===================================================== # Source: www.bahai-biblio.org ===================================================== Lidia Zamenhof - trait d’union entre l’Espéranto et la foi baha’ie Traduction de courtoisie par Frédéric Autret Sommaire Prologue: “Nuages du futur” Chapitre 1: “Le docteur et le rêve” Chapitre 2: “Celui qui espère” Chapitre 3: “L’idée interne” Chapitre 4: “Père et fille” Chapitre 5: “Des étoiles vertes et des coeurs en pain d’épices” Chapitre 6: “Quelque chose nous guide” Chapitre 7: “Images sur toile” Chapitre 8: “Genève” Chapitre 9: “Mère et fille spirituelle” Chapitre 10: “Croyante” Chapitre 11: “Un monde entièrement nouveau” Chapitre 12: “Semer des graines” Chapitre 13: “La maison grise et le jardin” Chapitre 14: “Qui peut prévoir ?” Chapitre 15: “Green Acre” Chapitre 16: “Rejetée” Chapitre 17: “Fragments” Chapitre 18: “Maintenant n’est pas leurs temps” Chapitre 19: “Une vague de mal” Chapitre 20: “Cela ne sera pas oublié” Epilogue ================================ Prologue: "Nuages du futur" Vers deux heures de l'après-midi, les gens avaient commencé à se réunir à l'extérieur de la maison de Zamenhof, située 41 rue Krolewska, à l'angle du quartier juif de Varsovie. On était le 16 Avril 1917. La journée était sombre et pluvieuse, mais ils venaient néanmoins, portant un noir solennel, aux funérailles du docteur Louis Lazare Zamenhof. A trois heures de l'après-midi, la procession revint lentement en direction du cimetière juif. Le cortège suivait le cercueil, transporté dans un corbillard recouvert de dais noir. Même les deux chevaux, tirant le corbillard étaient drapés avec solennité pour les funérailles. Un homme au visage triste, à la barbe blanche et avec un chapeau haut-de-forme, les dirigeait. Nombre de ceux qui marchaient ce jour-là derrière le cercueil, étaient des Juifs pauvres de Varsovie .Ils avaient connu le docteur Zamenhof en tant qu'oculiste au grand coeur, qui les avait soignés eux et leurs familles pour quelques sous, ou gratuitement lorsqu'ils n'avaient pas les moyens. La plupart d'entre eux étaient des hommes, bien que quelques femmes étaient visibles parmi le défilé, certaines portant de gros voiles noirs si épais, que l'on ne pouvait voir leurs visages. Il y avait des commerçants, des ouvriers, et de jeunes garçons en cape d'étudiant; des hommes d'un certain âge avec des chapeaux melons, certains même portaient des chapeaux hauts-de-forme et des cannes, des vieux hommes courbés aux longues barbes blanches et le traditionnel long caftan noir et la casquette des Juifs d'Europe de l'Est. Alors que la procession se déplaçait à travers les rues, d'autres personnes s'y joignait. A la différence des funérailles traditionnelles des chrétiens polonais, il n'y avait aucune décoration élaborée, ni orchestre jouant la "Marche funèbre de Chopin". Aux funérailles juives, la taille de la foule indiquait l'importance du défunt. En ce jour, la foule était immense. Parmi le cortège dans la procession se trouvait une fille de 13 ans avec de longues tresses blondes. Elle se rappellera ce jour toute sa vie. Quelques années plus tard, elle se rappela: "...par un jour gris et pluvieux, la procession se dirigea vers le cimetière, les rues du quartier où il avait vécu si longtemps, étaient noires de monde. Ces hommes, simples et pauvres, honoraient le départ d'un homme, qui avec une grande patience et un grand dévouement, s'était occupé de leurs yeux, et qui pour beaucoup d'entre eux, leur avait évité le sort terrible de la cécité". Le défunt, c'était son père. La plupart du cortège ne connaissait seulement Zamenhof qu'en tant que gentil médecin. Cependant, au-delà des frontières de son pays natal, il était connu comme le créateur de l'Espéranto, la langue internationale, qui était déjà parlé par des milliers de personnes dans des pays allant du Mexique au Japon. Bien que le docteur Zamenhof ait des admirateurs, de par le monde, ils ne pouvaient être là, en ce jour de 1917, pour lui rendre les derniers hommages. Le monde était en guerre, et Varsovie était occupé par les troupes allemandes. Les frontières étaient fermées. Tous les Zamenhof n'avaient pu être là. Plusieurs membres de la famille se trouvaient en Russie, lorsque Varsovie fut envahie, et ils étaient retenus derrière les lignes de front de la bataille, incapable de revenir chez eux. Parmi la procession solennelle de Juifs, qui marchaient péniblement et tristement au cimetière ce jour-là, un homme se manifesta - un officier militaire allemand. Le commandant Neubarth, le commandant du port, espérantiste, et un autre allemand, étaient les seuls représentants étrangers aux funérailles du docteur Zamenhof. Il faisait froid, comme souvent par un jour d'Avril à Varsovie, bien que la glace ait presque fondu dans la Vistule. Les arbres du cimetière juif étaient encore dénudés, quand la procession passa près d'eux, en portant le cercueil et d'innombrables fleurs. Le cortège se réunit autour de la petite colline, où la tombe avait été creusée. C'était un bel emplacement, donné par la communauté juive de Varsovie, pour l'endroit de repos de l'un de ses fils les plus aimés. Après l'éloge du rabbin, plusieurs éminents espérantistes de Varsovie parlèrent avec émotion du docteur Zamenhof, qu'ils vénéraient en tant que "Majstro", ce qui signifie "maître" en espéranto. L'un de ceux-là était Léo Belmont, un poète bien connu. Louis Zamenhof - l'homme mortel- est mort, disait Belmont, "mais Louis Zamenhof, -une âme brillante, créateur d'un travail qui englobe tous les peuples de la terre, un prophète les guidant sur le chemin de la fraternité... n'est pas mort, car elle est immortelle". Le monde n'apprécie pas encore la valeur du travail de toute une vie de Zamenhof, leur disait Belmont, mais il prédisait: " Sa gloire sera extraordinaire: car je vois clairement, à travers les nuages de l'avenir, un temps lorsque dans toutes les capitales du monde, son monument sera érigé!". Plus tard, le commandant allemand Neubarth se présenta et jura solennellement, au nom des espérantistes d'Allemagne, qu'ils ne cesseraient de suivre l'exemple du docteur Zamenhof. Ils seraient fidèles à leur travail d'espérantiste jusqu'au bout, promettait-il. Le timbre ancien et triste des prières funéraires hébraïques, flottait dans l'air. Lentement le cercueil fut descendu dans le sol et recouvert de terre. Des couronnes de fleurs étaient amoncelées jusque en haut. Durant des années, parmi les monuments en marbre dans le cimetière juif, seule la plus simple des pierres tombales indiquerait la tombe de Louis Zamenhof. Les années passant, sa fille Lidia retournait plusieurs fois en ce lieu, à la tombe de son père. Mais maintenant qu'il était parti, qui s'occuperait de son travail? Qui s'efforcerait d'accomplir ses rêves? ================================ Chapitre 1: "Le docteur et le rêve" Bien que Lidia Zamenhof n'avait que 13 ans lorsque son père mourut, son travail et ses rêves influenceront profondément sa vie entière. En fait, Louis Zamenhof produisait un effet profond sur tous ceux qui le rencontrait: ses manières affables, ses idéaux élevés, lui, attirèrent des millions de personnes, qui embrassèrent la langue, qu'il avait crée. Bien que parfois, ses admirateurs trop zélés lui montrait une adoration comme si il était un leader religieux, c'était un homme très secret et modeste, et une telle vénération pour sa personne l'embarrassait et le peinait. Parfois, des enfants de parents célèbres trouvent la responsabilité de cette parenté comme un fardeau, et souhaite faire leur propre chemin dans le monde, indépendant de la grande ombre, qui plane sur celui qu'ils ne pourront jamais espérer égaler. Les enfants de Zamenhof, au contraire, choisirent tous de dévouer leurs vies aux mêmes champs d'effort que leur renommé père. Son fils, Adam, devint docteur et surpassa même le célèbre aîné Zamenhof en ophtalmologie. Sa fille Sofia devint également médecin, spécialisé dans la médecine interne et la pédiatrie. Mais ce fut sa plus jeune fille Lidia, qui dévouera sa vie au travail qui avait été particulièrement cher à Louis Zamenhof: le combat pour l'unité de l'humanité. Comme le fit Louis en son temps, Lidia Zamenhof trouvera sa route choisie difficile et aura à faire à de l'opposition, à de la frustration et à de la déception. Mais la lumière de l'idéal serait toujours devant elle, comme cela avait été le cas pour son père, une balise d'espoir, qui brillerait même dans l'obscurité la plus profonde. Parce que l'on ne peut pas comprendre Lidia sans connaître un peu Louis, son histoire commence convenablement avec son histoire. Louis Zamenhof naquit en 1859 de Markus et Rosalie (Sofer) Zamenhof. Il était le premier de neuf enfants comprenant Sara (qui mourut durant l'enfance), Fania, Auguste, Félix, Henryk, Léon, Alexandre et Ida. L'arrière grand-père de Louis, Wolf Zamenhof, venait de la province du Kurland, dans la partie sud-ouest de la Lettonie, mais au moment de la naissance de Louis, la famille Zamenhof vivait à Bialystok, dans le district de Grodno, Lituanie, qui, en ce temps, faisait partie de l'empire russe. Les expériences d'enfance de Louis à Bialystok, dit-il plus tard, l'affectèrent si profondément, qu'elles lui donnèrent la direction pour tous ses futurs efforts. L'histoire avait crée à Bialystok une sorte de carrefour, où les gens de cultures et de nationalités différentes vinrent à se réunir, non pas dans la fraternité, mais dans l'hostilité. Le jeune Louis était la plupart du temps désespéré du fait que souvent, ils ne pouvaient communiquer les uns les autres: les Russes, les Polonais, les Allemands et les Juifs de Bialystok parlaient leur propre langue, et chaque groupe se protégeait, méfiant et soupçonneux des autres. Louis apprit rapidement qu'il appartenait au groupe que, par dessus tout, était la cible de suspicion et de haine: les Juifs. Bien que les Juifs aient vécu dans la région de Pologne depuis les temps médiévaux, lorsqu'ils arrivèrent d'Allemagne à l'invitation de rois et de nobles polonais, ils furent traités comme des étrangers - accusés d'être des exploiteurs économiques, injuriés des chaires comme tueurs du Christ. A travers les siècles, et bien qu'il y eût des périodes durant lesquelles les Juifs de Pologne furent protégés par une charte royale, ils furent sujette fréquemment à la discrimination, à la ségrégation et à la brutalité. Par moment, ils furent contraints de vivre en dehors de la communauté chrétienne dans des ghettos. A l'occasion, ils furent entièrement expulsés. Les chrétiens qui vivaient parmi eux ne comprirent jamais le monde intérieur de la communauté juive. Ils voyaient seulement que les juifs s'habillaient et agissaient différemment, parlaient une langue étrangère à eux, et suivaient des rites religieux de nature inconnue. Ils vinrent finalement à considérer les Juifs comme une race à part, une nation étrangère inférieure, vivant dans leur monde. Pour les juifs, leur propre chemin était le précieux legs des générations - leur lien à travers les âges à Moïse et aux prophètes hébreux, le retour du grand Covenant, que Dieu avait fait avec Abraham. Lorsqu'ils étaient tourmentés dans les rues, battus et appelés " juif galeux" et "mangeurs d'oignons", de telles cruautés avaient seulement convaincu les juifs que leur propre chemin était le meilleur. Ils ne se défendaient jamais, mais résistaient aux souffles, croyant que Dieu leur enverrait le Messie et les mèneraient à leur ancienne patrie. "Eretz Israël", la terre d'Israël. "L'année prochaine", disaient-ils toujours à la fin du programme de la Pâque juive, "à Jérusalem". Les Juifs voyaient leur persécution comme une part inévitable des souffrances, qu’il doivent endurer pendant leur exil. Ces Juifs, qui étaient martyrisés à cause de leur foi , pensaient-ils, mourraient pour la “purification du nom de Dieu”. Lorsque, au 17ème siècle, 100000 Juifs furent massacrés durant une décennie de violence, qui avait commencé avec le soulèvement sanglant casaque en Ukraine, beaucoup de Juifs pensaient cet holocauste sans précédent un signe sur que la venue du Messie devait être proche et leurs souffrances prendraient bientôt fin. Pendant la fin de l’année 1700, le royaume de Pologne fut aboli et ses territoires divisés parmi la Russie, l’Autriche et l’Allemagne. Les territoires de l’est devinrent une partie de l’empire russe. Après 1815, la partie centrale de la Pologne, qui comprenait Varsovie, devint un royaume à moitié autonome, assujetti à la loi russe. L’empire russe contenait à présent la plus grande population juive dans le monde, et les Juifs devinrent un bouc émissaire pratique pour détourner les masses mécontentes des problèmes économiques et politiques en une foule violente contre les hommes, les femmes et les enfants sans défense, et la destruction gratuite et le pillage de leurs maisons, de leurs magasins, et de leurs synagogues. Le mot pour ces attaques sauvages devint un mot familier et terrifiant pour les Juifs de l’Europe de l’est: un pogrom. En tant que jeune garçon à Bialystok, Louis Zamenhof n’était pas conscient de toutes les raisons complexes des haines et des préjugés, qu’il voyait autour de lui, mais il voyait la souffrance qu’elle engendrait, et cela fit sur lui une impression durable. Sa sensibilité au triste sort de son propre peuple juif le mènera finalement à s’intéresser au triste sort de l’humanité. “N’eus-je pas été juif”, dit-il plus tard, “que l’idée d’un avenir cosmopolite n’aurait pas exercé une telle fascination sur moi, et je n’aurais jamais travailler avec autant d’ardeur et autant de désintéressement à la réalisation de mon idéal”. La barrière la plus manifeste, que le jeune Louis voyait entre les personnes, était la différence des langues. Il connaissait l’histoire biblique de la Tour de Babel, qui expliquait la confusion des langues comme une punition de Dieu aux transgressions des descendants de Noé, qui avaient tenté de construire une tour, qui atteindrait le ciel. Comme le dira plus tard Zamenhof, en ce temps-là, la confusion des langues avait été le résultat du péché ; dorénavant, cela était devenue elle-même la cause de la malveillance. La diversité des langues était, ressentait-il, “la seule, ou du moins la principale cause de séparation de la famille humaine et de ses divisions en factions hostiles. J’ai été éduqué comme un idéaliste: on m’a enseigné, que tous les hommes sont des frères, et cependant, dans les rues et dans les cours, quelque chose à chaque pas m’amène à sentir que l’homme n’existe pas: il y a seulement des Russes, des Polonais, des Allemands, des Juifs, etc... Cela tourmentait toujours ma jeune âme... Je me disais que lorsque je serais grand, je ne manquerais pas de chasser ce mal”. Louis Zamenhof jura de donner au monde une langue que tous les peuples pourront utiliser pour communiquer les uns avec les autres, et ainsi, espérait-il, surmonter leurs différences. Mais quelle sorte de langue pourrait-elle servir comme langage pour toute l’humanité ? Laquelle choisir parmi les millions de langues et de dialectes dans le monde ? Louis abandonna rapidement l’idée de choisir une langue vivante pour sa “langue humaine”. Quelque que soit celle choisie, il y aurait certaines personnes qui la désapprouveraient. Et ces personnes, dont ce serait la langue natale, auraient un avantage sur tous les autres. Choisir une de ces langues, amènerait seulement à ce qu’elle soit supérieure en certains cas, et dans d’autres cas inférieure. Zamenhof devint persuadé que la seule langue internationale possible serait une langue neutre, n’appartenant à aucune des nations existantes. Après avoir rejeté l’idée d’une langue classique tel que le grec ou le latin, il commença à rêver de créer une nouvelle langue pour toute l’humanité. Le problème semblait parfois au-delà de lui. Comment un garçon pourrait inventer une langue ? “Une langue humaine”, écrivait Zamenhof, “avec ses accumulations sans fin de formes grammaticales, et ses centaines de millions de mots... me semblait une machine si colossal et si artificiel, que plus d’une fois, je me suis dit: “assez de rêves ! Cette entreprise est au-delà des pouvoirs humains”. Et pourtant, je revins toujours à mes rêves”. Louis Zamenhof n’était pas le premier de penser à créer une langue universelle. Des propositions de langues auxiliaires construites avaient circulé depuis le 17ème siècle -Descartes mentionna l’idée dans une lettre en 1629. En 1878, avant même que Zamenhof ait achevé son projet, une proposition pour une langue appelé Volapük (langue de mots), fut publié par Jean Martin Schleyer, un prêtre catholique allemand, qui pensait son travail être divinement inspiré. Mais le Volapük était arbitraire et difficile. Finalement, il périclita, ses partisans se divisèrent avec amertume sous l’attitude autoritaire de Schleyer et la question des réformes linguistiques. A l’âge de 15 ans, Louis Zamenhof commença à essayer de créer sa langue. Ses premiers essais furent insatisfaisants, mais avec les années, il continua à travailler sur son projet. A présent, la famille Zamenhof avait déménagé à Varsovie, où le père de Louis, Marc, enseignait les langues. Une discipline stricte, Marc Zamenhof n’avait aucune éducation conventionnelle, mais était autodidacte. Cependant, il projetait que ses fils puissent aller à l’université. Pour gagner l’argent nécessaire, la famille Zamenhof devint pensionnaire, et Marc reprit le poste de censeur juif. A la maison, chaque nuit, il examinait les publications juives pour toute déclaration qui pourrait offenser le gouvernement russe ou le tsar. Avec l’argent qu’il gagnait, Marc fut capable d’éduquer ses fils. Quatre devinrent docteurs et un devint pharmacien. Comme on aurait pu l’attendre en ce temps, aucune de ses filles n’allait à l’université. En 1878, Louis était en 8ème au lycée, et sa langue était, comme il l’écrivit plus tard, ”plus ou moins prête”. Il existait encore une grande différence entre sa langue universelle et ce qui finalement devint l’espéranto, mais l’idée, au moins, avait pris forme .Il fit confidence de sa création à certains de ses amis et à son frère Félix. Attirés par l’idée de Louis et la simplicité de la langue, ils commencèrent à l’apprendre. Le 5 décembre 1878, le petit groupe d’amis célébra solennellement la naissance de la langue universelle, donnant des discours dans la nouvelle langue, et chantant avec enthousiasme l’hymne que Louis avait écrit. Cela donnait: «Haine des nations, disparaissez, disparaissez, il est grand temps ! Toute l’humanité doit devenir unie en une seule famille.» En Juin, les jeunes hommes finissaient l’école et prenaient leur propre chemin. Mais lorsque les amis de Louis essayèrent de parler aux autres de la nouvelle langue, des hommes murs se moquèrent d’eux, qui désavouèrent la langue. Louis se retrouva lui-même seul. Il savait, qu’il était encore trop jeune pour exposer sa création publiquement, et il décida d’attendre et de continuer à améliorer la langue. Louis reçut un autre choc, lorsque son père, qui jusqu'à maintenant, avait toléré le projet de Louis, devint brusquement opposé à lui. Quelqu’un l’avait convaincu, que la préoccupation de son fils pour la langue, devait être un signe de folie. Louis avait fait la promesse à Marc de l’abandonner jusqu'à ce qu’il ait terminé ses études universitaires. Il emporta le cahier de Louis, contenant tout son précieux travail - toute la grammaire de la langue et les traductions qu’il avait faites - et il les enferma. Bientôt, Louis partit pour l’université de Moscou, où il allait étudier la médecine. A Moscou, il fut exposé à d’autres courants intellectuels, et son idéalisme prit une nouvelle direction, lorsqu’il devint impliqué dans les premiers soubresauts, de ce qui allait finalement devenir le mouvement sioniste. Comme beaucoup de jeunes Juifs de cette époque, Louis Zamenhof voulait améliorer la situation intolérable du peuple juif en Europe de l’Est. Son père et son grand-père avaient été des partisans de la “Haskalah”,: l’illumination juive, et les idées humanistes, rationalistes, et séculaires, que la Haskalah amena tardivement à la juiverie de l’Europe de l’est, influença profondément Louis. Inspiré par la Haskalah, et par ce qui avait apparut être un changement vers le libéralisme de la part du gouvernement russe, certains Juifs étaient devenus convaincus, que si les Juifs abandonnaient leur isolement culturel et devenaient assimilés dans la culture du pays dans lequel ils vivaient, conservant leur propre religion dans une forme moderniste, ils seraient acceptés comme des citoyens égaux. Marc Zamenhof était cependant un admirateur de la culture russe, main non de la culture polonaise. Mais les Juifs comme les Zamenhof, qui favorisaient une culture et une religion juive moderniste, étaient une minorité en Europe de l’est. La plupart des Juifs s’accrochaient à des traditions orthodoxes et dédaignaient les assimilés. Du temps de Louis cependant, lorsque l’antisémitisme devint plus vicieux et propagé, beaucoup d’assimilés devinrent désenchantés et doutèrent qu’ils puissent être jamais acceptés comme des citoyens égaux, qui suivait simplement une foi différente. Et lorsque, après l’assassinat du tsar Alexandre III en 1881, des pogroms éclatèrent dans 200 villes et villages, les illusions de beaucoup s’envolèrent. Ils tournèrent leurs efforts dans une nouvelle direction, convaincus à présent que les Juifs n’étaient pas juste simplement un groupe religieux, mais une nation, et que leur seul salut reposait sur l’établissement d’un état juif. Louis Zamenhof était parmi ceux qui rejetaient l’assimilation et qui embrassaient l’idée d’émigration. De sa propre initiative, il organisa en 1881 pour certains de ses camarades étudiants, à l’université de Moscou, la première organisation politique juive en Russie. Tout d’abord, Louis était d’accord avec la faction qui voulait aller en Amérique, établir un territoire, comme l’avait fait les Mormons, pour finalement former un état. Mais dans le but d’éviter la désunion dans le mouvement, il donna bientôt son soutien à la majorité, qui soutenait que la Palestine était la seule patrie possible pour les Juifs. Cette même année, des difficultés financières obligèrent Louis à retourner à Varsovie, où le jour de Noël, un pogrom éclata et la famille terrifiée eut à se cacher dans la cave. A Varsovie, Louis continua ses études ainsi que son travail dans le mouvement sioniste, trouvant parmi la jeunesse juive de Varsovie, une société de “l’amour de Sion”, qui projetait de former des colonies agraires en Palestine. Parmi les Juifs religieux de ce temps, le sionisme était encore nouveau et suspect. La plupart n’avaient pas accepté l’idée d’un état juif, qui était supposé s’établir seulement après la venue du Messie. Zamenhof se rappela plus tard, que lorsque il parlait avec une conviction passionnée de sa croyance en la reconstruction de la patrie juive, “mes camarades juifs se moquèrent de moi sévèrement”. Louis désirait travailler sur son langage, qui il sentait, aiderait les communautés juives éparpillées de par le monde, à communiquer les unes avec les autres et les sortiraient de leur isolement culturel. Jusqu’à présent, il avait obéi à son père et s’était consacré lui-même à ses études. Mais lorsqu’il demanda à voir sa précieuse liasse de son carnet de notes, il apprit que Marc les avait brûlé. Louis aurait à recommencer à reconstruire son langage du tout au tout, de mémoire. La cassure avec son père prendra beaucoup d’années à cicatriser. Louis continua à travailler sur la langue, alors qu’il finissait ses études médicales et commença à exercer dans un petit village en Lituanie. “La vie tranquille de l’endroit”, expliqua il plus tard, “était propice à la réflexion et amena un complet changement dans mes idées”. Dans les forêts paisibles de Lituanie, Louis Zamenhof en vint à la conviction que le nationalisme de toute sorte, même le nationalisme juif, “ne résoudrait jamais l’éternelle question juive” et n’amènerait son peuple à l’égalité et au respect. “Vous pourriez imaginer que ce ne fut avec aucune douleur que je décidait d’abandonner mon travail de nationaliste”, se souvint-il plus tard, dès lors je m’attelait moi-même à réaliser cette idée anationale, neutre, “qui avait occupé les pensées de ma prime jeunesse - l’idée d’une langue internationale”. La langue était enfin prête, mais un problème troublait Louis. “Je savais”, écrit-il, “que tout le monde me dirait: “Vôtre langue sera utile seulement lorsque le monde entier l’acceptera ; ainsi, je ne peux pas l’accepter jusqu'à ce que tout le monde le fasse”. Mais parce que “tout le monde” n’est pas possible sans certains individus en premier, la langue neutre n’aura pas d’avenir jusqu'à ce que son utilité pour chaque personne soit indépendant de l’acception ou de la non -acceptation par le monde déjà de la langue”. Zamenhof décida d’inventer une page “clé”, qui inclurait la grammaire et le vocabulaire, traduit dans une langue nationale. Quiconque recevrait une lettre écrite dans le nouveau langage pourrait la traduire sans hésiter et composer une réponse avec l’aide de la “clé” dans sa langue natale. Ainsi, la langue auxiliaire serait utilisée immédiatement pour son emploi crucial - la communication entre les personnes. Louis Zamenhof retourna à Varsovie, ayant décidé qu’il était inapte à une pratique générale. L’angoisse de voir des patients incurables mourir était plus qu’il ne pouvait en supporter. Il choisit l’ophtalmologie, étudiant la spécialité à l’hôpital juif à Varsovie et à Vienne, puis ouvrant son bureau rue Muranowska à Varsovie. A un meeting au “Khibat Sion”, il avait rencontré une jeune femme nommée Klara Zilbernik de Kaunas, Lituanie. Son père, le propriétaire d’une usine de savons, était impressionné par le sérieux du jeune docteur Zamenhof. Lorsque Klara et Louis se fiancèrent, Zilbernik dit à sa fille que Louis était “un génie” et que Klara avait “une tâche sacrée” devant elle. Elle le croyait aussi, et passerait le reste de sa vie à l’accomplir. En 1887, Louis et Klara se marièrent. Klara et son père s’accordèrent pour utiliser la moitié de sa dot pour permettre à Louis de présenter sa langue publiquement, sous la forme d’un petit livre. Il apparut de bonne heure cette année là. Le document de 40 pages comprenait des traductions dans la nouvelle langue, une lettre modèle et des poèmes originaux, aussi bien qu’une grammaire complète, un vocabulaire de 900 mots avec leur traduction en russe, et des promesses de formulaires remplis par ceux qui acceptaient d’apprendre la langue, que Zamenhof avait appelé Langue internationale. Louis Zamenhof fit face au moment avec excitation et une certaine trépidation. ”Du jour où mon livre apparut”, réalisa il, “Je ne serais capable plus longtemps de faire marche arrière ; je savais quel sort attends un docteur qui relève de son public, si son public le voit comme un excentrique...”. Zamenhof savait que poursuivre son idéal ouvertement pourrait mettre en danger la sécurité de sa famille et son bonheur futur. “Mais je ne pourrais pas abandonner l’idée qui m’avait possédé corps et âme”, dit-il, et il ne rebroussa pas chemin. ================================ Chapitre 2: “Celui qui espère” Le petit livre du docteur Zamenhof amena bientôt tant de lettres demandant des questions et offrant des conseils, qu’il publia un second livre comme moyen de leur répondre toutes. Un cercle d’enthousiastes grandit, alors que les gens commençaient à apprendre la langue et à l’utiliser pour correspondre les uns avec les autres et avec Zamenhof. Louis espérait que la langue se propagerait par lui-même, afin qu’il puisse “se retirer de la scène et être oublier”. Il avait signé son premier livre avec le pseudonyme “Docteur Espéranto”. Espéranto signifie “Celui qui espère”. Cela devint rapidement le nom populaire de la langue elle-même. Tout d’abord, la plupart des espérantistes vivaient dans l’empire russe et comprenaient beaucoup d’intellectuels juifs et des disciples de Tolstoï. Mais en 1889, le premier annuaire, ou bottin des espérantistes, incluait des personnes d’Allemagne, d’Autriche-Hongrie, d’Angleterre, de France, de Suède, des Etats-Unis, de Turquie, d’Espagne, de Chine, de Roumanie et de l’Italie ; et bientôt, il y eut des espérantistes en Amérique du Sud, en Afrique du Nord, en Afrique du Sud et en Australie. La langue était si simple que toute la grammaire pouvait être expliqué en 16 règles. Des mots étaient formés par des préfixes et des suffixes combinés avec des mots racine tirés principalement de l’Allemand et du Latin, afin d’être familiers à la plupart des interlocuteurs des langues européennes. Les noms étaient formés en ajoutant -o. Le pluriel était fait en ajoutant -j. L’utilisation de préfixes et de suffixes avait été un coup brillant. Cela simplifiait grandement la langue. Par exemple, le préfixe -mal indiquait le sens opposé du mot à lequel il était ajouté. Ainsi bona signifie “bon”, et malbona signifie “mauvais”. Non seulement cela supprimait tout les termes négatifs séparés, mais il devint alors possible de créer d’autres mots en utilisant le préfixe, tel que: dekstra, “droit”, maldeksta, “gauche”, antaü, “devant”, malantaü, ”derrière”, rica, ”riche”, malrica, “pauvre. A u lieu d’avoir à mémoriser un mot complètement différent pour chaque idée, on avait besoin seulement d’apprendre les racines et le préfixe. Un exemple de la manière dont des mots en espéranto étaient formés pourrait être vu dans samideano, un mot qui bientôt devint largement utilisé parmi les espérantistes. La racine -sam signifie “même”, la racine -ide signifie “idée”, et le suffise -ano signifie “membre”, ou “adhérent. Ainsi, samideano signifie celui qui partage la même idée, ou compatriote idéaliste, en d’autres mots espérantiste. La forme féminine était créée en ajoutant le féminin -in: sameideanino. Les pronoms personnels étaient ... Un cas finale était utilisé: le suffixe -n servait à indiquer, parmi autres choses, l’objet du verbe - ce qui sera appelé en latin ou en russe l’accusatif. Ainsi, “j’écris la lettre”, sera en espéranto: “Mi skribis la leteron”. L’espéranto avait été lancé avec succès dans le monde ; Louis et Klara étaient davantage ravis, lorsque en 1888, leur premier enfant, Adam, était né. Mais bientôt, des ennuis commençaient à obscurcir leurs vies. Louis avait des difficultés à établir son cabinet médical à Varsovie. Ses peurs avaient été justifiées - les gens le voyait comme un excentrique et était réticents à aller le voir pour un traitement médical. La moitié de la dot de Klara était passée à publier les livres d’espéranto ; le couple avait seulement encore 5000 roubles. Puis la catastrophe arriva. Le père de Louis, Marc, avait été accusé par un ennemi personnel de laisser un article critique sur le tsar Alexandre III passer la censure. L’article traitait du vin ; le passage injurieux était: “l’absorption continuelle de vin détruit graduellement les facultés intellectuels et civilisés du cerveau d’un homme et parfois cela entraîne maladie et une perte de toute raison”. Le passage était interprété comme un commentaire sur les habitudes du tsar et une insulte directe à sa personne. Marc fut démis de son poste en tant que censeur et il risquait aussi de perdre sa situation d’enseignant, car le parrain de son ennemi était ministre de l’éducation. Les fonctionnaires devraient être corrompus, ou Marc aurait à faire face à une ruine totale. Louis lui donna le reste de la dot de Klara. Marc garda son poste d’enseignant, mais Louis était financièrement ruiné. Dans l’espoir d’établir son cabinet dans une autre ville - où il ne serait pas soupçonné d’être un excentrique pour sa préoccupation de l’espéranto - il voyagea dans plusieurs villes de Pologne, aussi loin que Cherson en Crimée. Mais là-bas, il n’y avait pas assez de travail pour un spécialiste des yeux. Il retourna à Varsovie en 1898, désespéré et sans ressources, et convenant à regret d’accepter une aide financière du riche père de Klara. Louis décida d’établir son cabinet parmi les juifs pauvres de Varsovie, et la famille - une fille prénommée Sofia était née en 1889 - déménagea dans un appartement de la partie la plus pauvre du quartier juif, au 9 rue Dzika, où Louis avait également son cabinet de consultation. Pendant que d’autres oculistes à Varsovie demandaient des honoraires élevés, le docteur Zamenhof demandait seulement une modeste somme, et lorsque les patients n’avaient pas les moyens de payer, il les traitait sans paiement. Beaucoup de gens pauvres, qui autrement, auraient du laisser leurs maladies sans être traitées, vinrent sous les soins du docteur Zamenhof. Sa clientèle s’accrut, mais pour gagner sa vie, il avait à voir beaucoup plus de patients que ne le faisait les autres docteurs. Avec l’assistance du père de Klara, la famille était capable d’avoir, dans une certaine mesure, une sécurité financière. Le 29 Janvier 1904, le troisième enfant de Louis et Klara, une fille, naissait. Ils la prénommèrent Lidia. A présent, l’espéranto se propageait rapidement. La langue s’était montré elle-même d’un apprentissage facile, un moyen flexible pour une communication entre les interlocuteurs de différentes langues. Auparavant, Zamenhof avait démontré son étendue d’expression en traduisant Shakespeare et des livres de l’ancien Testament en espéranto. A la naissance de Lidia, il y avait des groupes espérantistes et des magazines dans beaucoup de pays, et des figures littéraires et scientifiques bien connus avaient rejoint le rang des espérantistes. Le comte Léo Tolstoï avait reçu une copie du premier livre espérantiste et avait appris la langue, disait-il, ”après pas plus de deux heures d’études”. “L’apprentissage de l’espéranto et sa propagation”, remarquait-il, “est sans doute un travail chrétien, qui aide à la création du royaume de Dieu, qui est le principal et seul but de la vie humaine”. Des plans furent faits par des espérantistes français pour tenir le premier congrès international grandeur nature d’espérantistes à Boulogne sur Mer en 1905. Zamenhof, qui était un homme timide et modeste, hésitait à y aller. Bien qu’en tant qu’élève, il avait parlé à de petits groupes secrets sionistes à Moscou et à Varsovie, il n’avait jamais donné de discours devant un tel public divers. Et il était déjà souffrant d’une maladie du coeur. Le voyage serait difficile pour lui, et coûteux. Zamenhof ne souhaitait pas que les espérantistes le traite avec des honneurs spéciaux. Il souhaitait qu’ils voient en lui “non l’auteur de l’espéranto, mais seulement un simple espérantiste”. Pendant un moment, il semblait que Louis ne serait pas capable d’assister au Congrès, même si il le voulait. La Russie était en guerre avec le Japon, et en Janvier 1905, des ordres arrivèrent, demandant à Zamenhof de servir en tant que docteur dans l’armée russe en Mandchourie. Klara était affolée par ces nouvelles et même contrariée par la réponse de son mari à cela. Bien que malade, Louis refusa de demander à être excusé de son devoir. Enfin, la famille et des amis le persuadèrent que sa santé ne pourrait supporter le dur voyage à travers la Russie et la Chine et les rigueurs du service militaire médicale. Les docteurs militaires approuvèrent. Au lieu d’envoyer le docteur Zamenhof au front, ils l’envoyèrent dans un hôpital durant une semaine. La situation en Europe de l’Est était assez instable. Dans l’empire russe se déroulaient un soulèvement et une révolution ; de terribles pogroms s’exécutaient, l’un des pire de ceux-ci était à Bialystock. Parmi les grèves et les soulèvements nationalistes qui avaient lieu cette année, il y avait une grève d’étudiants d’une école de grammaire polonaise de Varsovie. Louis et Klara étaient choqués lorsqu’ils apprirent que leur fils Adam s’y était joint. Louis le sorti de l’école et l’envoya demeurer avec la famille de Klara à Kaunas, où il finit ses études préparatoires. En dépit de tout ce qui s’était passé, alors que l’année se déroulait et que le temps du congrès approchait, Zamenhof décida qu’il assisterait à la rencontre en France. Mais beaucoup d’ennuis l’attendaient à Boulogne sur Mer. Les grands drapeaux avec l’étoile à cinq branches, symbole d’espoir et emblème de l’espéranto, volaient dans la ville balnéaire de Boulogne, mais les dirigeants du mouvement espérantiste en France se battaient entre eux. Plusieurs des dirigeants français désapprouvaient le brouillon du discours que Zamenhof leur avaient envoyé, particulièrement le poème “Prières sous la Bannière verte”, qu’il avait l’intention de lire à la fin. Ils trouvaient particulièrement choquant ses dernières strophes, qui contenaient la déclaration: “Chrétiens, Juifs ou Musulmans, nous sommes tous les enfants de Dieu”. Ils ne pensaient pas que le public approuverait. De plus, l’antisémitisme était fort en France, qui était encore divisé par l’affaire Dreyfus, et les dirigeants ne voulaient pas que le public sache qu’il était juif. Le créateur de l’espéranto avait le coeur brisé de trouver que la plupart des dirigeants espérantistes français ne partageaient pas ses idéaux. Bien qu’ils l’avertissent que le public pourrait même le huer, si il lisait sa “prière”, Zamenhof était déterminé à arriver à ses fins. Il était d’accord de renoncer à la dernière strophe du poème, sentant que peut-être, ils connaissaient plus du climat local de l’opinion, et il ne voulait offenser quiconque, bien que l’idéal était très haut. Autrement, il était décidé à lire le discours comme il l’avait écrit. Le soir arriva. Le petit auditorium du théâtre de la ville était rempli d’espérantistes. La salle bourdonnait du bavardage de 688 personnes appartenant à quelques 20 nations différentes. Mais au lieu de parler leur propre langue natale, ils parlaient tous la langue internationale espéranto. Un jeune suisse, Edmond Privat, décrivit la scène: “Une ferveur se propageait sous les lampes. Un frisson d’excitation se répandait à travers la foule en attente. Soudain, là, explosa la musique de l’hymne espérantiste, l’ ”Espoir”: «Dans le monde a surgi un sentiment nouveau, à travers le monde passe un puissant appel...» D’un commun accord, nous nous levâmes tous. Là se trouvait nôtre bien aimé dirigeant venant sur l’estrade avec les principaux officiels du congrès. Petit de taille, timide, ému, il se tenait là, avec son large front, ses lunettes rondes, et sa petite barbe grisonnante. Des mains, des chapeaux, des mouchoirs volaient dans l’air durant une demie heure d’applaudissements continus. Lorsqu’il se leva après l’accueil du maire, l’enthousiasme se déchaîna à nouveau. Mais à présent, il commença à parler. Le brouhaha cessa: nous nous assîmes tous à nouveau”. “Je vous salue, mes chers collègues”, commença Zamenhof, “frères et soeurs de la grande famille humaine, venus de terres proches ou lointaines, des plus divers nations du monde, pour vous serrer la main au nom de la grande idée qui nous unit tous... Ce jour est sacré. Nôtre réunion est modeste ; le monde extérieur connaît peu de celle-ci et les mots prononcés ici ne seront pas télégraphiés dans toutes les villes et tous les villages du monde ; ... cette salle n’est pas reluisante de vêtements luxueux et de décorations impressionnantes ; aucun coup de canon n’a retenti autour de la modeste maison dans laquelle nous sommes rassemblés ; mais dans l’air de cette salle, volent des sons mystérieux , des sons très subtils, imperceptibles à l’oreille, mais audible à chaque âme sensible. Ce sont les sons de quelque chose de grand qui est en train de naître. De mystérieux fantômes flottent dans l’air ; les yeux ne les voient pas, mais l’âme les voit ; ce sont les images d’un temps futur, d’une nouvelle ère. Les fantômes voleront dans le monde, seront rendus visibles, assumeront un pouvoir, et nos fils et nos grands enfants les verront, les sentiront et auront de la joie en eux”. Zamenhof parlait de comment la famille humaine avait été longtemps séparée par la guerre, des groupes hostiles, qui pendant des milliers d’années ne s’étaient pas compris les uns les autres. “Prophètes et poètes ont rêvé d’un futur très lointain où les hommes se seraient de nouveau rassemblés en une seule famille. Mais ce n’était qu’un rêve, que personne ne prenait au sérieux, auquel personne ne croyait. Et voilà que, pour la première fois, le rêve millénaire commence à se réaliser... Dans une petite ville de la France côtière, Nous, qui appartenons aux terres et aux nations les plus diverses, nous nous comprenons les uns les autres, nous nous parlons comme des frères, comme les membres d’une même nation... Nous nous tenons tous sur une base neutre, nous avons réellement tous des droits identiques ; nous nous sentons membres d’une même nation, comme les membres d’une même famille...”. Le public écoutait dans un silence respectueux. Parmi les visages de jeunes et vieux hommes et de jeunes et de femmes âgés, il y avait des expressions rayonnantes. Sa voix affermie ; “Nous allons montrer au monde que la compréhension mutuelle entre gens de différentes nations est parfaitement réalisable. ... que les barrières entre les peuples ne sont pas quelque chose d’inévitable et d’éternel, que l’entente entre des créatures d’une même espèce n’est pas un rêve fantastique, mais un phénomène parfaitement naturel qui n’a été que trop retardé par de tristes et honteuses circonstances, mais qui devait se produire tôt ou tard, qui accomplit maintenant ... Nôtre littérature est déjà très large, continua il, ”nos journaux sont très nombreux, nous avons maintenant des groupes et des clubs d’espérantistes dans le monde entier, et nôtre nom est à présent connu de toute personne éduquée de par le monde. Lorsque je regarde nôtre brillante position actuelle, je me rappelle avec émotion des premiers pionniers, qui travaillèrent pour nôtre cause en ces temps malheureux, lorsque nous rencontrions de tout côté que des ricanements et des persécutions”. Certains du public pouvaient voir les mains de Zamenhof commencer à trembler, alors qu’il approchait de la fin de son discours. “Bientôt, le travail de nôtre congrès dédié à la vraie fraternité de l’humanité commencera, continua il. En ce moment solennel, mon coeur est rempli de quelque chose d’indéfinissable, quelque chose de mystérieux, et je sens que je veux soulager mon coeur avec certaines prières, me tourner vers quelque Pouvoir plus grand, et invoquer son aide et ses bénédictions. En ce moment, je n’appartiens à aucune nation, je suis simplement un homme, même si je sens aussi qu’en ce moment, je n’appartiens à aucune religion nationale ou sectaire. En ce moment, devant les yeux de mon âme, il n’y a rien d’autre que cette Force morale que chaque être humain ressent dans son coeur. Et c’est à ce Pouvoir inconnu que j’adresse ma prière : «Ô Toi, ô puissant mystère, mystère incorporel régnant sur le monde,, Ô Toi, grande source de l’amour et de la Vérité et de la vie constante, Vers Toi, que tous Tu représentes différemment, Que chacun puisse concevoir dans le chemin de son esprit, mais le même dans son coeur, dans ses sensations, trouvera, Toi qui crées, Toi qui règnes, Aujourd’hui, nous te prions. Vers Toi, nous ne venons pas sans avec une croyance nationale, Avec des dogmes de ferveur aveugle, Toutes disputes religieuses maintenant font silence., Maintenant le zèle aveugle et la haine fanatique sont étouffés, Maintenant nôtre croyance est la croyance du coeur. Avec elle, qui est égale de tous, Avec elle, la plus vraie sans contrainte,. Nous voici, fils de l’humanité entière, A Ton autel. Tu as crée l’humanité parfaite et belle, Mais elle s’est divisée en batailles. Maintenant les gens se dévorent comme des bêtes sauvages, Maintenant le frère fait la guerre à son frère, Ô qui que Tu sois, Force mystérieuse, Ecoute la voix de la prière sincère, Redonne la paix à tous les enfants de la grande humanité ! Nous avons juré de travailler, de lutter, Pour rassembler l’humanité. Ô, Soutiens nous, Force, Ne nous laisse pas tomber, mais sois avec nous, Ô Pouvoir, Ne laisse pas les murs de division nous séparer. Ô mystérieux Pouvoir, accorde maintenant Ta bénédiction à nôtre labeur, Renforce à présent nôtre ardeur, et donne nous toujours le courage de rester fermes et braves contre les sauvages attaques. Le drapeau vert, nous le tiendrons déployé bien haut, comme un symbole de bonté et de bénédiction, la Force mystérieuse dirigeant le monde nous bénira et nous atteindrons nôtre but, Les murs qui divisent les peuples ne nous séparerons plus, ils craqueront, ils craqueront, et s’écrouleront, et tomberont pour toujours. Alors, l’Amour et la Vérité, renversant tous les murs, régneront sur la terre. Que les frères se réunissent, qu’ils croisent les mains, En avant avec des armes pacifiques. Chrétiens, Hébreux, Mahométans, Nous, tous fils de Dieu, que nous nous souvenions toujours de la Bonté de l’humanité et malgré les entraves , sans halte et debout, allons obstinément vers le but fraternel. En avant, ...sans nous arrêter.» “Lorsque Zamenhof s’assit”, se rappelle Privat, “des applaudissements prolongés éclatèrent ,et beaucoup étaient en larme”. Les dirigeants avaient eu tort. La sincérité de Zamenhof et son message avaient touché les coeurs de toute l’assistance. ================================ Chapitre 3: “L’idée interne” Avec les années, Louis Zamenhof avait réalisé qu’il existait une autre barrière qui avait divisé les hommes bien plus gravement que la langue natale: le préjugé religieux et le fanatisme. Il avait expérimenté par lui-même la laideur de l’antisémitisme et la violence des pogroms. Zamenhof croyait maintenant, que jusqu'à ce que les haines religieuses se finissent, la famille humaine ne deviendrait pas unie. Au départ de la Révolution de 1905, la violence contre les juifs en Russie polonaise devint si mauvaise, qu’un éminent espérantiste juif français et remarquable oculiste, Emile Javal, écrivit à Zamenhof, lui suggérant de prendre sa famille à Paris ,où ils seraient en sécurité. Mais Zamenhof ne voulait pas quitter Varsovie. Bien qu’il admettait que la vie là-bas était “en fait terrible”, il le remercia pour son offre, mais il refusa. Zamenhof désirait résoudre le problème du combat religieux. Quelques années auparavant, il avait présenté aux intellectuels juifs de Varsovie un programme qu’il espérait, formerait la base d’un mouvement religieux moral parmi les juifs. Zamenhof sentait que le judaïsme avait besoin d’être réformé, de ne pas être assimilé à ses “Gentils” alentours, mais d’être coupé de son noyau: la croyance en un Dieu et la loi d’aimer son prochain. Toute autre croyance, pensait-il, n’était “pas des lois, mais des coutumes et des traditions”. “L’essence du peuple hébreu”, écrivait-il, était l’idée d’un “seul Dieu inconnaissable pour toute l’humanité”. C ‘était pour cela que le peuple juif avait été crée, et pour lequel il avait souffert aux cours des millénaires. “L’amélioration de cette idée”, croyait-il, est par conséquent la mission entièrement naturelle du peuple juif et leur raison d’être”. Zamenhof appelait son programme hillèlisme, après qu’au 1er siècle avant Jésus-Christ, un sage hébreu Hillel, connu comme un homme tolérant qui interprétait les écritures selon l’esprit de la loi. “Ce que tu haï, ne le fait pas à ton frère”, avait dit Hillel. “C’est la Torah: tout le reste n’est que commentaire”. Zamenhof espérait que les principes de l’hillèlisme amèneraient à briser les barrières de préjugés et aideraient les juifs à être acceptés comme des citoyens égaux, où qu’ils vivent. Bien qu’il ne trouvait qu’un faible soutien pour son programme - aucun juif ne le supportait ouvertement - Zamenhof refusait d’abandonner l’idée. Il vint bientôt à croire qu’un tel mouvement ne devrait pas être seulement pour les juifs mais pour toute l’humanité. Il décida d’offrir son idée aux personnes de toutes races et de toutes religions, et il changea le nom en homaranisme afin de le rendre plus universel. Homarano en espéranto signifie “un membre de l’humanité”. L ‘essence de l’homaranisme était d’être l’égalité totale, la justice et le respect mutuel parmi les peuples de toutes races et de toutes religions. Chaque homaraniste serait libre de suivre sa propre religion, mais en s’occupant de membres d’autres groupes, serait supposé agir sur les bases de principes religieux humains neutres. Chaque individu serait libre de parler le langage qu’il souhaite chez lui, mais lorsqu’il rencontre des gens dont la langue maternelle était différente, il devra parler une langue neutre. Ce langage, pour le moment toutefois, allait être l’espéranto. Modestement, Zamenhof ajouta que si, dans le futur, les homaranistes souhaitaient choisir une autre langue, ils pourraient le faire. Les principes religieux qui guideraient tous les homaranistes incluraient une reconnaissance de Dieu comme le Pouvoir le plus élevé, inconnaissable à l’homme, et la règle fondamentale “d’agir envers les autres comme vous souhaiteriez que l’on agisse envers vous, et d’écouter toujours la voix de vôtre conscience”. “L’essence de toutes les religions est la même”, écrivait Zamenhof, “elles sont distinguées des uns des autres seulement par des légendes et des traditions...”