient à l'aube et les doux accents de sa voix pouvaient être entendus dans la nuit et au milieu du jour jusqu'à ce qu'elle retourna vers Toi et prit son envol vers Ton royaume; alla chercher l'abri de Ton seuil et prit son essor vers Ton Ciel éternel. Ô mon Seigneur, récompenses-la avec la contemplation de Ta beauté, nourris-la à la table de Ton éternité, donnes-lui une maison dans Ton voisinage, soutiens-la dans le jardin de Ta sainteté selon Ton bon plaisir; bénie sa demeure, gardes-la en sécurité à l'ombre de Ton arbre céleste, conduis-la, Ô Seigneur, dans les pavillons de Ta divinité, fais qu'elle soit un de Tes signes, une de Tes lumières. En vérité, Tu es le Généreux, le Dispensateur, Celui qui pardonne, le Très-Miséricordieux.


68. Shamsu'd-Duha

Khurshid Begum, qui reçut le titre de Shamsu'd-Duha, le soleil du matin, était la belle-mère du Roi des Martyrs. Cette éloquente et ardente servante de Dieu était la cousine du côté de son père du fameux Muhammad-Baqir d'Isfahan, largement célèbre comme le chef des ulamas de cette ville. Quand elle n'était encore qu'une enfant, elle perdit ses deux parents et fut élevée par sa grand-mère dans la maison du fameux érudit mujtahid et très bien instruite dans les différentes branches de la connaissance, en théologie et dans les sciences et les arts.

Lorsqu'elle fut adulte, elle fut mariée à Mirza Hadiy-i-Nahri; et comme son époux et elle-même étaient très attirés par les enseignements mystiques de cette éminente sommité, l'excellent et distingué Siyyid Kazim-i-Rashti [ci], ils partirent pour Karbila, accompagnés par le frère de Mirza Hadi, Mirza Muhammad-'Aliy-i-Nahri [cii]. Là ils prirent l'habitude d'assister aux classes de Siyyid, s'imprégnant de sa connaissance et ainsi cette servante devint très informée sur les sujets se rapportant à la divinité, sur les Ecritures et sur leurs significations les plus profondes. Le couple eut deux enfants, une fille et un fils. Ils appelèrent leur fils Siyyid 'Ali et leur fille Fatimih Begum, c'est elle qui, quand elle eut l'âge de se marier, épousa le Roi des Martyrs.

Shamsu'd-Duha était à Karbila lorsque l'appel du Seigneur exalté se leva à Shiraz et elle s'écria "Oui, en vérité"! En ce qui concerne son mari et son frère, immédiatement ils se mirent en route pour Shiraz; car tous deux, en visitant le tombeau de l'Imam Husayn, avaient levé les yeux vers la beauté du Premier Point, le Bab. Tous deux furent ébahis par ce qu'ils virent dans le visage transparent, dans ces attributs et ces manières célestes, et étaient d'accord qu'un tel Etre devait être quelqu'un de très grand. En conséquence, au moment où ils entendirent son appel divin, ils répondirent: "Oui, en vérité!" et ils s'enflammèrent d'un amour ardent pour Dieu. De plus, ils avaient été présents chaque jour dans cette place sainte où l'ancien Siyyid enseignait et l'avaient clairement entendu dire: "La Venue est proche, l'affaire plus subtile, plus insaisissable. Il incombe à chacun de rechercher, de demander, car il peut être possible que le Promis soit maintenant présent parmi les hommes, même maintenant visible, pendant que tous sont insouciants, inattentifs, les yeux bandés à son sujet, malgré ce que les traditions sacrées avaient prédit."

Quand les deux frères arrivèrent en Perse, ils entendirent que le Bab était parti pour la Mecque en pèlerinage. Siyyid Muhammad-'Ali partit pour Isfahan et Mirza Hadi retourna à Karbila. Dans l'intervalle, Shamsu'd-Duha était devenue amie avec la "Feuille du paradis", la soeur de Mulla Husayn, le Babu'l-Bab. Par cette dame, elle avait rencontré Tahirih, Qurratu'l-Ayn [ciii] et avait commencé à passer la plus grande partie de son temps en leur étroite compagnie, occupées à enseigner la Foi. Comme ceci se passait dans les premiers jours de la Cause, les gens n'étaient pas encore effrayés. Etre avec Tahirih profita infiniment à Shams, qui devint encore plus enflammée dans la Foi. Elle passa trois ans près de Tahirih à Karbila. Jour et nuit, elle était remuée comme la mer par les vents forts du Trés-Miséricordieux, et elle enseignait d'un langage éloquent.

Comme Tahirih devenait célèbre dans Karbila et comme la Cause de Sa Sainteté Suprême, le Bab, se répandait dans toute la Perse, les 'ulamas de la fin des temps se levèrent pour la rejeter, pour l'accabler de mépris et la détruire. Ils instituèrent une fatva ou jugement qui appelait à un massacre général. Tahirih était une de ceux qui étaient désignés par les sataniques 'ulamas de la ville comme une non-croyante et par erreur, ils pensèrent qu'elle était dans la maison de Shamsu'd-Duha. Ils rentrèrent de force dans la maison de Shams, la cernèrent, la maltraitèrent et la calomnièrent, et lui infligèrent de graves coups corporels. Ils la traînèrent en dehors de la maison et dans les rues du bazar; ils lui donnèrent des coups de bâton; ils lui jetèrent des pierres, ils la dénoncèrent d'un langage infect, l'insultant sans cesse. Pendant que tout cela se passait, Haji Siyyid Mihdi, le père de son distingué mari, arriva. "Cette femme n'est pas Tahirih!" leur cria-t-il. Mais il n'avait aucun témoin pour le prouver [civ] et les farrashes, la police et la foule ne s'arrêtèrent pas. Alors, à travers le tumulte, une voix s'écria: "Ils ont arrêté Qurratu'l-Ayn!" Et ainsi les gens abandonnèrent Shamsu'd-Duha.

Des gardes furent placés à la porte de la maison de Tahirih et personne n'eut l'autorisation d'entrer ou de sortir en attendant les instructions de Baghdad et de Constantinople. Comme l'attente se prolongeait, Tahirih demanda la permission d'aller à Baghdad. "Allons-y nous aussi" leur dit-elle. "Nous sommes résignées à tout. Quoi qu'il nous arrive, c'est ce qui peut nous arriver de mieux et de plus agréable". Avec la permission du gouvernement, Tahirih, la Feuille du Paradis, sa mère et Shamsu'd-Duha, quittèrent Karbila et voyagèrent vers Baghdad, mais la masse anguiforme de la populace les suivirent pendant une certaine distance, les lapidant sur un petit bout de chemin.

Lorsqu'elles atteignirent Baghdad, elles allèrent habiter dans la maison de Shaykh Muhammad-i-Shibl, le père de Muhammad-Mustafa; comme beaucoup se pressaient aux portes, il y avait un tumulte dans tout le quartier, Tahirih dut transférer sa résidence ailleurs, dans son propre logement, où elle continua à enseigner la Foi et proclamer la parole de Dieu. Ici, les 'ulamas, les shaykhs et les autres vinrent l'écouter, posant des questions et recevant des réponses, et très vite, elle fut très connue dans tout Baghdad, interprétant les thèmes de théologie les plus mystérieux et les plus subtils.

Lorsque les autorités gouvernementales furent informées, elles transférèrent Tahirih, Shamsu'd-Duha et la Feuille dans la maison du Mufti et là, elles restèrent trois mois jusqu'à ce que l'information concernant leur cas arriva de Constantinople. Pendant le séjour de Tahirih chez le Mufti, la plus grande partie du temps se passait à converser avec lui, en donnant des preuves convaincantes des enseignements, analysant et répondant aux questions relatives au Seigneur Dieu, parlant du jour de la résurrection [cv], de la balance et du jugement, démêlant les complexités des vérités intérieures.

Un jour, le père du Mufti arriva et les accabla violemment d'injures. Cela embarrassa en quelque sorte le Mufti et il commença à s'excuser pour son père. Puis il dit: "Votre réponse est arrivée de Constantinople. Le souverain vous a rendu votre liberté, mais à condition que vous quittiez ses royaumes." Le matin suivant, elles quittèrent la maison du Mufti et allèrent aux bains publics. Entre temps, Shaykh Muhammad-i-Shibl et Shaykh Sultan-i-'Arab faisaient les préparatifs nécessaires pour leur voyage et après trois jours, ils partirent de Baghdad; Tahirih, Shamsu'd-Duha, la Feuille du paradis, la mère de Mirza Hadi et un nombre de siyyids de Yazd partirent pour la Perse. Leurs dépenses de voyage étaient toutes prises en charge par Shaykh Muhammad.