. Zamenhof croyait que ces coutumes et ces traditions faites par l’homme, et non les enseignements d’amour et de fraternité donnés par Dieu, étaient la source de dissension religieuse parmi les gens. Les homaranistes, croyait Zamenhof, devaient travailler pour un jour, où les diverses pratiques religieuses de tous les homaranistes laisserait place à une série de coutumes neutres pour toute l’humanité. Zamenhof envisageait des temples homaranistes, où les mots de tous les ”grands enseignants de l’humanité” seraient lus, et les jeunes seraient éduqués au combat pour la vérité, la bonté, la justice et la fraternité entre les hommes, d’évaluer le travail honnête, et d’éviter ce qui était ignoble. Zamenhof précisa que les enseignements religieux promulgués dans le temple homaraniste ne doivent pas entrer en conflit avec la science. Zamenhof ne s’attendait pas à ce que tous les espérantistes acceptent l’homaranisme, mais il espérait qu’au moins, enfin, ils comprendraient les convictions qui l’avait mené à le développer et qu’ils salueraient l’idée avec respect et tolérance. Cependant, tous ceux qui étaient attirés par l’espéranto, ne partageaient pas la tolérance ou les idéaux de Zamenhof. Il n’avait pas anticipé la férocité avec laquelle certains attaqueraient l’homaranisme - aussi bien que son auteur. Zamenhof avait essayé de clarifier à tous que le programme de l’homaranisme était complètement séparé de l’espéranto, que l’on pouvait être un espérantiste sans accepter l’homaranisme, et tout d’abord, il publia ses idées homaranistes sous un pseudonyme. Pourtant, beaucoup devinèrent que Zamenhof était l’auteur. Un de ceux qui attaquait Zamenhof était un prêtre catholique lituanien espérantiste. Il prétendait que l’homaranisme était une tentative de remplacer le Christ par Hillel, qui, en fait, avait été contemporain de Jésus. A cela, Zamenhof répondit que l’homaranisme n’avait pas l’intention d’être une nouvelle religion mais un “pont qui pourrait relier pacifiquement toutes les religions existantes et plus tard, petit à petit, fusionner ensemble. Aucun de nous ne doute que ce Christ rêvait de la fraternité de l’humanité ; mais les fondateurs d’autres religions rêvèrent de la même chose. Si le Christ et les autres grands enseignants de l’humanité vivaient maintenant ensemble, ils agréeraient certainement aisément parmi eux-mêmes, ils placeraient assurément les “exigences actuelles de Dieu” au-delà de formes différentes, et nous n’aurions pas plusieurs religions mais une religion pour l’humanité”. L’adversaire le plus féroce à l’homaranisme était Louis de Beaufront, un espérantiste français hautement influent. L’espéranto était seulement une langue, revendiquait de Beaufront ; le relier à l’homaranisme ferait simplement du tort à la cause. Il publia une lettre en se moquant de l’auteur de l’homaranisme et suggérait sarcastiquement que pendant qu’ils étaient en train d’attendre pour les homaranistes l’ouverture de temples, des rites seraient accomplis dans des forêts vertes, portant des robes vertes couvertes d’étoiles dorées. Zamenhof avait projeté de présenter sa proposition pour l’homaranisme au second congrès universel d’espéranto à Genève en 1906. Mais la tempête de l’antagonisme contre l’idée était si forte que bientôt, Zamenhof envisageait de ne pas aller à Genève. Bien qu’il abandonna l’idée de présenter formellement l’homaranisme, il se résout à parler ouvertement de ses croyances au congrès. Zamenhof avait été profondément atterré par la vicieuse opposition à ce qu’il sentait était des idéaux éthiques universels, et par des revendications que l’espéranto était “simplement un langage”. Pour Zamenhof, l’espéranto n’avait jamais été qu’un langage. Il l’avait crée pour l’unification de l’humanité. Le 28 Août à 20h, la salle Victoria de Genève était remplie. Cette année, ils étaient presque deux fois plus dans l’assistance qu’il n’avait été à Boulogne. Les espérantistes attendaient avec anxiété le discours du docteur Zamenhof. Le voyage avait été difficile pour lui. Il était affaiblit par l’état de son coeur et l’angoisse mental amère des attaques contre lui. “Mesdames et Messieurs”, commença il. “A l’ouverture de nôtre congrès, vous attendez quelque discours de moi ; peut-être vous avez espéré quelque chose d’officiel, d’indifférent, pâlot et vide de tout contenu, comme le sont tous les discours officiels. Cependant, je ne peux vous donner un discours comme cela. En général, je n’ai aucun goût pour de tels discours, d’autant plus que cette année, un tel discours officiel sans relief serait un grand péché de ma part. Je viens d’un pays, où plusieurs millions d’hommes luttent péniblement pour leur liberté, pour la plus élémentaire liberté humaine, pour les droits de l’homme”.Mais Zamenhof ne parlera pas de cela: nôtre congrès n’a rien à faire avec la politique. Un autre combat se déroule, disait-il, “un cruel combat entre les races... La situation est épouvantable dans le Caucase, où de nombreuses langues sont parlées ; elle est terrible dans l’Ouest de la Russie. Qu’elle soit maudite, mille fois maudite, la haine raciale ! “Lorsque j’étais encore enfant dans la ville de Bialystock, je regardais avec tristesse l’hostilité réciproque qui divisait les fils naturels de la même terre et de la même ville. Et je rêvais alors qu’après des années, tout changerait pour le meilleur. Et les années ont passés ; et au lieu de mon beau rêve, j’ai vu une réalité terrible ; dans les rues de ma malheureuse ville natale, des bêtes sauvages avec des haches et des pieux en fer se sont précipités eux-mêmes, comme les bêtes sauvages les plus féroces, contre les calmes habitants de la ville, dont le seul crime était de parler une autre langue et de pratiquer une autre religion que celles de ces brutes sauvages... Je ne veux pas vous dire les détails affreux de la boucherie à Bialystock ; à vous, en tant qu’espérantiste, je veux vous dire seulement que les murs entre les peuples, les murs contre qui nous combattons, sont encore affreusement hauts et épais”. Si seulement les différents peuples se connaissaient bien les uns les autres, l’excitation des passions à travers le mensonge et la calomnie n’auraient pas des résultats si affreux, leur dit Zamenhof. Si seulement ils pouvaient communiquer, ils viendrait à réaliser leur humanité commune, et les éthiques et les idées qu’ils partagent. “Abattez, abattez les murailles qui séparent les peuples, s’exclame Zamenhof. Donnez-leur la possibilité de se connaître librement et de communiquer sur une base neutre, et c’est alors que pourront cesser les atrocités que nous voyons commettre en tant d’endroits... Aujourd’hui, alors que, en bien des endroits, les conflits entre races sont devenus si cruels, nous ,espérantistes, devons travailler plus dur que jamais. Mais pour que nôtre travail donne des fruits, il faut avant tout Que nous nous entendions bien sur l’idée interne de l’espérantisme Malheureusement, ces derniers temps, on a entendu dire parmi les espérantistes: “L’espéranto n’est qu’une langue. Evitez d’établir un rapport - même à titre privé -entre lui et une idée quelle qu’elle soit. Autrement on pensera que nous partageons tous cette idée-là et nous déplairons à ceux qui ne la partagent pas. Oh, que de mots ! Ainsi, par crainte de déplaire à ceux qui ne veulent utiliser l’espéranto que dans des buts pratiques personnels, nous devrions arracher de nos coeurs la partie la plus importante de l’espérantisme, la plus sacrée, cette idée qui est l’objectif principal de l’espérantisme, qui a été l’étoile qui a toujours guidé tous les combattants de l’espéranto ! Oh non, non, jamais ! Nous rejetons cette prétention de toutes nos forces. Si on nous oblige, nous, les premiers combattants de l’espéranto, à ôter de nôtre action tout ce qui constitue l’idéal, nous déchirerons et brûlerons avec indignation tout ce que nous avons écrit au nom de l’espéranto, nous détruirons avec douleur les travaux et les sacrifices de toute nôtre vie, nous jetterons l’étoile verte épinglée à nôtre poitrine et nous crierons avec horreur: “Avec un pareil espéranto, qui doit servir exclusivement à des fins commerciales et d’utilité pratique, nous ne voulons avoir rien de commun”. Il y a aura un temps où l’espéranto, étant devenu la propriété de toute l’humanité, perdra son caractère idéologique, où il deviendra simplement une langue, une langue où l’on ne sera pas plus obligé de se battre pour elle ; une langue où l’on retirera seulement du profit d’elle. Mais aujourd’hui, lorsque tous les espérantistes n’en n’ont pas encore bénéficier mais se battent seulement, nous sommes tous parfaitement conscient que ce n ‘est pas l’idée de l’utilité pratique qui provoque à travailler pour l’espéranto, mais seulement l’idée de l’idée sacrée, grande et importante contenue dans la langue internationale elle-même. Cette idée, vous tous le sentez bien, c’est: fraternité et justice entre tous les peuples” ; Zamenhof ne voulait pas abandonner l’idée même. Il espérait encore que les espérantistes verraient que, comme il le dit l’année suivante au congrès de Cambridge, en Angleterre, la bannière verte, symbole de la langue, était aussi le drapeau d’un pays - la terre espéranto - qui a non seulement sa propre langue, mais ses propres règles coutumes et principes: “Aux fonds de nos coeurs”, leur dit-il, ”vous sentez tous la grande bannière: vous ressentez tous qu’il y a quelque chose de plus que le simple emblème d’une langue. Plus nous prenons part à nos congrès annuels, plus nous deviendrons des frères, et plus les principes de la grande bannière couleront dans nos âmes. Beaucoup de gens rejoignent l’espéranto par simple curiosité, ou par amusement, ou peut-être espère même du profit ; mais dès qu’il visite la terre espéranto, ils deviennent de plus en plus aspirés et assujettis aux lois de ce pays, et ce, en dépit de leur propre volonté. Graduellement, la terre espéranto deviendra une école pour la fraternité future de l’humanité, et dans celle-ci, recouvrirons les valeurs principales de nos congrès”. Zamenhof avait beaucoup souffert du voyage en Angleterre. Après le congrès, il alla à Bad Nauheim en Allemagne pendant 6 semaines de traitements médicaux. Il espérait sans aucun doute que dès son retour à Varsovie, il serait capable de récupérer, et de se consacrer une nouvelle fois, à son cabinet médical et son travail pour l’espéranto. Ce ne fut pas ainsi, car bientôt, une sordide controverse explosa dans la patrie de l’espéranto. Durant les premières années de l’espéranto, diverses personnes avaient suggéré des changements qui, croyaient-ils, devaient se faire dans la langue. Zamenhof espérait que l’espéranto deviendrait une langue vivante qui grandirait naturellement en réponse aux besoins de ses utilisateurs. Mais il était toujours prudent sur des propositions de changement. Il considérait avec politesse toutes les “réformes” que les gens offraient, et il suggérait qu’un comité linguistique soit crée pour traiter de telles choses. Beaucoup des changements proposés étaient contradictoires ; une personne pouvait souhaiter changer simplement un aspect, alors que quelqu’un d’autre aimerait apporter des améliorations dans la langue. Zamenhof avait lui-même considéré et rejeté d’autres changements. Alors qu’ils résonnaient bien en théorie, il sentait qu’ils ne fonctionneraient pas dans la pratique. Certains de ceux qui suggéraient des changements étaient des espérantistes bien intentionnés voulant aider. D’autres, peut-être séduits par la possibilité d ‘avoir quelque influence personnelle sur les règles de la langue, devinrent obsédés par l’idée de réformer«“ l’espéranto. Zamenhof et d’autres s’alarmèrent à la perspective du changement continuel de l’espéranto par quiconque sentait l’urgence d’apporter une “amélioration”. Zamenhof souhaitait préserver l’intégrité de cette langue, encore qu’il était conscient que ce conflit de réformes et l’inflexibilité de l’auteur avait estropié le Volapük. Parmi ceux qui s’étaient fortement opposé se trouvait le français Louis de Beaufront. C’était une personne énigmatique qui clamait avoir renoncer à son propre projet de langue internationale pour l’espéranto. De Beaufront était déjà devenu le centre de controverse du fait de son désir de contrôler le mouvement espérantiste en France. Il était aussi l’un des adversaires les plus rigoureux de l’homaranisme. Une délégation pour le choix d’une langue internationale s’était formée grandement par les efforts d’un espérantiste français nommé Louis Couturat, dans un essai d’influencer l’association internationale des académies d’approuver l’espéranto. On demanda à Zamenhof de choisir quelqu’un pour représenter l’espéranto devant le comité de délégation. Il choisit Louis de Beaufront. En dépit du comportement passé de Beaufront, Zamenhof souhaitait montrer sa confiance en lui, et il était certain que de Beaufront, qui s’était toujours opposé à des réformes, défendrait l’espéranto de ses détracteurs. Mais de Beaufront et Couturat déçurent Zamenhof ; leur propre intention était d’avancer un “nouveau” langage. Couturat l’avait secrètement appelé Ido, qui signifie enfant en espéranto. Lorsque l’Ido fut présenté, cela se révéla être l’espéranto, changé pour incorporer les demandes des réformistes. Soudain, de Beaufront abandonna sa position de défenseur de l’espéranto et parla en faveur de l’Ido, menant chacun là-bas à croire que les espérantistes approuvaient l’Ido. Le comité vota pour accepter l’espéranto avec des changements en accord avec l’Ido. Lorsque les espérantistes apprirent ce qui s’était passé, ils furent indignés. Le temps venu, le vote final arriva, et la plupart des membres prestigieux du comité s’abstinrent ou se retirèrent, laissant seulement les supporters de l’Ido, qui naturellement, votèrent pour accepter leur propre projet. Couturat commença alors une campagne d’attaques contre les espérantistes et Zamenhof lui-même. Le mathématicien et philosophe Bertrand Russell, un ami de Couturat, écrivit dans son autobiographie que le discours de Couturat donnait l’impression qu’aucune personne de l’histoire de la race humaine toute entière n’avait jamais été “si dépravée que les espérantistes”. Lorsque Couturat se plaignît que le nom de son langage Ido ne le mènerait pas à la formation d’un mot comparable à “espérantiste”, Russell suggéra “idiot”, mais Couturat “n’était pas tout à fait d’accord” ; Le bien élevé Zamenhof endurait avec patience les idéistes qui abusaient, bien que cela le faisait souffrir profondément. Mais le comportement de De Beaufront était complètement embarrassant. C’était une personne triste, qui désirait être pris comme une personne importante, encore que cela n’était pas assez pour expliquer sa tricherie. Il était déjà une figure populaire et importante dans le mouvement espéranto et président d’une société espérantiste. Pourquoi faisait-il cela, lui qui avait travailler pendant 20 ans pour l’espéranto, et qui maintenant le reniait et injuriait ses fondateurs ? Il a été suggéré que la répudiation spectaculaire de De Beaufront de l’espéranto aurait découlé son hostilité envers l’homaranisme. “C’est possible”, écrivait Marjorie Boulton à Zamenhof, créateur de l’espéranto, “que de Beaufront, avec sa nature extravagante et intolérante en vint à haïr Zamenhof au sujet de l’homaranisme et voulait le chasser”. En 1908, au 4ème congrès à Dresde en Allemagne, Zamenhof ne dépensait pas sa précieuse énergie à dénoncer les traîtres. A la place, il se rappela les 1300 espérantistes réunis là, et que seule l’unité pouvait les mener à leur but. Maintenant, disait-il, laissons les épisodes être oublié. “Souvenons nous que nôtre congrès est un entraînement préliminaire et une formation pour la fraternité future de l’humanité. Ce qui est important pour nous, ce ne sont pas les détails triviaux externes de nôtre langue, mais ce qui compte, ce sont ses idées, et son but... peut-être la différence entre l’espéranto d’aujourd’hui et l’espéranto évolué dans plusieurs siècles à venir sera grande ; mais souhaitons à nôtre protection attentive que la langue vivra de manière vigoureuse, en dépit de toutes les tentatives contre lui, que son esprit croîtra en force, son but sera accompli et nos grands-parents bénirons nôtre patience”. ================================ Chapitre 4: “Père et fille” Lorsque Lidia était née en 1904, ses parents étaient déjà entre deux âges. Klara avait 40 ans, Louis 44 ans. Adam, le frère de Lidia et sa soeur Sofia avaient grandi: lorsque Lidia eût 2 ans, Adam alla en Suisse étudier la médecine à l’université de Lausanne, et Sofia suivit une année plus tard. Bien que la Suisse était loin de la maison, c’était pratiquement le seul choix qu’ils avaient si ils voulaient devenir docteurs. Seul un petit nombre de juifs étaient autorisés à assister aux universités dans l’empire russe. En dehors de visites occasionnelles à domicile, Adam et Sofia étaient partis durant la plupart de l’enfance de Lidia. Plus tard, les trois seront souvent séparés les uns des autres, mais le lien qui les réunissait était fort et ils tinrent en dépit de longues années seuls. En tant que seul enfant dans la maison des Zamenhof, Lidia avait l’attention de ses parents pour elle toute seule. Elle était leur chérie et leur joie, mais ils ne la gâtaient pas. Habillée dans une robe chichis, à étages, ses chaussures lacées au-dessus de ses chevilles et un noeud dans ses cheveux blonds enrubannées, alors qu’elle se tenait sur un coussin pour être pris en photo, son petit visage rond regardant la caméra avec une expression sérieuse et presque solennelle. Presque toutes ses photographies la montreront avec un tel look. Sa bouche avait tendance à tomber, ainsi son expression normale semblait celle d’une tristesse secrète. Lilka, comme sa famille l’appelait toujours, même lorsqu’elle grandissait, était arrivé à une époque, où ses parents pouvait la divertir. Bien que la situation en Pologne russe était souvent insécurisé et parfois dangereuse, la vie était financièrement plus facile qu’elle ne l’avait été pour la famille Zamenhof des années plus tôt. Le docteur Zamenhof avait un grand cabinet, et il recevait des revenus additionnels pour ses livres en espéranto. La famille était capable d’aller en vacances au pays, et chaque année Louis et Klara voyageaient pour le congrès universel quel que soit l’endroit où il se tenait. Mais la santé de Louis empirait: il était lui-même surmené, restant souvent plus longtemps qu’il ne le pouvait, par dévouement pour ses patients et non pour l’argent. Un jour par semaine et parfois deux, il voyait des patients pauvres sans argent. Bien qu’il y n’avait aucun pogrom à Varsovie, les conditions étaient terribles. Des centaines de juifs s’enfuyaient, cherchant refuge et une nouvelle vie en dehors de l’Europe. Beaucoup d’émigrants pauvres parfois des familles entières, passaient par le cabinet du docteur Zamenhof pour être examiné et traité pour des maladies oculaires afin qu’ils puissent entrer dans d’autres pays. En 1908, Klara confia à son ami Madame Moscheles à Londres, “la santé de mon mari serait meilleur si il pouvait se reposer un peu, mais malheureusement, il travaille toujours très dur”. L’angoisse mentale qu’il avait souffert le rendait nerveux et agité. “Il ne peux cependant pas marcher”, écrivait Klara, “ainsi il s’asseoit toujours chez lui à son secrétaire”. Lidia reçue sa première éducation à la maison, à l âge de 6 ans - elle n’entra pas à l’école avant l’âge de 10 ans. Klara décrit Lidia à 6 ans “très capable, brillante et travaillant dur”. Louis n’était pas aussi strict avec Lidia qu’il ne l’avait été avec Adam et Sofia. Il ne punissait jamais physiquement son enfant, bien qu’il les mettait parfois au piquet. Lidia se souvient que la discipline de son père comme ferme bien que bienveillante. “Lorsque le chat de Lidia attrapa sa première souris”, retrace Marjorie Boulton, “elle courait le dire à son père avec impatience. Sans nul doute, elle était déçue par sa bienveillance “Lidia, ne penses-tu pas que la souris aurait aimer également vivre ?” mais cela faisait partie de son apprentissage”. Zamenhof enseignait toujours à ses enfants à être honnête. Quelques années plus tard, Lidia se rappela un incident qui illustrait combien son père estimait cette vertu. Parmi les objets sur le secrétaire de son père se trouvait un coupe-papier en pierre en forme de chien. Un jour, Lidia remarqua que la base avait cassé en deux endroits. “Ordinairement, lorsque je vois quelque chose de cassé, de déchiré, je ne préfère pas demander comment cela s’est passé,” se souvient-elle, ”car je n’étais jamais complètement sure si de ne pas être responsable de cela. Mais comme pour le coupe-papier, j’avais réellement une conscience claire, Ainsi, je demandais courageusement à mon père ; “Qui l’a cassé ?”. Il répondait, “moi” “.J’étais presque sans voix. Impossible ! Papa l’a cassé ? ! Papa pourrait-il finalement - casser - quelque chose ?. Le docteur Zamenhof dit à sa fille que c’est ce qui était arrivé lorsqu’il était u jeune garçon. “Il avait plusieurs frères et soeurs. Chacun savait que dans une maison où il y avait beaucoup d’enfants, il arrivait facilement que d’une manière inopinée, par exemple, le carreau d’une fenêtre puisse se briser avec un bruit fracassant, ou que des figures en porcelaine tombent de leurs piédestals...”. Marc Zamenhof avait été un père sévère, écrivait Lidia, “qui ne pardonnait pas beaucoup si à cause de frasques d’enfants, quelque dégât arrivait à la maison, et lorsque un jour... le coupe-papier tomba du secrétaire de mon grand-père et se brisa au sol. Une terreur étreint le petit groupe d’enfants, et sans doute leurs coeurs cognèrent lorsqu’il entendirent la sévère question: “Qui a fait cela ?”. Et alors de parmi la foule tremblante, Louis se leva bravement et confessa: “Moi”. La courageuse confession toucha le coeur de mon grand-père. Il pardonna et ne punit pas le coupable”. Cependant, les enfants de Louis Zamenhof apprirent qu’il y avait un sujet sur lequel leur père révélait rarement la vérité: sa propre santé. Il ne souhaitait pas charger les autres de son récit. Dans la même lettre dans laquelle Klara confia à Madame Moscheles que son mari ne pouvait marcher, Louis avait écrit à Monsieur Moscheles, “Je travaille beaucoup trop en fait et je me sens plutôt fatigué... mais je ne suis pas malade”. Quelques années plus tard, Lidia se souviendra de sa mère comme “aimante, affectueuse, maternelle. Je la vois lorsque tu te penchais sur mon berceau, à me caresser, et me dire bonne nuit, à mettre ta main sur mon front chaud avant que le thermomètre te dise que j’étais réellement malade. Je vois combien tu te penchais sur les livres de compte du domicile, ou comment rapidement ta main tournait la roue de la machine à coudre, pour me faire une nouvelle simple robe en coton. Et les morceaux de tissus -oh, quelle joie, ! - servirait à habiller ma poupée, ma préférée, qui fermait et ouvrait les yeux”. Bien qu’elle était la seule enfant à la maison, Lidia n’était pas sans camarade de son âge. Il y avait plusieurs jeunes cousins qui jouaient ensemble chaque fois que leur famille rendait visite les uns aux autres. L’enfant de la famille Zamenhof avait une relation spéciale avec oncle Félix, le frère de Louis. Pharmacien de métier, et quelque peu poète, Félix Zamenhof arrangeait souvent des divertissements en soirée pour la famille et il avait un talent pour écrire de petits jeux pour les enfants. Toutes les fois qu’un de ses enfants avait un anniversaire ou quelquefois en d’autres occasions, il écrivait et dirigeait de petites productions théâtrales que Lidia et ses jeunes cousins jouaient. Chaque semaine, tous les Zamenhof - frères, soeurs, tantes, oncles, cousins, se rencontraient dans l’une des maisons. Ce week-end, la réunion de la famille Zamenhof était une tradition qui se prolongea bien après que les enfants aient grandi, bien que, comme se rappela le cousin de Lidia, Stéphane Zamenhof, “plus tard, les plus jeunes avaient de meilleures choses à faire et il n’y avait que les vieilles femmes qui y assistaient”. Pendant que les enfants jouaient, se souvient-il, “les adultes discutaient sur ce qui s’était passé durant la semaine - particulièrement les prix de la nourriture et les domestiques qui n’étaient pas ce qu’ils devraient être, et ainsi de suite”. Lorsque la famille se rencontra à la maison de Louis, tous étaient impatients des tartes framboise à la crème de Klara. Quelques années plus tard, le cousin Julien Zamenhof se rappela “une atmosphère d’enthousiasme et de respect” entourant le docteur Zamenhof. Stéphane se souvient que les enfants l’appelaient “Wujaszek Louis” - petit oncle Louis”. A ces réunions hebdomadaire, Julien se souvient, que son oncle s’asseyait “une cigarette dans la main, parlant calmement sans grand geste ni emphase, ne gesticulant jamais ; et pourtant, ce qu’il disait semblait important: chacun avait à l’écouter. Il était également lui-même un grand auditeur ; il écoutait sans hésiter un enfant, un patient, un conducteur de tramway ou un membre de la famille royale ; il parlait toujours, se conduisant bien et écoutant de la même manière, avec respect et attention”. Pendant que les jeunes cousins étaient autorisés à aller à travers la maison avec leurs jeux, une pièce leur était strictement interdite: le cabinet médical d’oncle Louis. Les enfants le sentaient, car la pièce était pleine de livres et d’objets intéressants, et il y avait de grandes possibilités d’exploration. Une fois, les 11 ans de Julien se levèrent, donnant écho à l’amertume que les enfants ressentaient parce qu’ils n’étaient pas autorisés à aller dans la merveilleuse pièce. “... tous ces espérantistes”, argumenta t’il en tant que porte-parole de la rébellion, “pourrait entrer dans son cabinet chaque fois qu’ils le veulent et pourtant nous, sa famille, serions admis seulement au cas d’un oeil douloureux... Ils sont des étrangers alors que nous sommes de la famille”. Ils ne sont pas des étrangers ; ils sont aussi ma famille ; ils partagent ma plus grande croyance dans le besoin de compréhension mutuel, et ils m’aident à propager cette idée parmi ceux qui en ont particulièrement besoin mais ne réalisent pas encore leur besoin”. Depuis son plus jeune âge, Lidia savait qu’il y avait beaucoup d’autres personnes qui étaient importantes dans la vie de son père. Elle savait qu‘elle devait attendre jusqu'à ce que tous les patients aient quitté son cabinet avant de pouvoir jouer à la balle avec lui, bien que parfois, lorsqu’elle pensait qu’il avait travailler assez longtemps, elle entrait bravement et lui demandait de jouer à la balle avec elle. Et il lui accordait de bon coeur quelques minutes. “De mon enfance”, écrivit Lidia plus tard, “je me souviens des patients attendant dans la salle d’attente, où certains venaient avec des yeux rouges enflammés, d’autres couvraient leurs yeux douloureux avec de l’ouate, parfois tâché, et d’autres encore les plus tristes de tous, ne venaient pas seuls ; des parents ou des amis les accompagnait, car ils étaient aveugles. Après la visite de ses patients, je voyais souvent du chagrin sur le visage de mon père - c’était la profonde et la sincère compassion pour ceux dont le sort avait dérobé la vue”. Lidia apprit que bien que son père s’occupait de ses patients, il était pourtant plus dévoué à son travail pour l’espéranto. Longtemps après que le dernier patient soit parti, il continuait à travailler, répondant aux nombreuses lettres qu’il recevait d’espérantistes du monde entier, écrivant des articles, et traduisant des livres en espéranto. Pour Lidia, son compagnon le plus proche semblait être sa machine à écrire. “Elle se trouvait sur une table de chêne près de la fenêtre de nôtre salle à manger”, écrivait-elle plus tard. “En soirée, elle était poussée en direction de la lumière de la lampe qui surplombait la table. La journée, elle travaillait seulement quelques heures, mais sa vie réelle commençait en soirée. Le vacarme de ses petites lettres était presque une berceuse pour moi ; quelque chose semblait manquer lorsqu’elle était silencieuse. Je devins habituée à ses mélodies monotones, dans laquelle la frappe des lettres était interrompue par une belle sonnerie qui annonçait la fin de la ligne, et le bruit grinçant du retour de chariot ; mes poupées trouvaient toujours sa couverture en bois comme une très pratique voiture d’enfant. “je me souviens à peine du temps où elle occupait sa place dans nôtre maison. Des années s’écoulèrent - elle travaillait toujours sans fatigue, n’étant pas seulement une machine mais presque une amie de mon père. Une amie jamais impatiente, jamais désespéré, mais toujours fidèle, toujours pleine d’espoir. Tout d’abord, je la regardais comme une ancienne et grave amie de la famille. Je me tenais près d’elle, avec intérêt, contemplant le travail de son mécanisme. Enfin je devins assez courageuse pour m’asseoir sur le tabouret et taper les lettres, me réjouissant que les lettres étaient beaucoup plus belles que celles de mon peu maniable écriture marqué sur un cahier. Mais ma première joie réelle fut lorsque je tapais un exercice et le montrait avec fierté à mon professeur. Je suis sure que c’était la seule raison pour laquelle elle ne râla pas sur des erreurs qu’en d’autres occasions, elle aurait découverte avec sa sévère critique”. La maison Zamenhof était souvent pleine d’espérantistes. Beaucoup vinrent d’autres pays pour visiter le docteur Zamenhof, presque comme un acte de pèlerinage. Lidia ne pouvait aider, observant le profond respect que ces étrangers montraient à son père bien que cela devait lui avoir tout d’abord sembler être mystérieux. En une occasion en 1909, Lidia amusa les hôtes qui assistaient à une célébration du 50ème anniversaire de son père. Klara l’avait amené dans la pièce pour la présenter au groupe, qui comprenait plusieurs éminents espérantistes. Puis ils s’assirent pour écouter une série de discours en espéranto qui complimentaient le Maître et sa famille. Soudain, Lidia bondit, indignée, s’exclamant en polonais: “Mais qu’est-ce qu’ils baragouinent ? Je ne comprends pas un mot !” et elle sortit de la pièce. Sur les rangées de l’excellente bibliothèque de Zamenhof se trouvaient des livres espérantistes envoyés par leurs auteurs de par le monde entier. Une fois, Lidia entendit un visiteur dirent que ces livres, plus que toute autre statue ou marbre ou granit, serait un monument éternel de la grandeur de son père. Elle n’oublia jamais ces mots. Mais son principal intérêt en espéranto à cette époque était comme une source pour sa collection de timbres, alors qu’elle récupérait de la poubelle les nombreux timbres étrangers de la poste, de lettres envoyés à son père. Bien que la famille de Lidia était juive, ils n’étaient pas des pratiquants religieux. Tandis que les juifs ne travaillaient pas le dimanche, même pour cuisiner, à la maisonnée Zamenhof, le dimanche était quelque peu différent du este de la semaine. En fait, le dimanche avait toujours été le jour où de grands arrivages postaux étaient pris à la poste - les livres commandés par les espérantistes de par le monde entier. Des juifs pieux suivaient les lois de régime avec attention, mais les Zamenhof ne séparaient les produits laitiers de la viande dans leur maison, et, se rappelle le cousin de Lidia, Stéphane, ils mangeaient du jambon à l’occasion. Très tôt, Lidia apprit les valeurs que son père chérissait, en particulier: regarder chaque être humain comme un membre de la famille humaine, quel que soit sa race, sa religion, sa langue ou sa classe. Bien que cela était la manière de faire dans la maison Zamenhof, Lidia apprit bientôt que dans le monde, au-delà de leur cour rue Dzika, tout le monde ne partageait pas ces idéaux de fraternité et de tolérance. Des juifs séculaires comme les Zamenhof, qui ne suivaient pas les styles de vie orthodoxes était un peuple à part. Bien qu’ils pouvaient vivre dans le quartier juif, ils ne participaient pas dans la traditionnelle société juive. En apparence et en parole, ils étaient davantage polonais, pourtant les polonais ne les acceptaient pas. Bien que Louis Zamenhof connaissait le yiddish et avait parlé russe à la maison, à l’époque où Lidia naquit, la langue du domicile des Zamenhof était le polonais - bien que les anciens Zamenhof utilisaient souvent l’espéranto. Lidia fut inscrite comme juive à la naissance, mais selon son propre témoignage, elle ne prit jamais part aux activités religieuses juives ou à la vie communautaire. Pour la plupart des polonais cependant, des gens comme les Zamenhof étaient très différents des autres juifs. Dans sa biographie de 1920, “La vie de Zamenhof”, le professeur suisse Edmond Privat évoquait l’angoisse que cela a causé à la jeune Lidia d’être différente - ni juive orthodoxe ni catholique polonaise: “Elle ... très tôt se montrait elle-même être réfléchie et de caractère indépendant. Son père respectait son caractère. La petite fille remarquait chaque chose avec des yeux clairvoyants. Pour le menu du soir à la maison, il y avait du thé, avec des tranches de jambon. Dans la foi juive, cela était un péché envers Dieu. La religion interdit l’usage de viande de porc. Avec les catholiques, c’était la même chose au sujet de la viande le vendredi. Mais père était un libre penseur. Pourquoi ? Dans les églises polonaises, là-bas sonnait la musique de l’orgue sous des peintures colorées brillantes. Des prêtres éloquents qui prêchaient là parlaient de la gloire éternelle des martyrs, crucifiés à la fois pour la patrie et le Christ. Pourquoi ne pas devenir une polonaise et une chrétienne ? Pourtant, à l’école, les chrétiens tournaient le dos aux petites filles juives. Certains des chauvins parents le leur disaient. De simples amitiés de coeur étaient brisées. Des mots de moquerie étaient entendus. Y avait-il quelque part quelque amour et noblesse ? L’enfant avait commencé à comprendre la profonde douleur dans son coeur...”. Dans le même temps, Lidia commençait à expérimenter la cruelle réalité des haines raciales et religieuses, son père perfectionnant sa propre théorie sur la religion. Dans un nouveau livre sur l’homaranisme publié en 1913, alors que Lidia avait 9 ans, il était clair qu’il avait changé certaines de ses idées. Précédemment, il avait accepté le fait que les gens appartenaient à une religion non pas à cause de ce qu’ils croyaient mais parce qu’ils étaient né dans elle. Maintenant cependant, il affirmait que cette “religion devrait seulement être l’affaire d’une croyance sincère, et ne pas jouer la part d’un outil héréditaire de désunion racial”. Les homaranistes, écrivait-il, devraient être capable de dire, “J’appelle ma religion seulement ma religion... à laquelle je crois en réalité... Si je ne crois en aucune des religions révélées existantes, je ne dois pas rester dans l’une d’elles simplement pour des raisons raciales et ainsi en fourvoyant les gens sur mes croyances et contribuer pour sans fin à des générations de désunion raciale, mais je dois - si les lois de mon pays le permette - ouvertement et officiellement m’appeler moi-même un “libre penseur”, mais non , cependant, être identifié libre penseur spécialement avec athéisme, mais réservant pour ma croyance une pleine liberté”. Pourtant, n’avoir aucune religion du tout n’était pas autrement plus satisfaisant. Zamenhof reconnaissait qu’appartenir à une communauté religieuse remplissait un besoin social ou du moins spirituel ; partager des coutumes, des traditions et des fêtes donnaient de la richesse à la vie. Une personne sans religion vivait une vie pâlote et prosaïque. Cela pouvait spécialement être vu parmi ces juifs séculaires de Pologne qui s’étaient complètement retirés de la tradition juive. Dans ‘ Au bord de la destruction: les juifs de Pologne entre les deux guerres’, la sociologue Célia S. Heller a noté que la vie de ces personnes, qui n’étaient ni juif pratiquant ni chrétiens, avaient souvent un “vide spirituel” qui “semble avoir résulté d’un désir mystique pour certains de leurs jeunes”. Zamenhof était clairement conscient du vide que le manque de religion laissait dans la vie d’un enfant. Peut-être il le vit dans sa propre petite Lidia. “Un enfant”, écrivait-il plus tard, “ne peut se nourrir de théories et de lois abstraites ; il a besoin d’impressions et un environnement tangible. L’enfant qui n’appartient à aucune religion formellement déclaré ne peut jamais avoir dans son coeur cette joie, cette chaleur, qui est donné aux autres enfants par l’église, les coutumes traditionnelles, la possession de “Dieu” dans le coeur. Combien l’enfant n’ayant pas de religion doit souvent cruellement souffrir lorsqu’il voit d’autres enfants, parfois très pauvres, mais avec un coeur heureux, aller à l’église pendant que lui-même n’a pas se règles définies, aucune fête, aucune traditions !”. Zamenhof espérait toujours que l’homaranisme se propagerait et attirerait des disciples afin que des gens de toute race ou religion - particulièrement ceux n’ayant aucune religion - pourront aller ensemble et partager leur propre chaleur, camaraderie et traditions, même lorsqu’ils affirment leurs idéaux éthiques. Une fois Zamenhof aurait pu espérer qu’avec le temps, Lidia était assez âgée pour comprendre de telles choses, qu’une congrégation d’homaranistes existerait afin qu’elle puisse avoir d telles expériences. Mais dans son édition révisée de ‘La déclaration sur l’homaranisme’, Zamenhof supprima toute référence aux temples homaranistes qu’il avait rêvé autrefois. Il concluait la Déclaration, cependant, en ajoutant que ceux qui étaient des “libre penseurs”, ayant cessé de croire en leur religion de naissance, devraient former leur propre communauté, que l’individu pouvait “rejoindre avec une pleine satisfaction pour ma conscience et pour les besoins de mon coeur”, il doit déclarer que cette communauté est sa religion officielle et doit la transmettre à son enfant. Jusqu'à ce qu’une telle communauté soit établie, le libre penseur doit “rester officiellement enrôlé dans la religion dans laquelle il est né, mais je dois toujours ajouté à son nom le mot “libre penseur” pour montrer que je m’inclus moi-même seulement temporairement ...”. “Cela a du être avec quelques douleurs que Zamenhof a écrit ces lignes, car elles ouvraient la possibilité, même l’inéluctabilité, de rompre ses derniers liens au judaïsme. ================================ Chapitre 5: “Des étoiles vertes et des coeurs en pain d’épices” Le 9ème congrès universel d’espéranto se tint à Berne en Suisse en Août 1913. Comme d’habitude, Louis et Klara y assistaient. Adam et Sofia étaient à Lausanne, Adam travaillant dans l’université clinique pour les yeux, Sofia finissant ses études médicales. Ils projetèrent de voyager à Berne et de rencontrer leurs parents là-bas. Lidia avait 9 ans, et était assez âgé pour les accompagner pour le voyage. Mais Klara écrivit à Sofia en lui confiant qu’elle ne savait pas que faire avec Lilka. La déterminée petite fille du “docteur espéranto” avait refusé avec entêtement d’apprendre sa langue, bien quelle comprenne la signification de ‘bonne nuit’ et ‘chocolat’. Klara savait que Lidia s’ennuierait au congrès si elle ne pouvait comprendre ce qui s’y passait. Et ce serait embarrassant que la fille du docteur Zamenhof ne connaisse pas l’espéranto. Klara ne voulait pas prendre Lidia avec elle, mais elle ne voulait pas la laisser à la maison. Sofia et Adam se consultèrent et décidèrent d’aviser leur mère de laisser leur jeune soeur avec un parent. Mais lorsque Sofia et Adam rencontrèrent leurs parents à Berne, ils furent étonnés de voir que Lidia là-bas aussi - parlait espéranto. Klara avait trouvé sa propre solution. Elle expliqua à Lidia que si elle n’apprenait pas l’espéranto, elle ne pourrait aller avec ses parents en Suisse. Naturellement, Lidia voulait aller faire le voyage, ainsi, avec la même forte volonté avec laquelle elle avait résisté en apprenant la langue, elle commença à essayer d’apprendre tout ce qu’elle pouvait. Après 6 semaines, elle avait appris suffisamment pour satisfaire sa mère et obtenir sa permission d’aller avec eux. Lorsque le train les amenait vers Berne, Lidia doit avoir regarder avec émerveillement le paysage qui défilait en dehors de la fenêtre. Elle avait vécu toute sa vie dans le quartier bondé et sale du quartier juif de Varsovie, mais là, se trouvaient une terre conte de fées de chalets aux toits rouges, des vaches de couleur chocolat au lait broutant sur des pentes au-dessous de la sombre forêt, et déchiqueté par les Alpes enneigées à leur sommet. Et puis, enfin, il y avait Berne, avec ses vieilles tours, ses flèches et ses fontaines, et ses ‘zytlogge’ étranges du 16ème siècle, l’horloge de la ville dont les figures mécaniques sortaient de leurs boites pour annoncer chaque heure. Sous les arcades de ses rues se trouvaient des salons de thé et les étalages tentants de pâtisseries et de sucreries, et naturellement du chocolat de toute forme et de toute variété. Les Zamenhof, hôtes du congrès, restèrent dans une modeste pension appelé Beau-Site, de l’autre côté du pont Kornhaus et à une bonne distance du casino, où le congrès devait avoir lieu. Un journaliste écrivait, que voir certains d’entre eux un jour, sur le chemin de leur logement: Mademoiselle Zamenhof, Sofia, Adam, et “Oh, je n’oublierais pas - sa ‘ladyship’ de 9 ans, Mademoiselle Lidia Zamenhof, une personne très charmante et (je m’excuse) une personne très amusante”. Bien que la dernière semaine d’Août 1913, les journaux de Berne étaient remplis par l’agitation des Balkans, la révolution en Chine et au Mexique et d’autres événements inquiétants dans le monde, ils imprimèrent plusieurs articles sur le congrès espérantiste. “Bienvenue”! clamait le Bund. De toutes parties du monde, par bateau et en train, des centaines de personnes voyagent à cette heure vers la capitale de la Suisse pour le 9ème congrès mondial d’espéranto. “Ils portaient une petite étoile verte à leurs boutonnières, le signe de l’espoir, et ils parlaient le même charmant langage... L’origine ou l’extraction, la langue et la religion, ne constituent pas un obstacle pour aucun d’eux durant ces jours, alors que la langue commune et l’attitude pacifique les rends égaux et supprime toutes les difficultés qui sont communes à d’autres conventions internationales. Tous les publics et les ennemis cachés de la langue auxiliaire internationale doivent jeter un regard à cette réunion mixte... Beaucoup d’entre eux auraient soudainement une opinion différente sur l’utopie qu’ils aiment à condamner avec un sourire supérieur”. Le casino, un bâtiment d’état en grès, donnait sur le ruban vert de la rivière Aar et offrait une vue splendide des Alpes bernoises. Le lundi, Lidia était avec les congressistes qui se pressaient dans sa grande salle. Assister au congrès annuel d’espéranto sera une part importante de sa vie d’adulte, et cette première expérience fit une forte impression sur elle, alors qu’elle observait le grand respect et l’adoration des espérantistes pour son père. Lidia regardait et écoutait lorsque les applaudissements et les acclamations volèrent lorsque Zamenhof marchait vers le podium, suivi par les dignitaires espérantistes et les délégués du congrès. Au milieu des acclamations, les notes de l’hymne espérantiste, ‘L’espoir’, résonna dans les tons profonds de l’orgue, et des milliers de voix chantèrent les paroles de Louis Zamenhof: «Dans le monde a surgi un sentiment nouveau. A travers le monde passe un puissant appel ; Sur les ailes d’un vent propice, Qu’il vole maintenant de lieu en lieu. Non pas les épées assoiffées de sang ne doivent entraîner la famille humaine: A un monde éternellement en guerre Cela promet une harmonie sacrée. Sous le signe sacré de l’espérance se réunissent de pacifiques combattants. Et l’oeuvre croît rapidement Par le travail de ceux qui espèrent. Puissants sont les murs millénaires Entre les peuples, Mais les barricades têtues bondiront en dehors Mis en pièces par l’amour sacré. Sur la base d’une langue neutre, Se comprenant les uns les autres, Les peuples d’accord formeront Un grand cercle de famille. Nôtre orchestre rempli de camarades ne se lassera jamais dans le travail pour la paix jusqu'à ce que le grand rêve de l’humanité devienne la vérité d’une éternelle bénédiction.» Après que les discours de bienvenue furent donnés, une médaille d’or était présentée au docteur Zamenhof en gratitude de ses années de travail, et une fille en costume folklorique suisse offrit un bouquet de roses rouges et d’elelweiss blanche à Klara. Des applaudissements explosèrent comme un ouragan, remarqua un observateur, le public “n’épargnant ni ses paumes ni ses gosiers”. Plus tard, dehors, plusieurs centaines d’espérantistes se réunirent pour parader à travers Berne, des bannières vertes et des drapeaux nationaux volant au-dessus de leurs têtes. Avec une foule de bernois curieux qui regardaient les différentes collections d’étrangers marchant vers le parc en face du Palais fédéral pour chanter l’hymne national suisse - en espéranto. Puis ils revinrent au casino, où la famille Zamenhof se trouvait sur le balcon. Alors qu’ils se tenaient debout devant le docteur Zamenhof, ils clamaient et chantaient ‘L’espoir’. Le journal ‘Der Bund’ rapporta que le banquet officiel se tint mercredi à midi “toujours, remplissait la grande salle du casino... Une statue bien rendue du père de l’espéranto, le docteur Zamenhof, encerclé d’une guirlande de lauriers, était placé sur le podium décoré avec l’étoile espérantiste sur un fond blanc dans un arrangement de belles fleurs. L’apparition du docteur Zamenhof - il arriva avec sa femme et une petite fille blonde charmante - était salué avec un cri vivant de célébration”. Il y avait tant de discours de soirée, commentait le reporter en grimaçant, que “vous saviez réellement que vous étiez à une conférence linguistique”. C’était le premier congrès de Zamenhof en tant “qu’espérantiste ordinaire”. Des années auparavant, il avait formellement renoncé à sa position de leader dans le mouvement espérantiste afin qu’il puisse consacré son temps à l’homaranisme. “L’espéranto est maintenant si fermement établi”, disait-il à un interviewer à Berne, “que je souhaite que les espérantistes ne me regarde plus comme “chef” et “Maître”. J’ai transmis la langue aux espérantistes eux-mêmes... J’ai toujours pensé qu’il n’était pas approprié que le nom de quelque personne puisse être identifié avec nôtre mouvement. Quelqu’un pourrait ne pas aimer mes idées religieuses ou politiques, ou mon caractère personnel, et il pourrait ainsi émettre des objections à l’espéranto. Il voudrait relier tout ce que je ferais ou dirait avec la nouvelle langue ; et il est préférable pour le succès du mouvement que par conséquent, je ne me tienne pas devant les espérantistes mais parmi eux”. Néanmoins, les espérantistes ne dissimulèrent pas leur révérence - presque de l’adoration - pour le créateur de leur “langue bien aimée”. Comme l’écrit Marjorie Boulton, “le soleil lui-même encourageait les héros en adoration, car durant le banquet officiel, un spectateur de la galerie vit comment un rayon de soleil à travers une fenêtre circulaire haute rendait un halo autour de la tête de Zamenhof”. Durant la semaine, il y eut plusieurs réunions, aussi bien qu’une garden party , une soirée de théâtre et un bal costumé où l’on pouvait acheter des coeurs en forme de pain d’épice avec ‘Je t’aime’ orthographié sur eux en espéranto. Les espérantistes “chérissaient le symbole, l’étoile verte, semblait se dessiner partout, à l’amusement du cynique reporter du ‘Berner Tagblatt’. Naturellement l’étoile devait être sur le gâteau”, remarqua il. “Même les lacets de soulier ne semblaient pas être une place indue (pour l’étoile), et nous ne pouvons pas enlever la possibilité que quelque part, l’étoile verte décore la douce chair dans la forme d’un tatouage”. Un jour durant la semaine, un correspondant britannique pour un magazine religieux progressiste ‘Le Commonwealth chrétien’, interviewa le docteur Zamenhof. Zamenhof dit au journaliste qu’il sentait qu’il y avait une compréhension en augmentation de la signification interne du mouvement. ”Ses buts est de promouvoir la fraternité réelle de l’homme”, expliquait-il, “et cette idée interne est maintenant beaucoup mieux compris. Nous ne vivrons pas pour voir ses réalisations, mais je suis certain que nos enfants et nos petits-enfants récolteront ses bénéfices”. Puis le correspondant demanda: “Considérez-vous que le commandement que Abdu’l-Baha donnait récemment à ses croyants d’apprendre l’espéranto aura plus d’effet dans la propagation de la langue dans l’est ?”. Abdu’l-Baha, fils de Baha’u’llah, le fondateur de la foi baha’ie, avait souvent encouragé les baha’is à apprendre l’espéranto. La semaine du congrès, le Commonwealth chrétien avait publié l’une de ses séries d’articles sur les expériences d’Abdu’l-Baha dans la prison d’Akka. Son père, Baha’u’llah, avait été exilé de sa perse natale et finalement emprisonné avec sa famille et ses compagnons à Akka, où Baha’u’llah mourut en 1892. Après la révolution qui renversa le sultan ottoman, Abdu’l-Baha était libre. En 1911, il commença un voyage à travers l’Europe et l’Amérique du Nord en parlant de la religion établie par son père. Abdu’l-Baha et Louis Zamenhof ne se rencontrèrent jamais, bien qu’ils vinrent près de chemins croisés: en 1913, Abdu’l-Baha était en Europe depuis Haïfa, mais en Juin, il était parti pour le Moyen-Orient. En tout cas, Louis Zamenhof était évidemment familiarisé avec certains des enseignements de la Foi baha’ie, qui comprenait le principe d’une langue auxiliaire universelle. Dès 1863, alors que Zamenhof n’était encore qu’un enfant, Baha’u’llah, alors à Constantinople, avait exprimé le principe d’une langue universelle et cité la possibilité d’utiliser une langue créée pour ce but. Dans son dernier livre, écrit en 1891, Baha’u’llah décrivait l’incident de Constantinople. Adressé à Shaykh Muhammad Taqi, le fils d’un ecclésiastique shiite notoire, le livre est connu en anglais sous: ‘L’épître au fils du loup’. Dans celui-ci, Baha’u’llah raconte: “Un jour, Kamal Pasha, qui était à Constantinople, rendit visite à cet opprimé. Nôtre conversation tournait autour de sujets profitables à l’homme. Il disait qu’il avait appris plusieurs langues. En réponse, Nous observions: “Vous avez perdu vôtre temps. Il est préférable que vous et les autres officiels du gouvernement, vous vous réunissiez et choisissiez l’une des différentes langues, et de la même manière, l’une des écritures existantes, ou de créer une autre langue et une nouvelle écriture qui sera enseigné aux enfants dan les écoles à travers le monde. Ils devraient, dans ce cas, acquérir seulement deux langues, l’une, leur propre langue natale, l’autre, la langue avec laquelle les peuples du monde converseront... “Lorsque, en nôtre présence, il acquiesça et même manifesta une grande joie et une satisfaction complète. Nous lui dîmes alors de mener cette affaire devant les officiels et les ministres du gouvernement, dans le but qu’il puisse être mis en pratique à travers les différents pays. Cependant, bien qu’il retourna nous voir souvent après cela, il ne fit plus allusion à ce sujet... “... A présent, continua Baha’u’llah, en s’adressant à Shaykh Muhammad Taqi, “une nouvelle langue et une nouvelle écriture ont été inventé. Si vous le désirez, Nous vous la communiquerons...”. Dans l’intervalle entre la conversation de Baha’u’llah avec Kamal Pacha en 1863 et son épître à Shaykh Muhammad Taqi en 1891, deux langues avaient été crée et étaient utilisées: le Volapük, qui était déjà en déclin et qui mourut plus tard ; et l’espéranto. Mais ni le Shaykh ni quelqu’un d’autre ne demanda jamais à Baha’u’llah le nom des langues à laquelle il faisait référence. Baha’u’llah écrivit l’idée d’une langue universelle en d’autres occasions et incluait explicitement la possibilité d’utiliser une langue créée pour la langue internationale. L’importance qu’il attribuait au principe d’une langue universelle est évident dans son livre spécifique ‘Le Kitab-i-Aqdas’, Son Livre des lois. L’accomplissement de ce principe, affirme il, serait un signe de la “venue à la maturité de la race humaine”. Auparavant, certains baha’is avaient été attiré à l’espéranto et l ‘avait vu comme l’accomplissement des mots de Baha’u’llah. Parmi ceux qui apprirent l’espéranto du temps de Zamenhof, il y avait Agnès Alexander, qui venait d’une mission familiale chrétienne dans les îles Hawaïï et qui vécut au Japon ; John E. Esslemont, un écossais ; et Lutfu’llah Hakim et Mirza Muhammad Labib, persans. Martha Root, la baha’i américaine bien connue, qui jouera un rôle important dans la vie de Lidia, commença apparemment à étudier l’espéranto en 1912, bien qu’elle ne le maîtrisa que quelques années plus tard. Alors que “l’ordre” d’apprendre l’espéranto, que le correspondant cita au docteur Zamenhof à Berne, bien que Abdu’l-Baha ait fortement et sans cesse encouragé les baha’is d’étudier l’espéranto, la plupart des baha’is ne prirent jamais cela comme une exigence obligatoire. Cependant, selon les traductions publiées d’observations faites dans 2 discours en 1913, Abdu’l-Baha s’était adressé à une réunion espérantiste à Paris, et ses mots furent reportés ainsi dans le journal ‘Star of the West’: “Dans le monde de l’existence, une langue auxiliaire internationale est le plus grand lien pour unir les peuples. Aujourd’hui, une des principales causes de malentendus en Europe est la diversité des langues. On dit: cet homme est allemand, cet autre est italien ; puis on rencontre également un anglais et un français. Bien qu’ils appartiennent au seul genre humain, ils restent séparés à cause de la différence de langue qui dresse une véritable barrière entre eux. Si une langue universelle auxiliaire était en usage, ils se trouveraient tous unis... Louons Dieu pour cette invention du docteur Zamenhof: l’espéranto. Cette langue possède en puissance toutes les qualités pour devenir un moyen de communication international entre les peuples. Nous devons tous être reconnaissants à Zamenhof pour son noble effort ; il a bien servi l’humanité. Il a inventé une langue qui procurera les plus grands bénéfices à tous les peuples. Par la persévérance infatigable, le dévouement et l’abnégation des fervents de l’espéranto, cette langue pourra devenir universelle. Aussi devons nous l’apprendre et la répandre autant que possible afin que, graduellement, elle soit reconnue, acceptée par tous les Etats et gouvernements du monde et inscrite au programme de toutes les écoles publiques. J’espère que l’espéranto sera adopté comme langue officielle dans toutes les conférences et les congrès internationaux, afin que chacun n’ait besoin de connaître que deux langues: la sienne et la langue auxiliaire. Alors, l’union parfaite entre les peuples sera établie. ...Aussi, j’espère que vous ferez tout ce qui est en vôtre pouvoir pour que l’espéranto se répande largement. Envoyez des enseignants en Iran si vous le pouvez, afin qu’ils puissent l’enseigner aux jeunes personnes, et j’ai écrit en Iran pour dire à certains des persans de venir là-bas et de l’étudier”. Et dans un discours donné en Janvier à Edimbourg, Ecosse, sous les auspices de l’association espérantiste d’Edimbourg, ‘Abdu’l-Baha rapporta avoir dit: “Nous... avons ordonné à tous les baha’is dans l’Est d’étudier cette langue très attentivement, et avant longtemps de la propager à travers l’Est entier”. Le docteur Zamenhof répondit à la question du journaliste: “Je me sens grandement intéressé par le mouvement baha’i, car c’est l’un des grands mouvements de ce monde, qui, comme le nôtre, insiste sur la fraternité de l’humanité, et appelle l’homme à se comprendre les uns les autres et à apprendre à s’aimer les uns les autres. Les baha’is comprendront l’idée interne de l’espéranto mieux que la plupart des autres personnes. Cette idée est “sur la base d’une langue neutre qui brise les murs qui divisent les hommes et les habitue à voir leur voisin comme un homme et un frère”. Par conséquent, je crois que si les baha’is apprennent l’espéranto, ses idées internes seront une grande force morale qui les obligera à la propager... J’ai toujours trouvé que les travailleurs les plus zélés pour l’espéranto sont ceux qui apprécient son idée interne, et non ceux qui voit en elle un instrument de profit matérielle... Beaucoup de personnes ont douté que l’espéranto soit accepté par les peuples de l’Est ; je n’ai jamais fait ainsi, et je suis sûr que tous les baha’is porteront la langue dans beaucoup d’endroits, où ordinairement, les propagandistes européens ne seraient jamais allés”. Cela se révéla être vrai: des baha’is tels que Mirza Muhammad Labib enseignèrent bientôt des classes d’espéranto en Iran. Martha Root utilisera largement l’espéranto dans ses voyages de par le monde et sera l’instrument en introduisant la langue en Chine, pendant qu’Agnès Alexander sera l’une des ferventes au Japon. Quelques années plus tard, un historien espérantiste commenta: “La sympathie active des baha’is aida grandement la propagation (de l’espéranto) dans les pays d’Orient. Souvent, un espérantiste qui voyage demandait si il était un baha’i”. La relation entre les deux mouvements, baha’i et espérantiste, aura une grande signification pour Lidia dans les années à venir. Mais ce jour là à Berne, pendant que son père discutait du sujet avec le journaliste, elle était certainement plus intéressée en regardant la ‘Zytlogge’ étrange et les grands ours bruns, les mascottes de la ville, dans la fosse aux ours. Le lundi matin, les rues de Berne étaient remplies d’une pluie claire qui était tombée durant la nuit, et le brouillard de lumière s’accrochait dans la vallée de l’Aar. Mais alors que deux transports ferroviaires spéciaux quittaient Berne pour une excursion à Interlaken, le brouillard se dissipa lentement et le soleil apparût. Ils allèrent en train aux frontières de la mer Thuner et de là par bateau à vapeur à Interlaken. Il y avait tant d’espérantistes - environ 650 - que le déjeuner se tint en 16 hôtels différents. L’après-midi, dans un théâtre à ciel ouvert, ils regardèrent une représentation du ‘Guillaume Tell’ de Schiller’ et le soir un concert agréable et un feu d’artifice. “La couleur verte formait - coïncidence ou non”, rapporta un journaliste, “une grande part du feu d’artifice, et à chaque instant que l’on pouvait voir, un cri s’arrachait des gorges de la foule”. Les nuées de fusées éclairaient la douce nuit alpine comme si il faisait jour et “des feux de Bengale” remplissaient le jardin avec des couleurs changeantes. Les espérantistes retournèrent à Berne vers minuit. A l’épreuve oratoire espérantiste cette semaine, le discours d’un espérantiste français sur la “patrie” gagna le premier prix. D’autres orateurs parlèrent de l’héroïsme, du courage, de la fraternité universelle et de la peine capitale. Les espérantistes eux, chérissant les moments de Berne et souhaitant les uns aux autres “Au 10ème” retournèrent chez eux. Mais beaucoup de choses se passeront avant que les espérantistes se réunissent de nouveau dans un congrès. La patrie, le courage, la fraternité et la mort seront bientôt plus que des sujets de discussions, et les feux de Bengale et les fusées qui éclairaient le ciel dans toute l’Europe ne seront plus simplement des feux d’artifices. ================================ Chapitre 6: “Quelque chose nous guide” Dès que les Zamenhof revinrent de Berne et retournèrent à la maison, Lidia entrait en première classe de la huitième année de l’école moderne pour filles, au centre de Varsovie. Elle avait eu à passer un examen dans le but d’être acceptée. Pendant les huit prochaines années, Lidia assistera à l’école là-bas 6 jours par semaine, étudiant les science, les mathématiques, l’histoire, la géographie, les langues, la littérature et le dessin. En tant que juive, elle était exempte des classes religieuses. Un contemporain se souvient de Lidia à 10 ans en tant que brillante étudiante, obéissante et propre, et charmante “comme un ange”, avec de longues tresses blondes et un grand ruban bleu de soie noué, qui “accentuait encore plus sa nature angélique”. Enfant, Lidia était apparemment intéressée par l’art et la peinture, et elle semble avoir continuer à peindre et à faire un peu d’arts appliqués jusqu'à ses années de collège, où d’autres activités retinrent son intérêt. L’année 1914 arriva, et le docteur Zamenhof finissait sa traduction en espéranto de l’Ancien Testament’. La vieille et usée machine à écrire claquait sa mélodie monotone. De ces jours, Lidia écrivit plus tard, “je grandissais, passant des poupées aux contes de fées, des contes de fées à des histoires bien plus réalistes, elle, la machine, travaille sans cesse, retraçant de sa voix monotone la même vieille histoire. “Une nuit hivernale, lorsque après 7 ans d’effort patient, mon père finissait quelque important travail, des rires gais éclataient dans nôtre maison, des félicitations, des bavardages. La machine se tenait calmement, silencieusement, dans son petit coin. Et dans mon esprit enfantin me vint l’idée que si j’étais la machine, je me sentirais offensé par une telle négligence pendant cette nuit cérémonieuse que j’avais moi-même aider à provoquer. Mais la machine inanimée était au-dessus de la colère et de la jalousie, et le prochain, elle chantera, dans sa mélodie habituelle, un nouveau chant de travail. “Ainsi, elle travaillait sans relâche depuis plusieurs années - mais les temps heureux passaient. Et même, elle devint silencieuse, immobile contre sa volonté et contre la volonté de l’homme dont le coeur était peiné par les événements du monde extérieur”. Le 10ème congrès universel d’espéranto allait se tenir à Paris en Août 1914. Il promettait encore d’être la plus grande réunion d’espérantistes: 3739 personnes avaient été enregistré. Mais cette année, seuls le docteur et Mademoiselle Zamenhof avaient l ‘intention d’y aller. Adam et Sofia étaient enfin rentrés à la maison de Suisse pour que Lidia puisse rester à Varsovie avec son frère et sa soeur. Une association espérantiste juive internationale s’était formée et avait l’intention de tenir sa première réunion durant le congrès de 1914 à Paris. Les dirigeants invitèrent le docteur Zamenhof à y assister. Il répondit qu’il aurait assisté avec joie à la réunion, mais il déclina de se joindre à l’association. Ses convictions en tant qu’homaraniste l’empêchait de participer à toute organisation nationaliste. ”Je suis profondément convaincu”, expliquait-il, “que tous les nationalismes offrent à l’humanité seulement que les plus grandes tristesses, et que le but de tous les hommes devrait être de créer une humanité harmonieuse. “Il exprimait sa croyance que le nationalisme de races opprimées, comme réaction naturelle d’autodéfense, était plus pardonnable que le nationalisme de races opprimées, car si le nationalisme du puissant est ignoble, que le faible était imprudent ; et chaque nationalisme donne naissance et supporte les autres. Le résultat final était “un cercle vicieux de misère de laquelle l’humanité n’échappera jamais, à moins que chacun de nous ne sacrifie son égoïsme de groupe et essaye de mettre sur pied un fondement entièrement neutre”. Vers le 28 Juillet, les parents de Lidia partirent pour Paris, bien que les journaux étaient remplis par la menace de la guerre, et le sujet de la guerre était sur toutes les lèvres. L’étincelle qui avait enflammé le baril de poudre de l’Europe avait été allumée le 28 à Sarajevo, lorsque des nationalistes serbes assassinèrent l’Archiduc François Ferdinand et sa femme. Un mois s’était passé alors que les diplomates émettaient des ultimatums et mobilisaient des armes. En dépit des clairs signes que la guerre était imminente, Adam se rappela plus tard qu’à Varsovie, “généralement, on ne croyait pas beaucoup que la guerre pourrait finalement arriver, et certainement que personne ne supposait qu’elle serait si sérieuse et si longue”. Les Zamenhof voyagèrent à travers l’Allemagne et atteignirent Cologne le 1er Août lorsque l’Allemagne déclara la guerre à la Russie. Soudain, en tant que sujet de l’empire russe, les Zamenhof se trouvèrent eux-mêmes dans un pays hostile. A Varsovie, la famille commença immédiatement à s’inquiéter lorsqu’ils n’entendirent rien de la part de Louis et Klara. Les enfants étaient en vacances dans le pays mais retournèrent à la maison des qu’ils apprirent le déclenchement de la guerre. Sur l’avis de certains amis espérantistes allemands, les Zamenhof avaient abandonné leurs plans de continuer en direction de Paris et avaient décidé de revenir à la maison. Mais les frontières étaient fermées. Enfin, après un voyage poignant de 2 semaines, voyageant en distance de Suède en Finlande, bondés dans des trains sans suffisamment de nourriture, ils essayèrent d’atteindre Varsovie. Beaucoup d’autres personnes de l’empire russe, certains d’entre eux avaient pris une cure à Spa en Allemagne, se retrouvèrent eux-mêmes, comme les Zamenhof, soudainement parmi les ennemis. Mais tandis que la plupart de l’Europe était dans l’étreinte des haines nationalistes, des espérantistes aidèrent souvent d’autres camarades qui avaient échoué dans des pays hostiles. A cause de la fragile santé du docteur Zamenhof, le difficile voyage était très fatigant et désagréable. Adam se rappela, mais beaucoup à cause du ”puissant souffle moral qu’il recevait, comme si cela était, voyant la soudaine apparition de la haine entre les peuples à qui il avait prêché la fraternité”. “Il arriva à la maison”, écrivait le frère de Lidia, “avec un coeur brisé et non pas seulement dans un sens symbolique. La sérieuse maladie de coeur en fait avait commencé durant cette période triste. Découragé, il résuma son travail quotidien à Varsovie, toujours plus triste, lorsqu’il voyait que la guerre devenait toujours plus cruelle et l’espoir de sa cessation était de plus en plus incertaine”. Sofia et Adam reçurent tous deux leur licence pour pratiquer la médecine dans l’empire russe. Au début de la guerre, Sofia alla passer quelques mois à travailler sous la direction de son oncle le docteur Silbernik à Lebedin, une ville dans la région administrative de Kharhov, en Ukraine. Adam travaillait comme assistant de son père à Varsovie. Lidia était à sa seconde année d’école. Pour elle, la vie était comme d’habitude. Chaque jour, sa mère tressait ses cheveux, lui faisait un oeuf et l’envoyait à l’école. Lorsque Lidia revenait l’après-midi à la maison, elle pouvait s’attendre à des enquêtes aimables de Klara sur sa journée, si il y avait eu le travail de classe terrifiant pendant la leçon d’arithmétique. Mais son père, qui l’avait toujours aidé dans son travail, spécialement en arithmétique, était plus malade que jamais auparavant. Le coeur du docteur Zamenhof était affaibli. Après une particulièrement mauvaise attaque d’angine qui effrayait la famille entière une nuit, Adam reprit la plupart du travail de son père, prenant soin des patients pauvres qui se déversaient pour quelque conseil et quelque traitement. Par dessus, Adam ne permettait pas à son père de faire ce travail journalier fatigant à son cabinet. Maintenant Zamenhof avait ses matins de libre pour travailler sur le projet le plus cher à lui, l’homaranisme, car il voyait des malades seulement deux heures dans l’après-midi. Bien qu’il n’avait plus à s’asseoir à son bureau longtemps dans la nuit, et au désespoir de sa famille, il travaillait encore toute la journée sans repos, et souvent sans quitter la maison. Klara essaya en vain d’obtenir qu’il sorte à l’extérieur et qu’il respire quelque air frais. Mais il n’y avait aucune place convenable pour marcher dans les environs de la rue Dzika dans le quartier juif, bruyant et bondé. Pour trouver de l’air pur et de la verdure, on devait faire une longue distance par le tram ou le droskhi. La famille pensait qu’il serait bien pour Louis si il vivait près d’un jardin. En Juillet 1915, les Zamenhof déménagèrent à l’appartement 7 au 41 rue Krolewska, dans une partie convenable de Varsovie, juste en dehors du quartier juif et en face des jardins saxons et de la Bourse de Varsovie. La rue Krolewska était plutôt un large boulevard de Varsovie, bordée d’arbres, se rappela Stéphane Zamenhof. Les jardins anglais étaient un parc de bonne taille avec des lits de fleurs, des bancs pour s’asseoir à l’ombre de marronniers d’Inde, de fontaines, d’un petit lac, d’un théâtre d’été, de cafés, d’une petite orangerie avec des plantes tropicales, et beaucoup d’espace de jeu pour les enfants. Des vendeurs de sucreries vendaient leurs marchandises dans le parc, tandis que des droshkis tirés par des chevaux couraient le long de la voie. Le nouvel appartement de Zamenhof était tout à fait confortable, se souvient le cousin Stéphane. C’était “plutôt un appartement cher à cet époque, avec un ascenseur en verre extérieur qui ne fonctionnait pas toujours. Là se trouvaient plusieurs pièces, avec un énorme cabinet de consultation qui avait toute sorte de boxes sombres pour regarder dans les yeux”. Ici, le docteur Zamenhof pouvait travailler plus tranquillement et pouvait être capable d’oublier le fait qu’il ne pourrait plus accomplir autant qu’il l’avait fait auparavant. Adam s’assura que son père voyait simplement quelques patients. Bien que certains amis espérantistes vinrent le voir, l’isolation forcée était difficile à supporter pour Zamenhof. Pourtant, se souviens Adam, “mon père ne cessait jamais d’être un optimiste et jusqu’aux derniers moments de sa vie, il croyait fortement que bientôt la terrible guerre ferait place à la coopération forte et fraternelle de tous les peuples”. Au début de la guerre, Zamenhof commença à travailler sur un essai qu’il espérait, aurait aider à rendre que cela se passe. Il s’appelait “Après la grande guerre - Appel aux diplomates”. Il fut capable de l’envoyer à l’étranger et il fut publié en Angleterre, en Hongrie et en Suisse en 1915. Dans l’essai, Zamenhof appelait aux hommes d’état qui avaient refait la carte de l’Europe après la guerre. Zamenhof voyait clairement l’importance de la tâche devant eux et avertissait: “Cela dépendra de vous si le monde aura une paix durable ou peut-être à jamais, ou si nous aurons seulement une courte période de calme qui bientôt sera à nouveau interrompue par le déclenchement de nouveaux conflits raciaux ou même de nouvelles guerres”. Zamenhof demanda aux diplomates de s’assurer que chaque pays appartient équitablement à tous ses citoyens, et de voir que chaque race ait des droits égaux. Il ajouta qu’il serait préférable qu’il y ait des “Etats-Unis d’Europe” au lieu de grands et petits états, un Tribunal Européen permanent doit être établit pour régler les conflits. Il concluait: “Messieurs les diplomates ! Après la terrible guerre d’extermination qui a amené l’humanité plus bas que les bêtes les plus féroces, l’Europe attend de vous la paix. Elle n’attends un intervalle bref de paix, mais une paix permanente, comme seul il convient à une race humaine civilisée. Mais souvenez-vous, rappelez-vous, souvenez-vous que les seuls moyens d’atteindre une telle paix passe par l’abolition à jamais des causes principales de la guerre, la survivance barbare de l’Antiquité: la domination de quelques peuples sur d’autres peuples”. De plus en plus fréquemment, la maladie de coeur du docteur Zamenhof interrompait son travail à la machine à écrire, et il serait contraint de rester au lit quelques jours. “Mais”, écrivait Adam, “il ne pouvait pas rester même un jour sans travailler... Même malade, il notait dans un petit calendrier de poche ce qui était toujours trouvé dans la nuit. Et si parfois, nous voulions discrètement entrer dans sa pièce pour voir si il dormait ou si il avait besoin de quelque chose (il n’appelait jamais quiconque), nous le vîmes toujours avec un stylo dans la main”. Les jours où Zamenhof était trop malade pour travailler et était forcé de garder le lit, Lidia et Adam jouaient de la musique pour lui. Adam jouait du violoncelle tandis que Lidia l’accompagnait au piano. Lorsqu’il était suffisamment bien pour quitter la maison, Lidia pouvait aller faire avec lui une promenade en droshki dans le parc. Bien que les conditions étaient difficiles à Varsovie durant les premières années de la guerre, la vie continuait. Lidia travaillait à ses études et jouait avec ses poupées, et la guerre faisant rage en Europe était un peu plus qu’un sujet de conversation pour les adultes aux réunions familiales hebdomadaires. Mais à présent, lorsqu’elle alla à la poubelle du cabinet de son père pour retrouver les timbres multicolores de divers pays, il n’y en avait aucun. Ce fut le père de Lidia qui lui expliquait la signification de la guerre -. “J’étais un enfant de 10 ans lorsque le cataclysme se produisit”, écrivait elle quelques années plus tard. “Je ne pense pas beaucoup à la guerre, bien qu’elle avait déjà secoué le monde, déracinée beaucoup de vies, détruit beaucoup de maisons. Je jouais gaiement et m’amusait moi-même, libre. Puis mon père, dont les yeux, depuis le début de ces jours noirs, étaient toujours tristes, me fit observer comment tant de sang et de larmes coulaient dans le monde, combien tant d’enfants demandaient leurs papas”. Des années plus tard, Lidia réfléchit pourquoi son père lui avait parlé de la guerre, et pourquoi il l’avait rendue consciente de la souffrance que tant d’autres enduraient, parmi les enfants comme elle. N’aurait-il pas été meilleur de lui laisser ce coin de soleil qu’elle avait trouvé dans un monde dans lequel la lumière avait disparu ? Elle réalisa que son père ne lui avait fait penser à la guerre pour voiler son bonheur, mais pour instiller en elle “une sympathie pour la souffrance d’êtres humains, pour la déchirure et l’arrachement de l’humanité”. Ces sentiments, écrivit Lidia, “planté dans l’âme d’un enfant, grandit jusqu'à ce qu’enfin, ils portent un fruit dans l’âme de la personne mûre. Ce fruit est le sentiment de la solidarité humaine, de la fraternité de tous les hommes quelle que soit leur race ou leur pays, de l’unité de l’humanité”. Les réalisations pénibles qui, une fois qu’elles ont ébranlé la gaieté des jeux d’enfants, deviendront la force conductrice derrière le travail de sa vie, comme cela a été le cas pour son père. Ce travail sera, comme elle le décrivit plus tard: “de construire un pont entre les personnes, de les aider à s’unir sous la bannière de l’humanité”. En 1915, le plan de l’armée allemande était de chasser les Alliés du front ouest pendant qu’il envoyait ses forces principales à l’est , contre la Russie. Les lignes allemandes avançaient à travers la Pologne. En Août, Varsovie tomba. Le gouvernement russe, donnant asile aux armées allemandes, avait blâmé les juifs pour ses défaites militaires et les accusaient d’être des espions allemands. Des milliers de juifs furent déportés plus loin à l’est en Russie. Lorsque très tôt dans la guerre, des troupes russes envahirent des villes en Pologne autrichienne, des pogroms sanglants furent perpétrés contre les juifs là-bas. A Varsovie, sous l’occupation allemande, les choses n’étaient pas faciles, mais en fait elles étaient meilleures qu’elles n’avaient été sous le tsar, car les allemands voulaient avoir la population de Pologne de leur côté, contre les russes, de qui ils promettaient de les libérer. Lorsque Varsovie fut occupée par l’armée allemande, Sofia, la soeur de Lidia se trouva elle-même séparée de sa famille par le front est. Elle avait été assignée à un poste en tant que docteur dans un village à Shtepovka, un village entre Kiev et Kharkov. En Octobre 1916, une Sofia inquiète écrivit à Mademoiselle Noll qu’elle avait apprit d’un espérantiste français que son père avait été gravement malade. Elle demanda à Mademoiselle Noll de savoir ce qu’il avait. “Mais n’écrivez pas que je connais quelque chose”, disait-elle, car alors mon père n’écrirait pas la vérité. Demandez en vôtre nom à propos de sa santé et écrivez moi la vérité, je vous en prie”. Deux mois plus tard, Edmond Privat, en tant que citoyen suisse neutre, fut capable de rendre visite à Louis Zamenhof. Ce sera la dernière interview de Privat avec son mentor, qui était très malade et “pouvait seulement parler doucement”. Zamenhof confia à Privat son souhait de réunir un congrès pour créer une société universelle pour des peuples de différentes races et de religions qui se sentent elles-mêmes unies par une éthique commune et par la tolérance - la communauté homaraniste qu’il avait toujours désirée. La pensée qu’il ne pourrait jamais achever la tâche le chagrinait. “C’était le but de toute mon existence”, répétait-il. “Je sacrifierais tout pour cela”. Selon Marjorie Boulton, ”Zamenhof avertit Privat de ne pas mettre trop d’espoir dans la libération à venir de beaucoup de peuples assujettis: libérés, ils refuseront aux autres les droits qu’ils voulaient pour eux-mêmes ; et là, ils ne seront jamais en réel harmonie dans la famille humaine jusqu'à ce que tous ses membres soient libres et qu’il y ait une sorte de gouvernement mondial souverain”. E Janvier 1917, Sofia écrivit à Mademoiselle Noll sur les nouvelles tragiques que le plus jeune frère de Louis Zamenhof, Alexandre, était mort. La lettre de Mademoiselle Noll relatant cette triste nouvelle atteignit Varsovie en Avril. Cela eut un effet d’ébranlement. Alexandre Zamenhof avait été un médecin militaire durant la guerre russo-japonaise. Il avait examiné de telles souffrances parmi les blessés qu’il jura de ne prendre jamais part à aucune guerre. Lorsque Alexandre fut à nouveau ordonné dans l’armée russe, il avait donné sa propre vie plutôt que de servir dans la guerre. Les nouvelles de la mort d’Alexandre, inattendu et terrible, furent un grand choc pour Louis Zamenhof. “Bien qu’il ne se plaignait jamais, parce qu’il ne souhaitait que quelqu’un d’autre souffre lorsqu’il souffrait,”, se souvient Adam, “il apparaissait plus misérable et plus pitoyable que nous ne l’avions vu auparavant. Mais il semble que jusqu'à sa mort, il ne pensait pas à lui autant qu’à son idée bien aimée, à travers laquelle il voulait apporter du bonheur à l’humanité, et il se sentait réellement malheureux qu’à cause de sa maladie, il ne puisse accomplir plus longtemps sa tâche journalière, qui l’amènerait à la victoire”. Le 14 Avril, le docteur Zamenhof semblait aller quelque peu mieux, et le projet de recommencer son travail le reprit avec une bonne humeur. A 5h de l’après-midi, le docteur vint l’appeler et ils eurent une conversation amicale. Se sentant fatigué, Zamenhof demanda au docteur si il pouvait se reposer sur le divan. Lorsque Klara s’approcha pour aider son mari, Elle le trouva mort. Plus tard, la famille découvrit sur le bureau d’étude de Zamenhof quelques notes d’un manuscrit sur lequel il avait travaillé au moment de sa mort. Comme la faiblesse et la douleur l’avaient finalement terrassé, Louis Zamenhof s’était battu pour noter ses pensées sur un sujet qu’il n’avait jamais cité publiquement auparavant: Dieu et l’immortalité. Il reconnaissait que beaucoup de personnes qui avaient été désintéressé par la religion devenaient souvent des croyants à la fin de la vie. Les athéistes expliqueraient cela, disait-il, comme la non sincérité ou la détérioration sénile du cerveau, ou comme une dernière auto-déception face à la mort. Zamenhof prévoyait que les gens voudraient appliquer ces explications à lui. Il savait que , au moment il avait essuyé des soupçons d’être un excentrique lorsqu’il avait d’abord avancer l’espéranto, il risquait une nouvelle fois d’être considéré dément si sur son lit de mort, il commençait à parler de religion. Mais comme toujours, Zamenhof résolut d’exprimer avec honnêteté ses croyances bien que cela ne lui amenait aucune sympathie de quiconque. “Pendant que dans le monde scientifique et bien-pensant, je perdrais tout respect”, écrivait-il, “dans le même temps, dans le monde des croyants, je ne trouverais aucune sympathie de compensation, mais simplement seulement l’attaque, car ma foi est complètement différente de leur foi !...”. “Ma mère était une croyante religieuse”, écrivait-il, “mon père était athéiste. Dans mon enfance, je croyais en Dieu et à l’immortalité de l’âme, dans la forme dans laquelle ma religion de naissance m’instruisit. Je ne me souviens pas exactement en quelle année de ma vie je perdis ma foi religieuse, mais je me souviens que j’atteignis le plus haut degré de mon incroyance vers l’âge de 15 ou 16 ans. C’était aussi la période la plus tourmentée de ma vie. A mes yeux, la vie perdit toute signification et toute valeur... Tout semblait si inanimé, si inutile, sans but, si absurde ! Je vins à penser que peut-être la mort n’est pas la disparition, peut-être la mort est un miracle... Que quelque chose nous guide pour un but élevé...”. Il ne finit jamais son essai. Le 16 Avril était sombre et pluvieux. Les rues étaient noires d’une foule de personnes alors que la procession bougeait lentement en direction du cimetière juif. Le choeur chantait les anciennes prières juives, les hommes pleuraient, les femmes derrière leurs voiles noires gémissaient de douleur. Le cercueil fut descendu dans la tombe. Dans l’appartement vide rue Krolewska, la machine à écrire se tenait dans son petit coin, recouvert d’un couvercle noir. “Elle se tenait silencieuse”, écrivit Lidia plus tard, “indifférente, sans émotion - la machine”. En tant qu’enfant, Louis Zamenhof avait juré qu’une fois qu’il serait grand, il supprimerait les démons du monde adulte qui affligeaient sa ville natale Bialystock. Il avait crée l’espéranto, l’avait vu se propager autour du monde et amener des peuples différentes races, religions et nationalités sous la bannière verte de la fraternité. Maintenant, à sa mort, la fille âgée de 13 ans de Louis Zamenhof, était déterminée à poursuivre son travail sacré. Lidia avait appris l’espéranto bien à présent, et par moment durant la guerre, elle commença à faire ses premiers essais mal assurés de traduire la littérature polonaise en espéranto. Cette vieille machine, cachée par sa couverture noire, semblait presque un symbole du legs spirituel de Louis Zamenhof. “Des mois passaient”, écrivit Lidia plus tard. “Sur la petite table en chêne se trouvait la machine - fermée. J’hésitais un long moment avant d’oser relever la couverture. Et il me semblait alors que je dévoilais la couverture du cercueil... “Je commençait à taper - les lettres réverbéraient. Lentement, sans peur, comme par magie, comme quelqu’un qui se réveille après un long sommeil et demande où il est, qui sont ceux autour de lui. Et ses sons sans paroles semblaient peut-être les mots de consolation les plus touchants...”. ================================ Chapitre 7: “Images sur toile” La famille Zamenhof était plongée dans la douleur après la mort de Louis, mais Klara pris sur elle. A ceux autour d’elle, elle semblait comme une personne qui avait perdu son but dans la vie. Lidia la regardait comme sa mère veuve “soudainement, incroyablement soudainement” âgée. La douleur de la mère fit une grande impression sur sa fille, dont “les yeux d’enfants”, se rappela Lidia plus tard, “ne pouvaient pas l’aider mais voir comment tes pensées et tes souvenirs s’envolent dans le passé, aux jours heureux”. Pour le restant de sa vie, Lidia se souviendra des tristes pèlerinages dominicaux au cimetière et combien elles revenaient de ces marches “blessée et brisée”. Finalement, laissée avec la responsabilité de Lidia âgée de 13 ans, Klara se remit de son chagrin. Elle se plongea elle-même dans le travail d’espéranto, remplissait encore sa “tâche sacrée” de poursuivre le rêve de son mari. Maintenant, son but dans la vie était de voir un monument convenable élevé sur sa tombe. En 1918, la guerre se termina, et la Pologne devint une nation indépendante pour la première fois depuis plus de 100 ans. Les trois empires qui gouvernaient autrefois n’avaient pas survécu à la guerre: les empereurs d’Allemagne et d’Autriche-Hongrie étaient battus, le tsar de Russie renversé par la révolution. Mais l’indépendance amena seulement une nouvelle agitation à la Pologne. La nation avait été sous domination étrangère depuis si longtemps qu’il n’avait aucune expérience de se gouverner lui-même, et son nouveau gouvernement faisait face à de sérieux problèmes. Bien que la nation était à présent libre, elle était aussi pauvre et surpeuplée. Dans les secteurs ruraux, sa population paysanne était beaucoup plus grande que le pays ne pouvait le supporter. Des villes étaient également bondées: il n’y avait nulle part à aller pour les paysans sans terre, et que quelques industries pour donner du travail. Après que les frontières de la Pologne furent finalement fixées, le pays contenait une population qui avait seulement deux tiers de polonais. Le reste incluait des ukrainiens, des juifs, des biélorusses, des allemands, des lituaniens, des russes et des tchèques. La présence de tant de personnes qui se considéraient elles-mêmes d’une nationalité différente du reste de la population était un problème que la Pologne n’avait jamais été capable de régler. Une nouvelle fois, les juifs souffraient. La guerre était à peine terminée que les pogroms commencèrent. L’été de 1918-1919 vit des explosions féroces de violences antisémite dans 130 villes et villages, entrepris avec le soutien et la participation de soldats de la nouvelle armée polonaise. Des magasins juifs furent boycottés ; des maisons furent pillés ; des synagogues furent profanées ; des centaines d’hommes, de femmes et d’enfants furent torturés et battus ; et des nombres incalculables de personnes furent tués. Dans plusieurs villes, de grandes sommes d’argent furent extorqués de communautés juives comme amendes de prétendue déloyauté et comme prix pour la protection fournie contre la violence, une protection qui plus tard fut refusée. Comme résultat des comptes-rendus des pogroms, que les polonais déniaient, les Alliés décidèrent que, comme condition d’indépendance, la Pologne devait signer un traité garantissant les pleins droits civils et la liberté religieuse à ses minorités nationales. Beaucoup de polonais, cependant, ressentaient cela comme une insulte à l’honneur national. Le gouvernement de Pologne ne fit jamais respecter le traité des minorités et il y renonça entièrement en 1934. Après la guerre, des grands empires étaient tombés et des millions de personnes furent morte, mais la “guerre à la fin de toutes les guerres” et ses suites fâcheuses jetaient les bases pour un nouveau conflit. Les divisions territoriales faites à Versailles et l’éclatement de l’empire austro-hongrois en républiques libéra une vague de nationalisme. L’Allemagne elle-même était laissée presque intacte, mais l’attribution de territoire de Pologne - bien que cette même patrie avait été prise de la Pologne il y a longtemps - et de la terre du Rhin à la France, était profondément ressentie. La France et la Grande-Bretagne étaient déterminées à avoir une revanche sur l’Allemagne, de la presser “jusqu'à ce que les pépins sortent”. Mais les conditions humiliantes de paix et les réparations de guerre impossibles demandés aux allemands défaits, aussi bien que les crises économiques et les troubles politiques balayant le pays démoralisé était plus que le faible nouveau gouvernement de Weimar ne pouvait supporter. Dans les années chaotiques qui suivirent, l’amer ressentiment de l’Allemagne trouva son expression dans un nationalisme farouche et un antisémitisme virulent, et la scène était prête pour l’ascension d’Hitler. En Pologne, les combats ne finissaient pas avec l’armistice qui amena la fin de la grande guerre. Bien que la nation ait été déclarée indépendante, ses frontières n’étaient pas encore immédiatement décidées. Un état de guerre existait avec le voisin de la Pologne, le nouvel état communiste de l’union soviétique et des troupes polonaises se heurtèrent avec l’armée rouge. En 1919, Adam Zamenhof fut appelé pour servir en tant que docteur militaire dans l’armée polonaise. L’année suivante, Sofia, encore en Ukraine, était mobilisée dans l’armée rouge en tant que docteur de régiment. Dans un tragique sort ironique, les enfants de Zamenhof se retrouvèrent eux-mêmes à servir dans les armées militaires les uns avec les autres. A u printemps de 1920, l’armée polonaise avançait à l’est de l’Ukraine à Kiev. Des troupes soviétiques commencèrent à repousser les polonais et contre-attaquèrent jusqu'à ce qu’en juin, Varsovie elle-même fut en danger d’invasion. Mais en Août, l’armée rouge était stoppée sur les rives de la Vistule et refoulée. Ce ne fut pas moins de 2 années plus tard qu’Adam et Sofia furent tous les deux libérés du service militaire et autorisés à revenir chez eux. Adam reprit son exercice de médecine. Les patients de son père l’acceptèrent à la place de leur docteur bien-aimé, et Adam fut capable de subvenir aux besoins de sa mère et de sa plus jeune soeur Lidia. Sofia retourna à Varsovie fatiguée et faible. Les conditions terribles qu’elle avait vécu pendant des années avait épuisé sa force: elle avait eu le typhus à trois reprises. Lorsque qu’elle recouvra sa santé, elle commença à pratiquer la médecine interne et la pédiatrie dans un hôpital. Enfin la famille Zamenhof était de nouveau réunie, et Lidia, Sofia et Adam vivaient sous le même toit avec leur mère. Quelques années plus tard, le cousin Stéphane Zamenhof, qui était aussi le filleul de Klara, se rappelait de Lidia, Adam, et Sofia comme ils étaient à cette époque. Sofia était, disait-il, “la physicienne officielle de la famille. Toutes les fois que quelqu’un dans la famille était malade, Sofia arrivait, spécialement pour les enfants”. Elle avait ”des cheveux court et une voix plutôt grave.. Elle ressemblait à un médecin bolchevique typique - énergique, masculin, et elle avait de bonnes manières avec les enfants ; ainsi nous étions gentils de lui faire peur. Mais elle était une personne très gentille”. Adam était petit et mince, et, se rappelle Stéphane Zamenhof, “très gentil et très intelligent”. En 1923, Adam se maria avec le docteur Frankel, également ophtalmologiste, qu’il connaissait depuis l’enfance. Elle avait été inspiré par Louis Zamenhof d’étudier l’ophtalmologie. Adam devint absorbé dans son champ médical, écrivant des livres et des articles scientifiques sur les maladies des yeux. Il était l’un des premiers chirurgien à faire des opérations sur la rétine et devint hautement respecté pour sa recherche, devenant finalement un docent (un professeur associé) à l’université de Varsovie - un accomplissement remarquable du temps où les juifs avaient été exclus des universités polonaises. Lidia, en tant qu’adolescente, était de constitution mince et “pas du tout belle”, se rappelle Stéphane, “mais elle avait un visage intéressant”. Stéphane se rappela que sa cousine Lilka était “toujours occupé à traduire la littérature en espéranto... Elle croyait qu’elle avait une mission dans la vie, de son père, de propager l’espéranto”. C’était attendu, se rappelle Stéphane, que les enfants de Zamenhof étudieraient pour devenir docteurs - ou du moins dentistes ou pharmaciens. “C’était si enraciné que tout le monde devait être docteur - chacun était un docteur - que les rebouteux et les livres étaient passés d’un membre de la famille à un autre, dépendant de ce qu’il avait étudié à l’école de médecine”, disait-il, Dans la génération de Lidia, les Zamenhof, Adam, Sofia, et les cousins Jules et Mieczyslaw, le frère de Stéphane, devinrent des médecins. Plusieurs autres cousins devinrent dentistes. Stéphane se rappela se sentir comme un proscrit car il était d’une école polytechnique, n’ayant pas étudier la médecine. Finalement, cependant, il devint professeur de microbiologie et d’immunologie en Amérique. A l’inverse de son frère, de sa soeur et de ses cousins, Lidia ne montra aucun penchant à devenir un médecin, et les livres médicaux ne l’intéressèrent pas. Si elle avait jamais voulu suivre la tradition familiale de la médecine, ou si elle se sentit proscrit, comme son cousin, par ce qu’elle ne faisait pas ainsi, elle ne le dit pas. Il y aura encore quelques années avant que Lidia trouve réellement ce qu’elle veut faire - un métier qui lui permettra de poursuivre sa mission de propager l’espéranto. La mère de Lidia, cependant, avait des idées précises sur ce qu’elle voulait pour l’avenir de sa fille. Klara souhaitait qu’elle étudie le droit et devienne peut-être une juriste. Aucun Zamenhof ne l’avait encore fait. Klara souhaitait sûrement pour sa fille d’avoir une longue vie et sa propre famille. Mais rien de tout cela ne sera le lot de Lidia. Dans un souvenir à propos de sa mère que Lidia écrivit plus tard, elle fit allusion de manière mélancolique aux rêves de Lidia, rêves qui ne se réaliseront jamais. “Vos souhaits n’étaient pas exaucés”, écrivait-elle, “et vous peignez sur la toile de l’espoir des images à laquelle la destinée n’ajoutait pas sa signature”. Ce que ses images étaient, Lidia ne le révéla jamais. En 1921, à l’âge de 17 ans, Lidia finissait la 8ème année de l’école moderne pour fille. Elle reçue de bonnes - mais pas excellentes notes en chimie, en physique, en astronomie, en sciences naturelles, en Latin, en allemand, en histoire et en dessin ; et des notes satisfaisantes en polonais, en français. En Novembre 1922, certaines églises tinrent des jours d’actions de grâce parce que le “président des juifs avait été tué”. A l’université de Varsovie, Lidia avait à faire face à la laide réalité de l’antisémitisme, qui était à son apogée dans les années 1920. Parce que les juifs estimaient traditionnellement l’éducation, ils travaillaient dur pour rentrer à l’université. Ainsi, il y avait un plus grand nombre de juifs dans les universités en proportion de leur population. Courroucés par cela, des étudiants polonais antisémites et des partis politiques nationalistes appelaient à la restriction du nombre d’étudiants juifs. La même année, Lidia entrait au collège. Des quotas limitant les juifs étaient introduits à l’université polonaise de l’école de médecine et de droit. Bien que ce quota fut abattu, l’agitation antisémite continuait dans les universités, et des quotas officieux furent introduits quelques années plus tard. “En tout temps et dans toutes les universités”, établit Celia S. Heller plus tard, “des étudiants juifs étaient harcelés, humiliés, et attaqués par certains de leurs élèves camarades polonais et des aides de groupes terroristes antijuif en dehors de l’université”. 