Ils arrivèrent à Kirmanshah où les femmes s'installèrent dans une maison et les hommes dans une autre. Le travail d'enseignement continuait sans interruption et aussitôt que les ulamas s'en aperçurent, ils donnèrent ordre que le groupe soit expulsé. Le chef du district accompagné d'une foule de personnes entrèrent de force dans la maison et pillèrent leurs affaires; puis ils installèrent les voyageurs dans des howdahs ouverts et les conduisirent en dehors de la ville. Quand ils arrivèrent dans un champ, les muletiers les descendirent et les laissèrent sur le sol, prenant les animaux et les howdahs, les laissant sans nourriture ni bagage et sans un toit au-dessus de leurs têtes.

Tahirih écrivit une lettre au gouverneur de Kirmanshah. "Nous étions des voyageurs invités dans votre ville. 'Honore ton invité' dit le Prophète 'même s'il est incroyant'. Est-il juste qu'un invité soit dédaigné et dépouillé?" Le gouverneur donna ordre que les affaires volées soient rendues et tout fut retourné à leurs propriétaires. Ainsi les muletiers revinrent, assirent les voyageurs dans les howdahs et allèrent à Hamadan. Les dames de Hamadan, mêmes les princesses, vinrent chaque jour rendre visite à Tahirih, qui resta deux mois [cvi] dans cette ville. Elle congédia quelques uns de ses compagnons de voyage afin qu'ils puissent retourner à Baghdad. Cependant, les autres l'accompagnèrent à Qazvin.

Alors qu'ils étaient en route, des cavaliers parents de Tahirih, c'est-à-dire ses frères, approchèrent. "Nous sommes venus" dirent-ils "selon l'ordre de votre père pour vous emmener seule." Mais Tahirih refusa, et ainsi tout le groupe resta ensemble jusqu'à ce qu'ils arrivent à Qazvin. Tahirih alla dans la maison de son père et les amis, ceux qui avaient voyagé à cheval et ceux qui avaient voyagé à pied, s'installèrent dans un caravansérail. Mirza Hadi, le mari de Shamsu'd-Duha était allé à Mah-Ku rencontrer le Bab. A son retour, il attendit l'arrivée à Qazvin de Shams, après quoi le couple partit pour Isfahan, et lorsqu'ils arrivèrent, Mirza Hadi partit pour Badasht. Dans ce hameau et ses environs, il fut attaqué, torturé, même lapidé et fut soumis à de telles épreuves qu'à la fin, il mourut dans un caravansérail en ruine. Son frère, Mirza Muhammad-'Ali, l'enterra, au bord de la route.

Shamsu'd-Duha resta à Isfahan. Elle passait ses jours et ses nuits dans le souvenir de Dieu et en enseignant Sa cause aux femmes de la ville. Elle avait reçu le don d'éloquence; ses propos étaient magnifiques à entendre.

Elle était très honorée par les femmes importantes d'Isfahan, renommée pour sa piété, sa croyance et la pureté de sa vie. Elle était la chasteté personnifiée; elle passait toutes ses heures en récitant des Ecrits saints, en interprétant les Textes, en débrouillant les plus complexes des thèmes spirituels ou en propageant les douces saveurs de Dieu.

C'était pour ces raisons que le Roi des Martyrs avait épousé sa fille respectée et était devenu son gendre. Et lorsque Shams alla vivre dans sa demeure princière, jour et nuit les gens affluèrent à sa porte, les femmes importantes de la ville, amies ou étrangères, proches ou éloignées, allaient et venaient. Car elle était un feu allumé par l'amour de Dieu, et elle proclamait le Verbe de Dieu avec une grande ardeur et avec verve, ainsi elle devint connue parmi les non-croyants comme Fatimih, la Dame de Lumière des baha'is. [cvii]

Et le temps passa jusqu'au jour où la "Serpent" et le "Loup" conspirèrent et publièrent un décret, une fatva, qui condamnait à mort le Roi des Martyrs. Ils complotèrent avec le gouverneur de la ville afin qu'ils puissent piller, mettre à sac et partager entre eux le grand trésor qu'il possédait. Puis le Shah se joignit à ces deux animaux sauvages et il ordonna que le sang des deux frères, le Roi des Martyrs et le Bien-Aimé des Martyrs, soit versé. Sans avertissement, ces hommes impitoyables, la "Serpent", le "Loup", leurs farrashes brutaux et la police attaquèrent. Ils enchaînèrent les deux frères et les conduisirent à la prison, pillèrent leurs maisons richement meublées, prirent toutes leurs possessions et n'épargnèrent personne, pas même les bébés. Ils torturèrent, maudirent, injurièrent, bafouèrent, rossèrent sans discontinuer les parents et autres victimes de la famille.

A Paris, Zillu's-Sultan [cviii] raconta ce qui suit, jurant sur serment de sa véracité: "De nombreuses fois, j'ai prévenu ces deux grands descendants de la maison du Prophète mais sans succès. Finalement, je les ai convoqués une nuit, et avec un ton d'extrême urgence, je leur ai dit ces mots: 'Messieurs, le Shah à trois reprises vous a condamnés à mort. Ses farmans arrivent sans cesse. Le décret est absolu et il n'y a qu'une seule direction ouverte devant vous maintenant: vous devez, en présence des 'ulamas, vous justifier et maudire votre Foi.' Leur réponse fut: 'Ya Baha'u'l-Abha! O Toi la Gloire du Tout-Glorieux! Que nos vies soient offertes!' Finalement, j'ai accepté qu'ils ne maudissent pas leur Foi et je leur dis que tout ce qu'ils avaient à dire était, 'Nous ne sommes pas baha'is' 'Juste ces quelques mots' dis-je, 'seront suffisants; alors je pourrais faire mon rapport au Shah et vous serez sauvés.' 'Ceci est impossible,' répondirent-ils, ' parce que nous sommes baha'is. Ô Toi la Gloire du Tout-Glorieux, nos coeurs ont faim du martyr! Ya Baha'u'l-Abha!' J'étais furieux alors j'ai essayé, en étant dur avec eux, de les forcer à renier leur Foi, mais c'était sans espoir. Le décret de "Serpent femelle" et du Loup, rapaces, et l'ordre du Shah furent exécutés."

Après le martyr de ces deux êtres chers, Shamsu'd-Duha fut recherchée et dut se réfugier dans la maison de son frère. Bien qu'il ne fut pas croyant, il était connu à Isfahan comme un homme droit, pieux et saint, un homme érudit, un ascète qui, comme un ermite, vivait retiré, et pour ces raisons il était très apprécié et tous avaient confiance en lui. Elle resta avec lui mais le gouvernement n'abandonnait pas ses recherches, finalement il l'a découvrit et lui demanda de se présenter; les sataniques ulamas, ayant rejoint les autorités civiles, avaient quelque chose à voir avec cela. Donc, son frère fut obligé d'accompagner Shamsu'd-Duha chez le gouverneur.

Il resta à l'extérieur pendant qu'ils envoyèrent sa soeur dans les appartements des femmes; le gouverneur vint à la porte et il lui donna des coups de pied et la piétina si sauvagement qu'elle s'évanouit. Puis le gouverneur cria à sa femme: "Princesse! Princesse! Venez ici et jetez un oeil sur la 'Dame de Lumière' des baha'is."

Les femmes la soulevèrent et la portèrent dans une des chambres pendant que son frère, abasourdi, attendait à l'extérieur de la maison. Finalement, essayant de plaider avec le gouverneur, il lui dit: "Ma soeur a été battue si sévèrement qu'elle est sur le point de mourir. Quel intérêt avez-vous de la garder ? Il n'y a aucun espoir pour elle maintenant: Avec votre autorisation je peux la ramener dans ma maison. Ce serait sûrement mieux qu'elle meure là-bas, plutôt qu'ici, car après tout, elle est une descendante du prophète, elle est de la noble lignée de Muhammad, et elle n'a rien fait de mal. Il n'y a rien contre elle excepté sa parenté au gendre." Le gouverneur répondit: "Elle est une des plus grandes dirigeantes et des héroïnes des baha'is. Elle va purement et simplement causer une autre révolte." Le frère dit: "Je vous promets qu'elle ne prononcera pas un seul mot. Il est certain que dans quelques jours, elle ne sera même plus en vie. Son corps est fragile, faible, presque sans vie et elle a beaucoup souffert".