7 années avaient passé depuis la mort de Louis Zamenhof, et de nouvelles tombes entouraient à présent son humble place e repos dans le cimetière juif. Parmi toutes les grandes pierres tombales, la sienne était le plus simple modèle. Les espérantistes avaient organisé un comité international de collecte de fonds pour élever un monument, et un comité local à Varsovie pour arranger sa construction. Ils choisirent un modèle simple crée le sculpteur de Varsovie M.Lubelski ; des blocs de granite surmontés par un globe du monde. Le monument fut sculpté à Aberdeen, en Ecosse, d’un granit gris écossais. Klara fut désespéré lorsque à l’été 1924, il n’était pas encore complété. Klara Zamenhof avait essayé de poursuivre le travail d’espéranto de son mari aussi bien qu’elle le pouvait. Pendant des années, elle maintena sa correspondance avec les espérantistes, mais finalement elle devint si malade pour répondre à la montagne de lettres qui continuait à arriver de par le monde. Chaque année, elle assistait aux congrès espérantistes, et cela devint une tradition de la saluer cérémonieusement à la cérémonie d’ouverture. En Août 1924, Lidia accompagnait sa mère, qui était maintenant très malade, souffrant d’un cancer ouvert, au 16ème congrès universel d’espéranto à Vienne. Plus de 3000 espérantistes étaient là. Le dimanche 10 Août, le congrès s’ouvrit dans la maison du concert. L’un des orateurs était Edmond Privat Il parla du passé de Vienne, lorsqu’il y a des siècles, des rois médiévaux partis au combat se réunirent dans la cathédrale de Saint Stéphane. “En ces jours, des rois font la guerre par la force. Mais les temps ont changé”, disait-il. “Le monde en guerre avait tué non seulement des millions de jeunes, il a aussi mis fin à une royauté ancienne, de l’ancien temps. “Une nouvelle ère, une nouvelle époque a commencé”, disait Privat. “Et aussi une nouvelle chevalerie”. La chevalerie de la nouvelle ère n’est plus les héros de force et d’armes. Ils ne sont plus recouverts d’argent brillant ou d’armures en or. Leurs mains ne tiennent plus des armes en acier. Les nouveaux héros sont les chevaliers de l’idéal et de l’amour pour l’humanité. Leur force, l’esprit ; leurs armes, des convictions et l’exemple. “La force mystérieuse, que Zamenhof déclame, qui les unit et les envoie à travers le monde entier pour accomplir leur tâche et amener l’humanité vers plus de lumière, plus de paix, plus de justice. Nôtre tâche est très clair: nous devons tuer le dragon noir de l’incompréhension parmi les peuples, nous devons propager cette langue dans laquelle réside l’esprit jeune de la nouvelle humanité”. Sans nulle doute, Lidia fut touché par les mots de l’orateur principal de l’espéranto, l’élève de son père. On pourrait imaginer qu’elle se sentait, comme les espérantistes l’était toujours, inspirée par ses exhortations à aller de l’avant et remplir leurs tâches sacrées. Peut-être, lorsqu’elle parlait, elle pensait même: elle serait l’un de ces chevaliers de la nouvelle ère, armée de l’esprit et la langue de Zamenhof ; elle irait de l’avant pour tuer le dragon noir et amener l’humanité vers la lumière de la compréhension. En tout cas, ce fut là-bas à Vienne, que Lidia commença à occuper un rôle public dans le mouvement espérantiste. Elle assista à beaucoup des réunions spécialistes au congrès et prit part à la réunion des élèves espérantistes, où elle fut choisie pour servir en tant que secrétaire de l’association internationale d’élèves espérantistes. Mais ce fut à la session finale de travail qu’elle fut présente et que ses convictions furent connues. Une proposition avait été présentée au congrès demandant que touts puissent accepter les opinions de l’académie de l’espéranto et le comité de langage concernant les changements dans la langue. Jamais depuis la mort de Zamenhof, il avait été crucial que l’autorité des institutions linguistiques soit respectée dans le but de garder l’intégrité de la langue. Vasily Eroshenko, un russe aveugle expatrié qui enseignait à l’université de Pékin, exprima son opinion que pendant que l’académie doit contrôler l’évolution du langage, elle doit permettre à cette évolution d’arriver. L’académie était trop conservatrice, sentait-il, et ne respectait pas suffisamment l’usage et les préférences des personnes. La discussion continua, des personnes différentes offraient leurs visions sur le sujet. Puis, probablement à l’étonnement de beaucoup dans le public, une femme mince, pâle se leva pour parler. C’était Lidia. Elle affirma que plusieurs des intervenants confondaient l’évolution avec l’anarchie. L’évolution de la langue pourrait réussir, disait-elle, seulement si elle était limitée par une certaine dose de discipline. Il n’est pas difficile d’imaginer qu’il y avaient des sourires indulgents dans la “Maison du concert” aux mots dépassionnés de la jeune élève universitaire, Mademoiselle Zamenhof. Mais Edmond Privat, enfin, pourrait avoir été rappelé de façon poignante de l’idéalisme de l’autre Zamenhof en tant qu’élève: le père de Lidia. Les espérantistes apprendraient bientôt qu’ici il y avait une autre Zamenhof qui parlerait de son esprit et exprimerait ses convictions ouvertement et sans peur. Comme elle le fit en ce jour à Vienne, Lidia incitera toujours à l’unité et avertira contre ce qui pourrait mener à la division ou au schisme dans le mouvement espéranto. Klara s’était battue bravement à travers le congrès, bien qu’il était évident qu’elle était dans une grande souffrance. Sur le chemin de la maison, elle passa des semaines dans une station thermale en Tchécoslovaquie. Le traitement ne lui fit pas du bien ; elle retourna à la maison sérieusement malade et fut confinée au lit. Les docteurs décidèrent d’opérer mais bientôt cela se révéla futile ; le cancer s’était propagé trop loin. Lidia regardait la détresse de sa mère sans pouvoir l’aider. “La mort commençait à vous recouvrir avec le voile de l’inconscience avant que vôtre coeur ne s’arrête”..., se rappela Lidia plus tard. “Perfide maladie - qui révélait son visage malveillant lorsque la fuite n’est plus possible. Et cloué dans vôtre lit de souffrance, vous attendez la mort car, oui, vous étiez conscient à la fin que c’était vôtre dernière maladie”. Début décembre, un mot atteignit Klara que le but pour laquelle elle avait travaillé serait finalement atteint: le monument pour la tombe de Louis Zamenhof avait été complété et était sur le chemin de Varsovie. Klara ne vécu pas pour le voir mis en place: elle mourut le 6 décembre 1924. Son dernier souhait était d’être enterré à côté de son mari. “Vous êtes partis”, gémit Lidia, “vous quittez vôtre corps usé, que nous confions à la terre. Puisse la terre être éclairé sur vous... et puissiez-vous être heureux dans le monde où il n’y a aucune souffrance. C’est ce que vôtre fille, à l’heure du souvenir, souhaite pour vous”. Une nouvelle fois, une procession funéraire serpenta à travers les rues du quartier juif de Varsovie, descendant rue Dzika puis en direction du cimetière. Une nouvelle fois, les gens en deuil écoutaient l’oratoire de Léo Belmont, suivi par 9 autres. Les prières étaient entonnées ; le cercueil glissait en descendant. Les versets de ”l’Espoir”, chanté avec tristesse, étaient poussés vers le ciel d’hiver. Une nouvelle fois, la terre était entassée et amoncelée de couronnes de fleurs. ================================ Chapitre 8: “Genève” Le mouvement espérantiste s’était rapidement reconstruit lui-même après la dévastation de la Grande Guerre. En tant que vague d’espoir renouvelé pour la paix et comme une conscience de propagation internationale, l’espéranto gagnait de la reconnaissance, du respect et l’acceptation de son utilité. Mais le chemin était encore rocailleux. Dans certains pays, le nationalisme continuait de retarder le progrès de l’espéranto, pendant que dans le mouvement, un désaccord sur la question de la neutralité divisait les espérantistes. Comme résultat de cours hautement réussis dans divers pays, l’espéranto s’était propagé dans les cercles socialistes. Mais les dirigeants parmi eux désapprouvaient la neutralité politique traditionnelle du mouvement espérantiste et sentaient que l’espéranto devait être utilisé ouvertement comme outil de combat de classe. En 1921, ils se détachèrent du mouvement “neutre”, formant un mouvement de travailleurs espérantistes radicaux. Le schisme donna à l’espéranto un sérieux coup à l’intérieur et à l’extérieur. Des extrémistes de droite en dehors du mouvement, suspicieux et quelque part, “internationaux” de caractère, apeurés par la force, ouvertement de droite du mouvements de travailleurs, accusèrent l’entier mouvement espérantiste de tendances dangereusement révolutionnaires. Après la guerre, lorsque la Ligue des Nations fut créée, beaucoup d’espérantistes espéraient que ce nouveau corps international, qui partageait les buts de l’espéranto de coopération internationale et de paix, reconnaîtrait les bénéfices que la langue de Zamenhof avait créée, et peut-être même l’adopterait-elle. Les espérantistes avait justement la personne pour présenter leur cas - le distingué Edmond Privat, qui finalement servit comme membre de la délégation perse. L’affaire fut apporté devant la Ligue en tant que résolution exprimant l’espoir que l’espéranto puisse être enseigné plus largement dans les écoles, “dans le but que les enfants de toutes nations de nos jours connaissent au moins deux langues, leur langue natale et des moyens faciles pour une communication internationale”. Mais les délégués de France s’opposèrent avec colère, considérant même l’affaire, revendiquant qu’ ”il y a déjà une langue internationale, - le français”. Finalement un rapport favorable sur “l’espéranto en tant que langue auxiliaire internationale” fut préparé par le secrétaire général de la Ligue. Le rapport trouva la langue être largement utilisé internationalement et affirmait que l’espéranto était plus facile à apprendre que tout autre langue. Son emploi était encouragé dans les écoles. Mais la délégation française objecta encore, agissant sur les ordres de son gouvernement pour opposer tout autre langue que le français. A la fin, l’affaire en était référée à la Ligue du comité de la coopération intellectuelle, qui refusa de recommander l’espéranto parce qu’il craignait que l’apprentissage d’une langue auxiliaire découragerait les gens d’étudier des langues nationales. Largement sous la pression du nationalisme français, la Ligue des Nations laissa l’affaire en suspens. Zamenhof n’aurait pas été surpris. En 1891, il avait prévenu les espérantistes de ne pas attendre d’aide de personnes importantes ou de gouvernements dans la croyance que l’espéranto dépendait d’une telle assistance. Au contraire, Zamenhof avait dit qu’ils prendraient note seulement après que le mouvement devint leur propre succès. Bien que la Ligue des Nations ne voulait pas la reconnaître comme une langue auxiliaire internationale officielle, l’espéranto avait gagné reconnaissance et soutien dans d’autres endroits. En 1924, la Perse (sans doute à travers Edmond Privat) présenta une résolution que l’espéranto soit reconnu comme une “claire langue” pour la télégraphie, qui était unanimement acceptée par la Ligue des Nations aussi bien que par l’union universelle du Télégraphe. Le bureau international du travail, qui était soutenu par la Ligue, commença à utiliser l’espéranto, comme le firent diverses organisations commerciales et scientifiques. Plus tard, l’Académie française des sciences passa une résolution soutenant l’espéranto. Bien que la structure fondamentale et la grammaire de l’espéranto restait inchangées de la forme dans laquelle Zamenhof l’avait tout d’abord établi, comme la langue était utilisée de manière croissante, elle grandit en vocabulaire. La première liste de mots de Zamenhof contenait environ 900 racines ; en 1930, un dictionnaire d’espéranto contenait 3800 racines, de laquelle 40000 mots pouvaient être formés. Mais l’espéranto était devenu beaucoup plus qu’une langue. C’était un mouvement culturel complet avec des institutions locales, nationales et internationales, sa propre histoire et des traditions entretenues. «L’utilité pratique et commerciale” de l’espéranto avait reçue une nouvelle tendance comme cigarettes “espérantistes”, faites en Ecosse, venues sur le marché (“La fumée internationale”, criait la publicité -), et en Angleterre, on pouvait acheter des chocolats Cadbury “espérantistes” aux confiseurs locaux. Plus important, et beaucoup plus durable, l’espéranto avait sa propre littérature. Dans les premières décennies de la vie de l’espéranto, une grande quantité de littérature avait été traduite dans la langue internationale, pas simplement de langues européennes occidentales, qui partageaient des racines linguistiques avec l’espéranto, mais du chinois, du japonais, de l’arménien, du hongrois, du russe et du polonais, parmi d’autres. Le travail des traducteurs avait montré le potentiel de l’espéranto pour l’expression littéraire, aussi bien que son aptitude à faire une diversité de langues nationales accessibles à un public international considérable à travers une simple traduction. Après la 1ère Guerre Mondiale, la littérature originale de l’espéranto commença à fleurir. Plusieurs “écoles” littéraires poussèrent, la plus importante de celles-ci était l’école de Budapest, dont les figures importantes étaient deux hongrois: le poète Kalman Kalocsay, un médecin médical de profession ; et Julio Baghy, un poète, romancier et acteur. Le journal littéraire de l’école de Budapest était (Le monde littéraire), qui publia certaines des courtes histoires de Lidia durant les années 30. Après la mort de Klara, les espérantistes espéraient que les membres de la famille Zamenhof continueraient à prendre part personnellement au mouvement espérantiste. Tandis que personne ne pourrait remplacer Louis Zamenhof dans leurs coeurs, certains espéraient qu’Adam poursuivrait le travail de son père comme il avait marché sur les pas de son père en médecine. Adam connaissait bien la langue et avait été actif dans le mouvement durant ses années scolaires, traduisant des mots de Pushkin et aidant son père avec le courrier et l’annuaire des espérantistes. Mais à présent, le cabinet médical ne lui laissait pas de temps pour les activités espérantistes. Sofia connaissait aussi l’espéranto couramment. Comme son frère, pendant qu’elle grandissait, elle avait aidé son père, particulièrement avec sa bibliothèque. Bien qu’elle se tenait informée sur le mouvement et allait aux congrès annuellement, elle était trop occupée avec son cabinet médical. Brièvement après la mort de Klara, un espérantiste de Varsovie, Edouard Wiesenfeld, publia une collection de croquis de la famille Zamenhof appelés Galerie de Zamenhof. Débutant en Janvier 1925, elle s’exprime en feuilletons dans le journal international d’espéranto “Heroldo de espéranto”. Dans celui-ci, Wiesenfeld réprimande poliment le jeune Adam Zamenhof de ne pas reprendre le rôle de son père dans l’espéranto. Il se lamentait aussi que Sofia ”ne prenne pas activement part à la vie espérantiste”. Dans l’édition du ‘Heroldo’ de février 1914, le chapitre sur Lidia apparaît. Wiesenfeld, qui avait été présent lorsque Lidia parla au congrès de Vienne, décrivit la “Mademoiselle Lili” de 21 ans, “de caractère et de tempérament...typiquement zamenhofien, seul quelque chose de non raffiné, qui s’expliquait par sa jeunesse... “L’espéranto l’intéresse”, écrivait Wisenfeld, “et elle la seule enfant Zamenhof active dans la langue internationale... Après son retour de Vienne, sa ferveur pour l’espéranto crût même davantage, et nous espérons avoir en elle l’un des pionniers les plus fervents de la cause espérantiste sur le sol polonais”. La conclusion perspective de Wiesenfeld était: “La plus jeune, mais la plus prometteuse”. On s’étonne ce qui pourrait lui avoir appelé Lidia “non raffinée”. Peut-être cette indépendance d’esprit qui la rendait un enfant déterminé et parfois obstiné semblait maintenant aussi franche et affirmée pour une jeune femme. Bien que Wiesenfeld excusait ses côtés frustres comme un signe d’immaturité, Lida semblait avoir été une jeune femme sérieuse qui était profondément concernée par les questions les plus importantes de l’époque, et qui avait un petit usage pour des recherches frivoles. Avant l’été 1925, les tresses blondes de l’enfance étaient partie. Elle avait un menton marquant, saillant, qui accentuait son air de détermination. Lida avait fini ses études à l’université de Varsovie. A l’automne, elle passa ses examens et reçue le diplôme de Juge-Magistrat - Maître de droit. Mais en Pologne, un diplôme en droit ne mène aussi directement à un métier qu’un diplôme en médecine. L’association du barreau polonais était strict au sujet de l’admission de juifs - très peu étaient acceptés. Si elle voulait poursuivre une carrière de juriste, elle aurait à travailler dans un bureau de droit pendant plusieurs années avant de pouvoir commencer à pratiquer. Parce que étudier le droit avait été l’idée de sa mère, et qu’elle ne voulait pas devenir juriste, elle ne donna probablement peu d’intérêt à l’idée. Peut-être cet été, lorsqu’elle se préoccupait sur ses examens finaux et le graduation anticipée, elle se demandait ce qu’elle pourrait faire après. Lidia ne semble jamais avoir considéré simplement de se marier et d’avoir des enfants. A cette époque, naturellement, il était tout à fait inhabituel pour une femme d’avoir un autre but que de devenir une femme et une mère. Si une femme décidait de ne pas choisir de travailler dans une profession, ce choix exigeait habituellement un précédent mariage, comme il était généralement cru qu’une femme ne pourrait avoir à la fois une famille et une carrière. Dans la maison Zamenhof, cependant, il semblait avoir été espéré que chaque personne fasse une sorte de travail qui était de servir l’humanité, et dans la famille étendue Zamenhof, il y avait plusieurs familles à 2 carrières - souvent à la fois les épouses étaient doctoresses. Pourtant, ni Sofia ni Lidia ne se marièrent. Cela n’était pas aussi inhabituel dans le clan Zamenhof. Plusieurs années plus tard, la femme de Julien, le docteur Zamenhof, se rappela qu’il y avait au moins 6 femmes Zamenhof qui n’avaient pas voulu du tout se marier. Maîtresse de maison n’intéressait pas Lidia, qui n’avait jamais appris à cuisiner - elle se décrivait elle-même comme “complètement inapte” à cela. La vie de l’esprit et le travail pour les idéaux de Zamenhof était bien plus importants pour elle. Mais contrairement à Sofia, qui avec ses manières brusques et son apparence, était, comme son cousin la décrivait, un peu décourageante, probablement, aux hommes”. Lidia n’était pas non féminine en tout. Elle avait une grande tendresse, et une grande sympathie pour la condition de la femme. Bien qu’elle n’était pas belle dans le sens habituel, Lidia avait une beauté intérieure qui attirait ceux la rencontrait ; certainement que beaucoup des jeunes hommes espérantistes auraient été honoré de se marier avec la file de Zamenhof. Encore peut-être que le seul fait qu’elle soit la fille du Maître faisait que les personnes avaient peur de l’approcher. D’un bout à l’autre de sa vie, bien que beaucoup l’admirait et la respectait, peu de personnes ne devinrent réellement jamais proche d’elle. En une occasion, Lidia confia à un ami qu’une fois elle avait “perdu son coeur , mais que c’était tout ce qu’elle révéla de cela. Isaj Dratwer se rappela plus tard que “nous, espérantistes - alors de jeunes hommes - étions habitués à dire que Lidia avait seulement un amour, qui est la langue espéranto !”. Avec les années, l’espéranto était devenu en fait le grand amour de Lidia. Elle était devenue un membre actif de Concorde, une société espérantiste de Varsovie, et certains se souviennent d’elle comme son “esprit guide”. Jamais depuis le congrès de Vienne elle n’avait servi comme secrétaire de l’association internationale d’étudiants espérantistes, aidant à dresser ses arrêtés. Durant la guerre, Lidia avait commencé à traduire la littérature polonaise en espéranto. Jusqu'à maintenant, elle n’avait pas essayé de publier ses traductions, ne les pensant pas assez bonnes. Elle n’avait pas abandonné, mais avait tenu à améliorer ses talents de traduction. Enfin elle avait quelque chose qu’elle était prête à publier: une série de 5 courtes histoires de l’auteur polonais Henryk Sienkiewicz. Cela parut l’année où elle finissait l’université, publié dans un mince volume (octave) par Hirt et Sohn de Leipzig, Allemagne. Le critique du ‘Monde Littéraire’ était enthousiaste, appelant la traduction de Lidia “distinguée et remarquable”. Il ajoutait que “ce ne serait pas une surprise si la première édition s’écoulerait rapidement, car le jeune travail mérite l’attention de chaque amoureux de la littérature”. L’enfant qui s’était autrefois entêté à apprendre l’espéranto avait grandi pour voir dans la langue plus que simplement un legs familial. A travers l’exemple de son père, et son instruction attentionné et douce, ses idées et ses croyances - l’idée interne de l’espéranto - avait pris racine dans le coeur de Lidia. En tant qu’enfant, elle avait vu le résultat des pogroms, de la guerre et l’occupation de son pays. En tant que jeune femme dans son adolescence et comme élève universitaire, elle avait observé les séquelles des souffrances de la guerre, favorisant l’injustice et la revanche. - toutes les choses dont son père l’avait prévenu - et elle croyait que la paix ne viendrait pas jusqu'à ce qu’il y ait la fraternité et la justice parmi tous les peuples du monde. Mais cela ne pourrait arriver tant que ils ne pourraient communiquer les uns avec les autres. L’espéranto, croyait-elle, fournirait les moyens idéaux pour cela. Bien que Louis Zamenhof soit devenu convaincu que l’unification de l’humanité viendrait seulement à travers une religion mondiale, Lidia, à 21 ans, n’était pas intéressée par la religion. De son propre récit, elle avait cru en dieu en tant qu’enfant, mais elle avait perdu cette foi. En 1925, Lidia Zamenhof était, comme elle le décrivait elle-même, “une athéiste”. En tant que jeune femme sensible, Lidia doit avoir ressenti profondément le conflit d’identité nationale qui troublait beaucoup de juifs polonais de familles non religieuses. Elle s’identifia elle-même comme juive, bien que séculaire. Bien que Lidia se décrivait elle-même officiellement par le mot polonais (de confession juive), qui était préféré au littéral (juif) par ceux qui souhaitaient être eux-mêmes culturellement à distance de la joaillerie polonaise orthodoxe, elle dédaignait ces juifs qui reniaient leur affiliation juive et qui essayait de “passer” en tant que Gentils, parfois même en se convertissant au catholicisme pour essayer de continuer leurs carrières. Pourtant, Lidia aimait aussi la Pologne, et ressentait une grande affinité pour la littérature polonaise. Parmi les espérantistes de Pologne entre les guerres, la majorité étaient juifs. Il y avait des exceptions notables, bien qu’elles étaient peu nombreuses. La plupart des polonais étaient insensibles envers l’espéranto. Fièrement patriotes, ils se souvenaient encore du temps sous la domination étrangère lorsque les langues d’autres nations leur avait été imposé. On aurait pu espérer qu’ils comprennent le besoin d’une langue auxiliaire neutre, mais l’attitude générale à cette époque en Pologne était “inamicale”, se rappela Eugène Rytenberg, qui enseignait l’espéranto à Varsovie durant les années 1930. La plupart des polonais considéraient l’espéranto “une affaire juive”, dit Lidia plus tard, et ils veulent ne rien avoir à faire avec ce la. Mais dans le mouvement international espérantiste, Lidia rencontra des personnes de par le monde, certains de pays qui il y a peu de temps, menaient une guerre amère les uns contre les autres. Pour la plupart des espérantistes, les différences de nationalité ou de religion signifiaient peu. Même si ils ne partageaient pas tous une croyance fervente dans “l’idée interne”, au moins ils se considéraient eux-mêmes frères et soeurs dans nôtre cher langage. Parmi les espérantistes, Lidia était chez elle. Le 17ème congrès universel d’espéranto allait se tenir à Genève, en Suisse. Lidia alla avec sa soeur Sofia. Des années plus tard, elle se souvint: “Lorsqu’à l’été 1925, je pris le train pour aller de Varsovie à Vienne et de Vienne à Genève dans le but d’assister au congrès espérantiste tenue cette année dans la ville des Nations, je n’imaginais pas que chaque tour de roue m’amènerait plus près d’un contact qui allait signifié la Vie pour moi. Après deux nuits blanches, Lidia arriva à Genève. La ville était juste recouverte par une vague de chaleur, et le dimanche 1er Août était beau. Comme c’était le jour national suisse, cette nuit les quais alignés d’arbres le long du lac Léman étaient fêtés de lumières, de musiques, et de feux d’artifices grondant au-dessus du lac, reflétant leurs couleurs à sa surface. A 8 h la nuit vibrait comme toutes les cloches dans Genève carillonnent en fête. Les espérantistes, se divertissaient de leur “soir tout ensemble”, flânaient dans l’université de la Promenade des bastions, les jardins décorés de lumières, tandis que les musiciens les distrayaient. A Genève, des articles de journaux avaient étaient apparus sur le congrès deux semaines avant son début, et juste avant que la réunion n s’ouvre, ‘la Tribune de Genève’ avait imprimé un long article sympathique sur l’espéranto. “Il n’est plus temps de plaisanteries faciles et de sottises anti-espérantistes”, écrivait le journaliste. “Aujourd’hui, ceci est laissé à l’ignorant, car c’est dans des cercles sérieux, ou de personnes pratiques...ou des universitaires et des érudits... que l’espéranto compte ses champions les plus fervents”. Nombre d’employés de la Poste de Genève et de gendarmes avaient étudiés l’espéranto afin qu’ils puissent assister les milliers de participants espérés assister au congrès. Les gendarmes parlant l’espéranto pouvaient être reconnus - comment autrement ? - par une étoile verte brodée sur la manche de leurs blouses. Le dimanche, le jour que le congrès commença, Genève était voilée par du ciel gris qui versait de la pluie toute la journée. Mais au moment de l’ouverture de la cérémonie, la pluie cessa. A 8h la foule remplie l’opulente salle Victoria. Après les discours de bienvenue, Edmond Privat se leva pour parler. Il se souvint du public dans la même salle, 9 ans plus tôt. Louis Zamenhof leur avait parlé non pour blâmer quelque pays ou personnes, mais plutôt de l’obscurité qui cause à l’homme d’agir envers les uns les autres de manière si bestiale et sauvage. “Faisons entendre la lumière de la compréhension mutuelle, mettons en avant la lumière de la connaissance mutuelle et de la camaraderie”, disait Privat, “ce sont les mots de Zamenhof au congrès de Genève. Et lorsque je me souviens que, je pense aussi à propos de tous ces génies qui, comme il le fit, s’efforçait toujours d’amener ce monde à la lumière... de grands hommes dans ce monde auront toujours travaillé pour la lumière... Mais Louis Zamenhof était parti. Et, disait Privat, “cette charmante personne, que nous aimions tous voir au congrès” - Klara - ne sera pas de nouveau avec nous. Privat leur demandait de se lever en son honneur. “Avec plaisir nous saluons les deux filles de nôtre Maître: Sofia et Lidia Zamenhof, qui nous font l’honneur d’assister au congrès. Qu’ils vivent ; Puissent-ils vivre longtemps ! cria il, et des applaudissements remplirent la salle”. “La mémoire de leurs nobles parents”, continua Privat, “reste gravée dans tous nos coeurs. Ils sont en réalité de braves, de courageuses jeunes femmes travaillant pour des buts nobles et beaux. Remercions-les chaleureusement pour cela, autant que pour leurs venues à Genève”. Une nouvelle fois, le public du congrès applaudissait. Un après-midi, Lidia et quelques amis flânèrent dans les jardins près du Palais de la Ligue des Nations, riant, bavardant et admirant le paysage magnifique. Le lac Léman reflétait de manière aveuglante les derniers rayons du soleil. “Un rare enthousiasme de joie”, se rappelle Lidia plus tard, quelque enchantement nous pousse, comme des enfants insouciants, de lits de fleurs à des lits de fleurs, de groupes d’arbres à des groupes d’arbres. Enfin nous nous arrêtons à un petit square, au milieu de lequel se trouve un objet. Nous approchons et le regardons avec curiosité. Sur deux pôles est accroché une pièce de bronze, dont la surface était décoré de dragons, de serpents et d’étranges hiéroglyphes... Cela nous aspirait, nous attirait. “Qu’est ce que c’est ? Qu’est ce que cela peut-il être ?”, demandait quelqu’un. L’un de nous frappa le bronze avec un doigt. Un charmant doux bourdonnement, un écho éloigné d’un son pouvait être entendu. Nous frappâmes de nouveau. Le mystérieux et inutile son faisait écho. “Une cloche ! Laissons la sonner !”, cria quelqu’un. “Oui, une cloche - , imposa une voix, “une cloche envoyé comme un don de Chine à la Ligue des Nations afin qu’elle puisse sonner lorsque la paix régnera dans le monde”. “Le sentiment de folâtrerie nous quitta. Avec respect nous nous éloignâmes du mystérieux bronze. Appeler son nouveau son, lorsque l’odeur du sang s’élève dans l’air, lorsque les serpents de la haine sifflent encore dans les marécages du chauvinisme, serait profaner la cloche”. Lidia rêva: “Une cloche de paix ! Toi, une énigme façonnée de bronze à côté des rivières jaunes de la Terre céleste ! Tu émigra du coeur de ta patrie et a été disposé sur les rivages des plus beaux lacs, entre des montagnes qui touchent les nuages. Et patiente, comme l’éternité - inscrutable, comme l’éternité - tu attends l’heure promise. Cette heure viendra... Tu sonneras, et les vents porteront ton écho au loin, aux neiges du Nord et les déserts du sud, à travers les vertes vallées et les pics enneigés. Tu carillonneras et alors les épées ne claqueront plus, ni les canons ne rugiront plus, mais les cloches de tous les temples du monde répéteront ton son annonçant à l’humanité le commencement de la nouvelle ère !”. Le jeudi 6 Août promettait un temps clair, mais une nouvelle tempête était en route, ramenant les nuages et la pluie. Plus tôt cette semaine, quelqu’un avait invité Lidia à l’une des réunions spécialisée, planifiée pour jeudi. Le programme du congrès l’enregistrait simplement comme “réunion baha’i”. Le nom ne signifiait rien à elle, se rappela plus tard Lidia. “Je regardais l’horaire du congrès. Une autre réunion, dans laquelle j’avais plus d’intérêt, allait avoir lieu dans le même temps. Je décidais rapidement: Je ne pourrais aller à cette réunion baha’i”. Mais lorsque le jour vint, l’autre réunion finit plus tôt que prévue. Lidia ne vit aucune raison de refuser l’invitation baha’ie. Elle y alla, mais, comme elle le décrit, “sans courtoisie”. La réunion avait commencé à 15h dans le service du Bureau international baha’i. Le bureau était près de la salle Victoria, sur le boulevard Georges-Favon, une rue passante, grande, alignée d’arbres. Lidia approcha de la porte de l’immeuble gris-brun. Au-dessus de la porte se trouvait le numéro de l’immeuble gravé dans la pierre: le19. Depuis quelque temps, les baha’is avait travaillé sur les préparations des deux réunions tenues ici cette semaine. Ils espéraient attirer les espérantistes à venir et apprendre plus sur la foi baha’ie. Si ils n’attiraient pas les espérantistes à leur religion, au moins ils les entraînaient à apprécier leur hospitalité. “Quiconque voulait boire un bon thé (gratuit !) allait certainement au bureau baha’i pour écouter les discours des baha’is”, rapporta ‘Heroldo de Espéranto’... Avec joie, nous apprenions que partout les baha’is apprennent nôtre langue... Nous admirions aussi la ferveur et la dévotion de l’un de ses plus grands apôtres... Martha Root”. Mademoiselle Martha Root, une journaliste américaine indépendante, était venue en Suisse de Haïfa, en Palestine, spécialement pour aider l’ouverture du bureau international baha’i et arranger les réunions baha’is au congrès. Une femme petite et d’aspect simple de 53 ans qui était habillée de manière quelque peu excentrique, Martha Root impressionnait les gens tout d’abord en tant “que petite souris”. Mais son esprit dynamique et sa sincérité attiraient les personnes à elle. En 1914, elle avait démissionnée de sa position d'éditrice de société d’un journal de Pittsburgh dans le but de voyager en tant que correspondante étrangère indépendante, et depuis des années, elle avait dédié sa vie à voyager dans le monde, la plupart du temps seule, lisant et écrivant sur la foi baha’ie. Bien qu’elle était souvent malade, elle voyagea et donna des discours jusqu'à ce que l’épuisement la rattrape. Elle garda une allure semblant inhumaine dans une course contre la maladie qui consumait de manière inexorable son corps: depuis 1912, elle avait su qu’elle avait un cancer. Non concernée avec le confort personnel, Martha Root voyageait en troisième classe et dînait souvent à bas prix comme un morceau de fromage et un oeuf à la coque dans sa chambre d’hôtel. Pourtant, dans chaque pays qu’elle visita, elle approcha des personnes importantes dans beaucoup de domaines et rencontra la royauté et des présidents à qui elle donna le message. Martha Root avait étudié l’espéranto avec les années, sachant qu’il l’aiderait dans ses voyages. En fait, lorsqu’elle allait de pays en pays, elle trouvait que l’espéranto ouvrait beaucoup de portes pour elle. Bien que son intérêt initial dans l’espéranto avait été comme un moyen d’attirer les gens aux enseignements baha’is, elle devint une fervente espérantiste. Martha sympathisait de tout coeur avec les principes de l’espérantisme, croyant que la langue auxiliaire internationale devait être une langue neutre. “Aux personnes qui avaient voyagé et rencontrait les hommes d’état et les masses dans différents pays”, écrivait-elle, “il est évident que toute langue nationale n’est pas seulement acceptable comme une langue d’aide universelle, mais c’est inapproprié à une pensée l’international d’un nouveau cycle universel”. Les portraits de ‘Abdu’l-Baha et du docteur Zamenhof étaient décorés de rameaux verts et de drapeaux espérantistes”. La pièce principale du Bureau avait de la place pour 60 personnes. Pour la réunion, les portes des pièces attenantes avaient été ouvertes pour permettre à 40 autres personnes de s’asseoir et d’entendre confortablement la discussion. Dans son rapport sur l’événement, Martha Root remarqua qu’à la fois Sofia et Lidia étaient là et que Sofia lue un papier de son père sur le besoin d’une religion universelle. Martha Root cita les observations du docteur Zamenhof sur la foi baha’ie au journaliste au congrès de Berne en 1913 aussi bien qu’une déclaration de Zamenhof avait été faite plus tôt que “J’estime hautement la personne de ‘Abdu’l-Baha et son travail ; je vois en lui l’un des plus grands bienfaiteurs de l’humanité”. Une dame russe, Madame Umanski, lue les déclarations élogieuses qu’Abdu’l-Baha avait faites à différents groupes espérantistes, et le docteur Mûhlsclegel, un physicien de Stuttgart, Allemagne, donna une courte allocution en espéranto sur la foi baha’ie . “Le mouvement baha’i n’est pas simplement une nouvelle religion orientale parmi d’autres religions ou d’autres mouvements spirituels, il est simplement le renouveau de la religion”, disait-il, “car il existe seulement un Dieu, un amour, une vérité, une religion”. C’était seulement les formes de la manifestation divine qui changeaient, expliqua le docteur Mûhlschlegel. “Les grands prophètes sont les réflecteurs, les manifestations de la seule lumière divine... Ils révèlent la lumière Divine selon la capacité des gens de ce temps et l’endroit, qui change. Par conséquent, les formes externes de la religion changent également”, continua il, ”c’est, après quelques temps une forme différente avec un nouveau prophète. Nous humains disons alors que ce où ce prophète a fondé une nouvelle religion. En vérité, il trouva seulement une nouvelle forme, une forme plus moderne de la religion humaine”. Moïse et le Christ avaient enseigné aux peuples selon leurs besoins et leurs capacités, disait-il. ”A présent, Baha’u’llah est venu. Il parle aujourd’hui à l’humanité toute entière même plus complexe, plus diversifiée qu’alors... A travers Baha’u’llah, les chrétiens comprendront mieux le Christ, comme à travers le Christ, nous comprenons mieux Moïse. Baha’u’llah accomplit et met en pratique les mots du Christ tout comme le Christ accomplit les mots de Moïse...”. Il continua en expliquant que l’un des principes baha’is était l’utilisation d’une langue auxiliaire internationale, à choisir parmi les langues existantes ou à créer. Cette langue, expliquait-il, devait être enseignée aux enfants dans toutes les écoles du monde, “afin que le monde entier puisse être considéré comme un seul pays dont tous les hommes en sont les citoyens”. “Le bien-aîmé fruit de l’arbre de la connaissance est ce mot majestueux», disait-il, paraphrasant Baha’u’llah. “Vous êtes tous les fruits d’un même arbre et les feuilles d’une même branche. La gloire n’est pas à celui qui aime seulement son pays, la gloire est à celui qui aime le monde entier”. Pensons à cela, chers amis ! “Cela fur ordonné il y a plusieurs décennies par un prophète dans un pays oriental non civilisé. Le docteur Louis Lazare Zamenhof durant sa vie bénie mis en pratique cette idée interne de l’espéranto, l’esprit du nouvel avenir de l’humanité, l’esprit de Baha’u’llah. A cause de cela, le docteur Zamenhof était un vrai baha’i. Et tous les baha’is dans le monde entier l’honore comme un modèle idéal, l’aime en tant que ‘Maître’ «et frère”. Enfin la réunion fut ouverte pour la discussion, et le thé fut servi. Durant le forum ouvert, rapporta plus tard Martha Root avec délectation, “le président de l’une des sociétés de paix de l’Europe les mieux connus et un espérantiste remarquable” dirent: “Travaillons afin que tous les baha’is puissent devenir espérantistes et tous les espérantistes deviennent baha’is”. Presque 50 ans plus tard, en 1974, le docteur Mühlschlegel se rappela avoir vu Lidia à cette réunion, et que durant la discussion, Lidia parlait avec Martha Root. Mais Lidia se souvenait seulement de ”certains discours, certaines lectures... comme je venais seulement sans courtoisie, je ne portais pas quelque spéciale attention à ce qui se passait. Les mots allaient dans une oreille et sortaient de l’autre. Dès que je quittais Genève, j’oubliais tout”. Martha Root, cependant, se souvenait des eux files du docteur Zamenhof et, avec sa détermination habituelle, cherchait des moyens de rentrer à nouveau en contact avec eux. Après la réunion de Genève, elle écrivit à Ella Cooper, une baha’ie américaine, sur l’idée qui lui était venue. Martha programmait d’aller à Varsovie, où elle espérait que Lidia et Sofia laisserait leur conseil pour un moment. “Si je pouvais rester avec elles un mois”, écrivait-elle, “j’apprendrais beaucoup, non seulement en parlant dans l’esprit de l’idée du docteur Zamenhof - mais aussi, je pourrais leur dire beaucoup sur la foi baha’ie. “Si certains des Zamenhof deviennent baha’is, Martha croyait “que cela serait une grande impulsion pour la cause baha’ie dans tous les cercles espérantistes du monde...”. Martha était particulièrement attirée par Lidia, qui “semblait si triste. J’ai toujours souhaité qu’elle puisse connaître la joie de la vie d’Abdu’l-Baha. Cela vint à moi très fortement que cela serait un plan très sage d’essayer d’aller là-bas...” Lorsque le congrès s’acheva, Lidia rentra à Varsovie, ne pensant jamais qu’elle reverrait cette dame américaine. Pendant que le pacifique congrès espérantiste, consacré à abattre les barrières entre les peuples, avait eu rendez-vous en Suisse neutre, ailleurs dans le monde, d’autres étaient occupé à élever ces barrières plus hautes que jamais. Même lorsque Lidia avait voyagé de Varsovie à Genève par elle-même, quelques 50000 personnes avaient également quitter la Pologne, mais contre leur volonté. Ils étaient des allemands ethniques qui avaient quitté ce qui était autrefois la Pologne allemande. Cinq ans auparavant, un plébiscite s’était tenu et ces personnes, la plupart des petits fermiers et des artisans, avaient voté pour garder leur citoyenneté allemande. A présent, le gouvernement polonais - soutenu pour la cour d’arbitrage de La Haye - les avait déporté. Contraints de quitter leurs maisons, emportant tout ce qu’ils pouvaient de leurs possessions, une fois qu’ils arrivent en Allemagne, ils n’auront nulle part où aller. En représailles, l’Allemagne expulsa 20000 polonais de son territoire. Après la Grande Guerre, la Pologne avait reçu un morceau de l’Allemagne, mais une fois polonaise, la terre qui séparait la Prusse orientale du reste de l’Allemagne. Cette première semaine d’Août 1925, les journaux allemands étaient en train de se plaindre amèrement au sujet de ce “couloir polonais”, insistant qu’à cause de cela, 2 millions d’allemands de la Prusse orientale étaient coupés de leur patrie. La veuve du président américain Wilson, qui voyageait à travers l’Allemagne, avait été accueilli avec hostilité et des insultes ; tandis qu’aux Etats-Unis, le représentant italien de la Ligue des Nations était en train de dénoncer les “projets utopiques” de paix mondiale, revendiquant que la guerre était le cours naturel des choses, et parlant au nom du mouvement qui avait balayé l’Italie, appelé fascisme. Et à Los Angeles, Californie, le comité exécutif de la société chimique américaine venait juste d’adopter une résolution qui dénonçait la Ligue des Nations “interdisant les gaz empoisonnés dans la guerre. La Ligue, disaient les chimistes, montrait “un lamentable manque de compréhension de la guerre chimique”, qui, sentaient les scientifiques, était plus humaine que les anciennes formes de boucherie. ================================ Chapitre 9: “Mère et fille spirituelle”. Enfin le monument pour la tombe du docteur Zamenhof avait été embarqué d’Ecosse à la ville libre de Dantzig (actuellement la ville portuaire polonaise de Gdansk) sur la mer Baltique. Mais lorsque la pierre fut examinée à l’arrivée, il fut découvert avoir certaines erreurs dans les lettres. Les corriger serait coûteux, mais le sculpteur, Lubelski, insista que les erreurs soient corrigées, sinon il n’autoriserait pas son nom sur le monument. Enfin, tout était en ordre, le monument fut mis en place au-dessus de la tombe. Bien que cela signifiait retarder l’inauguration pour plusieurs mois, le comité décida de maintenir les cérémonies de consécrations publiques sur le 9ème anniversaire de la mort de Zamenhof, en Avril 1926. Quelque temps avant cette date, Lidia reçue un télégramme signé “Martha Root” demandant une opportunité de parler aux cérémonies d’inauguration sur la relation du travail de la vie de Zamenhof aux principes de Baha’u’llah. “Après quelques moments de considération et de rêveries”, se rappelle Lidia plus tard, “Je reliais cela quelque peu avec la réunion de Genève et avec l’une des personnes que j’avais rencontré là-bas”. Elle rapporta le télégramme au comité, qui donna son accord à la demande de Mademoiselle Root. Le 18 Avril - la date a été avancé au plus proche dimanche - le temps était doux et clair. Une heure avant la cérémonie, plusieurs centaines de personnes étaient réunis ensemble, silencieux et respectueux, près de la porte d’entrée à l’endroit où la tombe était située, devant le cimetière. Des drapeaux espérantistes flottaient dans l’air au-dessus du monument, qui était voilé par un drap noir. La pente en face de la tombe était décoré de verdure de la forme d’une étoile espérantiste à 5 pointes. Autour du monument, tenant des drapeaux espérantistes, se situaient une garde d’honneur d’élèves. A 11h, 500 personnes s’étaient réunis, comprenant des représentants de la communauté juive, des sociétés espérantistes et des institutions éducatives, aussi bien que des journalistes, des photographes et certains fonctionnaires gouvernementaux. Plusieurs personnes étaient venues des provinces, et certaines, comprenant Martha Root, d’autres pays. La famille et les orateurs arrivèrent, et la foule fit place pour eux sur la terrasse à côté du monument. A 11 heures, la cérémonie commença. Le professeur Odo Bujwid de Cracovie coupa le ruban et dévoila la pierre, alors que le choeur chantait “L’Espoir”. Après plusieurs discours, Adam Zamenhof se présenta au nom de la famille Zamenhof pour placer la première guirlande de fleurs aux pieds du monument. Puis, un par un, d’autres s’approchaient, offrant leurs bouquets de fleurs et disant quelques mots en hommage au docteur Zamenhof. Martha Root était venue en tant que délégué du mouvement baha’i. Elle se pencha sur la tombe et plaça des roses blanches aux pieds de la pierre. Puis, comme elle le relata plus tard, elle “parla aux personnes du message d’amour et d’estime de Shoghi Effendi, Gardien de la cause baha’ie et les salutations des baha’is du monde. Ce fut significatif, nota elle, “que tous les discours exaltaient l’esprit de l’espérantisme, son pouvoir de faire du monde “une grande famille unie ensemble”. A 5 heures du soir, les espérantistes de Varsovie et les délégués qui étaient venus d’autres villes et d’autres pays se rassemblèrent à une réception à la maison de Zamenhof. Martha Root était parmi eux et décrivit ses sensations lorsqu’elle entra dans le cabinet du docteur Zamenhof, que la famille avait gardé intact comme une sorte de lieu saint: “Tous ressentaient un frisson à monter ces marches où il avait si souvent marché et visité la pièce où il avait fait beaucoup de son travail”, écrivait-elle (apparemment inconsciente que Zamenhof avait vécu dans l’appartement rue Krolewska seulement les dernières années de sa vie). “... Son bureau contient, à côté de tous les instruments et attirails, une collection de livres espérantistes du premier feuillet aux derniers volumes, c’est certainement la bibliothèque d’espéranto la plus intéressante dans le monde. Ici, là, partout dans le cabinet sont des dons, des drapeaux espérantistes et des bannières, des photos des congrès universels d’espéranto. Monsieur Joseph Gabowicz, l’un des meilleurs sculpteurs de Pologne avait fait un buste du docteur Zamenhof qui est tellement comme lui, que lorsqu’il se trouve sur le piano et les amis qui remplissent la pièce chantaient “l’Espoir”, cela semblait comme si la figure bougeait et vivait: l’esprit du docteur Zamenhof était en leur sein”. Après le discours de Leo Belmont, Martha Root se leva. C’était le moment qu’elle héritait pour parler du “mouvement baha’i comme une forme d’homaranisme”. Elle cita les paroles d’‘Abdu’l-Baha louant Zamenhof et l’espéranto, et les déclarations du docteur Zamenhof sur la foi baha’ie comme “l’un des plus grands mouvements du monde qui, comme l’espéranto, insiste sur la fraternité de l’humanité”. Les mots sonnaient familiers à Lidia; Martha avait lu les mêmes citations une année auparavant à Genève à la réunion baha’ie. Après plusieurs discours, une des dames chanta des chants de Beethoven et de Schubert en espéranto. Lidia devint intriguée par Martha Root, qui parlait de sa religion de manière si fervente, teinté d’espéranto avec un accent américain. “Très rapidement, je commençait à me demander”, se rappela Lidia plus tard, “ce que faisait cette femme, ni riche ni robuste, errant dans le monde”. Martha Root resta à Varsovie pendant plus de deux mois. Comme elle l’avait espéré, elle s’arrangea pour rester avec la famille Zamenhof. Sofia et Adam étaient à l’hôpital pendant la journée, mais Lidia, qui avait commencé d’étudier l’anglais, était à la maison. Lidia consentait à aider Martha avec son espéranto, et Martha allait aider Lidia avec son anglais. “Je sens que nous aurons un merveilleux temps ensemble”, écrivait Martha à des amis en Amérique, “et que nous apprendrons plus que des “langues”. Cela amènera l’espéranto et le mouvement baha’i d’être plus près ensemble”. Martha déménagea dans l’appartement de Zamenhof, partageant la chambre de Lidia. Elle avait l’intention de payer les Zamenhof pour sa chambre et le gîte ”et j’espérais payer généreusement, car leur père donna tout son temps pour trouver l’espéranto et ils ont travailler dur”. Martha Root sentait qu’elle avait été guidée à Lidia. “Baha’u’llah et Abdu’l-Baha l’ont planifié”, écrivait-elle à Ella Cooper. “Pour cela, pendant des mois on a prié... Je sens qu’”Abdu’l-Baha et le docteur Zamenhof souhaitent que cela rapproche plus ensemble les deux mouvements”. Mais lorsque Martha parla à Lidia de la religion ; la fille du docteur Zamenhof était sceptique. “Bientôt elle me dit ce qu’était la Cause à laquelle elle avait sacrifié sa vie”, écrivit Lidia plus tard. “Je ne peux dire que je l’ai accepté tout de suite. J’ai été indifférente aux affaires de foi trop longtemps. Je me rappelle lui demandant si une athéiste (moi-même) peut être un baha’i. Et lorsque elle me dit que les baha’is croient en l’existence de Dieu, je décidais en moi-même: bien, je ne vais pas être baha’ie. Mais Martha ne pouvait pas se décourager facilement. Elle savait comment être patiente, être fidèle - et prier. C’était sa personnalité pure et spirituelle qui m’attirait en ce temps là plus que toutes déclarations écrites”. Ayant grandi avec l’atmosphère de vénération qui entourait son père, Lidia était peut-être spécialement susceptible à une personnalité comme celle de Martha, sincèrement et pleinement dévouée à la vie de l’idéal. Martha avait aussi, se rappelle Marzieh Gail, “une tendresse maternelle envers elle”, qui était probablement réconfortant et séduisant pour Lidia, qui avait perdu sa propre mère seulement récemment. Martha et Lidia formaient un lien d’amour profond et durable qui était comme celui entre mère et fille. Martha se référa à Lidia dans des lettres comme son “enfant spirituel” et Lidia pensait à Martha comme sa “mère spirituelle”, mais pour elles, l’expression était plus qu’une simple figure de style. Bien que, comme Lidia l’avait remarqué, c’était la personnalité “pure et spirituelle” de Martha qui l’attira en premier, le message de Martha, les enseignements baha’is, résonnèrent en Lidia. Elle avait grandi avec, sinon une croyance personnelle, au moins une loyauté à la philosophie familiale de son père comme les enseignements les plus avancés sur le sujet de l’humanité comme “un grand cercle familial”. Maintenant, soudainement, elle voyait ses concepts dans une autre perspective. “Il me semble”, disait-elle à Martha, “que l’espéranto est simplement une école dans laquelle les futurs baha’is s’éduquent eux-mêmes. Le mouvement baha’i est un pas en avant. Il est plus large”. A première vue, c’était tout à fait une déclaration sensationnelle. Pour la propre fille de Zamenhof, de dire que quelque chose d’autre était plus grand que l’espéranto, que la cause à laquelle son père avait dédié sa vie était “seulement une école”, sans doute cela choqua profondément beaucoup d’espérantistes et pourrait même avoir sembler être une trahison. Pourtant, le créateur de l’espéranto n’avait jamais regardé le mouvement espérantiste comme une fin en soi, mais plutôt comme un moyen d’éduquer les peuples à l’unité. Zamenhof lui-même avait cru que l’idée de la langue neutre ne pourrait jamais réussir sans une religion mondiale. Les mots de Lidia à Martha semblaient faire écho à ce que Zamenhof avait dit au congrès universel d ‘espéranto en 1907: “Progressivement, le pays de l’espéranto deviendra une école pour la future fraternité de l’humanité”. Les espérantistes apprirent la remarque de Lidia presque immédiatement, car Martha Root la cita dans un article qu’elle écrivit sur la cérémonie d’inauguration. Le journal ‘Heroldo de espéranto’ publiait un extrait dans son édition du 4 Juin, appelant à porter attention à la déclaration comme remarquable mais supprimant le mot “seulement” - peut-être pour adoucir l’effet sur les espérantistes. La fille du docteur Zamenhof ne voyait aucune contradiction ou conflit de loyauté en acceptant la foi baha’ie. Ses enseignements essentiels n’étaient pas en conflit avec les idées de Zamenhof, mais semblaient les confirmer et les élargir. Ici étaient les idées de l’homaranisme - un seul Dieu comme le Créateur inconnaissable de tous, une seule humanité pour vivre en paix comme une seule grande famille, l’entente des enseignements essentiels des grands enseignants du passé, accord entre la science et la religion, une langue auxiliaire internationale. Mais si les principes étaient les mêmes, pourquoi accepter la foi baha’ie plus que l’homaranisme ? L’admiration personnelle de Lidia pour ou attirer à Martha Root n’était pas assez pour l’expliquer. Louis Zamenhof n’avait jamais revendiqué fonder une religion, mais les enseignements baha’is, Lidia en vint à croire, portaient le pouvoir d l’inspiration divine. “Dans l’enseignement de Baha’u’llah”, expliqua Lidia quelques années plus tard, “je trouve l’universalité que seul l’enseignement du vrai Dieu peut offrir à l’humanité”. Et entre l’espéranto et sa nouvelle foi trouvée, Lidia percevait un lien spirituel fondamental. Elle devint, de ses propres mots, “profondément convaincue”, que “l’espéranto fut crée directement sous l’influence de Baha’u’llah, bien que l’auteur d la langue ne le connaissait pas” . Lidia ne sentait pas que devenir une baha’ie affectait sa foi juive, car pour elle, être une juive était une affaire raciale ou ethnique, pas une affaire religieuse. L’idée d’accepter quelque religion se révéla plus qu’un obstacle pour Lidia. “J’étais moi-même comme dans l’obscurité”, se rappela elle dans son enfance, dans une lettre écrite plusieurs années plus tard, “et seulement maintenant je vois combien ombragée et malheureuse était cette obscurité et combien brillants sont les rayons de la Lumière, la source de toute vie et de toute vérité”. “Après le départ de Martha, j’étais laissée seule”, écrivait Lidia. “De temps en temps, ses lettres, pleines d’amour, me stimulaient de nouveau. A côté de cela, cependant, il n’y avait personne de mon côté pour me rappeler de Dieu lorsque je L’oubliais et personne pour soutenir mon esprit lorsqu’il sombrait dans l’indifférence. Mais il n’y avait aussi personne pour devenir un test pour moi et pour me laisser voir un visage que l’Esprit n’avait pas encore illuminé avec la même lumière que je vis dans ma mère spirituelle. Mon intérêt spirituel était comme une marée - allant et venant, allant et venant. Parfois il serait si bas qu’aussi loin que je peux raconter, même sous le couteau du chirurgien, je ne me tournais vers Dieu. Mais lorsque la marée revenait, chaque fois ses vagues recouvraient une grande surface de mon âme. Je commençais à essayer de prier Dieu, en Qui je n’avais pas cru pendant beaucoup d’années. “Un seul désir se cristallisait finalement en moi: je voulais aller à Haïfa. Nul doute que durant le séjour de Martha à Varsovie, elle parla à Lidia à propos de son pèlerinage aux tombeaux sacrés à Haïfa, Palestine, et l’encouragea à faire elle-même un pèlerinage. Lidia était devenue une baha’ie trop tard pour rencontrer Abdu’l-Baha, qui était mort en 1921. La direction d la communauté baha’ie avait passé à son petit-fils Shoghi Rabbani, connu comme Shoghi Effendi, que Abdu’l-Baha avait nommé dans son Testament comme Gardien de la foi baha’ie. A cause des conditions instables et souvent dangereuses en Palestine, il était nécessaire d’obtenir l’approbation de Shoghi Effendi avant de faire le voyage du pèlerinage, ainsi, écrivit Lidia plus tard, “ma mère spirituelle écrivit au Gardien demandant la permission”. A la déception de Lidia, Shoghi Effendi répondit qu’elle devait attendre. Lidia vit à nouveau Martha Root en Août au 18eme congrès universel d’espéranto à Edimbourg, Ecosse. Pour ce “Congrès de joie”, le temps en Ecosse était chaud et agréable ; le ‘Scotman’ rapportait qu’Edimbourg n’avait jamais vu autant de soleil en une semaine. La place la plus remplie dans la ville était la gare de chemin de fer: c’était un jour férié d’Août, et les gens s’écoulaient de la ville pour le long week-end. La ville donna aux espérantistes la libre utilisation des tramways et les chauffeurs saluèrent les visiteurs en espéranto. Deux réunions baha’is eurent lieu au congrès, qui se tenaient dans les salles de l’église unifiée libre d’Ecosse, où en 1913, ‘Abdu’l-Baha avait donné une fois un discours public. Le docteur Immanuel Olsvanger, un juif polonais, qui était le chef du mouvement sioniste en Grande-Bretagne, présida la première session baha’ie le 2 Août et présenta Martha Root, qui parla sur “le pouvoir positif de la religion universelle”. Ensuite, il y eut un discours sur le progrès de la foi baha’ie en différents pays, avec des diapositives de ‘Akka’ et Haïfa, de la musique et des lectures des écrits de Baha’u’llah. Lidia amena sa soeur Sofia à la réunion. Le scientifique suisse et espérantiste, le docteur Auguste Forel envoya à la réunion un télégramme: “Longue vie à la religion universelle de Baha’u’llah ! Longue vie à la langue auxiliaire universelle, l’espéranto !”. Mais la réaction n’était pas universellement approuvée. Au congrès, rapporta Martha, “deux personnes attaquèrent la Cause !”. Elle ajouta avec philosophie, “Mais quelqu’un doit s ‘attendre à quelque critique”. Le prochain congrès annuel, dans la ville libre de Dantzig en 1927, marquait le 40ème anniversaire de la naissance de l’espéranto. Lidia, Adam et Sofia y assistèrent tous. A la cérémonie d’ouverture, Martha Root s’était arrangé pour lire un message de salutations de Shoghi Effendi , le Gardien de la foi baha’i. “Mes chers compatriotes dans le service de l’humanité”, avait-il écrit au congrès. “J’ai un grand plaisir en m’adressant à vous... et vous souhaitant de tout mon coeur les plus grands succès dans le grand travail que vous êtes en train de faire pour la promotion du bien de l’humanité. “Cela vous intéressera d’apprendre, j’en suis sur, que comme résultat des remarques répétées et énergiques de ‘Abdu’l-baha, beaucoup de ses partisans, même dans les villages éloignés et les hameaux d’Iran, où la lumière de la civilisation occidentale vient à peine encore pénétré, aussi bien que dans d’autres pays à travers l’Est, sont engagés énergiquement et avec enthousiasme dans l’étude et l’enseignement de l’espéranto, pour le futur, dont ils chérissent les plus grands espoirs. J’exprime les sentiments des innombrables serviteurs de la foi à travers le monde, lorsque je vous offre à travers cette lettre, la cordiale expression des souhaits les meilleurs et des prières ferventes pour le succès de vôtre noble but”. Martha parla encore à l’une des réunions baha’ies, des “Preuves baha’ies de la Vie après la mort”.” Les raison de nôtre naissance dans ce monde n’est pas seulement d’acquérir un bonheur matériel ou ces conditions extérieures qui nous semble si importantes”, disait-elle. “Au contraire... la vraie raison de nôtre naissance est d’éveiller l’esprit caché dans chaque âme et de développer les qualités qui seront utilisés dans l’autre monde. L’enfant né dans le royaume humain vient équipé d’oeils, d’oreilles et d’autres sens, qui sont déjà formés et prêts à l’emploi. De la même manière, nous sommes spirituellement dans le monde utérin de la vie éternelle et la plus grande connaissance scientifique que nous pouvons obtenir est d’apprendre à acquérir les qualités divines, car l’esprit éveillé peut prendre avec lui vers le royaume le plus haut seulement ces qualités divines qu’il acquiert ici. Il est important que nous nous efforcions de nous préparer aussi bien que possible pour un rapide progrès car nous sentons que cela est en nôtre pouvoir de continuer nôtre vie sur un autre plan”. Malheureusement ; Martha avait choisi le mauvais mot en espéranto pour traduire “plan” alors que sa déclaration parut: “nous sentons que cela est en nôtre pouvoir de continuer nôtre vie sur une autre planète”. Lorsque le discours fut publié en tant que brochure, il fut dûment révisé dans un journal allemand d’espéranto par Arnold Behrendt, un important espérantiste allemand qui allait jouer un rôle ignoble dans le mouvement durant les années à venir. Il se formalisa dans sa critique, disant, “Je confesse: Je crois ... aussi dans la vie de l’esprit après la mort. Mais ma croyance n’est pas la même que ce qui apparaître être celle de l’auteur... Je ne crois pas que nôtre esprit continuera de vivre dans une autre planète... “Naturellement, Martha Root ne fit plus rien. Le dimanche, près de la ville thermale balnéaire de Zoppot, dans un petit carré entouré par de jeunes sapins, appelé le “Sol espérantiste”, un “chêne jubilé” allait être planté pour commémorer le 40ème anniversaire de l’espéranto. Les espérantistes avaient amené de la terre de leurs pays pour la placer symboliquement autour des racines du jeune arbre. Le soleil était brûlant et il y avait une longue distance de Zoppot au sol espérantiste. Alors que les drapeaux de Dantzig et de Zoppot et la Bannière verte volaient au-dessus, les espérantistes et certains badauds curieux s’entassaient dans la petite surface préparée pour la cérémonie. Après plusieurs discours, Lidia se présenta pour verser de la terre de la tombe de son père sur les racines du chêne du Jubilé. Puis d’autres approchèrent avec de la terre qu’ils avaient apporté pour l’occasion. Prenant l’événement très au sérieux, Martha Root avait amené de la terre de la tombe de Baha’u’llah à Akka et des tombes du Bab et d’Abdu’l-Baha sur le Mont Carmel à Haïfa, aussi bien que celle envoyé par un ami américain d’un endroit où ‘Abdu’l-baha avait autrefois visité dans le New-Jersey. Ce fut un moment solennel et symbolique alors que des personnes de nombreux pays offraient les terres sacrées de leurs pays natals, les bornant ensemble à nourrir l’arbre qui se tenait pour l’unité et la compréhension. Mais le monde extérieur s’immisça avec son propre symbolisme. Un journaliste observa que avec ce temps étouffant, la plupart de la terre sèche apportée pour la cérémonie finissait non pas dans le sol mais dans l’air - comme de la poussière dans le vent. Et, presque trois mois plus tard, le journal de Zoppot rapportait que le chêne Jubilé avait été malicieusement détruit par des vandales. Bien qu’il fut replanté plus tard, il fut à nouveau détruit et la grande plaque commémorative détruite par les nazis allemands. L’espoir de paix à laquelle beaucoup de personnes s’étaient accrochées durant les années qui suivaient la Grande Guerre s’était évanoui. Des idéalistes de la génération de Lidia avaient placé leurs fois dans la Ligue des Nations pour préserver la paix et régler les disputes internationales. Mais lorsque ces enfants de la guerre devinrent adultes, il devint clair que cet espoir était mort: la Ligue, que les Etats-Unis avaient refusé de rejoindre, était impuissante. De par le monde, le nationalisme fanatique et les haines sectaires étaient plus fortes que jamais. La génération de Lidia observait comme les dictatures surgissaient, rejetant avec mépris la Ligue et le Traité de Versailles. Pour tous, il devint bientôt évident qu’une autre guerre mondial, plus dévastatrice que la première, était inévitable. Pendant que beaucoup de gens étaient cyniques sur les chances de paix, certaines, comprenant Lidia, s’accrochaient encore à l’espoir qu’à travers la rigueur et l’éducation, les coeurs pourraient être changés, et la paix pourrait devenir une réalité et non juste un rêve. Mais ceux-ci avaient déjà commencé à voir eux-mêmes comme assiégés. Dans son discours au congrès de Dantzig, Edmond Privat évoqua ce sentiment lorsqu’il dit à la cantonade: “Maintenant nous nous trouvons dans nôtre de joie de nôtre grand campement espérantiste. Nous tous, amenons nos soucis, nos désirs, nos mauvaises herbes intérieures et nos branches sèches et jetons les dans le feu. Saisissons-nous sincèrement les mains des uns des autres, formons u cercle autour de la belle flamme. Puisse t-elle grandir, puisse elle crépiter, puisse elle réchauffer nos coeurs. Dehors, dans le monde, c’est la nuit”. A Varsovie, Lidia avait commencé à enseigner des classes d’espéranto pour la société Concorde. Bien qu’elle gagnait très peu pour ses cours, elle aimait enseigner et était à l’aise avec cela. Elle avait aussi commencé à publier ses propres histoires dans “l’Espérantiste polonais”. A travers elles, elle avait trouvé un autre moyen de propager ses idées les plus chères. Dans son écriture, elle habillait souvent par une allégorie la question ou le principe qu’elle voulait exprimée. Un aperçu par hasard d’une scène - une famille dans un parc, une étiquette sur une lettre, un article qu’elle avait lu, ou une personne qu’elle avait rencontré, pouvait l’émouvoir pour écrire sur la signification la plus profonde qu’elle percevait. En l’espace d’environ une année, elle publia 5 articles et histoires dans “l’Espérantiste polonais”. L’une de ces histoires, qui se révélait ironique à la lumière des événements à venir, reflétait les relations aggravantes entre les personnes, mais aussi l’espoir de celles comme Lidia qu’il y avait une réponse et que l’on pouvait même conquérir les haines. Dans son histoire, elle décrivait un voyageur passant à travers une terre étrangère appelée Chauvinia. “Déjà le soleil était couché et seuls de minuscules nuages d’ouest, colorés de rouge comme par du sang, se montraient où disparaissaient”, écrivait-elle. “Il faisait très chaud, presque étouffant. La nature semblait prête pour une tempête... Je marchais longtemps sur un chemin rocailleux et montagneux. Enfin je rencontrais un homme. Il me regardait méchamment et avec suspicion. Je le saluais et lui demandais si il pourrait me donner refuge pour la nuit. “Qui êtes-vous, étrangère ? De quelle pays vous venez ? Qu’est ce que vous voulez à Chauvinia ?”. Sa voix avait u ton discordant et déplaisant: nous nous comprenions avec difficulté. “Je viens d’un pays lointain et après un long voyage. Je souhaite seulement passer la nuit dans vôtre pays. “Quel est le nom de vôtre pays ? demanda il. “Je lui dis son nom. Les traits du Chauvinien devinrent contorsionnés, comme les traits d’un chien enragé prêt à mordre. “Nous ne donnons pas refuge à vos citoyens !”, dit-il et il me tourna le dos. “Seul, je continuais avec le coeur gros et des larmes dans les yeux. Ainsi, parce que j’étais une étrangère, je fus refusée d’être hébergée ici. Je décidais de ne pas chercher plus loin et de traverser la terre inhospitalière aussi vite que possible. Je marchais toute la nuit. Parfois des nuages recouvraient la lune - puis j’avais à stopper et à attendre ses réapparitions, car sans ses lumières pales, je perdrais mon chemin. Parfois une tempête se levait, comme pour me barrer le chemin, et c’était difficile de continuer. Les échos des montagnes imitaient le fracas de mes pas et les répétaient. Bruyamment, avec résonance... Il me semblait qu’autour de moi marchait une armée ennemie invisible...”. Dans l’histoire comme Lidia l’a décrite, le voyageur fut finalement accueilli dans la verte et plaisante “Terre d’espéranto”. Mais la fin de l’histoire comme Lidia l’a vécu se révéla tout à fait différente. 10 ans avaient passés depuis la mort du docteur Zamenhof. Autrefois cela avait été Louis qui, s’asseyant tard, frappait les touches de la vieille machine à écrire. Maintenant c’était Lidia qui avait pris sa place. En décembre, “l’espérantiste polonais” publiait des souvenirs d’elles, appelé “La machine à écrire de mon père”. “La vieille machine se trouvait sur sa petite table”, écrivait-elle. “Comparée aux dernières, elle n’offrait que peu de valeur. Elle manquait de certains arrangements importants et les sténographes la regardait avec pitié, presque avec dédain. Cependant, je la respectais. Et lorsque j’ouvris le couvercle, c’était comme si le visage amicale souriait, et devant mes yeux apparue l’inscription brillante et lumineuse gravée sur la machine: “Travaillons et espérons”. ================================ Chapitre 10: “Croyante” Il n’y avait jamais eu de réunion baha’ie depuis 1925 aux congrès universels d’espéranto. Martha Root avait organisé ces premières réunions et prenait part aux séances. Au congrès de 1928 à Anvers, Belgique, Lidia servait comme présidente honorifique aux deux sessions baha’ies et parla avec éloquence à l’ouverture. Ceci, son début comme oratrice, attirait une attention considérable: Jusqu'à présent, elle n’avait jamais consenti à faire un discours de quelque sorte que ce soit aux congrès d’espéranto. Durant les sessions baha’ies tenues dans le “Cercle artistique royale”, Lidia écoutait comment un baha’i persan rapportait sur le progrès de la religion dans son pays natal. Dans le passé, disait-il, le clergé musulman avait obstrué l’éducation en Iran. Les écoles étaient seulement pour les garçons, et seuls les langues persanes et arabes étaient enseignées. Maintenant, disait-il, merci aux enseignements de Baha’u’llah, une nouvelle pensée se propage, que le clergé ne pourra plus gêner. Des écoles baha’ies, ouvertes à toutes les religions, enseignaient à la fois les garçons et les filles. L’apprentissage de l’espéranto était propagée, principalement par les baha’is, leur disait-il ; la plupart des délégués de l’association universelle d’espéranto étaient baha’is, et ils étaient des enseignants envoyés dans différentes parties du pays. Une nouvelle fois Shoghi Effendi avait envoyé des salutations au congrès. “Je peux vous assuré”, écrivait-il, “que les membres de la communauté baha’ie mondiale suivent avec un intérêt croissant et un authentique espoir les progrès de vos labeurs, et sentent que par vos nobles efforts, vous êtes en train de promouvoir l’un des principes les plus importants proclamé par Baha’u’llah. “Ils partagent avec moi le fervent espoir que dans les jours à venir, des liens plus étroits de coopération et d’amitié pourraient relier les espérantistes du monde avec nôtre bien-aimée foi, et que l’établissement et le maintien de relations entre baha’is et espérantistes se révélera favorable à l’amélioration de l’humanité”. Les mots de Shoghi Effendi avaient touché Lidia, comme l’avait fait les nouvelles de l’enseignement de sa bien-aimée langue dans la patrie de Baha’u’llah. Deux objectifs commencèrent à se cristalliser dans son esprit - elle était déterminée à forger ces “liens plus rapprochés de coopération et d’amitié” entre espérantistes et baha’is et de voyager en Iran pour amener l’espéranto dans le berceau de la foi baha’ie. Comme durant le temps de Louis Zamenhof, il y avait encore une controverse parmi les espérantistes sur “l’idée interne”. Certains sentaient que propager la langue neutre devrait être le seul but du mouvement espéranto. D’autres sentaient que les idées de fraternité et de justice devaient être séparées de celle-ci. Lidia croyait que ces idées ne pouvaient être séparées de l’espéranto, et le souvent disait avec tellement de courage dans des articles et des contes allégoriques dans la presse espérantiste. Dans l’une de ses histoires dans “l’espérantiste polonais”, elle écrivait sur la légende du vieux juif du “golem ”; dans laquelle un rabbin du moyen âge avait essayé de créer un homme de terre et d’argile. Le créateur de l’espéranto, disait Lidia, avait donné “son propre coeur chaud” à sa création, et c’était ce feu de l’idéalisme que reçue la langue vivante. “Mais il y a des gens qui disent, “Oui, c’est beau, c’est élégant, mais le feu - ce feu en elle n’est pas nécessaire”. Et ils posent leurs mains, froides comme des cadavres, sur le coeur chaud, soufflent sur lui par moquerie, essayent de l’étouffer... Oh, amis collaborateurs», plaidait-elle, “n’éteignez pas le feu”. Pendant que certains étaient sensibles de relier l’espéranto avec quelque idée, il y en avaient qui, bien qu’ils pouvaient partager les idéaux de fraternité et de justice, s’opposaient à ce moment fortement à relier l’espéranto ou le nom de Zamenhof avec quelque croyance ou organisation religieuse. Tout comme Louis Zamenhof avait lui-même souffert du mécontentement de certains de ses compatriotes lorsqu’il présenta son programme de l’homaranisme, à présent lorsque le dire se répandait que sa fille était en train de promouvoir publiquement la foi baha’ie, certains espérantistes importants désapprouvèrent. Des années plus tard, Lidia révéla qu’après qu’elle soit devenue baha’ie, les gens la haranguait, l’accusant de “mettre en danger la position de l’espéranto, particulièrement en Pologne, si je m’identifiait moi-même, portant le nom du créateur de l’espéranto, avec une nouvelle, peu familière et encore inconnue religion”. Durant ce temps, sentait Lidia, elle “se fit beaucoup d’ennemis”, mais n’y portait pas attention”. Elle expliqua: “J’estime plus importante ma relation sincère avec Dieu, de qui je reconnais être révélé Lui-même en Baha’u’llah, que de faire plaisir à l’opinion publique”. Il a été écrit que certains des parents de Lidia l’accusèrent de trahir la religion juive et même la persécutèrent pour ses croyances. Bien que Lidia admit dans une lettre à Shoghi Effendi que sa famille était opposée à son activité baha’ie, il n’y a pas de preuves que leurs objections étaient suffisamment fortes pour être appelé persécution. Ni que les objections de la famille étaient de nature religieuse. Comme les Zamenhof n’étaient pas religieux, ils ne réagissaient pas dans le mauvais sens que des juifs orthodoxes puissent avoir à se reconvertir. Une famille extrêmement pieuse pourrait même dire les prières funéraires pour le converti, qu’il regardait ensuite comme mort. Pour une juive en Pologne, se convertir au christianisme était en fait vu comme une trahison. Devenir une baha’ie était quelque chose de différent ; peu savaient que cette foi était regardé souvent par erreur comme une philosophie plutôt qu’une religion, une conception erronée nourrie par le fait que, à cette époque, c’était habituellement référencée à un “mouvement” plutôt qu’à une religion. Il n’y avait pas de communauté baha’ie en Pologne ; en fait, les seuls autres baha’is que les Zamenhof ne rencontrèrent jamais ou qui les connaissaient étaient des espérantistes amis - Martha Root, le docteur Adelbert Mühlschlegel, le docteur Grossmann, le docteur Ernst Kliemke (président de l’association espérantiste allemande), le professeur Paul Christaller et quelques autres. Il apparaît que les objections des “Zamenhof” se levèrent plutôt d’une inquiétude de ne pas relier l’espéranto publiquement avec la foi baha’ie, de peur que le public ne pense que le premier mouvement était une partie de l’autre. Des lettres de Martha Root, écrites après avoir visiter Lidia à Varsovie, le confirme. Au sujet d’Adam et de Sofia, elle commenta: “ces personnes sont adorables, mais ils ne sont pas baha’is et je pense qu’ils voudraient plutôt que Lidia ne traduisent pas les Livres baha’is ou les relient elle-même autant et ne donne autant de temps au travail baha’i. Ils voudraient plutôt que son nom, le nom de Zamenhof, ne soit pas autant associé avec baha’i. Ils étaient toujours si gentils avec moi, ils étaient hospitaliers, ils étaient sincères. Je souhaite leur parler honnêtement... Ils aiment Lidia avec dévotion. “Mais, pensa Martha, “ils ne comprennent pas leur soeur”. Lidia avait été épargné de “tout penny” pour son pèlerinage à Haïfa. Lorsqu’elle dit à sa famille qu’elle pensait qu’elle n’irait pas au congrès universel d’espéranto en 1929 mais économiserait l’argent pour son pèlerinage, “ils rirent”, dit Martha à Shoghi Effendi, “et se firent une grande plaisanterie de la visite à Haïfa de Lidia”. Adam et Sofia, ajoutait Martha, étaient “gentils, adorables, mais ils n’étaient pas spirituels”... Sofia, disait-elle, ne croyait pas à la vie après la mort. “Et ils ne comprenaient pas Lidia. Elle ne leur dit pas beaucoup sur ses prières et ses études - mais la dernière nuit, je parlais avec eux pendant 2 heures et je crois qu’ils pourraient également être intéressés... J’ai dit à Lidia qu’au moment voulu, elle leur amènera tous vers les enseignements baha’is”. Martha pensait que certains autres parents de Lidia étaient compréhensifs envers la foi baha’ie ; des années plus tard, elle écrivit qu’elle avait rencontré une fois, la soeur de Klara Zamenhof, qui “disait aimer beaucoup les enseignements baha’is. Leur frère, Monsieur Silbernik (qui avait vécu à New-York et qui mourut en 1925)... écrivit pour les journaux de New-York un article très compréhensif sur la foi baha’ie”. Roan Orloff Stone, qui devint une amie proche et une confidente de Lidia en Amérique, se rappela en 1980 que Lidia était très proche de sa famille et qu’elle n’avait mentionné quelque chose de contraire. A cette époque, Madame Stone se rappela que certaines personnes en dehors de la famille accusaient Lidia de trahir le judaïsme lorsqu’elle devint baha’ie. Pour sa part, Lidia Zamenhof ne rejeta jamais son héritage juif, contrairement à beaucoup de juifs convertis au christianisme qui faisaient souvent de grandes distances pour dissimuler leurs origines. En fait, Lidia ne sentait pas qu’en devenant baha’ie, elle avait entièrement casser avec la communauté juive. Pour elle, être juive n’avait rien à voir avec la religion. Bien que Lidia ne participait pas dans la société juive de Varsovie, en 1929, elle publiait un article sur la foi baha’ie dans “Nôtre revue”, un important quotidien juif de langue polonaise de Varsovie, et elle pourrait avoir été critiqué comme résultat de cela. Sa famille, reportait Martha Root, “était très surprise” par l’article. En tant que seule baha’ie en Pologne, Lidia avait appris sur sa nouvelle foi par elle-même. En dehors d’une rare visite d’un voyageur baha’i, ses seuls contacts avec d’autres baha’is étaient aux congrès universels d’espéranto et par lettre. Elle était particulièrement impatiente des voyages de Martha Root à Varsovie, mais Martha n’était pas la seule à lui rendre visite: Madame Lorol Schopflocher visita Lidia à Varsovie au moins deux fois. Après sa visite en 1928, Lidia écrivit à Shoghi Effendi que Madame Schopflocher était arrivée au moment où Lidia avait besoin de quelqu’un pour l’aider dans sa compréhension. Lidia trouva rapidement que dans le but de lire les écrits de sa nouvelle foi, elle aurait à apprendre bien l’anglais. A cette époque, il n’y avait aucune littérature baha’ie en polonais, et, à part “Les Paroles cachées” de Baha’u’llah, aucun travail important n’avait encore été traduit en espéranto. La littérature originale de la foi baha’ie était en persan et en arabe, et la plus grande masse des ouvrages traduits étaient en anglais. Lidia avait commencé d’étudier l’anglais plusieurs années auparavant, mais maintenant elle avait une raison de travailler plus dur pour le maîtriser. Désireuse d’étudier les écrits baha’is, elle sentait que ses efforts seraient entravés par ses lacunes en anglais. Ainsi elle commença à prendre des cours d’anglais 3 heures par semaine ; son professeur était un russe. Même lorsque Lidia était en train d’apprendre l’anglais, elle commença à traduire la littérature baha’ie en espéranto. Et, comme elle lisait les écrits baha’is, des thèmes baha’is commencèrent à apparaître dans sa propre écriture. Une déclaration sur la vie après la mort dans “Les Leçons de Saint Jean d’Acre” d’Abdu’l-Baha inspirèrent un conte allégorique appelé “Oiseau en cage”, qui fut publié dans “l’Espérantiste polonais” en 1929. Lorsque Martha Root rendit visite à Lidia en février 1929 pour deux semaines, elle trouva Lidia travaillant très dur - classes d’instituteur, lectures en espéranto, traduction et travail “pour obtenir que le gouvernement introduise les cours d’espéranto dans les écoles”. Cet effort était brave mais ne trouva pas beaucoup de succès. Lidia n’avait pas eu plus de chance avec ses efforts pour intéresser les gens à Varsovie à la foi baha’ie. Elle avait écrit une conférence appelé “Qu’est ce que la foi baha’ie ?” qu’elle offrit de présenter à un club à Varsovie. Ils refusèrent. Intrépide, Lidia décida de le présenter au prochain congrès d’espéranto. Elle avait commencé à traduire en espéranto le livre d’introduction de J.E. Esslemont “Baha’u’llah et l’ère nouvelle”, qui, à la joie de Lidia, contenait aussi une partie sur la langue inventée par son père. Esslemont, qui mourut en 1925, avait été, selon Martha Root, “le meilleur espérantiste dans le monde baha’i”. Vuk Echtner, un baha’i de Prague, avait aidé Lidia dans la traduction, mais elle ne se sentait pas encore sure de son anglais, ainsi elle mit le projet de côté et commença à travailler sur “Les causeries d’Abdu’l-Baha à Paris”.Lorsque Martha Root arriva à Varsovie, Lidia reprit de nouveau son travail sur Esslemont, se sentant plus confiante avec Martha ici pour l’aider. Chaque jour, matin et après-midi, Lidia visitait Martha à son hôtel pour travailler sur la traduction. Elle lisait à voix haute des parties du livre et lui demandait sur des points dont elle n’était pas sure. Chaque nuit, Lidia travaillait jusqu'à 1h en préparant la session du jour suivant avec Martha. Martha avait plus confiance dans les possibilités de Lidia que Lidia elle-même. “Oh, combien j’admire sa capacité !”, dit Martha à Shoghi Effendi. Elle connaît une douzaine de mots et instantanément elle sélectionne celui qui est le meilleur. Ce sera une telle grande traduction que je à peine attendre que je la possède ! Combien cela m’aidera dans mes lectures !”. “Elle est si complète !, écrivait Martha à Julia Culver. “Ce sera une merveilleuse traduction et l’une des plus grandes choses qui puisse arriver dans nôtre cause. Shoghi Effendi est très content”. Il avait déjà écrit trois fois à Lidia. Martha Roort révéla à Shoghi Effendi, Gardien de la foi baha’ie, ses sentiments profonds au sujet de Lidia. “Lidia est si confirmée, si profondément sérieuse...”, lui dit-elle. “Elle a un esprit tellement fin si sain, si équilibré, si logique... Elle a un jugement si excellent sur toute chose. Elle est l’enfant de son père “spirituellement” aussi bien que physiquement. Elle est si juste, si modeste, si sincère, et elle est l’une des traductrices les plus fines que j’ai jamais rencontré... “Elle était très contente sur le message pour elle, mais elle est si modeste qu’elle dit (j’oublie les mots mais la pensée est que si elle serait très triste d’avoir à penser qu’elle est une bonne baha’ie alors qu’elle commence juste à essayer d’être une baha’ie, mais elle dit qu’elle désire certainement devenir une baha’ie)”. “Elle aime aussi le chapitre sur “La prière”, lui dit Martha dans la même lettre. “... Lidia et moi sommes ensemble chaque minute possible. Hier, dans sa chambre, nous avons prié ensemble, elle aime aussi la prière de l’aube “O mon Dieu, Tu me vois accroché à Ton nom”, elle récitent tous les prières, elle est si impatiente d’apprendre à prier. Aujourd’hui, dans ma chambre, nous nous arrêtâmes de traduire et de réciter certaines des belles prières. J’essaye de lui dire comment je prie et j’attends toujours la Guidance. Je lui dit combien je prie fermement vers Baha’u’llah afin qu’il me montrera comment l’aider. Je lui dis qu’elle a l’une des plus grandes opportunités et tâches de ce siècle, car elle peut se lever avec l’Aide de Baha’u’llah pour relier ces deux grands mouvements, l’espéranto avec le mouvement baha’i. Elle peut faire un travail presque aussi grand que son père a fait”. Martha en fait prévoyait un grand avenir pour sa “fille spirituelle”. Elle prédit au Gardien: “Lidia pourrait devenir l’apôtre de la Pologne, je la vois dans ma vision de Shoghi Effendi”. Cet été de 1929, Martha et Lidia furent à nouveau ensemble à Vienne pour l’ouverture du musée international d’espéranto, juste avant le congrès universel d’espéranto à Budapest, et au congrès lui-même. Ils avaient planifié ensemble les réunions baha’ies durant la visite de Martha à Varsovie. A Vienne, les délégués accompagnèrent une réception avec le président de l’Autriche. Sous les chandeliers, Lidia se profila dans une robe imprimée brillante et un chapeau cloche, agrippant son sac à main sous un bras. A l’ouverture du musée, sous le dôme de l’ancienne salle de la librairie nationale autrichienne, Lidia présenta au musée un manuscrit original de son père de l’année 1881. Quelques 50 ans plus tard, une baha’ie de Vienne, Madame Luise Lappinger, à l’âge de 92 ans, se rappela avoir reçu deux fois Lidia dans son appartement du troisième arrondissement de Vienne. Franz Pöllinger, un baha’i allemand, amena Lidia à la maison Lappinger, qui, à cette époque, était un lieu de réunion pour les baha’is de Vienne, nombre d’entre eux étaient de souche juive. Dans le traditionnel petit salon viennois, dominé par la salle à manger et les chaises, sur lesquelles un chandelier en cuivre dans une ombre créait une atmosphère intime et chaleureuse. Madame Lappinger avait assis Lidia dans la chaise réservée aux invités spéciaux. “Elle était agréable, très douce, très petite”, se rappela Madame Lappinger. Baignées dans la lumière du chandelier de cuivre, ils burent du thé et mangèrent des pâtisseries. Lidia parla avec calme des difficultés que son père avait du affronter. “Elle semblait avoir une aura spirituelle qui irradiait d’elle”, se rappela Madame Lappinger. “Elle était une personne calme, bien, noble”. Après la visite de Lidia, se rappela Madame Lappinger, elle et Monsieur Lappinger trouvèrent une référence dans la littérature baha’ie encourageant l’apprentissage de l’espéranto, ainsi ils prirent un cours dans la langue. “Mais les gens laissaient tomber chemin”, se rappelle elle, “jusqu'à ce que tout le monde abandonne”. Lidia et son oncle, le docteur Félix Zamenhof étaient les seuls membres de la famille Zamenhof qui assistaient au congrès à Budapest. A la session d’ouverture, le président du congrès les salua et leur demanda de s’asseoir à la table avec les officiels sur l’estrade. Le public confirma l’invitation avec des applaudissements vigoureux. A la première réunion de travail, Lidia parla durant une discussion de prononciation. Arnold Behrendt, un officiel de la poste de Berlin, dit qu’il sentait que le sujet avait été suffisamment discuté. Pas assez, dit Lidia. Car il y a toujours de nouveaux espérantistes, et particulièrement pour eux, de telles discussions seraient utiles et instructives. Plus tard, Lidia parla à nouveau, en désaccord avec Monsieur Behrendt sur un autre sujet. Durant le congrès, les représentants allemands acceptèrent une couronne au nom du congrès à la “Tombe du soldat inconnu”. Lidia décrivit l’événement: “Ici, où finit la rue Andrassy, près du beau parc de la ville, un grand monument s’étire en direction du ciel. Un amas de fleurs est couchée là, un soldat à cheval se trouve garde... “Tombe du soldat inconnu ! Combien d’autres tombes similaires, combien d’autres monuments de bronze ou de marbre voit-on dans l’Europe d’après guerre !”. Longtemps après la guerre, elle observa, “les monuments restent - l’inconnu Abel accuse l’inconnu Caïn”. Ceux qui voient de tels monuments comme tributs de la gloire militaire se trompent, écrivait Lidia. Ils ne voient pas les pleurs, mélangées avec les fleurs, ne ressentent pas la prière silencieuse de millions de coeurs que jamais des soldats inconnus ne devraient encore périr dans des batailles sanglantes ; ils ne comprennent pas qu’un tel monument, bien que glorifiant extérieurement le spectre de la guerre, est dans son sens le plus profond un cri puissant pour la paix”. Aucun discours éloquent ne résonna en ce jour. Les espérantistes inclinaient leurs têtes en silence. Lidia regardait le groupe de personnes ici, parmi eux des français et des allemands “qui n’avaient pas encore oublié les temps agités lorsque, couchés dans l’attente dans les tranchées, ils pointaient leurs fusils vers l’ennemi” - les uns avec les autres. “... Et Dieu seul sait”, observa elle, si les balles qui perçaient le corps du soldat inconnu n’avait pas été déchargées par la main de l’un de ceux présents”. Deux réunions baha’ies se tinrent durant le congrès. Lidia parla aux deux, et servit comme présidente honorifique. Sa lecture sur la foi baha’ie était tirée du livre du docteur Esslemont, qu’elle avait traduit. Son discours était “excellent”, disait le professeur Paul Christaller, un baha’i de Stuttgart. Durabt la discussion, les personnes dans le public formulèrent des questions que, comme le nota le docteur Christaller, Lidia répondit directement et bien. Son discours fut réimprimé dans le journal espérantiste ‘Le Nouveau Jour’, publié en Allemagne, aussi bien que dans le journal espérantiste international ‘Heroldo de espéranto’. Ce fut la même lecture à laquelle le club de Varsovie s’était détourné. Lidia et Martha se séparèrent à la gare de Budapest, Lidia allant en Pologne, Martha en Orient. A la maison à Varsovie, Lidia craignait qu’elle ne puisse plus à nouveau voir sa chère Martha. “Je l’aime beaucoup”, dit Lidia à Agnès Alexander, une baha’ie espérantiste avec qui elle avait commencé à correspondre. La descendante des missionnaires chrétiens aux îles Hawaï, Agnès Alexander avait été une enseignante baha’ie au Japon depuis 1914. Elle avait été espérantiste depuis les jours de Louis Zamenhof. “J’ai entendu parlé de nôtre chère Martha Root et j’ai reconnu vôtre nom dans les livres baha’is”, écrivait Lidia à Agnès. “Ce fut un grand honneur et un grand plaisir de recevoir vôtre lettre”. Lidia inclua un message spécial pour un groupe espérantiste japonais appelé ‘Le cercle clair’: “Avec joie, j’ai entendu parlé de la propagation de l’espéranto au Japon”, leur dit-elle. “Les japonais ont une grande compréhension de l’utilité pratique de la langue internationale. Je serais heureux si je savais aussi qu’ils comprennent aussi bien l’idéal élevé de l’humanité de cette langue. “Baha’u’llah, le grand prophète du siècle dernier, dit il y a quelques décennies que la langue internationale est nécessaire pour atteindre la paix éternelle. C’était aussi le but de l’auteur de l’espéranto, et c’est l’étoile, qui non seulement à travers le vert mais à travers toutes les couleurs de l’arc-en-ciel illumine et éclaire nôtre horizon”. ================================ Chapitre 11: “Un monde entièrement nouveau” Le “Batory” était prévu d’arriver au port de New-York le mercredi 29 septembre, et lorsque le jour arriva, des journalistes de tous les journaux de New-York étaient en train d’attendre dans la chambre d’hôtel de Lidia pour l’interviewer. Mais le bateau avait un jour de retard et ils partirent déçus. Le jour suivant, tôt le matin, un petit groupe de baha’is et d’espérantistes attendaient au port pour accueillir Lidia. Horace Holley et Della Quinlan - tenant un bouquet de dahlias - étaient parmi eux. A bord du “Batory”, Lidia vit la “statue de la liberté” surgissant du brouillard matinal. Elle regardait les autres passagers, beaucoup d’entre eux étaient des immigrants, et observa: “l’émotion était visible sur chaque visage, en dépit d’un masque d’indifférence, lorsque les officiels américains sur le bateau vérifiaient les passeports, ... les déclarations, les certificats, pour décider de la vie ou de la mort: admettre ou non les étrangers sur le territoire américain ? Que s’était-il passé, “se demandait-elle”, à la dernière minute, pour cette vieille femme à qui j’avais aider à préparer sa déclaration de douane pour un samovar et des bougeoirs de fêtes, les derniers souvenirs du vieux monde, de l’ancienne vie ? La pensée d’elle me vint seulement plus tard, car dans le même temps, j’expérimentait moi-même une certaine émotion lorsque mon passeport disparut dans le portefeuille des officiels pour “vérifier” la vérité de mes affirmations sur le but de mon voyage et à propos de l’organisation qui m’avait invité”. Horace Holley attendait de signer la garantie pour elle avec les officiels de l’immigration. Bien qu’il était arrivé au port prêt à payer les 500 dollars de douane, les officiels ne le lui demandèrent pas. Mais les douaniers firent à Lidia une fouille complète, soupçonneux de ce qui apparaissait être une collection bizarre d’objets dans ses bagages. Ils semblaient “quelque peu surpris par la batterie de stylos, d’animaux en caoutchouc et d’autres choses nécessaires pour l’enseignement “Cseh” dans ses bagages. Alors que Monsieur Holley conduisait Lidia à son hôtel, New York “l’absorbait”: “incomparable pour ses gratte-ciel, le trafic fiévreux, la grande foule de personnes, d’automobiles, de toute chose que le monde possède. Mes genoux tremblaient encore et je ressentais encore le roulis du bateau, mais il n’était plus temps de penser à cela. Ma chambre au 16ème étage d’un hôtel de New York se remplissait rapidement de journalistes et d’espérantistes. En Amérique, on ne perds pas son temps”. En fait, à ce moment-là, seuls quatre journalistes se présentèrent, mais ils restèrent longtemps, posant des questions. A la fin, seuls le “New York Suns” et le New York News publièrent l’histoire. Un article dit: “Bonjour ! dit la dame. Des reporters non informés sont incapables de répondre. Ils ne connaissent pas l’espéranto. “Bonjour”, une jeune femme mince portant des lunettes saluait un groupe de reporters quelque peu effrayés... “Comment vous vous sentez ?”. “Pouvez vous le répétez ?”, répliqua l’un d’eux. Et la jeune femme répondit: “Bonjour, comment allez vous ?”. ... Et ainsi, le 4ème état était à nouveau introduit à l’espéranto, la langue internationale, par son principal avocat, mademoiselle Lidia Zamenhof, la fille la plus jeune de son récent fondateur. Après avoir démontrer qu’elle pouvait parler anglais si elle était concentrée, Mademoiselle Zamenhof parla l’espéranto et là, elle resta au regard de beaucoup, amadouant durant le reste de l’interview. Les journalistes apprirent bientôt que ses mots de salutation signifiaient simplement, “Bonjour ! Comment allez-vous !”. Les journalistes semblaient moins intéressés par l’espéranto que de demander à Lidia des questions personnels qu’elle n’était pas habituée à se voir posé par des étrangers. Quel âge avait-elle et quelle était sa taille ? Lorsque le journaliste du ’Sun’ lui demanda combien elle pesait, elle sembla embarrassée. Il cria, “Laissez-moi deviner, laissez-moi deviner”, et il la fit se lever. Il la regarda partout, pinça son bras, et annonça qu’elle pesait environ 100 livres. “Elle accepta”, raconta plus tard Della Quinlan, “sans bouger un cheveu. Mais lorsque il sortit, son visage était méditatif ! Elle dit lentement et avec emphase, “C’est un monde entièrement nouveau !”. Un journaliste demanda à Lidia, “Avez-vous un petit ami ? et il rapporta sa réponse ainsi: “N’a pas le temps pour de telles sotises», sa réponse ou la traduction, ou les deux, sonnait ainsi”. Le journaliste Howard Whitman, dont l’article, intitulé “la fille de l’espéranto ici pour combattre Babel”, publié dans le ‘Sunday News’, n’était pas aussi entièrement sérieux dans sa couverture du voyage de Lidia pour porter “la torche du travail de la vie de son père en Amérique”. Il écrivit de l’espéranto: Un vocabulaire de démarrage essentiel pourrait inclure: ”Hé, copain, je t’aime, envoie-moi cinq dollars”. Expliquant que les espérantistes portaient une étoile verte dans leurs revers pour se reconnaître les uns les autres, il suggéra: La prochaine fois que vous voyez quelqu’un, essayez “Donnez-moi 5 dollars”, qui est aussi bien un moyen de voir combien l’amour fraternel que la langue a engendré”. L’article était accompagné d’une photo de Lidia, “croisé de l’espéranto”, entourée de ses animaux en caoutchouc et d’autres objets de démonstration de cours Cseh, et l’en-tête disait: “Vous avez possédé quelque chose ici !”. Deux jours après l’arrivée de Lidia, l’assemblée spirituelle des baha’is de New York City tint un thé pour elle au centre baha’i situé 119 de la 57ème rue ouest, et les espérantistes de New York donnèrent un repas pour la présenter aux espérantistes. Au centre baha’i cet après-midi, une foule nombreuse s’était réunie pour rencontrer Lidia. Mais ceux dans le public qui connaissaient les reportages défavorables de Samuel Eby sur la capacité de Lidia à parler incontestablement, attendaient son discours avec inquiétude. L’avocat distingué Mountfort Mills ouvrit la réunion, saluant Lidia de la part de l’assemblée spirituelle nationale. Della Quinlan la salua au nom des baha’is espérantistes. “Puis”, dit plus tard Della à Joséphine Kruka, “elle monta à la tribune... et elle parla en anglais avec un accent français délicieux. Et Joséphine ! elle les enflamma. C’était un discours admirablement réfléchi, montrant une compréhension fondamentale de l’esprit de la cause. Elle finit en espéranto, que James Morton traduisit. Elle n’avait pas plutôt quitter la tribune, que Monsieur Mills monta à moi et dit que c’était l’une des meilleures choses qui n’avait jamais été faite à New York, elle parlerait dimanche prochain. “Della était accablée de confusion et de joie. “Oh !, Joséphine, nous “avons quelque chose ici”, comme ils disent”. Della fut instantanément charmée par Lidia. “Lidia est si gentille”, ecrivait-elle. “Lorsqu’elle cherche quelque chose dans la chambre, elle met son doigt au bord de son nez et dit: “Maintenant, où est-ce ? “Elle est tellement fragile !”, disait Della à Ernest Dodge. “Son photographe rends son regard grand pour quelque raison inconnue”. “Aucune image ne lui rends justice. Elle est si vivante !”