Comme le frère était très respecté et accepté par les grands comme par les petits, le gouverneur libéra Shamsu'd-Duha de sa détention, la laissant partir. Elle vécut pendant un certain temps dans la maison de son frère, se lamentant, en peine, déversant des larmes, pleurant ses morts. Son frère n'était pas en paix et les ennemis ne les laissèrent pas tranquilles; il y avait de nouveaux troubles chaque jour et des clameurs publiques. Finalement, le frère pensa que le mieux était d'amener Shams en pèlerinage à Mashhad, espérant que le feu des perturbations civiles s'arrêteraient. Ils allèrent à Mashhad et s'installèrent dans une maison libre près du tombeau de l'Imam Rida. [cix]

Comme il était pieux, le frère se rendait au tombeau chaque matin et restait là, pris par ses dévotions jusqu'à midi. L'après-midi également, il se précipitait vers le lieu saint et priait jusqu'au soir. La maison étant vide, Shamsu'd-Duha s'arrangea pour se mettre en rapport avec plusieurs croyantes et commença à se réunir avec elles; et comme l'amour de Dieu brûlait si ardemment dans son coeur, elle ne put rester silencieuse, aussi pendant ces heures que son frère était absent, la maison s'animait. Les baha'ies s'y réunissaient et écoutaient avec un intérêt profond ses paroles lucides et éloquentes.

A cette époque, la vie était très dure pour les croyants à Mashhad avec les malveillants toujours en alerte; s'ils suspectaient un individu, ils le tuaient. Il n'y avait aucune sécurité ni paix. Mais Shamsu'd-Duha ne pouvait rester tranquille malgré les terribles épreuves qu'elle avait endurées, elle ignorait le danger et était capable de se jeter dans les flammes ou dans la mer.

Comme son frère ne fréquentait personne, il ne savait rien de ce qui se passait. Jour et nuit il allait de la maison au tombeau et du tombeau à la maison; il était un reclus, n'avait pas d'amis et ne parlait à personne. Malgré cela, il arriva un jour où il s'aperçut que le trouble avait éclaté dans la ville et il savait que cela se terminerait très mal. C'était un homme si calme et silencieux qu'il ne fit aucun reproche à sa soeur; simplement il l'amena hors de Mashhad sans avertissement et ils retournèrent à Isfahan. Il l'envoya chez sa fille, la veuve du Roi des Martyrs car il ne voulait plus l'abriter sous son toit.

Shamsu'd-Duha était de retour à Isfahan, enseignant la Foi courageusement et propageant les douces saveurs de Dieu. Si passionné était l'amour ardent dans son coeur qu'il la forçait à parler ouvertement partout où elle trouvait une oreille attentive. Et lorsqu'une fois encore la famille du Roi des Martyrs fut sur le point d'être touchée par de terribles calamités et d'endurer de sévères afflictions, à Isfahan, Baha'u'llah demanda à ce qu'ils viennent dans la Plus Grande Prison. Shamsu'd-Duha, la veuve du Roi des Martyrs et les enfants arrivèrent en Terre Sainte. Ici, elles passaient leur journée joyeusement lorsque le fils du Roi des Martyrs, Mirza 'Abdu'l- Hussayn, à cause des terribles souffrances qu'il avait endurées à Isfahan, eut la tuberculose et mourut à 'Akka.

Shamsu'd-Duha avait le coeur lourd. Elle pleura son absence, s'affaiblit par sa perte et ceci devint encore plus dur car l'affliction suprême, le comble de la douleur arriva sur nous. Le fondement de sa vie était ébranlé; telle une bougie, elle brûlait de chagrin. Elle devint si faible qu'elle resta dans son lit sans pouvoir bouger. Malgré cela, elle ne se reposait pas, ni ne restait silencieuse un seul instant. Elle parlait tout au long de la journée des choses qui étaient advenues dans la Cause ou bien elle récitait les Ecrits saints, suppliait et chantait des prières - jusqu'à ce que quittant la Plus Grande Prison, elle s'envola vers le monde de Dieu. Elle se hâta loin de cet abîme poussiéreux de perdition vers un pays sans souillure; emballa ses effets et partit pour la terre des lumières. Que sur elle soient les salutations, les bénédictions et la plus grande miséricorde, abritée par la compassion de son Seigneur omnipotent.


69. Tahirih

Une femme chaste et sainte, un signe et un exemple de beauté incomparable, un flambeau ardent de l'amour de Dieu, une lampe de Ses dons, telle était Jinab-i-Tahirih [cx]. Elle était appelée Umm-Salma; c'était la fille de Haji Mulla Salih, un mujtahid de Qazvin, et son oncle paternel était Mulla Taqi, le Imam-Jum'ih ou le dirigeant des prières dans la mosquée principale de cette ville. Ils la marièrent à Mulla Muhammad, le fils de Mulla Taqi et elle eut trois enfants, deux fils et une fille; tous trois étaient privés de la grâce qui enveloppait leur mère et tous négligèrent de reconnaître la vérité de la Cause.

Lorsqu'elle était encore enfant, son père lui choisit un professeur et elle étudia les différentes branches de la connaissance et des arts, montrant une capacité remarquable dans les travaux littéraires. Le degré de son éducation et de ses connaissances était tel que son père exprimait souvent des regrets disant: "Si seulement elle avait été un garçon, il aurait illuminé ma maison et m'aurait apporté la réussite!" [cxi]

Un jour, elle fut invitée chez Mulla Javad, un cousin du côté de sa mère et là, dans la bibliothèque de son cousin elle découvrit quelques-uns des écrits de Shaykh Ahmad-i-Ahsa'i. [cxii] Enchantée par ce qu'il avait à dire, Tahirih demanda à emprunter les écrits et à les amener chez elle. Mulla Javad refusa violemment, lui disant: "Votre père est un ennemi des deux Lumières lumineuses, Shaykh Ahmad et Siyyid Kazim. Si seulement il rêvait qu'un mot de ces êtres éminents, qu'un parfum du jardin de ces réalités, vous étiez parvenu, il s'attaquerait à ma vie et vous aussi deviendriez la cible de son courroux." Tahirih répondit: "Voilà longtemps que j'avais soif de ceci; j'ai langui après ces explications, ces vérités intérieures. Donnez-moi tout ce que vous avez de ces livres. Qu'importe si cela déplaît à mon père." En conséquence, Mulla Javad lui envoya les écrits du Shaykh et du Siyyid.

Une nuit, Tahirih chercha son père dans sa bibliothèque et commença à parler des enseignements de Shaykh Ahmad. A l'instant même où il apprit que sa fille connaissait les doctrines Shaykhi, les accusations de Mulla Salih retentirent et il cria: "Javad a fait de vous une âme perdue!" Tahirih répondit: "Le feu Shaykh était un vrai érudit de Dieu et j'ai appris une infinité de vérités spirituelles en lisant ses livres. De plus, il fonde tout ce qu'il dit sur les traditions des saints Imams. Vous vous appelez un connaisseur mystique et un homme de Dieu, vous considérez votre oncle respecté comme un érudit et le plus pieux - cependant dans aucun de vous deux je ne trouve une trace de ces qualités!"

Pendant quelque temps, elle continua ces discussions chaudes avec son père, débattant sur des questions telles que la Résurrection et le jour du Jugement, la nuit de l'ascension au ciel de Muhammad, la promesse et la menace et la venue du Promis [cxiii]. Manquant d'arguments, son père avait recours aux malédictions et aux injures. Puis, une nuit, pour appuyer sa lutte, Tahirih cita une sainte tradition de l'Imam Ja'far-i-Sadiq [cxiv] et comme elle confirmait ce qu'elle disait, son père éclata de rire, se moquant de la tradition. Tahirih dit: "Oh mon père, ce sont les paroles du saint Imam. Comment pouvez-vous vous moquer et les repousser?"

A partir de ce moment, elle cessa de débattre et de lutter avec son père. Pendant ce temps, elle engagea une correspondance secrète avec Siyyid Kazim, concernant la solution des problèmes complexes de théologie et Siyyid Kazim vint à lui donner le nom de "Consolation des yeux" (Qurratu'l-'Ayn). En ce qui concerne le titre de Tahirih (La Pure), il lui a été donné en premier à Badasht et plus tard fut approuvé par le Bab et rapporté dans des tablettes.