. Ce soir, la réunion de la société espérantiste de New York allait être dédiée à une leçon de démonstration Cseh. Diana Klotts, une journaliste d’un périodique juif, ‘La Sentinelle’, était là. Elle avait rencontré Lidia à sa chambre d’hôtel plus tôt dans la journée. “Petite, la blonde Lidia Zamenhof n’est pas belle.Non, au moins, dans le sens acceptée du terme”, était sa première impression. Mais après avoir vu le cours de démonstration, elle écrivit: “C’est le soir, et la chambre est de New York est comble de gens qui écoutent une jeune femme d’environ 33 ans dont les yeux scintillent derrière des lunettes en monture de coquilles. Avec tout le courage et la sagesse d’une Minerve moderne, elle se tient devant son public et avec une voix pleine de générosité dit de manière étrange, en signe d’introduction, “Je suis Lidia Zamenhof”. Et tous immédiatement, la mince blonde Lidia Zamehof est belle, irradiant de cette grâce et de ce charme qui émane d’une vraie grande... “Alors que le soir avançait et que son introduction était finie, elle descendit de la tribune et la première leçon en espéranto commence. Et il y a de l’humour - des rires - beaucoup de plaisir dans la petite salle est. Il n’y a rien d’ennuyeux à propos d’une langue aussi vivante que l’espéranto... Elle dira “Je vous aime. Et il y a la réflexion d’une étrange lumière intérieure. Oui, Lidia Zamenhof est belle - comme le message qu’elle apporte”. L’article, intitulé “La grande prêtresse de l’espéranto”, fut vendu et envoyé à une centaine de périodiques juifs. Deux semaines plus tard, Lidia parla à nouveau au centre baha’i. Son discours était intitulé: ”Le retour de l’héroïsme spirituel”. Ce fut une nouvelle fois un succès. Avec délectation Della dit à Joséphine: “Philippe Marangella dit qu’il n’a pas vu comment elle pouvait soutenir son discours à un tel niveau spirituel pendant une durée aussi longue. Je pense que c’est le plus grand compliment qu’un orateur ait jamais reçu à entendre”.Della écrivit à Jessie Revell, de Philadelphie: «Horace m’a dit ce soir qu’il souhaitait qu’elle puisse s’installer ici en Amérique. Vous savez qu’il ne loue pas à la légère”. Et à Lucy Marshall à San Fransisco: “Elle a une qualité particulière que je n’ai jamais vu défiler auparavant. Une grande simplicité combinée avec une profonde compréhension de la réalité spirituelle”. En dépit des peurs, Lidia avait confié une fois à Martha Root, qu’elle ne pourrait pas donner des discours devant des compagnons croyants, Lidia avait rapidement capturé les coeurs des baha’is américains. Mais les ennuis venaient juste de commencer. Les relations entre les espérantistes et les baha’is étaient devenues tendues dès le début par la confusion sur quel rôle les baha’is espéraient que les espérantistes jouent dans la visite de Lidia. Certains des espérantistes avaient été heurtés parce qu’ils n’avaient jamais été approchés officiellement par l’assemblée spirituelle nationale elle-même, mais seulement par le docteur Charles Witt, président du comité international de langue auxiliaire. Ils ne pouvaient pas comprendre pourquoi le docteur Witt ne leur avait encore écrivait jamais et ils étaient intrigués pourquoi Della Quinlan était la seule à laquelle ils n’avaient jamais entendu parler. Tant bien que mal, elle avait négligé de leur dire qu’elle était la nouvelle présidente du comité. Finalement ce problème fut résolu, mais une certaine amertume des deux côtés restait. Elle devint bientôt aggravé par un conflit entre deux membres du comité d’organisation de Lidia, Della Quinlan et Samuel Eby. A la lumière des premiers discours bien acceptés à New York, les déclarations discréditantes que Monsieur Eby avait faite sur la capacité de Lidia de parler en public semblaient très bizarres. Alors que les événements progressaient, Della vint à sentir, comme elle, que l’homme avait “développé un antagonisme envers Lidia et l’idée complète de l’avoir ici”. Elle confia à Lucie Marshall que “j’ai peur que ce soit une indication d’un antagonisme envers la foi baha’ie”. Les classes d’espéranto de Lidia à New York commencèrent avec 53 élèves, qui payèrent 5 dollars pour la série de leçons. Les américains avaient espéré attirer plus d’élèves et furent déçus. Pourtant, un reportage établit avec optimisme, “Si l’on considère les difficultés que le mouvement espéranto a expérimenté dans cette grande ville, ces résultats sont en réalité satisfaisants... Beaucoup de baha’is, qui n’étaient pas jusqu'à présent intéressés à la langue mondiale, ont commencé l’étude de l’espéranto”. Selon Della, la pauvre assistance était largement du au manque de publicité. Bien que Monsieur Eby avait payé pour Lidia pour rester plusieurs jours à New York afin de pouvoir être disponible aux journalistes, Della affirma qu’il avait refusé de faire de la publicité pour ses cours. Ils avaient été dénombrés sur des contacts de journaux: il avait travaillé au ‘New York Times’ comme correcteur d’épreuves. Bien que tout d’abord Lidia était inconsciente des problèmes que Della avaient eu avec Monsieur Eby, Della pensait que Lidia ressentait l’atmosphère de tension, “les conditions autour d’elle”, et que cela lui donnait son “indigestion nerveuse”. Au milieu d’octobre, Lidia était si malade qu’elle dut annuler un cours. En fait, Lidia avait été malade depuis sa première semaine en Amérique. A un pique-nique dans le pays par un froid jour de pluie, elle avait attrapé un mauvais rhume qui se prolongeait. La tension du voyage par océan et l’adaptation à un pays étranger avaient prélevé sans doute une partie de ses forces. Pour corser les choses, les conditions dans la maison où elle vivait étaient loin d’être idéales. Monsieur Eby s’était arrangé pour elle de rester avec une famille espérantiste dans le Bronx durant le reste de son temps à New York. Ce fut à une longue distance de ses cours et trop loin pour des personnes qui venaient et qui lui rendaient visite aisément. Bien que Lidia avait demandé pour que ce soit une chambre propre et chaude, l’hiver était là et le radiateur dans la maison était cassé. L’homme, chez qui elle était une hôte, était dévoué à elle”, mais il manifesta u comportement alarmant et imprévisible. Après avoir expérimenté l’un de ses déchaînements, Madame Holey fut tout à fait bouleverser que Lidia ait été placée là. En dépit de la maladie de Lidia, elle avait le même effet dynamique sur ses élèves en Amérique comme elle l’avait eu en Europe. ”Elle apparaît être une personne très calme”, écrivait Della, “mais lorsqu’elle se mettait debout devant une classe, elle changeait. Puis on voit une personnalité vive, intéressante. L’un de mes amis me dit après l’avoir observé “elle est la chose la plus fascinante que je n’ai jamais observé”. Lidia se battait avec ses cours, dissimulant sa maladie jusqu'à ce qu’il devint évident qu’elle était en fait très malade. Même lorsqu’elle insista qu’elle était seulement “un petit peu malade”, et que ce n’était “rien de sérieux, probablement de la fatigue”. Mais après beaucoup de cajoleries, elle fut persuadée de consulter un médecin - un espérantiste qui avait connu son père à Varsovie. Il diagnostiqua sa maladie comme la jaunisse, et elle eut à reporter ses cours pendant une semaine. La tension entre Della Quinlan et Samuel Eby augmentait constamment. Della sentait qu’il avait agi bizarrement depuis son retour de Varsovie. Elle ne comprenait pas pourquoi il avait soudainement développer une telle attitude antagoniste, car ils avaient été en bons termes depuis deux ans. Mais maintenant il donna de comprendre à Della qu’il souhaitait reprendre lui-même le travail du comité organisateur et qu’il ne consulterait avec quiconque à propos des plans pour Lidia. Della sentait que l’homme de 81 ans pourrait avoir souffert d’une sorte de sénilité démente progressant rapidement. En tant que président du comité organisateur, il tenait encore un pouvoir considérable, et Della s’inquiétait de ce qu’il pourrait faire prochainement pour saboter la visite de Lidia. Pour Della, Monsieur Eby semblait courroucé que Lidia ait tant de succès, et irrité que les baha’is l’aiment autant. Della se plaignit à Ernest Dodge: Il dit qu’il n’avait pas l’intention de l’envoyer où il y avait des baha’is “enragés”. Au comble de la fureur, Monsieur Dodge rappela à Mademoiselle Quinlan au sujet des documents de Lidia et les lois sur le désistement d’une embauche. Della lui dit que le visa de Lidia était valable une année. “Tout le monde vous assure qu’il peut être facilement renouvelé”, affirmait-elle avec confiance. Elle voulait essayer, disait-elle, d’obtenir des informations précises. Mais Della était occupée par beaucoup de choses - son propre travail à la Bourse, coordonnant les horaires de Lidia, écrivant à tous les différents groupes qui souhaitaient que Lidia leur rendent visite, et traitant avec le difficile Monsieur Eby. Mademoiselle Quinlan elle-même n’était pas bien, et souffrait d’un cancer. Ainsi, une nouvelle fois, l’affaire du visa avait été mis de côté. Fin Octobre, la santé de Lidia s’était beaucoup améliorée. Mais les Holleys et Della Quinlan s’entendirent pour qu’elle déménage de la maison où elle était restée, bien qu’ils étaient peu surs de comment l’obtenir sans heurter ses sentiments d’hôte. Madame Quinlan et Monsieur Holley allèrent visiter Lidia, et Monsieur Holley proposa que l’assemblée spirituelle soit son hôte pour décembre, afin qu’elle puisse avoir plus de contacts avec les baha’is. Lidia approuva. Le docteur qui avait traité Lidia les avertirent de ne pas attendre trop longtemps. Selon Della, les conditions qu’elle trouva dans la maison l’avait choqué et il ne voulait pas qu’elle reste un autre pois là-bas. Lidia n’était pas très forte, disait-il. Elle avait besoin de retrouver ses forces et d’avoir la paix et la tranquillité. Il pensait que là-bas, il y avait trop d’étages à grimper, les conditions de la salle de bains n’étaient pas correctes et elle n’était pas nourrie convenablement. Durant ces jours difficiles, Lidia reçu une lettre de Shoghi Effendi dans laquelle il envoyait ses “prières ardentes pour vôtre succès sans précédent dans vôtre voyage historique aux Etats-Unis” et lui dit de “persévérer et d’être confiante”. Début novembre, Della et Joséphine furent stupéfaits d’apprendre que Samuel Eby avait porté plainte contre eux avec le comité exécutif de l’association espérantiste de l’Amérique du Nord. Plus que jamais, Monsieur Eby avait exprimé clairement son opinion que les espérantistes ne devraient pas coopérer avec les baha’is sur tous les plans de Lidia. Une telle coopération, sentait-il, signifie enchevêtrer le mouvement neutre espérantiste dans une dangereuse alliance avec une foi religieuse. Monsieur Dodge essaya de le persuader que ce n’était pas vrai et dit qu’il espérait que Lidia réveillerait l’intérêt à l’espéranto parmi les baha’is américains. Monsieur Eby continuait de dénigrer Lidia en tant qu’oratrice. Ayant une telle opinion défavorable sur elle, son insistance de fermer tous ces projets fit une petite prise de conscience à Della, qui sentait qu’il voulait simplement garder les baha’is hors d’elle. Cela lui semblait évident qu’il avait l’intention d’empêcher Lidia de donner des discours publics pendant son séjour en Amérique. Joséphine Kruka, a qui Della confiait ses difficultés à venir, des lettres angoissées, indiquant qu’ils devraient “faire de lui un ami plutôt qu’un ennemi”. Della accepta niaisement le blâme mais continua d’être exaspérée lorsque Lidia insistait pour que Della soit polie avec l’homme. Si Lidia ne savait pas exactement ce qui était mal pris, elle savait que quelque chose était en fait terriblement faux parmi les personnes autour d’elle. Lorsque Monsieur Eby l’ignora complètement à une réunion où elle allait être l’invité d’honneur, et qu’il refusa de discuter de ses projets avec elle, Della avait enfin à expliquer à Lidia ce qui se passait. Maintenant, Lidia comprit finalement la raison pour l’atmosphère de tension et de distraction parmi ceux qui étaient supposés être les organisateurs et les promoteurs de ses cours. Mais la réponse de Lidia n’était pas de prendre partie, ou d’engager la polémique, mais de rester au-dessus de la division et de se concentrer sur son travail. Bien qu’en privé, elle devait être angoissée du fossé entre ses collaborateurs, qui avaient franchement entravé les efforts de l’espéranto et jeter un nuage sombre sur sa visite en Amérique, Lidia s’abstint de se plaindre de cela et essaya de rester en bons termes avec tous. Samuel Eby insinua à Ernest Dodge qu’il voulait que Della et Joséphine soient évincées du comité de Lidia. Mais lorsque Monsieur Dodge refusa d’obéir et à la place suggéra que Della reçoive le rôle de leader en menant à bien l’itinéraire de Lidia (ce qu’elle avait fait tout au long), Monsieur Eby se résigna. Ce fut malheureux de ce qui pourrait avoir été une maladie physique pour laquelle, il n’était bien sur pas responsable, le mena à jouer le rôle de l’adversaire dans la visite de Lidia en Amérique. Cela allait être l’une des dernières choses qu’il fit: il mourut une année plus tard. Quel que soit la cause de son antipathie envers Lidia - Della le sentit plus tard avait commencé au congrès de Varsovie lorsque Lidia n’avait apparemment pas fait assez attention aux visiteurs américains selon leur attente - son comportement désorienta tellement Madame Quinlan qu’elle négligea de regarder l’affaire des documents de Lidia. A ce moment, cela semblait être un détail sans importance, mais à la fin, cela se révéla avoir des conséquences tragiques. Un soir à la fête des 19 jours à New York, Lidia rencontra enfin Roan Orloff (plus tard Stone), la jaune enseignante Cseh avec qui elle avait correspondu. Roan travaillait à la Maison d’état de Boston et vivait seul à l’hôtel. Sa mère, une “juive orthodoxe” fanatique, ne la voulait plus dans la maison depuis que Roan était devenue baha’ie. Roan avait été désireuse de rencontrer Lidia. Au centre baha’i, la salle était pleine de personnes du coin, parlant en anglais. Lidia était assise seule dans le coin d’un grand sofa, avec, se rappelle Madame Stone, “un regard de tristesse qui est si caractéristique de beaucoup d’expressions de juifs”. Roan approcha et la présenta elle-même selon la méthode Cseh: “Bonsoir. Je suis Roan Orloff. Qui êtes-vous ?”. Lidia sourit et dit: “Je suis Lidia Zamenhof”. Mais lorsqu’elle réalisa que Roan lui parlait en anglais, “tout soudainement, elle devint une autre personne”, se souvint Roan. “Elle devenait vive, il y avait un regard de curiosité et de joie sur son visage en réalisant qu’il y avait quelqu’un dans la salle qui pouvait lui parler dans sa propre langue”. Lidia se sentait déjà proche de Roan et elle lui avait écrit de France: “Je sens que nous sommes de vraies soeurs, en tant que baha’ies, en tant qu’espérantistes et finalement pour nôtre amour commun de la chère Martha Root, que j’appelle toujours ma mère spirituelle”. Au centre baha’i à New York, Lidia rencontra le docteur Ugo Giachery et sa femme Angeline. Les Giachery s’étaient préparés à rencontrer la fille du célèbre docteur Zamenhof, mais ils furent surpris et ravis de trouver une jeune femme modeste, effacée, qui parlait très bien l’anglais, avec un léger accent, et qui était dévoué à sa foi. “il y a certaines femmes qui ne sont pas belles mais qui sont attirantes”, se rappela le docteur Giachery quelques années plus tard, “mais il y a quelque chose qui vient de l’intérieur. Et vous êtes attiré même si il n’y a pas ce que vous appellerez une bonne physionomie ; vous étiez attiré par elle ; elle avait son propre charme”. Les Giachery furent particulièrement touchés par le dévouement de Lidia à la foi baha’ie. C’était, remarqua le docteur Giachery, “une qualité rare d’une espérantiste ; de tous ceux que nous avions rencontré auparavant, seuls une poignée avait montré quelque intérêt dans la foi baha’ie”. “En tant que baha’i”, disait-il, “elle était une croyante ferme, constante et convaincue de la foi. Et ce n’était pas à cause d’un mirage de bénéfices, de profits matériels, mais ce dévouement qu’elle avait développé pour la foi. Et je pense qu’être la fille de Zamenhof n’était pas suprême dans sa vie. Elle était comme vous et moi qui parlait de la foi et qui oublie son passé”. Consciente des persécutions grandissantes des juifs en Europe, les Giachery dirent à Lidia qu’elle ne devrait pas retourner en Pologne mais qu’elle devrait rester en Amérique. ================================ Chapitre 12: “Semer des graines”. Lidia trouva bientôt que comparé à l’Europe, L’Amérique était en fait “un monde entièrement nouveau”. Elle était étonnée par certains aspects de la vie aux Etats-Unis. “Ici, on peut manger de la glace deux fois par jour”, écrivait-elle. “C’est presque le plat national et je suis désolée que mon neveu, qui adore la glace ne soit pas là”. “Vous pouvez en achetez dans chaque magasin”, disait-elle dans une lettre aux espérantistes européens, et elle ajouta avec surprise que “dans les magasins américains, les médicaments semblent jouer le rôle le moins important”. Elle leur parla des 50000 magasins où l’on peut acheter “tout ce que l’on a besoin pour la vie quotidienne: en hiver des gants chauds, en été une salle de bains, et en toutes saisons - de la glace”. Lidia s’amusa à trouver que les gratte-ciel de New York avaient des ascenseurs locaux et rapides comme des trains. Et les heures d’affluence à New York: “des harengs dans une boite jouissent du confort et du luxe comparés avec les new-yorkais dans des trains après la fermeture des magasins et des bureaux !”. Elle n’avait jamais vu une voiture d’occasion auparavant. “Dans certains pays”, écrivait-elle, “un homme pauvre qui ne peut acheter de nouveaux vêtements va dans un magasin d’occasion et achète un vieux manteau. L’américain qui ne peut se permettre d’acheter une nouvelle voiture (de telles personnes sont même nombreuses) va dans un jardin où de vieilles voitures... attendent quelqu’un pour les acheter”. Parce que Lidia avait besoin du revenu de ses cours pour payer ses dépenses, il fut décidé qu’elle visiterait seulement de grandes villes dans l’est et le Midwest, où des groupes baha’is et espérantistes étaient établis. Elle fut déçue, car elle avait espéré voyager autour des Etats-Unis, mais l’expérience lui avait enseigné de prendre les choses comme elles venaient. “Parfois, il me venait à l’esprit de faire des plans qui me semblaient très intelligent, sages, etc...”, disait-elle, “et ils étaient renversés comme un château de cartes”. Et le Très Grand Planificateur faisait d’autres plans...”. Dans ses discours publics sur la langue internationale, Lidia insistait toujours à parler espéranto avec un traducteur, mais elle admit à présent qu’elle pouvait “essayer de parler anglais” avec des personnes telles que des journalistes. A New York, elle parla à un public de 500 personnes de l’association des femmes journalistes et parla aux élèves des hautes écoles cadettes de Brooklyn et de l’Orange de l’est du New Jersey. Un jour à New York, elle donna un discours au centre baha’i sur “La langue et l’unité mondiale” , partageant le programme avec Dave Hennen Morris, ancien ambassadeur américain de Belgique, et sa femme. “Cela partit vite”, dit Della à Joséphine. “Monsieur et Madame Morris parlaient bien, mais sans quelque esprit particulier... Puis Lidia se présenta ainsi, contre eux ! Le docteur Ali Kuli Khan l’entendit pour la première fois cet après-midi. Ses mots à Madame khan sont la meilleure description de Lidia sur une estrade baha’ie. Il dit qu’elle a le feu de l’esprit, de la foi et de l’éloquence”. A New York, Lidia rencontra Agnès Alexander, qui venait juste de faire un pèlerinage à Haïfa et qui était installé aux îles Hawaï après plusieurs années au Japon. Mademoiselle Alexander partagea avec Lidia ses notes de conversations avec Shoghi Effendi. Le Gardien, dit-elle, avait demandé à certains baha’is de milieu catholique qu’une fois qu’ils étaient baha’is, ils devaient se démettre de leurs églises chrétiennes. Lidia se demandait si cette instruction s’appliquerait aussi bien pour elle. Toujours préoccupée de faire la bonne chose, elle écrivit à Shoghi Effendi pour son conseil. Elle était encore officiellement et légalement juive, mais, elle expliquait qu’appartenir à la communauté juive plus de signification juridique que religieuse. Certains juifs, lui dit-elle, quittaient la communauté afin de ne pas avoir d’obstacle à leur carrière. Elle cita la persécution que les juifs de Pologne souffrirent et ajouta que se démettre formellement dans un tel moment signifierait affaiblir la communauté. Elle n’en voulait pas ainsi, mais, lui dit-elle, elle était consentante de faire comme il l’ordonnait. Elle attendit avec anxiété sa réponse. Lidia dut partir de la maison dans le Bronx le 1er décembre. Mais la personne chargée de faire les arrangements pour elle ne l’avait pas encore fait, ainsi son départ fut retardé. Lidia avait continué d’être malade avec un coup de froid du temps où elle était là-bas. Quelques temps après, elle déménagea à la maison Allerton sur la 55ème rue, où elle resta jusqu'à son départ de New York. Lorsqu’on lui demandait, Lidia ne parlait jamais des problèmes et ne faisait aucune allusion de la vraie raison de son départ, admettant seulement que c’était une grande distance - une heure de train du centre. Après que Lidia partit de leur maison, son ancien hôte et sa femme arrêtèrent d’assister à ses cours, et Samuel Eby abandonna également. Son ancien hôte commença à faire, selon Della, “des déclarations très extravagantes sur elle” - Della ne pouvait même pas apporter elle-même à dire à Joséphine ce qu’il en était. “Les choses qu’ils disent sont mauvaises”, insinua elle sombrement. “Et les remarques sont légalement applicables”. Finalement, le 2 Janvier Lidia quitta New York pour Philadelphie, où elle resta 7 semaines, séjournant dans la maison de Monsieur et Madame Joseph Dubin. Les choses n’allaient pas aussi douces qu’elle l’avait espéré. Aucun discours radio n’avait été arrangé, et bien que des centaines d’annonces avaient été envoyés aux écoles et aux sociétés, il y eut peu de résultat. La couverture de la presse était décevante. Les papiers polonais et un périodique lithuanien imprimèrent des petites annonces, et seuls deux journalistes de journaux importants vinrent interviewer Lidia. Seul un journal, le “Record de Philadelphie”, imprima un article, avec une grande photographie de Lidia, ses cheveux sont brillants dans le flash du photographe, et son fort menton faisant saillie en avant. L’article était court, mais le titre réclamait l’attention: “Heureuse nouvelle année”, s’exclamait la brillante jeune femme ; ”interdit”, grogne Hitler... “J’ai trouvé”, disent 1 million”. Le journaliste la trouva “plutôt comme un jeune femme légère comme un oiseau”, et il était ouvertement sceptique de la facilité avec laquelle elle lui assurait que l’espéranto pourrait être appris. Il écrivit: “comme la guitare hawaïenne ou un engin aéronautique, cela peut être maîtrisé, dit-elle, en 20 petites leçons”. L’article appelait l’attention à la suppression de l’espéranto en Allemagne et le fait que cet espéranto, trouvait Monsieur Goebbels, ”était inconsistant avec les buts du nationalisme nazi”, aussi bien que le fait que l’auteur de l’espéranto était un juif polonais. Bien que l’article pouvait ne pas avoir attiré beaucoup l’attention à Philadelphie, plus tard, des événements montreront que la publicité comme celle-ci trouva des lecteurs intéressés à Berlin, particulièrement au bureau de la Gestapo en charge de contrôler les activités des juifs à l’étranger et dans la presse étrangère. La rencontre baha’ie un jour avant le cours fut une catastrophe. Horace Holley présenta Lidia, mais il avait à prendre un train et partit alors qu’elle commençait à parler. Plus tard, Lidia fut “presque heureuse” qu’il ne fut pas là pour entendre ce qui s’était passé. Jessie Revell avait suggéré que Lidia donne son discours en anglais, mais Lidia, souhaitant que le public l’entende parler anglais - et probablement encore hésitante sur sa propre capacité à parler en anglais - insista à parler avec un traducteur. Ensuite, elle fut désolée de n’avoir pas pris le conseil de Mademoiselle Revell. Dès les premières phrases que le traducteur disait, Lidia réalisa que quelque chose était affreusement erronée. Le traducteur, un espérantiste de longue date, n’interprétait pas correctement ses mots. Plutôt que de l’offenser en lui demandant de s’asseoir, elle commença à parler elle-même en anglais, Lidia luttait. Mais cela devint pire. Plusieurs fois elle avait à l’arrêter et insistait sur une traduction plus correcte: ce qu’il disait était complètement différent de ce qu’elle disait - presque le contraire ! Et elle devint de plus en plus ennuyée du manque de sérieux avec lequel il traitait de la chose. Il n’y avait aucune excuse pour sa prestation - elle lui avait donné le texte de ses notes à étudier plusieurs heures auparavant. Della exprima sa surprise sur sa conduite. “Il connaît bien l’espéranto et il pourrait certainement traduire correctement pour vous”, dit-elle à Lidia. “J e pense peut-être qu’il a eu des difficultés avec les baha’is précédemment et il ne les aime pas”. L’épisode déprima Lidia, et le jour suivant - le jour du cours d’introduction - des choses allèrent de travers toute la journée jusqu’au soir. Mais soudain cette soirée, Lidia sentit, “le baromètre changea”.Au dîner, son hôte avait été appelé à l’extérieur pour quelques minutes pour attendre un visiteur et la conversation “me donna la chance de dire quelques mots sur Baha’u’llah. Peut-être ces mots seront complètement perdus, je ne crois pas”, écrivait-elle à Della, “mais j’ai remarqué presque avec étonnement que cette courte conversation me rétablie et me revivifia”. Bien que 200 personnes assistèrent à la leçon de démonstration, le cours commença avec seulement 25 élèves. Lidia avait insisté pour tenir les cours trois fois par semaine, mais quelques personnes avaient la volonté d’y assister souvent. Della écrivit pour l’encourager: “Sachez que les amis vous entoure de leurs pensées d’amour. Mercredi soir chez les Holley, lorsque je disais au revoir à Doris Holley, elle me disait, “Je pense que Baha’u’llah aime beaucoup Lidia Zamenhof”. Quand même les choses n’allaient pas sans heurts pour Lidia à Philadelphie, ceux qui la rencontrait étaient attirés et impressionnés par elle. Jessie et Ethel Revell la reçurent chez eux à plusieurs reprises. Plus tard, Jessie Revell écrivit à Della Quinlan: “Lidia est une très bonne enseignante baha’ie, sa profondeur de la connaissance baha’ie est très étonnante... Pendant qu’ici, nous la prirent à Cédarville, NJ, pour visiter un Ministre baptiste espérantiste, et ce fut un tel plaisir pour nous de l’entendre enseigner la Cause à cet homme. Elle attira aussi un jeune couple... à la Cause... Elle est très chère aux coeurs de tous les amis ici t aussi des espérantistes”. Joseph Dubin, l’hôte de Lidia à Philadelphie, vint à admirer Lidia. Il dit à Della qu’en premier, il avait offert à Lidia l’hospitalité pour aider le mouvement espérantiste. Mais après son arrivée, il “vit et compris qu’elle est une personne qui mérite d’être reçue avec hospitalité comme une amie. Elle n’était pas embêtante ; elle ne causait aucun souci. Elle mangeait ce que nous avions, dormait paisiblement, venait et allait tranquillement. “J’aimais beaucoup parler avec elle car elle est hautement intelligente. Elle comprend avec profondeur le problème de la paix et de la vie humaine... On peut seulement regretter”, ajouta il, “qu’elle soit si occupée qu’elle ait peu de temps pour s’amuser, ou pour dépenser dans la vie sociale. Mais c’est la destinée de son idéal et de son travail, et elle ne se plaint pas sur cela. Elle veut seulement aider le mouvement”. Pendant qu’elle était à Philadelphie, Lidia parla également à Baltimore (bien que ce fut une nuit très orageuse et que peu de personnes vinrent) et à Washington, DC, sur “Le retour de l’héroïsme spirituel”. Doris Lohse, qui rencontra Lidia à Washington se rappela plus tard lorsque Lidia vint à une réunion qu’elle était “tellement si humble, très timide”. Les personnes dans le public regardaient autour de la salle vers l’orateur, ne s’attendant pas que ce fut la petite femme tranquille avec des lunettes qui était parmi eux. Puis à la dernière minute, lorsqu’elle fut présentée, Mademoiselle Lohse se rappela, des voix chuchotèrent, “Qui est-elle ?. “C’est Lidia”. Et puis ce merveilleux discours”. “Elle était simple”, se souvint Doris Lohse, “et vous voyiez toujours au premier regard qu’elle était une fille intelligente et bien. Elle était très mûre. Elle ne commençait pas à parler ; elle attendait tout d’abord que quelqu’un lui parle. Elle était si modeste... et si satisfaite de peu. Elle était très indépendante. Juste une grande lumière”. Son discours en cette soirée à Washington impressionna le public comme “très sérieuse et efficace”.Elle avait préparé le discours avec soin et semblait l’avoir pratiquement entièrement mémorisé. Bien qu’elle avait amené le texte avec elle, elle posa le manuscrit sur la table et jeta à peine un regard sur lui. Maintenant que Lidia était en Amérique depuis plusieurs mois, elle s’était finalement habituée au Nouveau Monde. Elle ne ressentait plus le mal du pays qu’elle avait souffert dans ses premières années de voyage, bien qu’elle ne pouvait pas encore dire qu’elle aimait spécialement voyager: “pas du tout”, disait-elle. Elle aimait son travail, mais elle admettait, que si cela n’avait pas été pour les amis qu’elle l’avait fait en Amérique, les baha’is et les espérantistes, elle aurait ressentie “quelque peu étrange au début parmi les gratte-ciel”. Son travail en Amérique s’était révélé beaucoup plus difficile qu’en France. “On doit semer beaucoup pour semer peu”, écrivait-elle à une correspondante en Europe. L’alimentation en Amérique lui donna aussi certaines habitudes - elle pensait que les américains utilisaient trop de poivre dans leur nourriture. La famille avec qui elle était restée à Philadelphie était végétarienne., “et ainsi, je suis devenue quelque peu végétarienne”, écrivait-elle. “Bien que je sois habituée à manger de la viande, ce n’est pas difficile pour moi”. Même après que Lidia eut quitté New-York, les deux hommes qui avaient causé des problèmes continuèrent à semer le trouble. Le commérage se répandit à Washington, DC, empoisonnant les gens contre elle et refroidissant l’enthousiasme des espérantistes de Washington, l’un d’eux était revenu d’une visite à New York avec “des ragots de malheur sur Lidia”. Les espérantistes dans la capitale, écrivait Joséphine Kruka, “n’étaient pas enthousiastes” à propos de l’invitation pour Lidia de donner un cours dans leur ville. Certains avaient été hésitants au début, doutant que même un cours donnée par la fille de Zamenhof soit un succès. Maintenant ils étaient même découragés, et ils étaient heureux de laisser d’autres villes aller au devant d’eux dans l’itinéraire de Lidia. A la fin, Lidia ne donna jamais un cours dans la ville capitale des Etats-Unis. Pour rendre les choses plus difficiles, l’antipathie envers Lidia avait pris une nouvelle direction. “l’enfer gris a brisé à nouveau les perdants”, écrivit Della à Joséphine. Il fut dit qu’un nombre de personnes s’étaient plaints sur Lidia, disant qu’en dehors de ses classes, elle était inaccessible et même rude. Ils l’accusèrent même de se croire supérieure parce qu’elle était la fille de Zamenhof. Ernest Dodge à Washington, à qui ces histoires avaient été relatées, fut beaucoup secoué par les accusations et suggéra qu’elle pouvait être souffrante de maladie, de surmenage et d’anxiété au sujet de sa famille en Pologne. Mais, écrivit il à Della, si Lidia (qu’il n’avait pas encore personnellement rencontré) était réellement une personne si difficile, il s’interrogeait si sa visite en Amérique valait le coup après tout. “Je pense que vous réaliserez”, ajouta il, “combien ces rapports ne peuvent aider à émouvoir les pensées de certains d’entre nous”. Della rétorqua que l’épisode avait été “préarrangé” par les adversaires. Elle croyait que certaines incompréhensions qui étaient arrivées étaient dues au fait que les manières européennes et américaines étaient très différentes. Lidia ne comprenait pas les styles de vie des américains, qui semblaient souvent rudes et offensants. Certains des élèves étaient malheureux qu’elle ne puisse avoir la permission d’ouvrir la discussion sur divers points de grammaire dans ses cours, mais la méthode Cseh - selon laquelle toute la classe avait à être en espéranto - ne lui permis pas. Finalement la nature des accusations qui avaient été perpétrées contre Lidia derrière son dos furent révélées. L’homme qui avait accueillit Lidia chez lui, avait été dit à Della, l’avait appelé un “menteur” et un “voleur”. Cela pouvait être facilement congédié en tant que divagations irrationnelles, mais il y avait autre chose qui, bien qu’également faux, pourrait être sérieusement dommageable à Lidia si il était propagé autour. En la présence d’autres, il avait revendiqué que Lidia était venue en Amérique pour propager “des doctrines communistes”. L’extension de sa confusion mentale était claire, au moins pour Della, lorsqu‘elle apprit que “dans presque le même esprit, il leur proposait qu’ils démarrent un fonds pour elle pour voyager à travers l’Amérique”. Lorsque ses auditeurs protestèrent qu’ils pensaient que ce serait mal avisé de contribuer à un fonds pour quelqu’un enseignant le communisme, “il devint méchamment troublé dans ses obligations de réconcilier cette proposition avec ses accusations”. Sachant que l’homme n’était pas responsable de ses remarques, Della ne prit pas ses déchaînements au sérieux. Mais d’autres qui ne le connaissaient pas bien commencèrent à répéter les histoires et se dépêchèrent de mettre Della en alerte. “Bien que ces accusations sont complètement absurdes”, dit-elle à Ernest Dodge, “ils reflètent tout à fait la profondeur de la malice qui est ressentie envers elle dans un certain quartier”. “Quel dommage pourrait être fait à Lidia, s’inquiétait Della, “par des lettres judicieuses écrites ici et là à travers le pays ?”. Joséphine pensait que Della avait tendance à devenir “un peu trop émotive”. Et l’avertie de “laisser les choses en état”. Elle l’avertie: “Nous ne pouvons laisser une scission venir entre les baha’is et les espérantistes. Ce serait tragique”. Joséphine sentait que c’était de la faute des baha’is d’avoir permis la confusion première et l’incompréhension avoir lieu au début de la visite de Lidia. Lidia ne reçue aucun signe qu’elle savait à propos des agissements à New York et se montra encore amicale en ce qui concerne ses anciens hôtes. Elle fut embarrassée ce pourquoi Della était devenue si bouleversée et elle avait demandé à Lidia de ne pas leur écrire. L’attitude prudent de Ernest Dodge changea lorsqu’il rencontra finalement Lidia à sa causerie à Washington,DC. Il dit à Della que sa conversation avec Lidia ce soir laissait “une impression très agréable”.et il sentait que des perspectives pour “ses futurs travaux” étaient “favorables”. Bien que Lidia était en train d’enseigner seulement un cours à Philadelphie, le courrier lui accaparait tout son temps libre, alors qu’elle faisait des arrangements pour ses futurs cours et ses lectures à venir - tapant laborieusement des copies des lettres de Della - et elle écrivit à des amis et des connaissances. Mais elle trouva un peu de temps pour écrire des articles pour “L’Ordre mondial” et pour “La Praktiko”. Même lorsqu’elle était aux Etats-Unis, elle enseignait la foi baha’ie à des correspondants en Pologne et en France. “La correspondance en espéranto sur la foi baha’ie prenait beaucoup de temps”, écrivait-elle, “ce dont je suis très heureuse”. Après que l’une de ses correspondantes lui écrivit sur ses expériences avec le phénomène psychique, Lidia l’avertit au sujet d’essayer de faire des contacts avec des forces de l’au-delà et révéla qu’en une occasion, elle avait eu aussi des expériences psychiques. “Je dois confesser”, lui dit-elle, “que vôtre relation avec l’autre monde me dérange plutôt. J’ai aussi à une époque sentie certaines influences, mais je n’était jamais sure qu’ils étaient amicales ou inamicales. Ici, sur terre, nous n’avons pas assez de connaissances sur les forces et les moyens de l’autre monde. En se soumettant aux influences c’est comme si nous nous exposons nous-mêmes aveuglement aux actions des forces inconnues à nous, et ces forces pourraient ne pas toujours être favorables. Les forces obscures qui sont à présent poussent le monde dans le chaos peuvent aussi agir sur le plan psychique. Sur la terre, des ennemis parfois viennent à nous comme des loups dans les vêtements de l’agneau pour nous dépister. Cela peut être la même chose sur le plan psychique”. Lidia avait commencé à écrire à Harold Foulds, un espérantiste de Cleveland, l’encourageant dans son étude de la foi baha’ie. “C’est plus qu’une foi”, lui dit-elle avec ardeur, “parce que poser les fondations et résoudre les problèmes qui embarrassent le monde qui maintenant tourmentent l’humanité si profondément, ce n’est pas simplement une religion, mais c’est un nouvel Ordre dans le monde. C’est aussi comme une table abondamment posée, sur laquelle chacun peut trouver quelque chose selon son plaisir: le croyant - une élevée et noble foi ; le philosophe - une pensée hautement philosophique ; le sociologue - une solution aux problèmes mondiaux ; et chacun - une nouvelle joie et du courage”. Lidia écrivit plusieurs de longues lettres à Monsieur Foulds, révélant en détail ses propres pensées et lui parlant de sa propre recherche spirituelle. “Je me souviens”, écrivait-elle, ”que lorsque je fis mes premiers pas dans cette nouvelle foi, mon intérêt comme les vagues de la mer, montait et semblait descendre, mais juste comme les vagues de la mer, il débordait mon âme toujours et toujours davantage. Maintenant je suis comme une personne qui, après une grande soif et de la souffrance a atteint les rives d’une mer d’eau douce, un océan plein de l’eau de la vie - et n’a plus peur de la soif ”. Monsieur Foulds écrivit une fois à Lidia qu’il avait commencé de correspondre avec “Tante” Victoria Bédikian. Lidia lui rappela poliment: “Elle et moi sont simplement des “béquilles”, comme on dit, pour vous. Lorsque vous atteindrez réellement la Source de santé spirituelle et de courage, vous serez capable de marcher par vous même sur le chemin lumineux en direction du Soleil, et vous n’aurez plus besoin de béquilles de quelque sorte que ce soient. Je vous demande de continuer courageusement et avec fermeté vôtre étude de l’enseignement baha’i et de vous tourner vers la Source elle-même, vers les écrits de Baha’u’llah et d’Abdu’l-Baha. Lorsque le grand Enseignant parle, les petits professeurs doivent être silencieux ou ouvrir leurs bouches seulement pour répéter Leurs paroles de sagesse. Lorsque le Soleil rayonne avec brillance, on éteint les bougies, et lorsque le Rossignol chante, on ne doit pas écouter le gazouillement des moineaux”. Lidia attendait très anxieusement l’arrivée de lettres de Shoghi Effendi. “Les lettres du Gardien m’apporte toujours une force nouvelle”, dit-elle à Della. Lidia avait reçue sa réponse, devant se retirer formellement de la communauté juive de Varsovie: “... le Gardien sent”, écrivit son secrétaire, “qu’en vue du fait qu’une telle membre, comme vous dites, a une signification plutôt sociale et juridique n’implique pas nécessairement pour vous de vous retirer formellement de ce corps à présent. Il espère que plus tard des conditions développeront à un point qui rendra envisageable pour vous de pousser plus loin l’action de cette affaire. “Avec l’assurance renouvelée de ses prières pour la confirmation de vos travaux pour la Cause, et avec ses meilleurs souhaits pour vôtre santé et vôtre protection...”. Dans un post-scriptum, Shoghi Effendi avait ajouté: “Puisse la main toute-puissante de Baha’u’llah vous guider et vous soutenir dans vos services magnifiques et historiques pour la foi baha’ie en Amérique, et vous rendre capable de rehausser le splendide enregistrement de vos services internationaux inoubliables. Vôtre vrai et reconnaissant frère, Shoghi”. “Lidia fut soulagée. Elle n’aurait pas à demander pour abandonner la communauté juive cernée. Bien que pour Lidia, les lettres de Shoghi Effendi apportaient “une nouvelle force”, Horace Holley envoya en janvier à Lidia la copie d’une lettre du Gardien qui la troubla. Elle était adressée à Georges Winthrop Lee, de Boston, qui était espérantiste depuis 1906. Depuis quelques temps, Monsieur Lee essayait de d’intéresser les baha’is à l’espéranto. Bien qu’il n’était pas baha’i, il écrivait occasionnellement à Shoghi Effendi, expliqua il à Lidia, “proposant que pour l’exemple, il apprenne nôtre chère langue, mais la réponse par son secrétaire est toujours qu’il est trop occupé”. La lettre qu’il avait reçu de Haïfa disait: “Vous vous plaignez que les croyants en Amérique n’attache pas suffisamment d’importance à l’étude de l’espéranto, cela pourrait être vrai et en partie du au fait qu’ils ne croient pas encore que cela développera nécessairement vers la langue auxiliaire internationale du futur. L’intérêt qu’ont les baha’is et qu’ils devraient avoir dans cette langue est essentiellement à cause de la signification vitale de l’idée qu’il représente plutôt que la croyance dans sa valeur inhérente en tant que moyen d’expression international convenable et adéquate. Les baha’is en fait accueillent l’espéranto comme la première expérience de cette sorte des temps modernes. Ils sont en complète sympathie avec les espérantistes aussi loin qu’ils insistent sur l’absolue nécessité pour la création d’une langue internationale doit être étudiée par tous les peuples du monde en plus de leurs langues nationales respectives. Le gardien lui-même l’aurait appris, mais ses occupations sont si multiples et si écrasantes qu’il n’est pas possible de trouver le temps de le faire. C’est son espoir que Mademoiselle Zamenhof, la fille distinguée du créateur de l’espéranto aidera de nouveau à stimuler à travers son contact avec les amis d’Amérique la propagation de cette langue parmi divers baha’is et parmi les centres. Vous devriez certainement faire tous les efforts pour la rencontrer pendant qu’elle est aux Etats-Unis”. Lidia fut quelque peu consternée par un passage de cette lettre, mais elle n’était pas sure de comprendre l’anglais correctement, et elle écrivit à Della lui demandant de le clarifier. Pourquoi les baha’is croyaient autrefois que l’espéranto deviendrait la langue internationale, mais ils ne le croient plus à présent ?, se demanda elle. Dissimulant sa détresse, elle écrivit à Monsieur Lee: “J’ai rencontré le Gardien de la foi baha’ie, aimé de tous les baha’is, il y a 8 ans, lorsque j’ai visité Haïfa. Je vis moi-même que se obligations sont si nombreuses, si diverses, et si pressantes qu’il ne peut dédier son temps à étudier la langue. Mais c’est lui-même qui en premier suggéra que je vienne en Amérique, et par sa suggestion, je fus invité dans ce pays par l’Assemblée spirituelle nationale ; qui rendit le voyage possible. Sans leur aide, je n’aurais certainement pas pu venir”. En tout cas, il était clair de par les lettres du Gardien que Shoghi Effendi sentait encore que les baha’is apprendraient et utiliseraient l’espéranto ; il n’espérait pas seulement que, pendant qu’elle était aux Etats-Unis, Lidia intéresserait les espérantistes à la foi baha’ie, mais qu’elle intéresserait les baha’is à l’espéranto. Bien que Lidia souffrait de partager son lot de difficultés et de déceptions en Amérique, elle écrivit à Harold Foulds de ne pas se décourager dans sa propre quête spirituelle, “même si le But parfois disparaît de devant vos yeux et semble se retirer, même si parfois des nuages terrestres vous cache la brillance du soleil éternel, et que ces nuages terrestres sont à présent plus lourds que dans d’autres temps. Toutes les forces de la nuit semblent exercer leurs pouvoirs pour barrer le chemin du Soleil. Ces pouvoirs nocturnes peuvent encore triomphés, mais pas pour longtemps. Il n’y a aucune obscurité que le soleil ne peut conquérir”. Et en une autre occasion: “Chers amis, chaque chercheur rencontre des difficultés sur sa route. Si vous les rencontrées également, ne perdez pas espoir. Les difficultés sont nos épreuves. Ils nous montrent la force ou la faiblesse de nôtre esprit, l’intensité et l’ardeur de nôtre recherche, et ils nous adoucissent et nous rendent plus forts et plus solides”. A la fin de son séjour à Philadelphie, Lidia vint à sentir que le cours n’était pas tant un échec après tout. Bien que le nombre d’élèves, 34, était bien au-dessous du nombre qu’elle avait eu habituellement en France, peut-être pour les américains, ce n’était pas si mauvais. Elle se sentit encouragée parce qu’un discours et un cours de démonstration qu’elle avait donné à l’institut technique de Drexel semblaient avoir généré un grand intérêt parmi les élèves et les professeurs là-bas. “Semer des graines”, écrivait-elle à une amie, “n’est jamais vain”. ================================ Chapitre 13: “La maison grise et le jardin” Fin février 1938, Lidia quitta Philadelphie pour Détroit, Michigan. Bien qu’ils étaient seulement deux douzaine d’espérantistes actifs dans cette ville, ils travaillèrent durs pour la publicité des cours de Lidia, envoyant des millions de prospectus et arrangeant des interviews, des radiodiffusions et des lectures. Un horaire chargé avait été planifié pour elle et elle s’adressa à une variété de groupes comprenant les baha’is, l’association des femmes juristes, le club Zonta, la société végétarienne, deux organisations auxiliaires maçonniques, et elle donna un discours et un cours de démonstration à 120 élèves au YMCA. Pendant qu’au Michigan elle voyageait aussi pour s’adresser à des réunions à Ann Arbor, Marysville, Flint et Roseville. Les baha’is de Maywood, Illinois, arrangèrent pour elle de parler devant un public de 200 personnes à l’école Irving, où le principal était un espérantiste et un nombre de professeurs étudiaient la langue. Elle donna un discours en anglais sur WWJ, la radio de “Détroit News” (“J’espère que mon mauvais accent était lui-même un propagande pour l’espéranto”, dit-elle plus tard), et deux émissions de radio en polonais sur la station WJBK, où sa capacité à parler tira des commentaires favorables des opérateurs radio polonais, et un papier en polonais à Tolède capta le message à la radio et publia un article sur celui-ci. En tout à Détroit, 32 articles remarquables furent publiés sur elle dans 19 journaux en sept langues comprenant le polonais, le bulgare, l’allemand, l’ukrainien et le yiddish. Les hôtes à Détroit étaient Robert et Mabelle Davis. Les Davies étaient des espérantistes baha’is et Madame Davis traduisait fréquemment pour Lidia aux nombreux discours publics qu’elle donna pendant qu’elle était à Détroit. Lidia avait espéré tenir l’un des cours d’espéranto dans la noire YMCA, mais tous les cours se tinrent dans une réserve au rez-de-chaussée de la salle de la Convention. Elle fut déçue que “nous n’avons pas un noir dans les cours”. Elle avait aussi espéré parler devant l’association nationale pour l’avancement des peuples de couleurs, mais cela n’arriva jamais. Il était dit que leurs programmes étaient “trop pleins”. Toute la publicité avait un effet: 22 élèves inscrits dans son cours avec 57 terminant le cours. Après, la société espérantiste de Détroit reporta: “Le travail de Mademoiselle Zamenhof était excellent satisfaisant. Ses élèves retenaient leurs intérêts durant le cours, faisaient de remarquables progrès et à la fin avaient le désir de faire plus. Mademoiselle Zamenhof remplissait plus que tous les espoirs. Sa capacité d’enseignante n’a pas été encore pleinement appréciée, beaucoup moins que ce qu’il a été convenablement annoncé au public américain. De plus, Mademoiselle est plus qu’un professeur, est plus qu’une célébrité. Pour elle, l’espéranto n’est pas une possibilité à être démontré, mais une réalité triomphante à être mise en exemple. Ce n’est pas seulement un sujet académique à être enseigné, mais une partie de la vie qui se déploie”. A la fin du cours en Mai, les espérantistes de Détroit tinrent un pique-nique d’adieu en l’honneur de Lidia au lac Orion. Le docteur Charles Simon de Cleveland se rappelle avoir rencontré Lidia ce jour là. Il était venu à Détroit pour lui parler au sujet du congrès à venir de l’association espérantiste d’Amérique du Nord et fut “immédiatement impressionné par la personnalité dynamique et par son charme évident”. Le moment de son arrivée, se rappela il fut “spectaculaire”. “Lorsque Mademoiselle Zamenhof entra dans la salle où se tenait le pique-nique, tous ceux présents se levèrent de leurs sièges et tout à fait spontanément commencèrent à chanter “L’espoir”. Elle se tenait tranquillement debout durant le chant, un visage mince mais imposant, habillée dans un tout à fait bon goût, avec une fourrure noire autour de ses épaules. Puis elle remercia les salutations de manière tout à fait digne, et le programme du pique-nique continua, avec des chants de plusieurs chants espérantistes accompagnés à l’accordéon”. “Une photo intime, vivante du “Maître” comme elle l’avait connu fut son cadeau d’adieu pour nous”, écrivit Robert Davis, le secrétaire de la société espérantiste, dans le rapport officiel. “Combien j’envie nôtre opportunité ! Combien précieuses sont ces heures avec nôtre chère langue et la fille du Maître !”. Même pendant qu’elle était en Amérique, Lidia était en train de défendre le legs de son père en Europe, où il était sous l’attaque des nationalistes. Dans un article, elle réfuta chaudement une suggestion que le nom de l’espéranto devrait être changé en “Européen”. En réponse aux allégations qu’elle avait lu dans un journal espérantiste revendiquant que l’internationalisme de l’espéranto n’était pas admis, Lidia répliqua que le nom originel de l’espéranto avait été “Langue internationale”. “Quand et où le Maître dit que sa langue devrait servir seulement les Européens ?”, demanda elle. “Pour sur, elle est basée sur les langues européennes. Mais la raison de cela était que son auteur était plus proche du chaudron européen des langues, à la tour Babel. Cela ne signifie pas qu’il voulait en tout cas donner le privilège aux langues européennes. S’ils souhaitaient regarder les déficiences de l’espéranto, ils pourraient trouver matière: comme c’est européen et il ne reflète pas suffisamment des racines orientales. “Lorsque la langue évoluera plus tard, suggéra Lidia, “peut-être qu’elle prendra des influences orientales à un degré à lequel l’espéranto se propagera en Asie et les peuples des différents pays asiatiques ajouteront leurs contributions à la langue. Mais la vraie question en cours”, insista Lidia, n’était pas linguistique. Pour essayer d’utiliser l’espéranto, “qui avait été crée dans le but que toutes les nation et toutes les cultures puissent être égales sur ses fondations, “dans le but de proclamer la supériorité d’une partie de l’humanité, serait “complètement contraire à l’idée de l’espéranto”, s’exclamait-elle. Zamenhof n’avait pas voulu de compromission sur ses idées. Il ne suivait pas les tendances du temps. Réprimandant les espérantistes de ne pas “suivre les vents changeants de l’opinion politique comme des girouettes” ou “comme des caméléons s’adaptant avec obéissance aux couleurs gouvernantes”, elle indiqua que si Zamenhof avait été juste ”l’un des nombreux moutons dans le troupeau désespéré”, il n’aurait jamais crée l’espéranto. Alors que l’année 1938 se déroulait, les nouvelles de l’Europe étaient plus que jamais inquiétantes, la rhétorique des dictateurs plus que jamais hystérique et menaçante. La discrimination, le boycott et la violence contre les juifs étaient plus grandement étendus en Europe, non seulement en Allemagne et en Pologne, mais également dans d’autres pays. “Nous sommes revenus au Moyen Age”, observait un dirigeant juif américain après une visite en Europe. Le 12 Mars, Lidia lisait dans le journal du matin que l’Autriche avait été reprise par les nazis allemands en ce qui vint à être connu comme l’Anschluss. Le gouvernement autrichien fut démantelé et la nation cessa d’exister, devenant une province du troisième Reich. Avec l’Anschluss vint une frénésie de violence contre les juifs à Vienne plus terrible que ce que toute l’Allemagne en avait encore vu. “Est ce possible” ?, écrivit Lidia à Della, “que le grand Drame est déjà commencé ? Plus que jamais, on doit se tourner vers Baha’u’llah en ces moments”. Elle était heureuse que l’Assemblée spirituelle nationale ait voté de lui avoir donner un cours pour entraîner les professeurs espérantistes à la méthode Cseh à l’école d’été baha’ie de Green Acre. Lidia savait qu’il n’y avait plus beaucoup de temps avant que la guerre n’éclate en Europe, et elle voulait voir la méthode Cseh propagée autant que possible en Amérique. Lorsque l’Europe était dans le chaos, elle espérait que de nouvelles troupes d’espérantistes américains garderaient le mouvement en vie - libre des divisions qui avaient affligé l’espéranto en Europe. Elle écrivit à Della: “La nouvelle guerre à laquelle l’Europe n’échappera pas, fera taire les espérantistes belliqueux en Europe. Alors les amis américains auront à reprendre l’appel et commenceront à travailler pour la Cause”. Della sentait un sentiment d’urgence. Elle confia ses peurs à Joséphine Kruka: “En regard de la situation européenne, je ressens plus que jamais combien il est important que Lidia enseigne autant d’espérantistes que possible à la méthode Cseh. Lorsque le volcan entre en éruption, comme il se pourrait à tout moment, ce sera la fin de l’espéranto dans le continent pour nombres d’années à venir. Si il y avaient seulement d’autres moyens par lesquels on puisse faire plus pour l’espéranto ici, je l’aurais incité à le faire aussi. Mais je ne vois pas autre chose, quelque part qui se compare à cela”. Lidia partageait cette peur. “Malheureusement”, écrivait-elle, “je suis d’accord avec vous, que probablement rien ne restera - non seulement des organisations espérantistes mais de toute l’Europe dans le futur proche. Ainsi nous devons déployer tous nos efforts ici en Amérique”. Pendant que Lidia apprenait que Harolds Foulds avait commencé à apprendre une leçon d’espéranto avec les baha’is de Cleveland, elle lui écrivit: “Je ne peux vous dire combien je suis heureuse de vôtre nouvelle moyen de recherche ... et de vôtre part, vous les aiderez à se rapprocher de l’espéranto et de commencer à connaître cette langue qui - j’en suis profondément convaincue - fut crée directement sous l’influence de Baha’u’llah, bien que l’auteur de la langue était inconscient de cela”. Ces nuages sombres qui s ‘étaient propagés sur l’Europe étaient chargés lourdement sur Lidia était évident dans un rêve effrayant qu’elle décrivit dans une lettre à Harold Foulds. Le rêve se révélera être froidement prophétique. “Revenant d’une marche”, écrivait-elle, “dans la foule, je perdis ma petite mère qui n’était pas forte, et en la cherchant, je me retrouve dans un couloir. A la fin de ce couloir se trouvait un grand fond baptismal. De là bas, deux routes bifurquaient, à droite et à gauche. Plein de monde allaient à travers ce couloir, et en atteignant le fonds baptismal, ils se divisaient et sans s’arrêter, ils continuent d’aller: une partie vont à droite, l’autre à gauche. Mais qu’ils aillent à gauche ou à droite, ils font leur chemin avec les mêmes efforts, et je vis de larges perles de sueurs sur leurs fronts... “Cherchant ma mère, je me retrouve dans une salle d’hôpital. C’était un étrange hôpital et d’étranges malades. Au milieu de la salle, sur le sol, se trouve un grand cercueil avec une croix d’argent. Certains des malades sont immobiles sur leurs lits, mais d’autres, entièrement blessés dans leurs lits de comme dans u linceul, sautaient et s’ébattaient sur leurs lits. Je compris alors que c’était un asile de fous. Je me retrouve moi-même plus tard dans un autre couloir, je vis une femme dans une uniforme d’infirmière, et son orgueil qu’elle portait me fit comprendre qu’elle était l’une des chefs de l’hôpital. Je courus vers elle et lui demandait la sortie. Mais elle rendit un son incompréhensible, me regarda avec des yeux étranges - et dans ses yeux, je vis aussi de la folie. Et j’étais effrayée. Non à cause de quelque danger personnel pour moi-même, mais la pensée me terrifia que ceux qui étaient responsables de cet hôpital était aussi fous que les malades. Et je me réveillais avec terreur, évoquant le nom de Dieu. Plus tard, durant la journée, lorsque je pensais à ce rêve, je compris sa signification et je compris pourquoi j’étais devenue si effrayée. L’hôpital était le monde. Les malades blessés dans leurs linceuls, et sautant encore follement sur leurs lits sont les peuples du monde. Et ici, c’est pourquoi la situation était terrifiante: car ceux qui sont responsables de ce grand hôpital, le monde, sont eux-mêmes fous. Comment pourront-ils trouver la sortie ? Soudain je pensais: je me suis réveillée trop mal. Je pouvais encore aller et voir le chef de l’état ? Et à peine j’y avais pensé que je me souvins d’un autre rêve que j’avais rêvé lorsque je remontais dormir après m’être réveillée: “Il y avait un jardin célèbre à travers le monde. Le plus beau jardin dans le monde, le jardin que chaque voyageur souhaite voir et qui est l’objet de beaucoup de voyages. Je sortais d’une vieille maison grise... et je marchais dans cet incomparable jardin où des grappes de raisins enveloppaient des colonnes de marbres, où l’air était pur et sentait bon, et où le clair ciel bleu irradiait de paix et de tranquillité. Je retournais dans la vieille maison sombre et dit aux gens qui étaient là-bas pourquoi ils n’allaient pas dans le jardin ? la police se tenait à la porte et laisse les gens entrer seulement un par un et seulement pour un moment ! la police !, répondis-je avec surprise. J’étais dans le jardin, je marchais librement et aucune police me m’interdisait d’entrer !”. Puis Lidia offrit son interprétation du rêve. “Ici se trouve l’avenir du monde, après les plus amères épreuves: le jardin merveilleux de l’humanité, le jardin spirituel, le jardin longtemps promis et longtemps attendu, le Royaume de Dieu à être fondé sur terre ! La police qui gardent l’entrée et empêche les gens d’aller sont nos propres préjugés, nos désirs égoïstes, nos limites, nos haines - tout ce qui empêche d’entrer dans le Royaume spirituel. Et pourtant, le jardin est là qui attend, le beau et promis jardin ! L’un après l’autre, les gens sortent de la vieille maison grise et sombre ; l’un après l’autre, ils vont dans le jardin de l’esprit. “Aucun guide publié par des agences de voyages ne contient une description de ce très merveilleux jardin ! Aucun officiel de quelque compagnie que ce soit ne nous montrerait le chemin là-bas. Mais, chers compatriotes, continuez à lire les livres sur la foi baha’ie. Le chemin y est indiqué. Persistez et ayez du courage dans vôtre recherche. Jetez hors de vos yeux les voiles de la coutume et des traditions. Cherchez avec un esprit libre, indépendant et sans entrave et avec un coeur libre et chaleureux. Tôt ou tard, vous atteindrez certainement vôtre but !”. Pendant qu’elle restait à Détroit, Lidia fit 2 jours de visite à Urbana, Illinois, durant lesquels elle donna plusieurs causeries publiques et une leçon de démonstration Cseh. Margaret Kunz Ruhe, qui à cette époque était l’aîné de l’université de l’Illinois et la présidente du club de la jeunesse baha’ie, attendait Lidia à la gare. Elle se demandait comment elle reconnaîtrait Lidia, mais elle était sure qu’elle si elle portait une étoile verte sur son manteau, Lidia la reconnaîtrait. “Alors que le train de Chicago s’arrêtait”, se rappela plus tard Mademoiselle Ruhe, “les passagers sortaient, et je les regardais quelques instants avec une appréhension et une inquiétude considérable. Enfin une dame petite, timide, blonde et avec des lunettes se tenait à côté de moi et se présenta avec douceur elle-même comme Mademoiselle Zamenhof. Elle était chaleureuse, adorable, douce et plutôt effacée et modeste dans se manières et sa disposition. Elle était calme avec les signes d’être plus une introvertie qu’une extravertie. Elle portait de grandes lunettes avec des lentilles fortes qui lui donnait un regard plutôt scolaire et quelque peu d’une chouette. “Elle était une personne différente lorsqu’elle se tenait debout devant nous en tant que nôtre professeur. Elle était dynamique et parlait avec une voix vibrante et puissante. Je me rappelle que à un point, elle éleva une chaise haut dans l’air lorsqu’elle nous enseignait le mot en espéranto... Durant son séjour à Urbana, elle illuminait les coeurs et les esprits avec sa connaissance, sa sincérité et son inspiration”. En Mai 1938, Lidia retourna dans l’Illinois sur l’invitation de l’assemblée spirituelle nationale pour assister à la convention baha’ie annuelle, où les délégués de tous les Etats-Unis et à cette époque du Canada, éliront l’Assemblée nationale pour l’année à venir. Elle se tint à Chicago et à Wilmette, l’endroit de la maison d’adoration baha’ie. Là-bas, Lidia rencontra finalement Joséphine Kruka. “J’ai eu plusieurs jours glorieux avec Lidia”, écrivit Joséphine à Della plus tard. “Je l’aime tendrement”. Joséphine dit à Della que à cette Convention, May Maxwell, que Lidia avait rencontré plusieurs fois en France, lue ses notes de conversations avec Shoghi Effendi à Haïfa. Madame Maxwell dit à la réunion que Shoghi Effendi avait dit que les baha’is doivent adopter l’espéranto en tant que langue internationale pour aujourd’hui Il y eût”, ajouta Joséphine, “un silence”.* Lidia fut profondément touchée par la Maison d’adoration de Wilmette. “Ce Temple me donnait des sensations très douces”, écrivait-elle à Della. “Ici, je me sens chez moi: dans ma maison spirituelle”. Mais deux tristes événements s’étaient passés à la Convention. Des nouvelles arrivant de Palestine que Munirih Khanum, la femme d’Abdu’l-Baha, était morte. Le câble fut lut à un public abasourdi le samedi 1er Mai. Plus tard dans la journée, Madame Grace Robarts Ober s’effondra après avoir délivré un reportage à la Convention et dut être assistée de la salle. Bientôt la rumeur vint qu’elle était gravement malade et la réunion commença de dire des prières de guérison pour elle. Le mari de Madame Ober, Harlan, qui servait en tant que président de la Convention, mais lorsque sa femme fut frappée, il se précipita pour elle avec elle et un président de substitution dut être trouvé. Les reportages continuaient ; il y eût d’autres requêtes urgentes pour des prières de guérison. Mais quelques instants plus tard, un membre de l’Assemblée nationale vint à l’estrade pour annoncer que Madame Ober était morte. Les nouvelles de deux décès, écrivait Lidia, “posait un voile de grand chagrin sur la conférence. Mais lorsque vous écrivez, on ne peut pas s’affliger exagérément, lorsque l’on pense que la joie attends ceux qui sont morts ; Pour la sainte Mère - la réunion avec le bien aimé Maître (Abdu’l-Baha), et pour Grâce Ober - bien, je pense qu’une telle mort, droite après la causerie inspirée, dans le Temple, au milieu des prièes des amis, est quelque chose de si beau, de si joyeux, que nous pouvons seulement souhaiter un privilège similaire pour nous-mêmes et dans le même temps réaliser qu’un tel privilège doit être bien gagné à travers une vie de service”. Lidia fut demandé de parler deux fois ce jour là, “une fois, quelques minutes après que Madame Ober fut évacuée, avant que nous sachions qu’elle fut morte, et je parlais pendant un moment bien que mes pensées étaient concentrées sur Madame Ober, et je sentis que sa maladie était très sérieuse”. “Plus tard, le même soir, elle parla de Munirih Khanum, qu’elle avait rencontré à Haïfa. Une nouvelle fois, à l’une des réunions à Chicago, elle fut demandé de parler au public. “Je donnais un très court discours”, expliquait-elle,” parce qu’il est encore difficile pour moi de parler en anglais sans une préparation préalable”. Elle fut ravie lorsque les baha’is de Chicago, de Wilmette et du Maywood, Illinois, lui demandèrent si elle voulait donner des cours d’espéranto dans leurs villes. Un jour durant cette année, Martha Root, qui était en Inde, écrivit aux baha’is américains: “Je suis si heureuse que Lidia Zamenhof soit dans nôtre pays . Chaque lettre des amis loue son splendide travail - je souhaite toujours qu’ils l’aime à Varsovie puissent voir ces lettres ; ils l’aiment si profondément et apprécie quelle grande âme elle est. Je suis si fière de nôtre Lidia - je ne peux pas être à la maison pour la recevoir, l’aider, mais chaque jour, je prie que vous tous lui montrez l’amour de vos coeurs”. ================================ Chapitre 14: “Qui peut prévoir ?” Les classes de Lidia en Amérique n’étaient pas aussi grandes qu’elle l’avait espéré qu’elles le soient, mais l’argent qu’elle recevait d’eux était parfois même moins qu’il aurait du être. Les groupes locaux déduisaient leurs dépenses - pour la publicité pour les cours et la location de la salle de classe - de l’enseignement payés par les élèves, et bien que parfois, des particuliers offraient des contributions pour aider à compenser les dépenses, parfois à la fin du cours moins d’un tiers de l’enseignement monnayé était laissée à Lidia. Certains groupes déduisaient plus de leurs dépenses de l’enseignement que d’autres groupes ne le faisaient. Depuis que Lidia ne faisait pas son propre comptable pour les cours, elle ne savait pas, jusqu’à ce qu’il fut trop tard, ce qui avait été déduit ou si les élèves avaient même été chargés de la somme exacte pour le cours. Lidia acceptait ce qu’elle recevait sans se plaindre, mais Della fut alarmée qu’elle recevait si peu d’argent. Cela semblait juste une difficulté de trop à porter, et Della commença à penser qu’il serait mieux si Lidia retournait en Europe. Elle suggéra à Lidia que c’était un trop grand sacrifice pour elle de rester en Amérique depuis qu’elle ne gagnait pas assez d’argent pour ses cours. Lidia répliqua qu’elle “ne venait pas dans le pays pour s’enrichir” et qu’aussi longtemps qu’elle n’aurait pas de dépense pour la nourriture et le logement, elle ne s’inquiétait pas que ses gains ne soient pas grands. “Mais même si je retournais en Europe”, insista elle, “je ne pourrais compter sur des gros gains avec une misère croissante dans le monde...”. Bien que les choses n’avaient pas été sans heurts pour elle si loin, Lidia espérait prolonger son séjour en Amérique au moins 6 mois. Mais Lidia avait commencé à s’inquiéter que lorsque le temps vint pour elle de partir, elle ne pourrait pas revenir chez elle. Une loi était passée en Pologne après l’Anschluss de l’Autriche lorsque beaucoup de juifs polonais qui vivaient en Autriche avaient essayé de retourner en Pologne. Selon la nouvelle loi, les citoyens polonais qui avaient vécu plus de 5 ans à l’étranger pouvaient être défaits de leur citoyenneté. La loi fut portée aux juifs: le gouvernement polonais craignait que l’Allemagne expulse les millions de juifs polonais qui vivaient là-bas, et qu’il voudrait les empêcher de revenir à nouveau en Pologne. Lidia avait seulement fait trois courtes visites chez elle depuis les cinq dernières années, et elle s’inquiétait que ces trois visites ne seraient pas suffisantes pour satisfaire les exigences de la nouvelle loi. Si elle perdait sa citoyenneté, elle ne serait pas capable de rester en Amérique sans être capable de revenir en Pologne - une personne apatride, dans un monde au bord de la guerre. La pensée de L’Europe la refroidie. “On peut même à peine oser penser à propos de ce malheureux continent”, écrivait-elle à Della. “J’ai ma famille et beaucoup d’amis là-bas. Mon coeur est oppressé lorsque je pense à eux”. Sofia, la soeur de Lidia, lui avait écrit de Varsovie que la nouvelle loi ne s’appliquait pas à elle, mais Lidia n’était pas si sure. Elle demanda à Della de téléphoner au Consulat polonais à New York pour le découvrir. Mais elle ajouta, “Je demande... que sous aucune conditions vous disiez pour qui vous avez besoin de l’information”. Faire ainsi attirerait le danger, craignait-elle, plus que de le prévenir”. Pendant qu’elle était à Wilmette, Lidia avait confié à Madame Jeanne Bolles de New York ses peurs de perdre sa citoyenneté. Madame Bolles avait suggéré de devenir citoyenne américaine. “Et elle dit que le président Roosevelt faisait toute sorte d’appels aux réfugiés, le rendant plus facile pour eux je ne sais pas si seulement de venir en Amérique ou de devenir citoyen.* Cette question de Madame Bolles absorba mes pensées”, dit Lidia à Della. “Un passeport américain serait beaucoup plus pratique qu’un passeport polonais. Par conséquent, qui peut prévoir quel sera le sort des juifs en Pologne dans le futur ?”. Elle écrivit à Shoghi Effendi pour son avis. Lidia quitta Détroit pour Lima, Ohio, le 21 Mai. Elle arriva à Lima morte de fatigue, et sans aucun doute inquiète au sujet du cours à Green Acre sur lequel elle avait placé tant d’espoir. A cause de problèmes financiers, Della ne pouvait pas aller à Green Acre pour aider Lidia, et elle avait demandé à Joséphine Kruka de s’en occuper. Mais Joséphine annonça soudainement qu’elle avait l’intention d’aller en Finlande pour l’été et qu’elle ne serait pas là pour l’aider. Della devint folle. Lidia, apprenant les plans de Joséphine, l’avertit de ne pas aller en Europe sans télégraphier à Shoghi Effendi pour lui demander son avis. Joséphine lui envoya un court câble, mais sans citer les responsabilités espérantistes qu’elle abandonneraient dans le but de faire le voyage. Pendant ce temps, Della essaya de dire à Joséphine de changer d’avis. Lidia aurait besoin de quelqu’un pour l’aider à Green Acre: pour inscrire les élèves, pour distribuer le matériel, mais le plus important, pour agir comme son “appareil”. Sans “l’appareil” pour traduire, Lidia ne pourrait donner le cours Cseh à tous. “Si vous ne venez pas et que je ne peux venir”, plaida Della à Joséphine, “je ne vois pas qui va l’aider”. * Après l’Anschluss en Mars 1938, le président Roosevelt avait appelé à une conférence internationale, qui se tint à Evian Les Bains, France, pour chercher une mise en place des réfugiés juifs face à la persécution nazi. Il garantissait d’inaugurer à plein l’utilisation de quotas d’immigration pour l’Allemagne et l’Autriche (totalisant seulement environ 27000 personnes), mais il ne planifia jamais d’augmenter le nombre. A la conférence d’Evian, les 32 nations se dispensèrent eux-mêmes d’accepter des réfugiés, sauf la République Dominicaine. Le cours semblait déjà tourmenté par des ennuis. La publicité n’avait pas été sortie à temps. Et l’annonce qui avait été faite dans le “Baha’i News” était incorrect. Lidia écrivit à Joséphine, “Si vous ne pourrez pas venir, la perspective pour le cours, déjà sombre à cause du retard, paraîtra plus sombre et encore plus sombre”. Alors que Lidia se préparait à quitter Détroit, elle appris que Joséphine avait reçue sa réponse, Shoghi Effendi lui avait câblé: “Approuve Finlande. Prières”. Lidia se désespérait. “Lorsque je suis venu en Amérique”, dit-elle à Joséphine tristement, “Je rêvais sur ces cours d’enseignants Cseh” qui pouvaient être si important pour le mouvement espérantiste en Amérique, et je croyais que cela serait peut-être le service le plus important que je pourrais faire pour l’espéranto en Amérique. Bien, apparemment ce plan et cet espoir ne rencontre pas l’approbation de Dieu. Il y a des moments où je suis vraiment découragée à propos de Green Acre et où je voudrais volontiers abandonner cette entreprise. Mais je ne le ferai pas et je persévérerais”. Peu de temps après cela, la réponse de Shoghi Effendi à la dernière de Lidia arriva. Le Gardien ne vit aucune objection de changer sa citoyenneté et lui laissa la décision. Shoghi Effendi ajouta: “Les amis, non moins que moi, ne se sentent profondément redevables envers vous pour vos accomplissements splendides et historiques. Persévérez dans vôtre tâche historique, et ne ressentez jamais le découragement. Mes prières vous accompagne partout où vous irez et où vous servirez”. A Lima, Lidia resta une partie du temps à la maison de Franck et Charlene Warner, et une partie du temps à la maison de Franck et Dorothy Baker au 615 rue Elm ouest. Louise Baker Matthias, qui avait 17 ans à cette époque, se rappela cet été de la visite de Lidia. Lima était une ville d’environ 50000 habitants, mais c’était un centre métropolitain pour la surface et un pivot pour la distribution du pétrole. L’année précédente, les pasteurs de trois des plus grandes églises avaient lancés une attaque sur les baha’is, et Franck Baker craignait que son affaire puisse aller à la banqueroute lorsque sa boulangerie fut boycottée. Des baha’is locaux furent renvoyés de leurs boulots ou menacés d’être enflammés. Les attaques s’arrêtèrent un court instant plus tard lorsque Lima obtint sa première station de radio, et des questions sur la foi baha’ie furent répondues dans l’air. Beaucoup de personnes avaient été inquiètes au sujet du cours d’espéranto à Lima: Contrairement aux autres villes que Lidia avait visité, Lima n’avait pas d’organisation espérantiste. C’était les baha’is qui voulaient faire venir Lidia, en particulier une espérantiste de Lima, le docteur Luella Beecher, la mère de Dorothy Baker. Dorothy Baker, un descendant du côté de son père de Henri Ward Beecher et de Harriett Beecher Stowe, était un membre de l’Assemblée spirituelle nationale et un oratrice baha’ie réputé et une enseignante. Immédiatement, Lidia reconnue en elle une profonde spiritualité. “Elle est vraiment une personne extraordinaire”, écrivit Lidia à Della. “Parfois, lorsque je la regardais, j’avais l’impression que je regardais un ange. Je l’aime beaucoup et suis ravie d’être avec elle. J’aimerais atteindre au moins une petite part de cette grandeur spirituelle qui est la sienne”. A cause d’autres responsabilités, Dorothy Baker n’était pas en mesure d’assister à toutes les leçons d’espéranto, mais Lidia fut étonnée combien rapidement Madame Baker saisit la méthode Cseh. “Une fois”, dit-elle à Della, “d’une autre pièce je vis comment Dorothy Baker expliquait la première leçon à une personne qui l’avait manqué: elle était en train de donner une conversation régulière Cseh ! Dorothy Baker est une personne brillante et peut tout faire !” Lidia demanda à Madame Baker de demander à l’Assemblée spirituelle nationale si elle souhaitait qu’elle reste en Amérique. Elle retourna de la réunion avec leur réponse: l’Assemblée nationale approuvait chaleureusement que Lidia reste plus longtemps. Les cours d’espéranto à Lima furent tenues dans une grande pièce, “une sorte de jeu et fête” dans la boulangerie de Franck Baker. Plusieurs années plus tard, Margot Miessler Malkin, bien que seulement un enfant lorsqu’elle rencontra Lidia, rappela l’enthousiasme, la sincérité et les manières charmantes avec lesquelles Lidia présentait la langue espéranto avec une belle rose rouge dans sa main pour démontrer la simplicité de la langue pendant qu’elle décrivait la rose, toujours avec un visage souriant et radieux”. A Lima, l’horaire du discours de Lidia était large, ce qui lui donnait plus de temps pour nouer des amitiés. Les jeunes femmes de Lima trouvaient parfois les habitudes de l’Europe centrale de Lidia étranges, et ils commencèrent immédiatement à lui présenter les coutumes américaines. Un jour, Charlene Warner et Elcore Ebersole emmenèrent Lidia dans un magasin de glace et lui achetèrent un soda fraise. Ils avaient à lui montrer comment la paille travaille et comment tourner la paille autour et boire les fraises lorsqu’elles deviennent enfoncées dans la paille. Cela prit un long moment pour Lidia, et finalement elle dit: “C’était un impressionnant travail !”. “Elle pensait que les américains avaient rebuté beaucoup de gens”, se rappela Madame Ebersole. “Le premier soir à dîner, Charlene avait une belle nappe en toile de lin qui dépassait de peut-être 10 pouces tout autour et elle était soigneusement repassée. Lidia disait qu’elle utilisait une nappe qui couvrait juste le haut de la table. Les grandes nappes repassées était un autre souci pour elle. "De tout ce matériel supplémentaire, vous bordez juste sous le matelas qui est beaucoup plus épais qu’il n’en a besoin”, disait Lidia. “Tout ce qui est nécessaire est un morceau de vêtement de la taille d’une personne. C’est trop de gaspillage”. Louise baker Matthias se rappela un autre épisode qui illustrait les différences culturelles que Lidia avait lutté en Amérique. “Pendant le temps où Lidia était à Lima, un des baha’is local, Glen Sealts, qui possédait un magasin de blanchisserie, se proposa de laver tous ses vêtements gratuitement. Lidia était toujours absolument propre sur elle, mais apparemment cela était trop chère ou ce n’était pas habituel de laver des vêtements aussi fréquemment que nous le faisions ici. Elle pensait que ce n’était pas nécessaire. Mère (Dorothy Baker) fut choquée de sa réaction, et naturellement ne l’exprima pas, mais elle dit à Lidia “que c’était aussi bien une opportunité d’être considérée ou d’avoir un certain tact”. Finalement, Lidia céda et lui donna ses vêtements à laver. Lorsque Lidia quitta Lima, Madame Ebersole se rappela, “Vraiment, nôtre petit groupe lui changea de style. Nous lui achetâmes un équipement conventionnel complet: un taffetas rose stylisé, tous les soutiens, des pantoufles en or, des bas en argent, des bijoux et une nouvelle coiffure. Les baha’is lui donnèrent un foulard pluie - c’était alors populaire”. Les membres de sa classe tinrent un dîner d’adieu à un hôtel et ils lui firent un cadeau. Avec la situation qui empirait en Europe, les nouveaux amis de Lidia essayèrent de la persuader qu’elle devait obtenir son passeport et ses papiers en règle. Cependant, les fonctionnaires au Consulat polonais à New York avaient refusé de donner à Della Quinlan quelque information sur la nouvelle loi polonaise, insistant que le citoyen polonais qui voulait savoir sur cela devrait venir et s’informer en personne. La réponse du bureau polonais confirmait les soupçons de Lidia: la loi était destinée à se débarrasser des “citoyens indésirables” - en d’autres termes les juifs. Lidia était encore confiante que les choses se résoudraient.: “Je sais de mes cinq années d’expériences”, écrivait-elle, “que ces affaires officielles concernant les visas, les permis de visite et ainsi de suite, sont toujours une source de difficultés pour moi - mais que Dieu les aplanit. Une fois en France lorsqu’il y avait une tendance contre les étrangers, ils refusèrent officiellement de prolonger mon permis de visite, et en dépit du fait que tout était arrangé: non pas par le soutien des ministres sollicité par mes amis, mais par l’intervention d’un employé insignifiant. Ainsi j’ai confiance ; bien que je reconnaisse que je n’échapperait certainement pas à mon lot habituel de difficultés et d’émotions effrayantes”. Lidia avait encore en vie Green Acre et avait désespérément besoin de quelqu’un pour l’aider là-bas ; Mais cela devait être quelqu’un qui connaissait l’espéranto assez bien pour être son “appareil”. Lidia écrivit à Della qui suggéra Roan Orloff de Boston. “Je me souvins que Martha Root m’avait souvent dit lorsque j’étais stressée par différents problèmes dans ma vie: “Fais ta part, et laisse le reste à Dieu”... Mais voilà la chose: dans l’affaire de Green Acre, nôtre part a été faite”.Lidia était “prête à l’échec”. Mais écrivait-elle à Roan: “Le sort semble s’opposer à nous à chaque pas. Vous savez que j’ai besoin d’un “appareil”, c’est un traducteur pour les premières leçons...Je me sens complètement orpheline...serait-il possible de venir et de m’aider dans ma “misère” ?”. Roan accepta. “Tout d’abord, j’étais très embarrassée par le départ soudain de Mademoiselle Kruka”, répondit Lidia, “mais je confie cette affaire à Baha’u’llah - et m’aperçois qu’il m’envoie la réponse dans vôtre personne !”. “Ainsi voilà la première leçon”, écrivait-elle avec satisfaction, “que Dieu prends soin de nous et nous aide”. Joséphine Kruka rendit visite à Lidia pendant une heure sur son chemin à travers le pays pour embarquer pour la Finlande. Lidia pensait qu’elle semblait “très fatiguée, et beaucoup moins bien qu’elle n’était lorsque je l’avait vu à Wilmette. Elle semblait quelque peu déprimée, et pas du tout enthousiaste sur son voyage en Finlande, qu’elle regardait néanmoins comme son devoir. Elle disait qu’elle aurait du y aller l’année dernière et elle considère cette année de difficultés comme une punition pour son manque d’obéissance aux suggestions du Gardien l’année dernière. Mais j’étais complètement d’accord avec elle qu’attendre l’année à venir ne serait pas bien, car dans l’année à venir, l’Europe pourrait être réduit en cendres”. Joséphine admettait aussi à Lidia qu’elle regrettait de ne pas avoir expliqué au Gardien pour expliquer les circonstances sous lesquelles elle allait partir au lieu d’envoyer un câble court. Mais à présent, sentait Joséphine, il était trop tard. Lidia ne tint pas de reproches contre Joséphine et dit à Della: “Hier, je lui ait écrit pour l’encourager et lui dire qu’elle devrait considérer son voyage non comme une punition, mais comme un privilège d’être pionnier de la nouvelle Foi dans le pays de ses ancêtres... Nous devons toujours penser que lorsque le Maître (Abdu’l-Baha) disait, les choses importantes doivent céder aux choses les plus importantes. Et bien que Mademoiselle Kruka surprenait et nous embarrassait grandement par son action, et même risquait de mettre en danger l’affaire de Green Acre, car elle ne le faisait certainement pas en dehors de maladie volonté, bien que peut-être avec une prévoyance insuffisante, nous devons être avec elle, et amicalement avec elle dans ce moment important de sa vie alors qu’elle va au loin pour enseigner...”. En dépit des différences culturelles et l’effort d’avoir à déménager de ses logements et de rester dans quatre maisons différentes pendant son séjour à Lima, Lidia avait des souvenirs agréables du temps qu’elle passa là-bas“écrivait-elle. “Vraiment, je me sentais merveilleusement bien avec eux, et ils sont si bons et si gentils avec moi”. “En fait”, confiait-elle à Della, “ils me gâtait plutôt beaucoup”. Lorsque vint le temps de quitter Lima, les choses semblaient quelque peu meilleures que lorsqu’elle était arrivée. Le cours avait été un succès ; elle avait 62 élèves, plus qu’à New York. Avant la venue de Lidia, il y avait seulement une espérantiste à Lima - Luella Buecher. Après le départ de Lidia, ils étaient plus de 60, deux tiers d’entre eux étaient baha’is, et ils formaient une organisation avec Luella Buecher en tant que présidente. Mais le cours n’avait pas été un succès financier: Lidia fut embarrassée lorsqu’elle reçue un tout petit peu plus d’argent qu’elle n’en avait espéré. Cela se présenta que presque la moitié des élèves avaient seulement payé un dollar pour les leçons. En dépit des difficultés financières et d’autres difficultés qui s’étaient élevées pour Lidia en Amérique, Della avait changé son avis à propos du retour de Lidia en Europe. Même bien que le “commérage pernicieux” était “encore propagé, particulièrement l’aspect communiste”, confia elle à Joséphine, la perspective du retour de Lidia en Pologne remplit Della de peur pour elle”.Après son année difficile ici, retournez là bas !”. La situation avait en fait empiré en Europe alors qu’une crise succédait à une autre. En Allemagne, l’été 1938 vit une “vague déferlante de terreur” contre les Juifs. Des arrestations en masse avaient commencé au printemps, et les camps de concentration avaient été transformés en camps de travail forcés. Mais si Lidia avait perdu espoir que la paix puisse triomphée sur la guerre, elle ne le révéla pas. Dans un discours radiophonique sur WBLY à Lima, elle parla d’une émission radio entendue en espéranto de Brno, en Tchécoslovaquie.” Les conditions atmosphériques étaient très défavorables en ce jour”, disait-elle. “Un orage grondait... mais à travers cet orage, les mots de la langue espérantiste nous atteignit clairement, des mots prononcés sur l’amour entre les peuples et la paix sur terre”.Cela semblait, disait-elle, “comme un symbole du monde présent. Des vents soufflent. Le tonnerre gronde. La terre semble trembler. Mais en dépit de cela, les gens de bonne volonté étendront leurs mains aux personnes d’autres pays. Ils souhaitent se comprendre. Ils souhaitent s’aimer. Ils souhaitent vivre en paix.”. Ce fut en fait un symbole poignant. Des tonnerres politiques tombaient en déluge sur la Tchécoslovaquie en été 1938 et ce pays n’avait pas longtemps à vivre en paix. Parce que Lidia était en Amérique, elle ne pouvait assister au 30ème congrès universel d’espéranto qui se tint à Londres en 1938. Mais elle envoya un message de l’union des femmes espérantistes devant être lu au congrès. Bien que la guerre semblait inévitable, elle les exhorta à travailler même plus dur pour la paix. ”En un temps comme cela”, leur disait-elle, “lorsque l’horizon du monde est recouvert par d’épais nuages, nous les femmes, nous devons plus que jamais déployer tous les efforts pacifiques de nos coeurs. Nous devons proclamer que nous voulons la paix sur terre. Mais afin que nos mots ne soient pas seulement de vains sons, nous devons construire. La fondation sur laquelle nous devons construire est les coeurs... Lidia Zamenhof, par dessus tout, ne pouvait pas perdre l’espoir. Après tout, l’espéranto, comme elle dit à un journaliste américain, “signifie celui qui espère”. ================================ Chapitre 15: “Green Acre” Bien que Lidia ne pouvait pas aller au congrès de Londres, sa présence fut le clou du congrès de l’association espérantiste de l’Amérique du Nord en juillet à Cleveland, Ohio. A la session d’ouverture, elle salua les congressistes et leur dit: “une grande majorité du peuple américain ne ressent pas encore le besoin d’une langue internationale. Une grande majorité de l’humanité ne comprend pas encore la nécessité d’une compréhension mutuelle. A nous à qui appartient la tâche élevée de réveiller dans les coeurs humains la conscience de la solidarité de la race humaine, de la fraternité des hommes quelque que soient où ils soient nés, quelque que soit leur pays, leur race, leur foi”. Pendant les réunions d’affaires, rapporta Ernest Dodge, Lidia fut appelée à plusieurs reprises “à parler pour l’instruction sur tel point ou tel autre”. Elle donna plusieurs causeries comprenant l’une le dimanche matin sur le service non sectaire sur le thème de la fraternité de l’homme, et à une réunion spéciale sur le sujet de “L’espéranto dans le service de la religion”, à laquelle il fut discutée comment les Catholiques, les Protestants, la société des amis et les baha’is utilisaient l’espéranto. Lorsque Charles Simon rencontra tout d’abord Lidia à Détroit, il avait appris qu’elle était “un être tout à fait déterminée et à la forte volonté, peu enclin à dévier beaucoup de ses pratiques établies”. En relation avec le congrès de Cleveland, une réunion publique avait été planifiée à laquelle le maire de Cleveland allait parler, et Lidia allait donner une démonstration de cours Cseh, qui habituellement durait une heure. Le docteur Simon pensait que c’était un peu trop long, depuis qu’ils y avaient d’autres orateurs sur le programme, ainsi il lui demanda si elle pourrait écourter son cours. “Je pourrais”, répondit-elle, “mais je ne le veux pas !”. La démonstration “réussie merveilleusement”, se rappela il plus tard, “et le public réagit à cela tout à fait de manière enthousiaste”. Roan Orloff, qui avait été nommée au comité” d’organisation pour Lidia, servait en tant “qu’appareil” pour cette leçon. Roan pensait que c’était “la plus brillante performance qu’elle n’avait jamais vue”, et le discours de banquet de Lidia, à laquelle elle se remémorait les traces de son enfance et les dernières années de son père, “ensorcelant”.Même lorsqu’elle était silencieuse, sa présence électrifiait l’air”. Le congrès adopta une résolution exprimant “à Mademoiselle Zamenhof, la fille talentueuse du bien aimé fondateur de nôtre langue... nôtre gratitude la plus profonde pour l’inspiration de sa présence et pour sa coopération dévouée dans les diverses activités du congrès”, et autres expressions “nos sentiments d’appréciation” de l’Assemblée spirituelle nationale” pour la grande part qu’ils ont joué en rendant possible d’avoir Mademoiselle Zamenhof en Amérique pour propager la cause de l’espéranto à travers le pays”. Lidia continua à croire que les difficultés qu’elle avait affronté en Amérique seraient surmontées, et elle était confiance qu’il lui serait donnée un prolongement de son permis de visiteur afin qu’elle puisse continuer ses classes d’espéranto. Bien que son permis allait expirer le 30 septembre, elle fit des projets pour commencer un cours de six semaines à Cleveland commençant le 25 septembre, suivi par un cours à Minneapolis. Après le congrès de Cleveland, Lidia prit le train pour le Maine pour rester quelques jours avant le commencement du cours Cseh à Green Acre. Green Acre était un domaine sur les rives de la rivière Piscataqua dans le Maine. Il avait été établit en 1894 par Sarah Farmer en tant que retraite pour l’étude de la religion et de la philosophie. D’une institution représentant une variété de visions, il devint en 1938 une école d’été baha’ie et pouvait loger une centaine de personnes dans le “Inn”, un immeuble de quatre étages entouré par une véranda couverte. Cet été, les jours à Green Acre commencèrent avec des prières du matin dans la salle baha’ie. A côté des cours d’espéranto de Lidia, il y avaient des après-midi thé à la villa “Ole Bull” et des groupes d’études et des conférences. Le soir, se déroulaient des réceptions, des groupes de discussions des récitals musicaux ou des lectures, des lectures de la littérature baha’ie ou les dernières images émouvantes de Haïfa ; et le samedi soir, des danses à une radio (victrola) dans l’auditorium de l’Inn. Comme Lidia l’avait pressentie, le nombre d’élèves dans son cours Cseh était petit, seulement 10, mais “enthousiastes”, reporta Roan. Six étaient venus spécialement pour le cours de New York, Philadelphie et le Delaware. Certains étaient débutants ; d’autres étaient là pour apprendre la méthode d’enseignement Cseh. Comme auparavant, tous ceux qui assistaient ne payèrent pour le cours. “Elle a permis de bonne grâce que les gens les plus pauvres prennent part gratuitement”, dit Roan à Della. L’un de ceux qui était venu pour étudier la méthode Cseh était Samuel Martin de Emporia, Kansas. Bien qu’ayant seulement 14 ans, il était déjà un espérantiste compétent et enthousiaste. Il était aller seul au congrès de Cleveland, et lorsque les autres espérantistes apprirent qu’il voulait assister au cours de Green Acre, ils se réunirent et ils souscrire de l’argent pour lui envoyer là-bas. Quelques années plus tard, Martin se souvint de Lidia “en tant qu’une âme très gentille et très généreuse, avec une personnalité chaleureuse ; un excellent professeur”. Durant ces semaines dans le Maine, Lidia et Roan devinrent des amis proches. “une fois à Green Acre”, se souvint Roan, “nous marchions ensemble et quelqu’un nous dit, “vous êtes toujours ensemble !». Et Lidia dit, “bon, il y a un double lien entre nous. Nous sommes toutes les deux baha’ies et nous sommes toutes les deux espérantistes, ainsi nous aimons être ensemble”. “De l’image de son père”, se rappela Roan Orloff Stone plusieurs années plus tard, “Lidia était exactement son image”. “Elle avait”,se rappela tendrement Roan, “un tel amour pour Baha’u’llah, un tel amour pour l’espéranto - c’était un double amour - que vous ne regardiez pas sa beauté ou son manque de beauté, vous regardiez juste son âme dans ses yeux”. “Lorsque le nom de Baha’u’llah fut mentionné, ou la langue de l’invention de son père”, écrivit plus tard Madame Stone, ”c’est comme si à travers un miracle toute sa personnalité changeait... elle oubliait son propre ego comme avec des yeux brillants et d’une voix vibrante, elle se lançait dans une discussion ou racontait ses expériences dans son champ de service. Son visage devint spécialement illuminé lorsqu’elle parlait de son pèlerinage en Terre sainte, ses précieux moments avec la Très sainte Feuille, ses causeries avec le bien-aimé Gardien, sa communion avec Dieu dans les tombeaux sacrés”. Les jours heureux à Green Acre passèrent rapidement. A l’heure du repas, ils s’assirent autour d’une grande table dans u coin de la salle à manger. “Comment elle riait de bon coeur”, se rappela Roan, “lorsque, au petit déjeuner de dimanche, je versais une coulée de sirop d’érable sur mon pain. Roan, vous êtes noyée !”, cria elle. Dans l’autre main, elle était très ennuyée, et elle ne fit aucun secret de sa gêne, lorsque je taquinais nôtre convive, George Miller, plus que je n’aurais du”. Roan se rappela que Lidia était “toujours en train d’aider quelqu’un. Elle était toujours là si quelqu’un avait besoin d’un mot de réconfort, ou si quelqu’un avait besoin d’un conseil comme quelle couleur porter avec quelque chose d’autre, ou si quelqu’un avait un problème spirituel à discuter. Finalement, elle pouvait dire, “Bien, pourquoi vous n’écrivez pas à Shoghi Effendi sur ce sujet ? Il vous aiderait”. Mais Lidia ne parlait jamais de ses propres problèmes. Bien qu’ils étaient seulement 10 dans la classe d’espéranto, Lidia y donna toute son énergie, enseignant 4 heures par jour. Mais, confia Roan à Della, “elle est pâle et complètement usée ! Et je me sens un peu inquiète à son sujet !”. A la fin du cours, la classe donna à Lidia un don de 19 dollars et en plus, quelqu’un d’autre, mais pas un membre de la classe, qui “se sentait en adoration avec elle”, lui présenta un chèque de 50 dollars. Roan eut à retourner à son travail à la maison d’état de Boston jusqu’au jour férié. “Mes yeux étaient pleins de larmes”, écrivait-elle à Della, “et il y avait un morceau dans ma gorge lorsque je pris congé de mon amie”. Quelques mois plus tard, Lidia avait reçu une invitation pour visiter la retraite montagneuse de Roy Wilhelm dans le nord de Lovell, Maine, après le cours d’espéranto. Membre ancien de l’Assemblée spirituelle nationale, Roy Wilhelm dirigeait une affaire d’import à New York. Depuis plusieurs années, il était un ami proche de Martha Root, à qui il avait présenté la foi baha’ie. Une fois que le cours de Green Acre était fini, Lidia alla dans le nord Lovell pour assurer l’invitation de Monsieur Wilhelm. Elcore Ebersole de Lima, Ohio, était aussi là-bas à ce moment. Quelques années plus tard, elle se rappela leur séjour: “c’était une maison fantastique découpée dans la montagne élevée au-dessus du monde. De loin, elle ressemblait à un énorme coucou d’horloge... Lidia et moi se rencontrèrent par l’un des ouvriers de Roy Wilhelm et conduits dans sa maison au sommet d’une montagne. “Lidia aimait être là-bas et elle s’était établie comme si elle planifiait de rester longtemps”. Apparemment, il y avait une certaine incompréhension quant à savoir combien de temps son invitation allait durer. Bien que Lidia planifiait de rester au moins 17 jours, Elcore compris qu’ils étaient seulement invitées pour le week-end . “Après dix jours”, se rappela Madame Ebersole, “un cuisinier me demanda si j’avais quelque idée de combien de temps j’espérais rester. Je lui dit que je parlerais à Lidia et lui assurait que nous ne pourrions rester plus très longtemps. “Au petit déjeuner un matin, Roy passa une assiette de bananes et dit à Lidia: “Prenez une banane et mangez la”. Elle me demanda ce que cela signifiait, et je dis que cela signifiait que vous devriez prendre une banane et la peler et la couper sur les céréales. A la fin du repas, Roy disait toujours: “Maintenant”. Sur son ordre, chacun à la table mis son ou son genou sous le bord de la table où nous mettions la nappe repliée pour le prochain repas. Lidia riait à cet ordre, et attendait à chaque fois que le sommet de la table soit élevé par la pression des genoux”. Pendant qu’elle restait à la maison montagnarde de Roy Wilhelm, Lidia avait le temps d’écrire à Harolds Foulds, l’encourageant gentiment dans sa recherche spirituelle. “Dans le monde aujourd’hui, il y a beaucoup différents “isms”, écoles, théories, philosophies, et nous voyons des gens s’attrouper vers eux”, écrivait-elle. “Ils croissent rapidement, comme des herbes sauvages, et ils meurent rapidement. Un arbre qui doit rester pour des siècles croît lentement, et lentement il donne des fruits. Cela est vraie de la rapidité avec laquelle des idées superficielles se répandent et périssent, pendant que les grandes vérités prennent racine lentement dans le but de durer un long, un long moment. La même chose est vraie dans la relation à l’individu à son coeur où les racines de l’arbre de l’éternité deviennent seulement graduellement renforcées, tandis que les herbes de fantaisie et les théories artificielles trouveront rapidement une place en elles. Par conséquent, puisse vôtre coeur être comme un sol riche, dans lequel les racines de l’arbre d’éternité deviennent puissantes. Cultiver la terre de vôtre coeur et arroser le avec la sagesse Divine et l’inspiration que ce grand Enseignement du Messager de Dieu d’aujourd’hui apporte...”. “Lidia n’était pas très heureuse de quitter ce paradis”, se rappelle Elcore Ebersole, mais finalement ils prirent un bus pour repartir à Kittery, Maine. Durant la première semaine d’Août, Lidia retourna à Green Acre.Elle était occupée à traduire de nouveau. Plus tôt dans l’année, Madame Amélia Collins lui avait dit que Shoghi Effendi voulait avoir “Baha’u’llah et l’ère nouvelle” traduit en polonais. Bien que Lidia n’avait jamais traduit quoi que ce soit en polonais auparavant, elle avait écrit au Gardien: “Si il n’y a personne d’autre pour le faire, j’essayerais, si vous souhaitez plutôt que je fasse ce travail plutôt que d’autres traductions en espéranto. Bien que mon présent travail prenne presque tout mon temps, j’essayerais néanmoins de faire ce que vous me dites de faire”. Maintenant enfin, elle avait un peu de temps libre, mais plutôt que de se reposer, elle travaillait avec ferveur, stimulée par une lettre de Shoghi Effendi lui demandant de finir la traduction aussi vite que possible. Elle n’avait pas pris part régulièrement à la réunion de prières à Green Acre, admit-elle dans une lettre à Roan, “car il y avait différentes formes de prières et l’une d’elle est le travail. Mais en dépit de tous les efforts, je n’accomplit pas autant que j’aurais aimé”. Beaucoup de baha’is visitèrent Green Acre et restant là pendant presque tout l’été, Lidia fut capable d’être avec plusieurs personnes qui lui étaient devenues très chères. Dorothy Baker, qui était tout près d’être en vacances, vint à Green Acre et donna une causerie sur la prière et le jeûne. Puis, écrivait Lidia à Roan, “Ma chère, si j’étais venue en Amérique seulement pour entendre son discours et voir l’inspiration qui parlait à travers elle, même alors le voyage aurait valu dix fois la peine. Et lorsque je me compare moi-même à cet ange inspiré, je pleure sur mon insignifiance”. L’un de ceux qui avait assisté aux cours d’espéranto à Green Acre fut Louis Grégory, le remarquable enseignant baha’i noir. “J’ai appris à l’aimer et à l’admirer beaucoup...”, écrivait Lidia. “Si certains de ces personnes qui ont des préjugés racistes pouvaient le connaître, ils comprendraient sûrement bien qu’il n’y a que quelques personnes blanches que l’on puisse comparer à Monsieur Grégory !”. Roan retourna à Green Acre pour retrouver Lidia absorbée dans sa traduction. “Shoghi Effendi”, disait Lidia, le visage rougeoyant, “m’a dit que je dois me dépêcher et la finir aussi vite que possible”. Le dernier dimanche soir à la réunion de Green Acre,une “Parade de Paix” appelée “La fontaine de Lumière”, écrite par Nancy Bowditch, allait être présentée. Les parades de Madame Bowditch, des tableaux vivants de sujets baha’is, étaient quelque chose de traditionnel à Green Acre. Des personnes vinrent des villes environnantes pour y assister, et cette année, “le plus nombreux public depuis des années était tenu en haleine, ensorcelé par la présentation spectaculaire” de scènes de “La chronique de Nabil”, l’histoire du Bab, précurseur de la foi baha’ie, et ses disciples qui rencontrèrent un mort de martyre des mains du clergé musulman au 19ème siècle en Iran. “Toute la distribution était dans des beaux costumes orientaux avec des effets légers de lumière”, observa un journaliste. “La plus haute note spirituelle était maintenue à travers avec un élan croissant, finissant avec l’Appel du Bab à Ses 18 Lettres du vivant, alors qu’elles s’étaient dispersées dans tout l’Est pour parler du glorieux message. C’était un chef-d’oeuvre qui ne sera pas oublié par quiconque l’entendait”. Lidia et Roan avaient été recruté pour agir dans la parade. Lidia était en tant que Zaynab, un femme paysanne qui s’était déguisée elle-même en tant qu’homme pour combattre avec les babis assiégés au fort de Zanjan, où elle fut tuée. Roan jouait le rôle de Mulla Husayn, le premier à croire au Bab. Jadis, pendant qu’ils étaient attaqués par une foule armée de musulmans fanatiques, Mulla Husayn avait poursuivit le tueur de l’un de ses compagnons à l’endroit où son adversaire était caché derrière un arbre. Avec son épée, il donna un coup d’une puissance si extraordinaire que l’épée coupa l’arbre, l’homme et son armure. Les ennemis babis, en observant ce fait, fuirent consternés. La pièce avait seulement été répétée une fois avant la performance. De la part de Mulla Husayn, Roan avait à porter un grand bouclier et une épée, qu’elle ne savait pas comment utiliser. Lidia vint à sa rescousse. “Ce fut elle qui me montra comment “tuer” l’ennemi avec mon épée”, se rappela plus tard Roan, “elle, le coeur doux, l ‘amour tranquille !”. Bien que Roan avait pratiqué sa part tout le mois, durant la représentation ,alors qu’elle était concentrée sur le maniement du bouclier, elle oublia son texte. “Ce fut une nouvelle fois Lidia qui me sauva. Restée près de moi sur le “champ de bataille”, elle susurra les premiers mots, et tout finit bien”. Les jours idylliques de Green Acre touchaient à sa fin. Après que Lidia ait parlé au programme du jour férié sur le thème de “Les principes bahais pour la Paix”, il fut temps de partir de Boston et de retourner une fois de plus à son travail. Lidia avait déjà essayé d’appeler le Service d’Immigration et de naturalisation pour prolonger son permis de séjour en Amérique, mais le Bureau d’immigration refusa de considérer l’affaire avant la fin d’août, lorsqu’elle fit à nouveau une requête. Mountforts Mills, l’avocat, avait examiné ses papiers et les avait déclarés en ordre. A sa recommandation, sa lettre établissait: “Je souhaite rendre clair que je n’ai pas l’intention de rester en permanence dans ce pays”. Elle semble avoir senti que ce n’était pas la même chose que rechercher la citoyenneté. Elle continua: “Je souhaite appeler vôtre attention que dans mon travail - enseigner l’espéranto - je ne serais pas sage de remplacer quelque enseignant américain de cette langue...”