Tahirih avait pris feu. Elle partit pour Karbila, espérant rencontrer Siyyid Kazim, mais elle arriva trop tard: dix jours avant qu'elle n'arrive dans cette ville, il avait quitté ce monde. Peu de temps avant sa mort le Siyyid avait partagé avec ses disciples les bonnes nouvelles que l'avènement du promis était proche. "Allez" leur répétait-il "et cherchez votre Seigneur". Ainsi, les plus distingués de ses disciples se rassemblèrent pour méditer et prier, pour jeûner et veiller dans la Masjid-i-Kufih, tandis que d'autres attendaient l'avènement à Karbila.

Parmi eux il y avait Tahirih, jeûnant le jour, pratiquant des disciplines religieuses et passant la nuit à veiller et à chanter des prières. Une nuit, quand le jour allait poindre, elle posa sa tête sur son oreiller, perdit toute conscience de cette vie terrestre et fit un rêve; dans sa vision, un jeune, un Siyyid portant un habit noir et un turban vert, lui apparut dans les cieux. Il se tenait dans l'air, récitant des versets et priant avec les mains levées. Tout de suite elle mémorisa un de ces versets et l'écrivit sur son cahier quand elle se réveilla. Après que le Bab eut déclaré sa mission, et que son premier livre "La Meilleure des Histoires [cxv]" ait circulé, Tahirih lisait un jour un paragraphe du texte et elle arriva sur ce même verset qu'elle avait noté de son rêve. Immédiatement elle rendit grâce, tomba à genoux et baissa la tête jusqu'au sol, convaincue que le message du Bab était la vérité.

Les bonnes nouvelles la touchèrent à Karbila et tout de suite elle commença à enseigner. Elle traduisit et interpréta "La Meilleure des Histoires" tout en écrivant en persan et en arabe, composant des odes et des poèmes, et pratiquant humblement ses dévotions, accomplissant même celles qui étaient facultatives et en surnombre. Lorsque les sataniques ulamas de Karbila eurent vent de tout ceci et apprirent qu'une femme prêchait au peuple une nouvelle religion et avait déjà influencé un nombre considérable de gens, ils allèrent chez le gouverneur et déposèrent une plainte. Leurs charges, pour être bref, entraînèrent des attaques violentes sur Tahirih et des souffrances qu'elle accepta et pour lesquelles elle offrit louanges et remerciements.

Lorsque les autorités vinrent la chercher, elles allèrent tout d'abord chez Shamsu'd-Duha, la prenant pour Tahirih. Cependant, aussitôt qu'ils entendirent que Tahirih avait été arrêtée, ils laissèrent Shams libre car Tahirih avait envoyé un message au gouverneur disant: "Je suis à votre disposition. Ne causez de tort à personne d'autre."

Le gouverneur disposa des gardes autour de sa maison et l'enferma, demandant à Baghdad des instructions afin de savoir comment procéder. Pendant trois mois, elle vécut dans un état de siège, complètement isolée, avec des gardes entourant sa maison. Comme les autorités locales n'avaient toujours pas reçu de réponse de Baghdad, Tahirih soumit son cas au gouverneur, disant: "Aucun mot n'est venu ni de Baghdad ni de Constantinople. En conséquence, nous allons partir nous-mêmes pour Baghdad et y attendre la réponse." Le gouverneur l'autorisa à partir, et elle se mit en route accompagnée de Shamsu'd-Duha et de la Feuille du Paradis (la soeur de Mulla Husayn) et de sa mère. A Baghdad elle habita tout d'abord dans la maison de Shaykh Muhammad, le père distingué de Aqa Muhammad-Mustafa. Mais la pression des gens autour d'elle était si importante qu'elle transféra sa résidence dans un autre quartier, engagée jour et nuit à propager la Foi et librement associée aux habitants de Baghdad. Alors elle devint célèbre dans toute la ville et il y eut un immense tumulte.

Tahirih entretenait également une correspondance avec les 'ulamas de Kazimayn; elle leur présentait les preuves irréfutables, et lorsque l'un ou l'autre se présentait elle lui offrait des arguments convaincants. Finalement, elle envoya un message aux théologiens Shi'ihs, leur disant: "Si vous n'êtes pas satisfaits avec ces preuves concluantes, je vous défie à un examen de preuves [cxvi]". Alors il y eut de grands cris d'indignation des théologiens et le gouverneur fut obligé d'envoyer Tahirih et ses compagnes dans la maison de Ibn-i-Alusi, le mufti de Baghdad. Là elle resta environ trois mois, attendant des nouvelles et instructions de Constantinople. Ibn-i-Alusi l'engageait dans des dialogues savants, des questions étaient posées et les réponses données, il ne démentait pas ce qu'elle avait à dire.

Un jour, le mufti raconta un de ses rêves et lui demanda de lui dire ce que cela signifiait. Il dit: "Dans mon rêve, j'ai vu les 'ulamas Shi'ihs arriver au tombeau sacré de Imam Husayn, le prince des martyrs. Ils enlevèrent la barrière qui ferme le tombeau et il brisèrent la tombe resplendissante pour que le corps immaculé soit exposé, découvert à leur regard. Ils cherchaient à s'en emparer mais moi-même me suis baissé sur le corps sacré et les ai écartés." Tahirih répondit: "Voici la signification de votre rêve: bientôt vous aurez à me délivrer d'entre les mains des théologiens Shi'ih". "Moi aussi, je l'ai interprété ainsi" dit Ibn-i-Alusi.

Comme il avait découvert qu'elle était bien instruite dans les questions savantes, dans les commentaires et les textes sacrés, tous deux entretenaient souvent des discussions; elle parlait sur des thèmes tels que le jour de la résurrection, le jugement et le sirat [cxvii] et elle n'abandonnait pas.

Puis une nuit, le père de Ibn-i-Alusi arriva dans la maison de son fils. Il rencontra Tahirih et brutalement, sans poser une seule question, commença à la maudire, se moquer et l'injurier. Gêné par le comportement de son père, Ibn-i-Alusi s'excusa. Puis il dit: "la réponse est arrivée de Constantinople. Le roi a ordonné que vous soyez libérée mais à condition que vous quittiez son royaume. Partez donc demain, faites vos préparatifs pour le voyage et hâtez-vous loin de ce pays."

En conséquence, Tahirih, avec ses compagnes, quitta la maison du mufti, fit les préparatifs pour leur voyage et partit pour Baghdad. Quand elles quittèrent la ville, un nombre de croyants arabes, portant des armes, marchèrent le long de leur convoi. Parmi l'escorte il y avait Shaykh Sultan, Shaykh Muhammad et son fils distingué Muhammad-Mustafa et Shaykh Salih, et ils étaient à cheval. C'est Shaykh Muhammad qui prit en charge les dépenses du voyage.

Quand ils arrivèrent à Kirmanshah les femmes descendirent dans une maison et les hommes dans une autre, et les habitants arrivèrent dans un courant ininterrompu chercher des informations sur la nouvelle Foi. Comme partout ailleurs, les 'ulamas furent rapidement dans un état de frénésie et ils ordonnèrent que les nouveaux venus soient expulsés. Il en résulta que le kad-khuda ou le chef de ce quartier, avec une bande de gens, assiégèrent la maison où était Tahirih et la saccagèrent. Puis ils placèrent Tahirih et ses compagnes dans un howdah découvert et les amenèrent en dehors de la ville dans un champ où ils laissèrent les captives. Les conducteurs prirent leurs animaux et retournèrent à la ville. Les victimes restèrent sur le sol sans nourriture, ni abri et aucun moyen pour voyager.

Alors Tahirih écrivit une lettre au prince de ce territoire dans laquelle elle lui disait: "O toi gouverneur juste! Nous étions des invités dans ta ville. Est-ce ainsi que vous traitez vos invités ?" Lorsque sa lettre fut portée au gouverneur de Kirmanshah, il dit: "Je ne savais rien de cette injustice. Cette méchanceté fut suscitée par les théologiens." Immédiatement, il ordonna au kad-khuda de rendre aux voyageurs tous leurs biens. Cet officier rassembla toutes les marchandises volées, les conducteurs avec leurs animaux sortirent de la ville, les voyageurs reprirent leur place et continuèrent leur voyage.

Ils arrivèrent à Hamadan et là leur séjour fut heureux. Les femmes les plus illustres de cette ville, mêmes les princesses, venaient rendre visite, cherchant à bénéficier de l'enseignement de Tahirih. A Hamadan elle donna congé à une partie de son escorte et les renvoya à Baghdad, tandis qu'elle en prit certains à Qazvin avec elle, dont Shamsu'd-Duha et Shaykh-Salih.

Comme ils voyageaient, quelques cavaliers vinrent à leur rencontre, des parents de Tahirih de Qazvin. Ils désiraient la conduire seule, sans les autres, chez son père. Tahirih refusa, disant: "Ils sont en ma compagnie" Ainsi ils entrèrent dans Qazvin. Tahirih alla dans la maison de son père tandis que les arabes qui avaient formé son escorte descendirent dans un caravansérail.

Tahirih quitta rapidement son père et alla vivre avec son frère et là, les dames importantes de la ville venaient lui rendre visite. Tout cela dura jusqu'à l'assassinat de Mulla Taqi [cxviii], lorsque tous les babis de Qazvin furent jetés en prison. Certains furent envoyés à Tihran et ensuite retournés à Qazvin et furent martyrisés.

Le meurtre de Mulla Taqi se produisit de la façon suivante: un jour que ce tyran abruti par l'opium était en chaire, il commença à se moquer et à injurier le grand Shaykh Ahmad-i-Ahsa'i. Effrontément, grossièrement, criant des obscénités, il s'écria: "Ce Shaykh est celui qui alluma ce feu d'enfer et soumit le monde entier à cette épreuve!" Il y eut une demande dans l'audience, un natif de Shiraz. Il trouva que les reproches, les railleries et les indécences étaient plus qu'il ne pouvait en supporter. Dans l'obscurité, il se dirigea dans la mosquée, plongea une pointe de lance entre les lèvres de Mulla Taqi et s'enfuit. Le matin suivant, ils arrêtèrent les croyants sans défense et les soumirent à des tortures atroces, bien que tous aient été innocents et ne savaient rien de ce qui s'était passé. Il ne fut jamais question de faire des recherches pour étudier le cas. Les croyants, à plusieurs reprises, clamèrent leur innocence mais personne ne leur prêta attention. Après quelques jours, le tueur se rendit; il avoua aux autorités, les informant qu'il avait commis ce meurtre parce que Mulla Taqi avait calomnié Shaykh Ahmad. "Je me remets entre vos mains" leur dit-il "afin que vous rendiez leur liberté à ces gens innocents". Ils l'arrêtèrent, l'enchaînèrent et l'envoyèrent enchaîné avec les autres à Tihran.

Mais là, il nota que malgré sa confession, les autres n'avaient pas été libérés. Pendant la nuit, il s'échappa de la prison et alla dans la maison de Rida Khan - cet homme rare et précieux, cette étoile du sacrifice parmi les Bien-Aimés de Dieu - le fils de Muhammad Khan, le maître d'équitation de Muhammad Shah. Il y resta pendant quelque temps, après quoi lui et Rida Khan se rendirent secrètement au Fort de Shaykh Tabarsi dans le Mazindaran [cxix]. Muhammad Khan envoya des cavaliers à leur rencontre pour les dépister, mais malgré leurs efforts, personne ne put les trouver. Ces deux cavaliers arrivèrent au Fort de Tabarsi, où tous deux gagnèrent une mort de martyrs. En ce qui concerne les autres amis qui étaient dans la prison de Tihran, certains d'entre eux retournèrent à Qazvin et eux aussi devinrent martyrs.

Un jour, l'administrateur des finances Mirza Shafi appela le tueur et s'adressa à lui: "Jinab, appartenez-vous à un ordre de derviches ou suivez-vous la loi? Si vous êtes un disciple de la loi, pourquoi avez-vous donné à ce mujtahid érudit un coup cruel et fatal dans la bouche ? Si vous êtes un derviche et suivez la voie, une des règles de la voie est de ne blesser aucun homme. Comment, alors, avez-vous pu abattre ce théologien zélé?" "Monsieur" répondit-il, "à côté de la loi et à côté de la voie, nous avons également la vérité. C'est en servant la vérité que je l'ai puni de son action." [cxx]

Ces choses avaient pris place avant que la réalité de cette Cause ne soit révélée et que tout soit rendu clair. Car à cette époque, personne ne savait que la manifestation du Bab aboutirait à la manifestation de la Beauté Bénie, que la loi du talion serait supprimée et que le principe fondamental de la loi de Dieu serait qu'"il est meilleur pour vous d'être tué que de tuer"; que les désaccords et disputes cesseraient et la règle de la guerre et les massacres s'éteindraient.

Mais, béni soit Dieu, avec l'avènement de la Beauté Bénie, une telle splendeur d'harmonie et de paix, un tel esprit d'humilité et d'endurance se mirent à rayonner, que lorsque à Yazd les hommes, les femmes et les enfants furent les cibles du feu de l'ennemi ou passèrent au fil de l'épée, quand les dirigeants et les sataniques 'ulamas et leurs disciples se rejoignirent et ensemble attaquèrent ces victimes sans défense et répandirent leur sang - taillant et séparant les corps des femmes chastes, tranchant avec leurs dagues les gorges des enfants qu'ils avaient fait orphelins, puis jetant dans le feu les membres déchirés et mutilés - pas un des amis de Dieu ne leva une main contre eux. Au contraire, parmi ces martyrs, ces vrais compagnons de ceux qui sont morts il y a longtemps à Karbila - il y avait un homme qui, lorsqu'il vit le sabre étincelant levé sur lui, introduisit du sucre dans la bouche de son bourreau et cria: "Avec un goût sucré sur vos lèvres, mettez-moi à mort - car vous m'apportez le martyr, mon plus cher désir`"

Mais retournons à notre sujet. Après la mort de son oncle impie, Mulla Taqi, à Qazvin, Tahirih fut dans une situation désespérée. Elle était prisonnière et avait le coeur lourd, se lamentant sur les événements pénibles qui étaient advenus. Elle était surveillée de tous côtés, par les surveillants, les gardes, les farrashes et les ennemis. Pendant qu'elle se languissait, Baha'u'llah dépêcha de la capitale Hadiy-i-Qazvini l'époux de la célèbre Khatun-Jan, et ils s'arrangèrent, par un stratagème, pour la libérer de cet embrouillement et pour l'amener pendant la nuit à Tihran. Elle descendit dans la demeure de Baha'u'llah et fut logée dans un appartement des étages supérieurs.

Lorsque cela fut connu à Tihran, le gouverneur la fit chercher partout; malgré cela les amis arrivaient sans interruption pour la voir et Tahirih, assise derrière un rideau, discutait avec eux. Un jour, le grand Siyyid Yahya surnommé Vahid, était présent. Comme il était assis, Tahirih l'écoutait derrière son voile. J'étais alors un enfant et j'étais assis sur ses genoux. Avec éloquence et ferveur Vahid parlait sur les signes et les versets qui portaient témoignage de la venue de la nouvelle manifestation. Soudain elle l'interrompit et, élevant la voix, déclara avec véhémence: "O Yahya! Laisse les actions, et non les mots, témoigner de ta foi, si tu es un homme de véritable savoir. Cesse de répéter inutilement les traditions du passé, car pour le jour du service le moment est venu d'agir avec constance. Maintenant c'est le temps de montrer les signes véritables de Dieu, de déchirer les voiles des vaines imaginations, de promouvoir la parole de Dieu, et de nous sacrifier en son sentier. Laisse les actions, et non les mots être notre parure!"

La Beauté Bénie prit des dispositions minutieuses pour le voyage de Tahirih à Badasht et la renvoya avec un équipage et une suite. Son propre groupe se dirigea vers cette région quelques jours plus tard.

A Badasht il y avait un grand champ, au milieu duquel un ruisseau coulait, à sa droite et au fond il y avait trois jardins, l'envie du paradis. Un de ces jardins fut assigné à Quddus mais cela fut gardé secret. Un autre fut isolé pour Tahirih et sur un troisième fut érigé le pavillon de Baha'u'llah. Sur le champ au milieu des trois jardins, les croyants plantèrent leurs tentes. Les soirées, Baha'u'llah, Quddus et Tahirih se retrouvaient ensemble. A cette époque, le fait que le Bab était le Qa'im n'avait pas encore été proclamé; c'était la Beauté Bénie, avec Quddus [cxxi], qui organisa la proclamation d'un avènement universel et l'abrogation et le désaveu des anciennes lois.

Puis, un jour, et il y avait une sagesse en cela, Baha'u'llah tomba malade. Cette indisposition devait servir un but vital. Soudain, à la vue de tous, Quddus sortit du jardin et entra dans le pavillon de Baha'u'llah. Mais Tahirih lui envoya un message disant que leur hôte étant malade, Quddus devrait plutôt se rendre dans son jardin à elle. Sa réponse fut: "Ce jardin est préférable. Venez donc, dans celui-ci" Tahirih le visage sans voile, sortit de son jardin, avança vers le pavillon de Baha'u'llah; et comme elle marchait, elle clama ces paroles: "La trompette retentit ! Maintenant la grande trompette sonne ! L'avènement universel est maintenant proclamé !" [cxxii] Les croyants rassemblés dans cette tente étaient figés de peur et chacun demandait à l'autre: "Comment la loi peut-elle être abrogée? Comment se fait-il que cette femme soit là, debout, sans voile ?"

"Lisez la sourate de l'Inévitable" [cxxiii], dit Baha'u'llah et le lecteur commença: "Quand le Jour qui doit venir viendra soudainement... Jour qui abaissera ! Jour qui exaltera !" et ainsi fut annoncée la nouvelle Dispensation et la grande Résurrection fut rendue manifeste. Au début, ceux qui étaient présents s'enfuirent et certains abandonnèrent leur foi tandis que d'autres se sentirent en proie à des suspicions et des doutes et un grand nombre, après hésitation, revinrent en présence de Baha'u'llah. La conférence de Badasht s'arrêta mais l'Avènement universel avait été proclamé.

Plus tard, Quddus se hâta vers le Fort Tabarsi [cxxiv] et la Beauté Bénie avec des provisions et un équipement, voyagea vers Niyala, avec l'intention de partir la nuit, frayant Son chemin à travers le campement d'ennemi et entrant dans le Fort. Mais Mirza Taqi, le gouverneur d'Amul, eut vent de cela et avec sept cents fantassins arriva à Niyala. Pendant la nuit entourant le village, il renvoya Baha'u'llah avec onze cavaliers à Amul et ces calamités et tribulations, racontées auparavant, passèrent..

En ce qui concerne Tahirih, après la rupture à Badasht, elle fut capturée et les oppresseurs la renvoyèrent, sous bonne garde, à Tihran. Elle fut emprisonnée dans la maison de Mahmud Khan, le kalantar. Mais elle était enflammée, passionnée, sans repos et ne pouvait pas rester tranquille. Les dames de Tihran, pour un prétexte ou un autre, s'assemblaient pour la voir et l'écouter. Il arriva qu'il y eut une fête chez le maire pour le mariage de son fils; un banquet nuptial fut préparé et la maison parée. La fleur des dames de Tihran fut invitée, les princesses, les femmes des vizirs et autres personnages. Ce fut un mariage splendide, avec de la musique instrumentale et des mélodies vocales - jour et nuit le luth, les cloches et les chants. Alors Tahirih commença à parler; et les grandes dames furent tellement ensorcelées qu'elles abandonnèrent le réservoir et le tambour et tous les plaisirs de la fête du mariage pour s'assembler autour de Tahirih et écouter les douces paroles sortant de sa bouche.

Ainsi, elle demeura une captive opprimée. Puis il y eut l'attentat contre la vie du Shah [cxxv]; un farman fut publié; elle fut condamnée à mort. Ils arrivèrent chez Kalantar pour la prendre, en disant qu'elle était convoquée chez le premier ministre. Elle lava son visage et ses mains, revêtit une robe somptueuse et, parfumée d'extrait de roses, sortit de la maison.

Ils l'amenèrent dans un jardin où les chefs l'attendaient; mais ils hésitèrent et refusèrent de mettre fin à sa vie. Un esclave fut trouvé dans un état d'ivresse; abruti, vicieux, au coeur sombre. Et il étrangla Tahirih. Il enfonça un foulard entre ses lèvres et l'enroula autour de son cou. Puis ils soulevèrent son corps immaculé et le jetèrent dans un puits, là dans le jardin, et ils le recouvrirent de terre et de pierres. Mais Tahirih était heureuse; elle avait entendu d'un coeur léger la nouvelle de son martyr; elle fixa son regard vers le Royaume d'en-haut et offrit sa vie.

Que les salutations et les louanges soient sur elle. Que sa poussière soit sanctifiée par les rayons de lumière qui descendent sur elle du Ciel.


Glossaire

'Aba: manteau.

Abha: superlatif de Baha, le plus glorieux, tout glorieux.

Calcul Abjad: valeur numérique des lettres de l'alphabet arabe et persan.

Afnan: parents du Bab ("Dieu passe près de nous", p. 229).

La Beauté Ancienne: un titre de Baha'u'llah.

La Beauté Bénie: un titre de Baha'u'llah.

Dawlih: état, gouvernement.

Farman: ordre, commandement, décret royal.

Farrash: préposé, valet de pied.

Farsakh: le même que parsang ; une unité de mesure, variant entre trois à quatre miles, selon le terrain.

Fatva: le jugement prononcé par le mufti.

Haji: titre d'un musulman qui a fait le pèlerinage à la Mecque.

Haziratu'l-Quds: le bercail sacré ; le centre administratif baha'i.

Imam: le titre des douze successeurs shi'ih de Muhammad. Contrairement aux califes des musulmans sunnites (un calife est une personne élue, le chef apparent et visible), la succession du Prophète pour les shi'ihs est une affaire purement spirituelle, conférée par Muhammad et par chacun de ses successeurs jusqu'au douzième. L'imam est le successeur divinement désigné du Prophète, doté de toutes les perfections et des dons spirituels, à qui tous les croyants doivent l'obéissance, dont la décision est absolue et finale, la sagesse est surhumaine et la parole fait l'autorité.

Imam: chef de prière.

Imam-Jum'il: chef de prière du vendredi ou de la grande mosquée de la ville.

Jinab: titre courant, une sorte de " Monsieur le..".

Kad-khuda: chef du village ; chef de la bourgade.

Kalantar: maire.

Sadratu'l-Muntaha: se réfère à la Manifestation de Dieu.

Mashriqu'l-Adhkar: maison d'adoration.

Mufti: commentateur de la loi islamique ; juge chez les musulmans sunnites.

Mujtahid: docteur en loi, membre du clergé à qui le rang permet de pratiquer la jurisprudence religieuse. La plupart des mujtahids persans recevaient leurs diplômes des chefs juristes de Karbila et de Najaf.

Mulla: prêtre musulman

Nabil: érudit, noble. Le Bab et Baha'u'llah parfois s'adressaient à une personne en utilisant un titre dont les lettres, selon le calcul Abjad, avaient la même valeur numérique que celle de son nom. Par exemple, la valeur numérique des lettres de Muhammad est 92, et celle des lettres de Nabil aussi est 92.

Qa'im: celui qui se révèle ; un titre du Bab.

Shaykhi: une secte de l'islam shi'ih. Les shi'ihs étaient divisés en deux grandes branches, "sept imams" et "douze imams". L'École shaykhi, émanant de cette dernière branche fut fondée par Shaykh Ahmad et Siyyid Kazim, les précurseurs du Bab. Le Gardien écrit dans "Dieu passe près de nous ", son histoire des cent premières années de la foi babie - baha'ie, p.xiv: "je tâcherai de représenter et de relier ... ces évènements de premier plan qui ont, insensiblement, sans rémission et sous les yeux même d'une suite de générations perverses, indifférentes ou hostiles, transformé un rejeton dissident et négligeable en apparence de l'École shaykhi ... en une religion mondiale..."

Sirat: pont, ou voie ; indique la religion de Dieu.

Siyyid: titre des descendants du Prophète Muhammad.

'Ulama: savants religieux.



Notes

i. Pour l'auteur de Les briseurs de l'Aube, voir Nabil-i-Zarandi.

ii. Cf. Qur'an 19:98.

iii. Qur'an 3:91.

iv. Qur'an 54:55.

v. Aqa Jan. Cf. Shoghi. Effendi, Dieu passe près de nous, p.181.

vi. Siyyid Muammad, l'Antéchrist de la Révélation Baha'ie. Cf. Ibid., pp.156 et 181.

vii. Héraut du Prophète Muammad.

viii. Qur'an 68:4.

ix. Rumi raconte ailleurs que ce vin, viens de la jarre de "la vérité". La signification est que cela symbolise l'alliance Primordiale établie entre Dieu et l'homme au jour de "Ne suis-je pas ton Seigneur?" En ce jour, le Créateur fit appel à la prospérité des reins d'Adam et dit aux générations qui ne sont pas encore nées: "Ne suis-je pas ton Seigneur?" Après quoi. ils répondirent: "Oui, en vérité, vous l'êtes." Cf. Qur'an 7 :171.

x. Le para turc est 1/9 du cent. Cf.Webster, New International Dictionary.

xi. Nabil, auteur de La Chronique de Nabil est le "Poète Lauréat de Baha'u'llah, son chroniqueur et son infatigable disciple". Cf. Dieu passe près de Nous, p.124.

xii. Mirza Yaya, le "dirigeant nommé" de la communauté, il était le "centre provisoirement désigné en attendant la manifestation du Promis." Ibid., pp. 121-122.

xiii. Une référence du symbolisme islamique selon laquelle le bien est protégé du mal: les anges repoussent les esprits du mal qui tentent d'espionner le paradis en leur jetant des étoiles filantes. Cf. Qur'an 15:18, 37:10 et 67:5.

xiv. Une référence à l'avènement de la déclaration de Baha'u'llah en 1863, comme étant le Promis du Bab. La propre déclaration du Bab eût lieu en l'"an soixante" - 1844.

xv. Les Ecrits baha'is soulignent que la"divinité conférée à un Etre aussi. grand et l'entière incarnation des noms et des attributs de Dieu dans une sublime personnalité ne doivent, en aucun cas, être conçues ou interprétées de façon erronnée... Car quelque exaltée que soit la divinité que nous puissions attribuer aux Manifestations terrestres de ce Dieu invisible, bien que rationnel, elles ne peuvent nullement incarner dans la forme concrète et limitée d'un être mortel, son infinie, son incommensurable, son incorruptible et tout englobante réalité..." Cf. Shoghi. Effendi, La Dispensation de Baha'u'llah, p.34.

xvi. Selon le calcul Abjad, les lettres du nom "shidad" totalisant 309. 1892, la date de l'ascension de Baha'u'llah est 1309 A.H.

xvii. Ghariq. Les lettres composant ce nom ont une valeur numérique égale à 1310, l'année de l'Hégire débuta le 26 juillet 1892.

xviii. Termes utilisés par les soufis.

xix. idq signifie vérité.

xx. Qur'an 54:55.

xxi. Signifie fidèle, loyal et juste.

xxii. Ya Shafi.

xxiii. Qur'an 76:5.

xxiv. Nabil de Qa'in était son titre.

xxv. Qur'an 5:59.

xxvi. Un kran est égal à 20 shahis ou 50 centimes, cf. Webster, op. cit.

xxvii. Mirza Mihdi, le fils de Baha'u'llah qui, en priant un soir sur le toit de la caserne, tomba fatalement. Cf. Dieu passe près de Nous, p.180.

xxviii. Cf. Qur'an 13:28; 2:99; 3:67.

xxix. Yazid (Fils de Mu'aviyih), Calife 'Ummayad sous l'ordre duquel l'Imam usayn a été martyrisé. Légendaire pour sa cruauté. Cf. S. Haïm, New Persian - English dictionary, s.v.

xxx. La rébellion de Mirza Yaya, qui fut provisoirement nommé chef de la communauté Babie. Le Bab n'avait jamais nommé de successeur ou vice gérant, sauf rappelant ses disciples de l'imminence de l'avènement du Promis. Entre temps un inconnu virtuel fut, pour raison de sécurité, nommé leader. Après sa déclaration en 1863 en tant que le Promis par le Bab, Baha'u'llah se retira pour un moment à Andrinople, pour permettre aux exilés de choisir librement entre lui. et son incapable de frère dont les crimes et folies menacèrent la jeune Foi. Terrifié d'être défié par Baha'u'llah dans un débat public, Mirza Yaya refusa et fut complètement discrédité. Comme l'histoire Baha'ie l'avait déjà démontré, cette crise, bien que lamentable, se solda par de grandes victoires pour la Foi. - à savoir le ralliement d'imminents disciples à Baha'u'llah, et une déclaration globale de sa mission, dans Ses tablettes au Pape et aux Rois. Cf. Dieu passe près de Nous. p.27, chap.X. et d'autres places dans le livre.

xxxi. Mirza Yaya n'avait pas été banni. de la Perse. Par contre, il fut exilé d'Andrinople à Chypre et 'Abdu'l-Ghaffar de Ifahan était un de ses quatre compagnons, condamnés à aller avec lui. Cf. L'épître au fils de loup de Baha'u'llah, p.166 et Dieu passe près de Nous p.172.

xxxii. Cf. Qur'an 11:101; 76:5; 76:22; 17:20.

xxxiii. Cf. Dieu passe près de Nous, p.103.

xxxiv. Cf. Dieu passe près de Nous, pp. 178;185; 187.

xxxv. Qur'an 54:55.

xxxvi. Cette référence aux deux mondes, du jihan, peut faire allusion à la citation: Ifahan est la moitié du monde - Ifahan nif-i-jihan.

xxxvii. Pour cette définition de la Manifestation de Dieu, voir Dieu passe près de Nous, p.113.

xxxviii. Ces "lumières brillantes jumelles" étaient deux frères qui furent de grands commerçants d'Ifahan. Parce qu'il leur doit une somme importante d'argent, le grand prêtre - Imam-Jum'ih - de la cité ordonna leur martyr. Voir Épître au fils du loup de Baha'u'llah et Dieu passe près de Nous, pp.192, 210.

xxxix. Qur'an 89:27-30.

xl. Qur'an 24 :35.

xli. Qur'an 89 :27-30.

xlii. Cf. Qur'an 13 :28; "En vérité, dans le souvenir de Dieu les coeurs restent sereins".

xliii. Qur'an 76 :5.

xliv. Qur'an 13 :28.

xlv. Qur'an 3 :91.

xlvi. Qur'an 29 :19; 53:48; 56;62.

xlvii. Mirza Musa.

xlviii. Cf. Dieu passe près de nous, p. 178.

xlix. A peu près à 600 km au nord-ouest de Baghdad.

l. Shikastih - une écriture cursive ou demi-sténo aurait été inventée vers le XVIIème siècle à Hirat.

li. Le mariage de Gawhar Khanum et de Baha'u'llah eut lieu à Baghdad. Elle demeura dans cette ville avec son frère lorsque Baha'u'llah quitta l'Iraq puis alla plus tard à 'Akka selon Ses instructions. Alors qu'elle voyageait de Baghdad à Mosul, elle a été capturée avec d'autres croyants dont Zaynu'l-Mukarrabin. Baha'u'llah fait référence à cette captivité dans Sa Tablette au Shah. Gawhar Khanum brisa l'alliance de Baha'u'llah après Sa disparition. Elle mourut pendant le Ministère de 'Abdu'l-Baha.

lii. Qur'an 76 :9.

liii. Un calligraphe renommé qui vivait et écrivait à la cours de Shah-'Abbas le safavi (1557-1628).

liv. Mishk signifie musc. Mishkin-Qalam signifie le crayon parfumé de musc ou bien le jet du crayon noir.

lv. Qur'an 61 :4.

lvi. Dans quelques productions de cet artiste, l'écriture était disposée de telle manière qu'elle prenait la forme d'un oiseau. Lorsque E.G. Browne était en Perse, on lui. a dit que "celles-ci. auraient été recherchées avec empressement par les perses de toutes classes, s'il n'y avait pas eu comme signature du calligraphe le verset suivant :
"Dar diyar-i-kha shah-i-aib-'alam
Bandiy-i-bab-i-Baha, Mishkin-Qalam."
Cf. A year amongst the Persians, p.227. Ce verset signifie :
Maître de calligraphie, mon étendard passe devant;
Mais pour Baha'u'llah, un garant à la porte,
Je ne suis plus rien.
Mishkin-Qalam.
Le jeu de mots sur porte rend possible l'inclusion du nom du Bab avec le nom de Baha'u'llah.

lvii. Ustad est un maître qui excelle dans son art ou sa profession.

lviii. Qur'an 6;127.

lix. Qur'an 3;28.

lx. Qur'an 2;266, 267.

lxi. Pour certaines de ces phrases arabes, voir Qur'an 3 :170; 4 :12, 175; 5 :16, 17; 11 :100, 101; 28 :79; 41 :35.

lxii. Dans l'histoire Baha'ie, la période de Baghdad va du 8 avril 1853 au 3 mai. 1863. Le tuman équivaut à 1,08$ ou 1,60$.

lxiii. Ceci. était en accord avec les lois de l'islam . Cf. Qur'an 4 :12.

lxiv. Qur'an 7 :171.

lxv. Pour les tribulations qui suivirent le départ de Baha'u'llah, voir Dieu passe près de Nous, Chapitre XV.

lxvi. Le Hercule perse.

lxvii. Qur'an 89: 27.

lxviii. Qur'an 4 :71.

lxix. Cf. Dieu passe près de nous, p.171.

lxx. Qur'an 89: 27-30.

lxxi. Les Afnans sont les parents du Bab.

lxxii. Qur'an 7: 171.

lxxiii. Qur'an 39: 69.

lxxiv. Le Promis par le Bab.

lxxv. Symbolisme Islamique: Satan est le "lapidé"; avec des étoiles filantes en guise de pierres, les anges chassent les démons du paradis. Qur'an 3:31, 15:17, 34;37:7; 67:5.

lxxvi. Qur'an 2: 17.

lxxvii. Qur'an 4 :71.

lxxviii. Le Premier Ministre.

lxxix. Qum est la cité sainte de Faimih, "l'Immaculée". Soeur du huitième Imam, Imam Ria, elle fut enterrée là-bas en 816 A.D.

lxxx. Le reste du verset est: "Déchirons les voiles du paradis et exhibons un nouveau visage."

lxxxi. Qur'an 52 :4.

lxxxii. Cf. Qur'an 13: 28.

lxxxiii. Qur'an 3: 190.

lxxxiv. Cf. Qur'an 39: 68.

lxxxv. Qur'an 7:171.

lxxxvi. De l'arabe Manqul va ma'qul.

lxxxvii. Qur'an 3 :190

lxxxviii. Baha'u'llah était accompagné par les membres de sa famille et vingt six. disciples. Le convoi. comprenait une garde de dix. soldats avec leur officier, un train de cinquante mules et sept paires de howdahs, chaque paire surmontée par quatre parasols. Le voyage à Constantinople dura du 3 mai. 1863 au 16 août 1863. Cf. Dieu passe près de Nous, p.147.

lxxxix. Qur'an 26: 119; 36 :41

xc. Cf. Qur'an 5 :59.

xci. Qur'an 39: 68-69: "Et on soufflera dans la trompe, et voilà que ceux qui seront dans les cieux et ceux qui seront sur la terre seront foudroyés, sauf ceux que Allah voudra (épargner). Puis on y soufflera de nouveau, et les voilà debout à regarder. Et la terre resplendira de la lumière de son Seigneur..."

xcii. Dans la terminologie Shaykhi, le quatrième Appui. du Quatrième Pilier était l'homme parfait ou voie de la grâce, toujours recherché. aji Muammad-Karim Khan se considérait comme tel. Cf. Baha'u'llah, Kitab-i-Iqan (Le livre de la certitude), p.88, et 'Abdu'l-Baha, A traveller's narrative, p.49.

xciii. Le Douzième Imam promis.

xciv. Allamiy-i-illi, "le Très Érudit Docteur", titre du théologien Shi'ih renommé, Jamalu'd-Din asan ibn-i-'Ali de Hilla (1250-1325 après Jésus Christ).

xcv. Le ghurush turc ou piastre équivaut à 40 paras de l'époque, le para à environ un neuvième de cent.

xcvi. Accentuer la première syllabe: FA-teh-meh.

xcvii. Concernant le martyr de l'Imam usayn et le destin de sa famille, Gibbon écrivit que, "dans un futur et un climat lointain, l'événement tragique réveillerait la sympathie des coeurs les plus glacés".

xcviii. Le Sadratu'l-Muntaha est l'arbre qui marque la frontière. Cf. Qur'an 53 :14. Il est considéré se tenir à l'endroit le plus élevé du paradis, et marquer le point qu'aucun homme et qu'aucun ange ne peut dépasser. Dans la terminologie baha'ie, cela fait référence à la Manifestation de Dieu.

xcix. Cette prière a été révélée par 'Abdu'l-Baha pour l'épouse du Roi. des Martyrs.

c. Qur'an 76 :5.

ci. Un précurseur du Bab et co-fondateur de l'école Shaykhi. Voir glossaire.

cii. Plus tard, sa soeur devint l'épouse de 'Abdu'l-Baha, Cf. Dieu passe près de nous, p. 124 et La Chronique de Nabil, p. 431.

ciii. "Consolation des Yeux".

civ. Les femmes perses de cette époque étaient lourdement voilées en public.

cv. Qur'an 7 :7; 14 :42; 21 :48; 57 :25, etc...

cvi. Cf. Nabil, La Chronique de Nabil, chap. XV.

cvii. La référence concerne la fille de Muammad, Faimih, "le visage radieux et loyal, la Dame de Lumière".

cviii. L'aîné des fils du Shah et gouverneur de plus des deux-cinquièmes du royaume. Il ratifia la condamnation à mort. Peu après ces évènements, il tomba en disgrâce. Cf. Dieu passe près de nous, p.192; 221.

cix. Le Huitième Imam, empoisonné sous l'ordre du Calife Ma'mum, en 203 après l'Hégire, après que l'Imam ait été officiellement désigné héritier évident. Son tombeau, avec un dôme d'or, a été désigné comme la gloire du monde Shi'ih. Selon la tradition, le Prophète disait: "Une partie de mon corps est enterré à Khurasan".

cx. Prononcez TA-heh-reh.

cxi. Cf. La Chronique de Nabil, p. 94, note 2, et p.277, note 2. Certaines lignes traduites par Shoghi. Effendi. sont ajoutées ici.

cxii. Un précurseur du Bab et premier des deux fondateurs de l'École Shaykhi. Voir glossaire.

cxiii. Qur'an 17 :1; 30 :56; 50 :19; etc...

cxiv. Le sixième Imam.

cxv. Le commentaire du Bab concernant la sourate de Joseph, le Asanu'l-Qia était appelé le Qur'an des babis et a été traduit le l'arabe en persan par ahirih. Cf. Dieu passe près de nous, p.22

cxvi. Qur'an 3 :54: "...proférons exécration réciproque en appelant la malédiction d'Allah sur les menteurs.", l'épreuve a été donnée par imprécation.

cxvii. Qur'an 21 :48; 19 :37, etc... Dans l'islam, le pont de ira, tranchant comme une épée et plus fin qu'un cheveu est tendu entre le paradis et l'Enfer.

cxviii. Cf. La Chronique de Nabil, p. 260. Le meurtrier n'était pas un babi, mais un fervent admirateur des dirigeants Shaykhi, les Lumières Limpides Jumelles.

cxix. Cf. La Chronique de Nabil, p.261

cxx. Ceci. fait référence à la doctrine qui dit qu'il existe trois chemins conduisant vers Dieu: la Loi. (shari'at), le Sentier (ariqat), et la Vérité (aqiqat). C'est-à-dire, la loi. des orthodoxes, le sentier des derviches, et la vérité. Cf. R.A. Nicholson, Commentary on the Mathnavi of Rumi, s.v.

cxxi. La dix-huitième Lettre du Vivant, martyrisée avec une cruauté indescriptible sur la place du marché de Barfurush, à l'âge de 27 ans. Baha'u'llah lui. a accordé la seconde station, juste après le Bab. Cf. La Chronique de Nabil, pp. 378 et suivantes.

cxxii. Cf. Qur'an 74 :8 et 6 :73, ainsi. que Isaïe 27 :13 et Zacharie 9 :14

cxxiii. Qur'an, sourate 56.

cxxiv. Une campagne systématique contre la nouvelle Foi. avait été lancée en Perse à la fois par les autorités civiles et ecclésiastiques. Les croyants, abattus partout où ils étaient isolés, se regroupèrent comme ils le pouvaient pour se protéger contre le gouvernement, le clergé et le peuple. Dénoncés et encerclés alors qu'ils traversaient la forêt de Mazindaran, environ 300 croyants, pour la plupart des étudiants et des reclus, construisirent le fort de Shaykh abarsi et tinrent tête aux armées de la Perse pendant onze mois. Cf. La Chronique de Nabil, Chap. XIX. et XX; Dieu passe près de nous, p. 35 et suivantes.

cxxv. Le 15 août 1852, un jeune babi à moitié fou blessa le Shah d'un coup de pistolet. L'agresseur fit immédiatement abattu, et les autorités effectuèrent un massacre en masse des croyants, ce climat est décrit par Renant comme "un jour sans précédent dans l'histoire du monde", cf. Lord Curzon, Persia and the Persian Question, pp. 501-2, et Dieu passe près de nous, p. 59 et suivantes.

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