. Son application de prolonger son séjour de 8 mois établissait qu’elle n’était “pas employé dans les Etats-Unis”, mais était ”engagée dans les affaires aux Etats-Unis: enseigner l’espéranto dans différentes villes...’, et que son revenu mensuel était de 50 à 60 dollars par mois. Lidia n’avait pas entièrement retrouvé ses esprits au sujet de la recherche de la citoyenneté américaine. Elle écrivit à Roan: “Je n’ai pas encore reçue moi-même l’éclairage sur cette étape: je ne sais pas si je devrais le faire ou pas”. En tout cas, elle croyait qu’elle ne pourrait même pas le faire jusqu'à ce qu’elle ait demeuré un an aux Etats-Unis. Cependant, Ernest Dodge avait appris d’un officiel dans le Service d’Immigration et de Naturalisation que si Lidia voulait avoir la citoyenneté, elle aurait à quitter les Etats-Unis et y revenir pour le quota de Pologne, qui était d’environ 6500 par an . Monsieur Dodge avisa Roan que si, pour quelque raison que ce soit, le gouvernement devait continuer à déplacer Lidia, il l’enverrait dans le pays de sa citoyenneté - la Pologne. Mais personne ne pensait qu’une telle chose pourrait jamais arriver. ================================ Chapitre 16: “Rejetée” Après avoir quitter Green Acre, Lidia passa une semaine à Boston en tant qu’invitée de l’Assemblée spirituelle nationale baha’ie, de la société espérantiste et du Cercle des Amis espérantistes. “Avant et pendant sa visite”, rapporta Roan, “les baha’is et les espérantistes travaillaient ensemble dans l’unité et l’harmonie”. Lidia fut occupée du moment qu’elle arriva à Boston, allant d’un engagement de parole à un autre, parlant aux baha’is, aux espérantistes et à deux jeunes groupes juifs ; aussi bien que en assistant à des déjeuners et des réceptions donnés par les espérantistes, les baha’is et un groupe de polonais. En dehors de ses engagements formels, écrivait Roan, “il y en avaient beaucoup d’autres intercalés entre ceux-là, lorsque Mademoiselle Zamenhof parlait à des personnes sur la Cause”. Son discours devant les espérantistes de Boston, sur les souvenirs de son enfance et de son père, “était plein de pathétisme et intéressait à elle les auditeurs”, rapporta H.B. Hastings, un important espérantiste de Boston. Le jour d’après, après un interview radio, Lidia fut “cérémonieusement” reçu par le maire, Maurice J. Tobin. C’était un jour chaud, se rappela plus tard Roan. ”Il était en bras de chemise. Il dit juste eh !, bienvenue à Boston, et lui avait signé le livre d’invité et c’était cela”. Roan avait arrangé pour Lidia un court discours au temple Israël durant le service régulier. “Le rabbin Levi s’assit sur un côté de l’estrade, et elle s’assit de l’autre côté”, se rappela Roan. “Lorsque le service était fini, l’organiste vint arrivant du bas et dit:” J’ai aimé ce que vous dites, mais dites moi, ne peut-on dire o ?” Lidia dit, “Bien sur je peux dire “o” mais en Europe nous ne disons pas “ow”, nous disons “oh”. Lorsqu’elle parlait anglais, elle utilisait toujours le “o” européen”. Carl Alpert, un correspondant de l’agence télégraphique juive, avait pris un intérêt à Lidia et arrangea deux interviews radio et plusieurs apparitions pour elle à Boston, comprenant un discours devant un groupe de jeunes diplômés juifs du collège. Monsieur Alpert interviewa lui-même Lidia et son article intitulé, “L’espéranto, une force pour la Paix”, apparut dans beaucoup de périodiques juifs dans toute l’Amérique. Lorsqu’il demanda si il y avait des groupes espérantistes en Palestine, Lidia répondit, “Beaucoup. L’espéranto peut réellement faire beaucoup pour aider à résoudre le problème arabo-juif en Terre sainte. Les juifs ne veulent pas apprendre l’arabe et les arabes ne veulent pas apprendre l’hébreu. Ainsi, il y a beaucoup d’incompréhension des buts de chaque côté. C’est un exemple parfait de l’utilité de cette langue simple, qui peut facilement être utilisée par les deux groupes en tant que langue auxiliaire pour poursuivre leurs relations sociales et économiques, sans pour autant renoncer à leurs langues nationales”. Roan avait structurée la première lettre que Lidia lui avait écrite et elle l’avait accroché sur le mur de la salle du club à l’hôtel Gralyn où le “Cercle de l’amicale de l’espéranto” tenait ses réunions. Lorsque Roan emmena Lidia pour voir la salle du club, Lidia fut saisie de voir sa propre lettre accrochée au mur. “Elle se tourna vers moi”, se rappela Roan, “et elle dit, “Roan, vous êtes folle !”. Lidia ne pensait pas qu’elle devrait être traitée de manière différente juste parce qu’elle était la fille du docteur Zamenhof. “Elle n’aimait pas ça du tout”, réfléchie Roan quelques années plus tard. “Elle voulait être la même que toute autre personne”. A la fin du séjour de Lidia à Boston, Roan écrivit à Della une lettre qui révélait l’amour profond, l’admiration et la dévotion que Lidia avait inspiré en elle. “Quelle glorieuse semaine cela a été !”, s’exclamait Roan. “Etre juste avec elle, entendant sa douce voix, chauffée dans la lumière de l’amour de Baha’u’llah, apprenant des leçons de foi, de patience, de tact, de gentillesse... aimant son charmant anglais, écoutant sa prononciation en espéranto, surveillant son approche aux autres, observant sa présence à l’estrade, remerciant le Ciel pour son doux sourire - oh, aimant juste le sol qu’elle foule - Della, ma chère, je suis impuissante de mettre mes sentiments en mot, impuissante d’exprimer mon profond et durable amour pour elle, - mais vous savez combien je sens, car je suis certaine que quiconque qui aime son amour aime le chemin qu’elle fait”. Lidia, sincèrement humble, fut déconcertée par la dévotion qu’elle inspirait aux autres. Dans une lettre à Della qu’elle révéla: “Roan m’écrit souvent, toujours avec un grand amour que je ne mérite vraiment pas, et voyant cela, je me sens vraiment honteux car je ne peux me débarrasser du sentiment que même si je décevait mes amis, qui me voit bien meilleure que je ne le suis”. Lidia était peu disposée à quitter Boston, mais elle avait à aller à Cleveland, où elle avait été invité à enseigner. Les espérantistes de Cleveland étaient particulièrement de jeunes personnes. Un groupe de la haute école et des élèves de collège avaient travaillé durs pour faire de la publicité aux cours Cseh: les journaux de langues étrangères donnaient à Lidia de généreux reportages, et elle était interviewée par les trois journaux principaux de la ville. Au moins l’un d’eux avait un article illustré prêt à être imprimé, mais il ne fut jamais publié ; le conflit international le sortit de la page. Hitler menaçait de faire la guerre si les Sudètes en Tchécoslovaquie n’étaient pas remises à l’Allemagne. Le monde attendait dans la peur que les diplomates anglais et français, essayant d’apaiser Hitler, acquiescent à sa demande à la conférence de Munich, croyant naïvement les revendications de Hitler qu’une fois que les Sudètes feraient partie du troisième Reich, il n’aurait plus aucune revendication territoriale en Europe. Pour les éditeurs de journaux de Cleveland, l’espéranto semblait moins mériter de l’espace du journal ; beaucoup de personnes pensaient que la guerre en Europe était imminente. A Cleveland, comme elle l’avait fait dans d’autres villes, Lidia parlait devant divers groupes d’églises et d’assemblées scolaires, qui comprenaient le collège de Cleveland, le collège de Schauffler, l’école de Henry George et la haute école des poids et mesures. Comme d’habitude, elle donna sa lecture en espéranto avec un espérantiste local traduisant en anglais, et puis, à la fin du discours, traduisait les questions en espéranto pour que Lidia puisse répondre. “En dépit de la technique plutôt encombrante”, se rappela le docteur Simon, “ses discours excitaient un intérêt considérable et une curiosité concernant l’espéranto”. L’Assemblée spirituelle baha’ie avait offert son Centre dans l’immeuble de l’hippodrome en bas de la salle de classe, mais une fois alors que la Fête des 19 jours se passait un soir, alors qu’il y avait un cours d’espéranto au centre baha’i, le cours d’espéranto allait être déménagé au local YMCA. Charles Simon et Lidia se retrouvèrent eux-mêmes se préparant pour le cours dans la pièce où les cours de cuisine se tenaient, avec, se rappela il, “des poêles nombreuses alignées à la place des chaises. Menant à la salle de classe, je me rappelais immédiatement d’un magasin de comptabilité et, poussant la porte, je montrais la ressemblance à un magasin, et Mademoiselle Zamenhof vit immédiatement les possibilités de la situation. “Qu’est ce que vous souhaiteriez acheter, monsieur ?”, me demanda elle, prétendant être la vendeuse. “Donnez-moi une douzaine d’oeufs, s’il vous plaît”, je répliquais. “Certainement, monsieur, mais pouvez vous attendre que la poule les pondent ?”, répondit-elle. Lidia encouragea Charles Simon à devenir un enseignant Cseh, et à plusieurs reprises lorsque Lidia visita la maison Simon pour le dîner, il se rappela plus tard, ”nous passions plusieurs heures durant lesquelles je lui démontrais différents aspects de la méthode Cseh et elle corrigeais très assidûment chaque phase de ma technique. Son analyse pénétrante et ses suggestions utiles se trouvèrent utiles, non seulement pour les cours futurs que j’enseignais à Londres, et à la Sorbonne à Paris, durant mon service militaire, mais aussi dans mes propres cours en français, en espagnol et en allemand durant ma longue carrière d’enseignement”. L’une des baha’ies qui prit le cours, Mayme C.Jackson, écrivit à Della: “Je dois dire ici que je n’aurais manqué cela pour rien au monde...Je suis tout à fait sûre que j’exprime le sentiment de la classe toute entière... Mademoiselle Zamenhof durant tout le cours incluait quelques allusions de l’enseignement si proche à nos coeurs et je suis sûre que nous verrons la maturation de beaucoup de graines plantées durant son séjour”. A la mi-septembre, Lidia n’avait reçu aucune réponse du Service d’Immigration et de Naturalisation sur sa requête pour un prolongement de son séjour”. “Dans les moments de tensions que nous sommes en train de vivre actuellement,”, écrivait-elle à Della avec une pointe d’appréhension, “on ne peut prévoir quelque chose. Toute l’humanité est à présent dans une situation terrible, mais Baha’u’llah a tout pouvoir pour protéger et prendre soin pour ceux qui croient en Lui et se tournent vers Lui. Je place également mon sort entre Ses mains, car même si je reste en Amérique durant les jours terribles à venir, ma situation pourrait être très difficile ici. Mais nous devons croire en Lui, car nous sommes impuissants, et Il est le Tout Puissant”. 10 jours passèrent, et Lidia n’entendait encore rien - il restait seulement quatre jours avant que son permis de visite n’expire, mais les deux cours à Cleveland venaient tout juste de commencer. Il lui semblait que, en dépit de tous les efforts qui avaient été fournis, l’intérêt pour les cours “n’était pas très grand”. “Je peux à peine espérer autre chose”, confiait-elle à Roan dans un rare moment de pessimisme. Plus tard, cependant, elle écrivit à l’un des espérantistes que même bien que les cours de Cleveland aient seulement 35 élèves, “si nous considérons que nous avons fait la publicité principale, des discours, des cou de démonstrations, des interviews en ces derniers jours de tension de septembre, lorsque l’humanité toute entière sera prête à aller vers le terrible Armageddon... bien, je pense que sous de telles circonstances, ce modeste nombre est tout à fait vraiment satisfaisant”. A sa roche amie Roan, elle fit allusion a “certaines autres difficultés” ne concernant pas son travail, mais elle ne donna pas de précisions. “Et je réalise”, écrit-elle, “que c’est seulement le commencement des difficultés qui arriveront de plus en plus abondamment, lorsque - Mais qui autre que Dieu dissipe les difficultés ?”. Le Nord Est des Etats-Unis venait juste d’essuyer la terrible tempête de son histoire, un ouragan qui tua 500 personnes. A Cleveland, il faisait très chaud. “Le baromètre baissait terriblement”, écrivit Lidia à Roan. “Cependant le ciel est bleu et clair, mais il semble que nous allons avoir une tempête. Est ce que l’ouragan va venir ici ? “Je viens juste d’entendre un discours de Hitler à la radio... A New York, lorsque Della s’enquérait au sujet de l’application de Lidia, les officiels lui dirent simplement de ne pas s’inquiéter. Le jour avant que le permis de Lidia n’expire, elle n’avait encore rien entendue. Mountforts Mills était en dehors de la ville, ainsi Horace Holley demanda à Allen McDaniel, un ingénieur civil de Washington qui était membre de l’Assemblée spirituelle nationale, de téléphoner au département de l’Immigration pour reconnaître le statut de sa pétition “et peut-être”, ajouta monsieur Holley, “faites de joli mots pour elle”. “Ce serait une chose terrible pour elle d’avoir à retourner en Pologne”. Enfin la réponse du département de l’immigration arriva. C’était une lettre formelle, datée du 30 septembre - le jour où le permis de Lidia expirait, et il était signé par Byron H. Uhl, directeur de la région de New York au service de L’Immigration et de la naturalisation à l’île Ellis, New York. Elle disait: “Chère madame: Le département du travail a rejeté vôtre demande pour un prolongement de vôtre admission temporaire aux Etats-Unis de sept mois et trois semaines. Vous êtes, par conséquent, informée que vôtre départ sera effectué pas plus tard que le 10 octobre 1938. Au moins cinq jours avant le départ, ce bureau devra être notifié de la date, de la sorte et de la place de départ. Si vous partez par bateau, merci de fournir le nom de celui-ci, la date de départ et les numéros de vos tickets, de vôtre cabine et de vôtre couchette, afin que vôtre départ puisse être contrôle pour clarifier vôtre enregistrement dans nos fichiers pour de futures références”. Cependant, en 1981, sous la loi de la liberté de l’information, plusieurs tentatives furent faites pour obtenir l’accès au fichier de l’immigration et de la naturalisation sur l’affaire. A cette époque, l’agence affirmait qu’elle n’avait aucun fichier sur Lidia Zamenhof, et que le fichier avait probablement été détruit. Lidia était “désespérée et saisie” par la décision, si contraire à ce qu’elle avait espéré et en fait, attendu. Cela vint comme un choc spécialement déplaisant depuis que Della venait de lui écrire que les fonctionnaires leur avait conseillé de ne pas s’inquiéter. Madame Quinlan et les autres commencèrent immédiatement à chercher un revirement, contactant les espérantistes qui avaient des relations à Washington. Maintenant qu’elle était forcée de partir, Lidia réalisa soudainement combien elle voulait rester en Amérique ; elle ne voulait pas retourner du tout en Europe. Néanmoins, elle commença à faire des projets pour voyager en tant que passager polonais sur le transatlantique “Pilsudski” le 11 octobre à minuit. Elle câbla à Shoghi Effendi: “Extension séjour Amérique refusé. Amis essayent de changer décision gouvernement. Autrement retour Pologne. Merci câbler si devrait agir autrement”. Maintenant toutes sortes de choses devenaient soudainement critiques. Lidia avait été porté par le chèque que l’Assemblée nationale lui avait donné à son arrivée - elle avait été incapable de le dépenser car elle n’avait pas de compte en banque. C’était de l’argent qu’elle n’aurait pas besoin de payer pour son passage en Pologne. Mais maintenant, le chèque était daté d’un an et aucune banque ne voulait l’encaisser. “Ne sachant rien sur la banque et les coutumes de chèque”, et étant “inexpérimentée sur les affaires commerciales”, elle chercha le conseil de Roy Wilhelm. Finalement, elle reçue un nouveau chéquier. Durant son année en Amérique, Lidia avait laissé certaines de ses affaires aux domiciles de ses différents hôtes. Elle ne récupéra pas son fer à repasser, mais heureusement le manteau de fourrure qu’elle avait laissé dans un magasin départemental à Détroit pour être raccommodé venait juste de lui revenir. Elle en aurait besoin en Pologne. Le 3 octobre, un télégramme arrivait de Ernest Dodge: “Les fonctionnaires en place consentent pour recommander le prolongement jusqu’au 3 décembre. Lettre ce soir”. Monsieur Dodge revenait du département de l’immigration et avait fait la rencontre de monsieur Whorrall pour discuter du cas de Lidia. Maintenant il fut révélé qu’on lui avait refusé un prolongement de son permis de visiteur parce qu’en acceptant de l’argent pour ses cours d’espéranto, elle avait enfreint la loi: le permis de visiteur avec lequel elle est entrée dans le pays ne lui permettait pas de travailler alors qu’elle était aux Etats-Unis. Monsieur Dodge décrit à Della son entrevue avec le fonctionnaire: “Monsieur Whorrall m’assurait que cela avait été une violation tout au long du permis avec lequel mademoiselle Zamenhof était entré, pour avoir conduit ses cours comme il a été fait, et naturellement nous avons projeté tout le temps. Naturellement j’insistais sur le côté unique du service, l’invitation de deux corps à but altruiste, et ainsi de suite ; aussi le fait que son enseignement n’avait pas été une affaire lucrative, depuis qu’elle avait été entretenue par des amis personnels de la Cause dans le but de suppléer les reçus modestes de ses cours. Mais il disait qu’une personne avec un tel permis de visiteur n’est pas autorisée par la loi à travailler. “Finalement il dit: “Quel serait le temps le plus court pour qu’elle puisse mettre en ordre ses affaires et quitter le pays volontairement ?”. Je dis que 60 jours seraient nécessaires pour finir les cours déjà en cours à Cleveland. Puis il dit: “Bon, je lui donnerais 60 jours à compter d’aujourd’hui 3 décembre”. Et il ajouta qu’il savait bien que beaucoup de personnes qui viennent des permis de visite n’essayaient pas de travailler, mais c’était contre la loi, et le département a le droit et le devoir d’arrêter et de les déporter lorsqu’ils sont conscients des faits. Cependant, il me quitta pour m’expliquer clairement qu’il ne souhaite pas embarrasser nôtre mouvement ou mademoiselle Zamenhof personnellement, et il est prêt à juste ne pas prêter attention à l’angle de cette affaire, fournissant qu’elle va dans d’autres pays avant la fin du temps maintenant imparti”. Monsieur Dodge la questionna sur “les futurs déplacements possibles” et s’il n’y avait pas de lois spéciales pour les professeurs et les éducateurs. ”Ma compréhension de la réponse”, dit-il à Della, “est ceci: que dans certains cas, dans le cas d’un professeur régulier ou spécialiste, quelqu’un ayant uniquement des qualifications qui ne peuvent être dupliquées dans ce pays, ils accordent un formulaire spécial de permis d’entrée, sans attendre de quota. Mais qu’un tel permis peut être donné seulement sur la requête qui établit clairement et établit la raison pour l’exception lorsque le permis est d’abord demandé, et avant d’entrer dans le pays ; et ainsi qu’ils ne pourraient considérer cette sorte de demande en tout de l’un qui est déjà ici avec un permis qui spécifie une visite d’agrément, et qui n’a pas observé les limites sous quelle entrée était salué”. Les efforts de Monsieur Dodge avait donné à Lidia un sursis de deux mois - le temps de finir les cours à Cleveland et de rechercher une alternative à un retour en Pologne. “C’est une chose étrange”, dit Della à Roan, “mais chaque fois que quelque chose a mal tourné avec les affaires de Lidia, c’est Dodge qui nous a sauvé”. Lidia était abasourdie par les nouvelles qu’en enseignant des cours d’espéranto en Amérique, elle avait enfreint la loi. ”Je n’avais pas imaginé du tout que pendant une année, j’avais défié Oncle Sam !”, écrivait-elle à Della. “Quelle déplaisante affaire pour moi. Et qu’est ce que dira Shoghi Effendi ? “Il semble, ainsi, que sous ces circonstances, il soit inutile d’essayer d’obtenir la permission de rester plus longtemps. Ainsi, le cours à Minneapolis n’aura pas lieu. Ceux-ci, les deux cours à Cleveland sont les derniers que je donnerais aux Etats-Unis, et vraiment, écrivant cela, j’ai des larmes aux yeux”. Comment les choses en étaient arrivées à ce stade d’infortune et d’embarras ? Il semble que l’inattention et l’incompréhension soient responsables de l’erreur qui avait mené le gouvernement des Etats-Unis d’ordonner à Lidia de quitter le pays. Lidia avait toujours répondu avec vérité aux questions des fonctionnaires et n’avait jamais essayer de dissimuler le but de son voyage ou le fait qu’elle recevait de l’argent pour ses cours. Certainement que le Consul américain allait être blâmé pour n’avoir pas rendu la chose claire à Lidia au début. Mais la crise ne serait jamais arrivée si, avant de venir aux Etats-Unis, Monsieur Holley avait obtenu le “Désistement pour la clause du contrat de travail” qu’elle lui avait prié «de ne pas ajourner”, ou si les fonctionnaires au port de New York avaient rattrapé l’erreur lorsqu’il signa la garantie pour Lidia, ou si Della Quinlan s’était intéressée à l’affaire lorsque Ernest Dodge la lui rappela, avant que Lidia ait accepté de l’argent pour se cours. Lidia elle-même ne blâmait quiconque. ”Je me sens en fait reconnaissant à la NSA”, écrivait-elle, “pour leur bonne compréhension de la situation aussi bien que les efforts encore faits pour moi à Washington”. Maintenant Lidia avait à annuler tous ses projets d’enseigner dans d’autres villes américaines. Tristement, elle écrivit à Minneapolis pour expliquer pourquoi elle ne pouvait venir. Mais, inconnue à elle, à cause du”manque de fonds et la terrible inertie des gens de Minneapolis”, les espérantistes de Minneapolis avaient voté de ne pas inviter du tout Lidia. Durant son année en Amérique, Lidia avait souvent été exhorté par des amis de rechercher la citoyenneté américaine. Maintenant, l’un des fonctionnaires de l’immigration suggérait qu’elle aille au Canada, ou dans tout autre pays - cela ne devait pas être la Pologne - et essayer de revenir aux Etats-Unis sur le quota d’immigration polonaise. Mais Lidia doutait que ses chances de retourner en Amérique seraient sous de bons auspices. Elle craignait qu’elle puisse être sur la “liste noire”. Jusqu'à maintenant, elle avait reçu sa réponse de Shoghi Effendi. Son câble disait: “Approuve retour Pologne. Profond amour appréciation. Shoghi”. Bien que jusqu'à présent, Lidia n’avait pas été désireux de retourner en Pologne, elle avait commencé de sentir qu’elle avait une raison de retourner à la maison, et qu’elle pourrait avoir un important travail à faire là-bas. “Cela pourrait être plutôt important pour la Cause”, écrivait-elle à Della, “parce que il y a maintenant dans la partie est de la Pologne plusieurs personnes qui sont très intéressées par la foi baha’ie”. L’un de ceux-là était un correspondant de Lidia, Vasyl Doroshenko, un espérantiste ukrainien que Lidia avait rencontré au congrès de Varsovie en 1937. A travers lui, plusieurs de ses amis ukrainiens, qui ne connaissait pas le polonais, étaient aussi devenus intéressés. “Une chose est certaine”, écrivait Lidia, “une trouée a été fait dans les nuages, et la lumière du Soleil de Baha’u’llah commence à pénétrer à travers cette ouverture”. Elle écrivit à Roy Wilhelm, qui avait suggéré qu’elle demande la citoyenneté américaine, disant que le projet semblait à présent “une affaire très douteuse bien que je l’aimais, car voyager avec un passeport polonais implique beaucoup de difficultés... Il y a une autre raison, aussi, et c’est que la situation des gens de ma race est de plus en plus difficile en Europe. Ils sont persécutés et chassés d’Allemagne, d’Italie - et la Pologne pourrait venir après”. Espérant trouver un moyen pour que Lidia puisse éviter de retourner en Pologne, Della écrivit à l’association espérantiste canadienne pour leur demander d’inviter Lidia au Canada. Si ils refusaient, Lidia n’aurait pas d’autre alternative que de retourner en Pologne. Della se mit aussi en relation avec May Maxwell, qui vivait à Montréal pour discuter la possibilité de l’entrée de Lidia au Canada. Madame Maxwell, écrivit Della à Ernest Dodge, était d’accord “de coopérer avec nous en aidant Lidia à entrer au Canada et la recevoir à Montréal...”. Tout dépendait de la réponse de l’association espérantiste canadienne. Enfin, elle arriva: ils répondirent que l’affaire avait tant de complications qu’ils avaient décidé de ne pas inviter Lidia. Cela faisait plus d’une année qu’ils avaient considéré la possibilité, ajoutèrent-ils, ainsi ils ne sentaient pas qu‘ils allaient venir à une conclusion hâtive en décidant contre son invitation. Ils ne savaient pas ce que leur décision signifierait pour Lidia, bien qu’ils ne pouvaient pas certainement pas être inconscients ce que cela signifiait, qu’au dernier moment, l’envoyer en retour dans u continent au bord de la guerre. Bien que Lidia s’était attendue au pire, la réponse des Canadiens était une amère déception. Cette lettre “réglait la question”, écrivait-elle à Della. “Les Canadiens ne sont pas assez courageux”, dit-elle à Roan. “Ils “voient les difficultés”. Quelqu’un à Green Acre dit: un optimiste est un homme qui dans chaque difficulté voit une possibilité. Un pessimiste est u homme qui dans chaque possibilité voit des difficultés. “Il semblait à Lidia que “nôtre ami canadien appartienne au second groupe”. La remerciant pour ses efforts d’emmener Lidia au Canada, Lidia écrivit à Della, “Je suis très heureux que vous ayez la grande joie spirituelle qu’être avec May Maxwell donne toujours... On se sent proche du Maître (Abdu’l-Baha) lorsqu’on est avec elle. Et si l’attention constante de mes affaires, souvent pleines de difficultés, sont la cause de ces moments célestes que vous expérimentez, j’en suis la plus ravie”. En apprenant que les Canadiens ne voulaient pas l’inviter, Lidia câbla au Gardien pour lui demander la permission d’aller à Haïfa. Elle ne savait pas si elle aurait une autre chance de faire un pèlerinage, ou jamais. Même si, elle anticipa fortement” que la réponse serait négative. “Premièrement”, expliquait-elle, “maintenant je comprends mieux qu’il y a neuf ans, ce que signifie d’aller à Haïfa, quel privilège cela est, qu’un tel privilège n’est pas souvent reçu et que certainement on doit le mérité, et deuxièmement - à cause de la guerre en Palestine... Shoghi Effendi saura mieux et ce qu’il décidera sera bon. Probablement je retournerais en Pologne. Encore, je fais de manière téméraire cette demande car c’est une chance que je n’aurais bientôt plus”. Le docteur Charles Witt de Los Angeles avait invité Lidia à aller en Californie. Elle expliquait pourquoi elle ne pouvait accepter son invitation. “Y retournerais-je jamais ?, se demanda elle. “Seul le Dieu tout-puissant connaît ses propres plans... Et ainsi, en dépit de la sensation de surprise déplaisante, j’essayais d’accepter avec sérénité ce qui se passait. “Elle irait d’abord en Pologne, décida elle. Puis peut-être en France. “Et peut-être”, ajouta elle, “d’autres projets se développeront”. L’assemblée spirituelle nationale voulait encore essayer de garder Lidia aux Etats-Unis, et Horace Holley écrivit à Lidia qu’ils essayaient de résoudre des plans pour elle pour faire un voyage d’enseignement sans se faire payer ses cours d’espéranto. Allen McDaniel contacta Monsieur Dodge pour découvrir si il pouvait l’aider à prolonger plus longtemps son permis, mais Monsieur Dodge sentait qu’il avait épuisé chaque moyen disponible en lui en obtenant le prolongement de deux mois. Puis la réponse de Shoghi Effendi vint: “Regret dangereuse situation en Palestine nécessite ajournement de pèlerinage”. Le mot “ajournement” donna à Lidia de l’espoir. Peut-être qu’il y aura un autre moment ; mais quand ? Elle réserva une place sur le “Pilsudski” pour Gdynia, Pologne le 29 novembre. Lidia avait d’abord réagit avec peur et effroi - et peur - à la perspective de retourner en Pologne. Mais après un temps, elle devint résignée au fait, et comme elle l’avait fait auparavant, elle plaçait son sort dans les mains de Dieu. Dans une lettre à Roan, elle parla de sa soumission à quelque destinée il lui était destinée. ”N’est-il pas merveilleux pour un croyant d’avoir en chaque difficulté et chaque déception la connaissance et la consolation qu’il (ou elle) est guidé par la Main Suprême ? Et remercier soit Dieu pour toute chose que dans Sa sagesse il m’a envoyé ! Il est clair de par ses lettres que c’était une sorte de combat de venir à cette attitude. Lidia écrivit à un baha’i espérantiste de Minneapolis: “C’est une réelle déception pour moi, très pénible, mais nous devons accepter avec sérénité ce qui arrive, et croire que Dieu nous guide sur le chemin qui est le plus juste pour nous”. Lidia était capable de dissimuler sa déception et sa douleur de ceux autour d’elles. Le docteur Simon, qui l’accompagnait à un bureau de juge au début de ses efforts pour prolonger son permis de visite réfléchit quelques années plus tard, qu’elle ne semblait pas “particulièrement préoccupée ou dérangée par son échec d’avoir son permis renouvelé, alors que je pense qu’elle était à cette époque angoissée de retourner à sa famille en Pologne”. Il y avait quelque chose cependant qui terrifiait Lidia. “Demain”, confia elle à Roan, “J’ai un rendez-vous avec le dentiste, qui m’épouvante beaucoup”. ================================ Chapitre 17: “Fragments” Alors que toute chose semblait établie, une nouvelle crise survint. Le 28 octobre, Lidia lut par hasard dans un journal de Cleveland que sous la loi passée en Pologne plus tôt en 1938, tous les citoyens polonais de l’étranger qui n’avaient pas leurs passeports estampillés par le Consulat polonais perdaient leur citoyenneté polonaise. La date limite pour obtenir le visa était le 29 octobre - demain ! Il n’y avait aucun Consulat polonais à Cleveland, et Della avait le passeport de Lidia à New York. Lidia télégraphia à Della de prendre son passeport au Consulat polonais à New York, mais elle était “dans une grande peur” que le tampon lui serait refusé car elle était juive. Le jour suivant, Lidia reçue des nouvelles de sa famille en Pologne que l’octroi du visa était généralement “laissé à la discrétion et au bon vouloir du consul”, mais si il refusait de le lui donner, elle ne serait pas autorisée à entrer en Pologne. Della se rua au Consulat polonais, mais il semblait indifférent au sujet de quelque dernière limite. Puis Della envoya les papiers que le Consul lui avait donnés pour Lidia et sa signature. Lidia les renvoya à Della avec une lettre. “Peut-être vous avez lu combien de difficultés ont les juifs polonais en Allemagne à cause de cette loi”, écrivait-elle. Des déportations massives de juifs polonais de l’Allemagne avaient commencé le 29 octobre, le dernier jour pour obtenir le visa. “Si cela devait m’arriver, voici ici la situation: Je dois quitter l’Amérique avant le 3 décembre, mais je ne peux aller nulle part, et certainement pas en Pologne... “Dans la partie sur la religion”, continua elle, “J’ai dit la chose suivante: confession officielle: juive. Foi: baha’ie. Si quelqu’un vous demande à ce sujet, vous pouvez aisément expliquer les choses ! Vous rappeler que je reste un membre de la communauté juive avec la permission de Shoghi Effendi. Et j’ai dis ceci, surtout parce que la foi baha’ie n’est pas reconnue en Pologne. Par conséquent, ce n’est pas une question de conviction religieuse, mais de race ! Par conséquent, c’est un point important vis à vis de ma faveur”. Mais les peurs de Lidia - dans ce cas, - étaient infondées. Della amena le passeport au Consul, qui lui donna le visa exigé. Lidia ne serait pas refusée d’entrer en Pologne. Mais Della écrivit plus tard: “Oh, Roan, lorsque je reçus les papiers d’elle, avec des pièces jointes de photos qui la montrait telle qu’elle était, mon coeur saignait pour elle ! Un tel regard sur ce visage !... Vous pouvez imaginez comment elle ressent que son propre pays n’est plus très loin”. Des millions de juifs polonais qui vivaient en Allemagne ne furent si chanceux: ils furent expulser d’Allemagne et transportés à la frontière dans des voitures. Mais parce qu’ils avaient été défaits de leur citoyenneté polonaise, ils étaient détenus et gardés dans de terribles conditions dans un camp à la ville frontière polonaise de Zbaszyn. Finalement la pression internationale força la Pologne à les accepter. La crise avait produit un changement dans la manière de penser de Lidia. “Vraiment”, écrivait-elle à Della, “un lourd poids s’enlève de mon coeur et je remercie Baha’u’llah qu’Il ait entendu mes prières. Regardez combien les circonstances changent nôtre attitude: il y a quelque temps, je ressentais de grands regrets car je devais quitter l’Amérique. Maintenant, je suis heureuse car je peux aller en Pologne”. Lidia avait décidé d’abandonner ses efforts pour rechercher la citoyenneté américaine. Cela lui exigeait de demeurer 5 ans aux Etats-Unis, et elle croyait qu’elle ne pourrait jamais vivre en enseignant l’espéranto en Amérique pendant aussi longtemps. En dépit de l’avis énergique que certains de ses amis lui avaient donné de ne pas retourner en Europe, cette fois, son esprit était complètement perturbé. “Certainement”, écrivait-elle, «l’Europe n’est pas un bon endroit actuellement. Mais Shoghi Effendi approuve que je retourne en Pologne”. Aller en Pologne était, croyait-elle à présent, sa destinée. Quelques jours auparavant, elle avait reçu une lettre de Roan, qui, ne sachant rien des problèmes de Lidia, écrivit qu’elle avait rêvé qu’il y avaient des cafards et des souris dans la maison de Lidia. “Vôtre rêve... n’était pas complètement faux”, lui écrivit Lidia. “Dans le symbolisme des rêves, et autant que je le comprenne, ces animaux indésirables représentent certainement quelque chose de déplaisant, de mal à propos de ma maison”. Elle expliqua plus tard à Della: “Sans nul doute, les cafards et les souris dans ma maison symbolisent les difficultés de ma terre natale”. “Remercier soit Baha’u’llah !, écrivit-elle à Roan. “Oh, je priais tant, tant vers Lui durant ces jours, pour qu’Il me fasse partager le sort terrible d’êtres expatriés. Je connais un homme dans cette situation, ainsi je sais à quoi cela ressemble. Et j’ai des raisons de ne pas être certain de la décision du Consul. La première raison - la race !”. Mais les problèmes de Lidia n’étaient pas encore terminés. Maintenant elle apprenait qu’avant qu’elle puisse quitter le pays, elle devait montrer qu’elle s’était conformée aux lois de l’impôt sur le revenu. Le gouvernement des Etats-Unis l’avait obligé de quitter le pays parce qu’elle avait accepté de l’argent pour ses classes, et maintenant il voulait qu’elle paye une taxe de cet argent ! Elle s’était présenté avec un formulaire 1040 -C et des horaires de diverses taxes à remplir. La taxe pour les étrangers était de 10 pour cent avec aucune exemption pour un non étudiant, qui n’était pas supposé gagner de l’argent dans tous les cas. Lorsqu’elle ouvrit la lettre qui contenait les formulaires officiels imposés, elle se sentit “vraiment”, un crocodile rampant au dehors de l’enveloppe ne m’aurait pas terrifié plus que cette feuille de papier imprimé en gros avec tant de sections, de termes spécialisés, etc...”. La somme totale qu’elle avait reçu de ses cours était d’environ 630 dollars. Les difficultés de Lidia étaient arrivées à une époque où la situation mondiale se détériorait de manière effrayante, et la peur de la guerre devint de manière croissante un spectre qui assombrissait la vie ordinaire. Cette atmosphère d’anxiété mena à l’événement célèbre et bizarre qui eut lieu cette même semaine. La nuit du 30 octobre 1938, le public américain fut saisi une hystérie de masse lorsqu’un drame radiodiffusé très réaliste, bien qu’imaginaire, persuadèrent beaucoup que New York et le New Jersey avaient été envahis par des soucoupes de Mars. Ce fut “La guerre des mondes”, de H.G. Wells, raconté par Orson Welles. “Des personnes à travers le pays étaient paniqués”, se rappelle le docteur Simon. “Le soir suivant, j’étais en train d’expliquer à Lidia Zamenhof l’étendue avec laquelle le public avait été démoralisé par l’émission, et bien qu’elle n’avait pas entendu le programme, elle exprima avec surprise que les américains puissent devenir si nerveux à travers le programme de radio”. Comme elle le faisait souvent, Lidia vit une leçon dans l’incident et plus tard écrivit un article à ce sujet. Elle décrivait l’émission qui avait propagé une telle terreur à travers le pays. Lorsqu’elle fut terminée, observa elle, “aucun martien n’était venu sur Terre pour augmenter la confusion de nôtre malheureuse planète”. Elle contemplait la possibilité: “Que se serait-il passé si des êtres d’autres planètes atterrissaient sur terre ? Ne seraient-ils plus hautement civilisés que les humains et auraient lever il y a longtemps le besoin primitif de faire la guerre ? et sinon, les peuples de la terre n’auraient-ils pas oublié leurs différences et leurs haines et ne seraient-ils pas unis pour défendre toute l’humanité ?”Il est étrange et pénible de penser qu’il y a besoin ce cette catastrophe sans précédent pour réveiller en l’homme la conscience de l’unité de l’humanité”, écrivit-elle. “Mais si c’est la leçon dont a besoin l’humanité, peut-elle y échapper ? “Loin de nous”, songea elle, “que la planète nommée pour le dieu de la guerre ne brille avec une petite lumière rouge. Ne craignons pas cette planète. Le danger qui menace ne vient pas d’elle. “Si Mars elle-même, - non la planète, mais le dieu de la guerre Mars, - était descendu sur la terre, rougit comme du sang comme la planète elle-même, écrivit Lidia, “même alors, ne désespérons pas. Travaillons, efforçons-nous, et prions que cela sera le dernier grand test, que l’humanité n’aura jamais plus besoin d’un autre leçon sanglante, qu’elle se relèvera châtiée de la calamité et deviendra ce qu’elle devrait être”, - une humanité dans l’unité”. Les nouvelles du voyage de Lidia en Amérique avaient atteint aussi loin à l’étranger que Johannesburg, Afrique du Sud, où un article apparue sur elle dans le “Record sioniste”. “La dernière mode parmi les marchands de religion en Amérique est la secte baha’ie”, disait l’article. “Ce mouvement, qui prit naissance il y a 80 ans en Iran, apparaît être une grande vogue parmi les chercheurs après la nouvelle pensée... Je suis informé de bonne foi que beaucoup de juifs prennent un intérêt dans le culte. Le supporter juif la plus remarquable est Lidia Zamenhof, la fille de ce célèbre fondateur de l’espéranto, la langue universelle. C’est u long chemin du spécialiste juif des yeux de Bialystock , qui était un sioniste avoué, au temple baha’i à Chicago. Pourtant Mademoiselle Zamenhof essaye de faire usage de tous les arguments de son père en faveur d’une langue universelle pour le but d’une nouvelle “religion universelle”. Mademoiselle Zamenhof est une oratrice polie et charmante et de larges publics ont été transportés par son éloquence. La religion baha’ie reconnaît la langue espérantiste”, continue l’article, “et espère qu’elle puisse devenir le moyen universel de prière...”. Lorsque Lidia vit une copie de l’article, elle écrivit immédiatement à Roan objectant d’un “fragment d’information extrêmement incorrect et trompeur”. L’inquiétude de Lidia, sa lettre le montrait, était la véracité et la justesse même lorsque la chose était quelque peu pénible pour elle. “J’ai peur”, écrivait-elle, “que tous les lecteurs pensent sûrement que la foi baha’ie approuvent officiellement l’espéranto...Ne pouvez-vous pas expliquer que le choix d’une langue universelle doit être, selon les instructions de Baha’u’llah fait par la Maison universelle de Justice, et qu’avant que ce corps fasse le choix, aucune organisation baha’ie, ni l’association espérantiste d’Amérique du Nord, ni le Gardien lui-même, ne peut identifier la foi baha’ie avec l’espéranto ? Vous pouvez aussi lui dire que le Gardien encouragea grandement les baha’is (comme le fit Abdu’l-Baha) d’apprendre l’espéranto, considérant que c’est actuellement un outil de compréhension international, mais il ne peut donner aucune garantie que c’est la langue qui sera choisie... C’est le devoir de nous les baha’is d’éviter et d’essayer d’éviter toute information inexacte et trompeuse concernant la foi, même si cette inexactitude suggère quelque chose que nous aimons, en qui nous espérons, et de quoi nous sommes personnellement certain”. La humble Lidia était embarrassée que le journaliste l’ait appelé ”la supporter juive la plus remarquable” de la foi. “Ne peut-on pas dire modestement “l’une de ces supporters ?”, allégua elle. Roan écrivit une lettre au “Record sioniste”, expliquant que la position baha’ie en regard de l’espéranto, qui fut dûment publiée plusieurs mois plus tard. Mais certains des espérantistes étaient irrités contre elle pour l’avoir écrit, ne comprenant pas la position des baha’is et étant inconscients que cela avait été la requête de Lidia que la correction soit faite. Personnellement, Lidia était convaincue que l’espéranto deviendrait universellement reconnu en tant que langue auxiliaire internationale, et elle était déçue lorsque certains baha’is parlait d la chose comme si l’espéranto n’existait pas. Plusieurs articles au sujet de langue universelle étaient récemment apparus dans le magazine baha’i “Baha’i World”, et Lidia dit à Della: “il est certainement intéressant de voir que le journal dédie autant d’attention au thème. Mais, chaque fois que je vois quelqu’un parler sérieusement de quelle langue favoriser, cela me fait penser de personnes qui discutent pour ouvrir une porte qui est déjà ouverte...”. Les cours de Lidia à Cleveland finissaient le 11 novembre, et le lundi suivant, elle prenait le train pour New York City, où elle passerait ses deux dernières semaines en Amérique. Ses élèves lui donnèrent une soirée d'adieu à la maison de l'un des espérantistes locaux. Elle était particulièrement touchée lorsque l’un d’eux lui donna un beau corsage, auquel était attaché une carte qui disait, “Vous me rendez très heureuse !”. Le docteur Simon était parmi ceux à la gare qui virent Lidia partir pour New York. Lorsqu’elle secoua les mains avec eux dans la voiture Pullman, se rappela il plus tard, elle les incitait à continuer le travail pour la propagation de l’espéranto à travers le monde, et d’être fidèle aux idéaux du mouvement espérantiste. Maintenant, les pensées de Lidia étaient de retourner en Europe, et elle affrontait la perspective avec détermination mais avec la connaissance que la conflagration n’était plus éloignée. En fait, la guerre faisait déjà rage dans le monde: des fascistes combattaient des républicains en Espagne, l’armée japonaise attaquait la Chine, et l’Italie avait occupé l’Ethiopie. “Le tigre de la guerre a brisé sa cage”, écrivit Lidia dans un article. Et comme le tigre, une fois libéré, la bête de la guerre ne pourra pas espérer respecter les lois de la société civilisée. Lidia offrit le scénario: un bateau neutre, bombardé par un avion de l’un des côté belligérant ; l’aviateur ignore ses marques identificatrices. “Le pouvoir offensé proteste énergiquement. L’autre côté fait des excuses pour cela: un brouillard, une regrettable erreur, le coupable sera puni... “Ethiopie, Espagne, Chine... ici et ailleurs, les victimes crient et des fontaines sanglantes giclent. Un tigre de guerre ne connaît aussi aucune limite. Le respect pour les populations civiles, pour la Croix Rouge, pour les écoles, pour les temples, n’existe pas”. Ceux qui pensent autrement, affirmait-elle, étaient “naïfs”.”Le tigre de la guerre n’a aucune oreille à écouter, aucun cerveau à comprendre, aucun coeur pour ressentir de la compassion”. Pendant que les diplomates essayent vainement d’”enseigner au tigre une bonne conduite”, Lidia exhortait les femmes à construire dans leurs coeurs, et les coeurs de leurs enfants, “les fortification de la Paix. Des fortifications qui ne seront pas pénétrés par les gaz empoisonnés de la haine et de la suspicion inter-raciale, qui ne sera pas démoli par les bombes du fanatisme chauvin...”. Bientôt, les événements montrèrent que Lidia avait vue juste ; les diplomates ne pouvaient pas “enseigner au tigre une bonne conduite”. Alors que Lidia était en train de quitter Cleveland, des nouvelles arrivèrent qu’un pogrom massif avait été perpétré contre les juifs d’Allemagne. En “représailles” pour l’assassinat d’un diplomate allemand par un juif polonais fou de 17 ans, dont les parents étaient parmi ceux dont la citoyenneté était annulée et qui avaient été expulsés d’Allemagne, une vague de violence “spontanée” passa sur l’Allemagne et l’Autriche. Menés par les troupes de la tempête sous la direction de Joseph Goebbels et Reinhard Heydrich, des foules brûlaient des maisons juives, des magasins et des synagogues. Dans la violence de cette “Nuit de cristal”, qui en réalité continua pendant une semaine, 5 millions de marks d’assiettes en verre furent fracassés, 750 affaires juives furent détruites, et près d’une centaine de juifs furent assassinés. Quelques 3000 juifs furent arrêtés et envoyés dans des camps de concentration. C’était l’Europe à laquelle Lidia allait retourner. Roan voulait voyager de Boston à New York pour voir partir Lidia, mais Lidia lui écrivit de ne pas venir. “Je ne dois pas vous encourager à cette dépense d’argent, de temps et d’efforts, bien que je serais heureuse de vous revoir”, dit-elle à son amie. Apparemment, Roan était aussi hésitante pour y aller, mais pour des raisons d’humilité. Après avoir reçu la lettre suivante de Roan, Lidia écrivit: “Maintenant, je grommelle ! ! ! Vous avez réellement de la raison insensée de ne pas venir à New York, Si c’est “parce que vous n’êtes pas digne de cirer mes chaussures” ou quelque chose comme cela ! ! ! ! (soit dit en parlant, je les fait briller moi-même). Mais prenez garde, Roan, car finalement je dirais vraiment: “Elle est folle”. “Mais bien que je ne suis pas d’accord sur les raisons, je pense que cela est mieux pour vous de ne pas venir, autant pour la dépense de temps et d’argent, que pour le fait que - et en cela j’ai une grande expérience - la séparation personnelle est beaucoup plus dure que si vous restez à Boston. Vous ne seriez pas heureuse lorsque vous verriez le bateau s’éloigner du rivage. Je connais bien ces choses. Ainsi, il est préférable pour vous de rester à Boston, mais merci de vous souvenir que les raisons que vous donnez diffèrent des miennes !”. Alors que le jour de son départ approchait, Lidia écrivit des lettres d’adieu à ses amis en Amérique. Sûrement certaines l’une des lettres des plus pénibles qu’elle eut à écrire en ces jours sombres étaient des lettres comme celle-ci: «Chère amie baha’ie, J’ai reçu vôtre aimable lettre il y a quelques jours et je suis très reconnaissant en fait pour la sorte d’invitation que les amis d’Augusta (Géorgie) ont manifesté pour moi. Je serais extrêmement heureuse d’être capable de l’accepter. Malheureusement, il en est autrement. Je suis contrainte de quitter l’Amérique et d’aller en Pologne dans une semaine, le 29 novembre. Nous ne savons jamais quels sont les plans de Dieu pour nous. Peut-être je devrais revenir un jour - si c’est Sa Volonté. Alors, j’espère, que Madame Quinlan vous informera et peut-être je pourrais alors visiter Augusta. Pendant ce temps, je vous remercie encore pour vôtre aimable lettre. Puisse la bénédiction de Baha’u’llah être toujours sur les amis d’Augusta. Avec l’amour baha’i le plus véritable, vôtre Lidia Zamenhof.» Les derniers jours de Lidia à New York furent trépidants et remplis de réunions. Même avant de demander l’approbation de Lidia, Della avait arrangé pour elle de donner une causerie baha’ie à Brooklyn. “Oui, vous avez raison que je ne refuserais certainement pas de parler”, avait répondu Lidia ; “Cela sera en fait le dernier service, je crois, que je serais capable de rendre en Amérique”. C’était , écrivit Della à Roan, “une belle réunion”. La plupart des personnes de là-bas étaient espérantistes. Ils furent grandement attirés. Je n’ai pas besoin de vous dire comment elle parlait. Un homme me dit le dernier jeudi soir que maintes et maintes fois, il se disait à lui-même pendant qu’elle parlait, “éloquente, éloquente”. Et nous ne le savons pas !”. Le jour avant que Lidia ne quitte l’Amérique était un jour d’action de grâces. Elle avait été invité à passer le jour de congé avec Monsieur et Madame Edward Kinney, et elle resta à leur domicile jusqu'à 11h du soir à une réunion fréquentée à la fois par les espérantistes et les baha’is. “Cette nuit”, écrivit Lidia plus tard, “restera inoubliable dans ma mémoire. Toute l’atmosphère était profondément pénétrante et spirituelle. Je peux encore voir la tête grise de Monsieur Kinney derrière le piano”. Madame Kinney avait mentionnée qu’elle connaissait quelqu’un qui pourrait être capable d’aider Lidia à rester en Amérique. “Mais je la remerciait”, dit Lidia à Roan. “Shoghi Effendi a approuvé ma venue en Pologne, et je sens que je dois le faire”. Lidia avait fait plusieurs départs dans sa vie, mais c’était l’un des plus durs. Ses lettres révélaient la tristesse et la mélancolie qu’elle ressentait en ayant à dire adieu à ses amis américains. “Je vous demande”, écrivait-elle à Roan, “de vaincre vôtre imagination et ne pas permettre de regarder au départ du bateau si cela doit peser dans vôtre coeur. Je ne veux absolument pas que vôtre coeur soit déprimé. Soyez toujours de bonne humeur, soyez toujours heureuse !”. Lidia admettait qu’elle était encore redevable de quelques cents pour certaines transactions ou autre. Elle plaisanta dans une lettre: “Ah, Roan, je devrais vraiment vous envoyer le chèque de 14 et la moitié de cents...Mais j’ai peur que si je fais cela, je ne serais plus capable de payer pour mon voyage en bateau. Ainsi je fuis de l’Europe sans payer la dette (personnes en Europe qui ne veulent pas payer leurs dettes fuient en Amérique). Si vous souhaitez, envoyez la police après moi. Elle écrivit son message d’adieu à l’assemblée spirituelle nationale un jour avant de partir. ”Je me sens triste de quitter l’Amérique où j’avais trouvé tant d’amis, tant d’âmes merveilleuses, profondément inspirées avec cet Esprit qui est la Destinée du Nouveau Jour. Je considère que c’est un grand privilège d’être venue dans ce pays et j’espère que ce que j’ai appris ici m’aidera à devenir un instrument pour la Cause de Baha’u’llah un peu meilleur”. Le 29 Novembre, le “Pilsudski” partait de la jetée de la 6ème rue à Hoboken, New Jersey. Hélène et Martin étaient les seules là-bas à dire au revoir à Lidia, se rappela Madame Léonard plus tard. Hélène Léonard, qui était polonaise, avait été une élève dans le premier cours de Lidia à New York. Longtemps après, elle se souvint que le jour d’avant que le bateau parte, Lidia l’appela pour lui dire qu’elle partait. Madame Léonard téléphona à plusieurs espérantistes pour essayer d’obtenir un comité d’adieu réuni pour la voir partir, mais elle échoua. Elle espérait que certaines personnes, du moins, viendrait au bateau, mais personne ne le fit. “Ainsi je restais jusqu'à la dernière minute”, se souvient-elle. “Inutile de dire que ce fut un adieu déchirant”. Madame Léonard conseilla Lidia de ne pas retourner en Europe et l’invitait à rester à leur maison à New Jersey. Mais Lidia refusa, disant, “J’ai une famille là-bas et ils sont effrayés”. “Elle avait foi qu’elle puisse fuir”, dit plus tard Madame Léonard, que peut-être par quelque miracle elle pourrait être épargnée”. Le jour où le bateau partait, Allen Mc Daniel, à Washington, essaya de contacter Lidia. Il avait continué ses efforts pour obtenir des fonctionnaires de l’immigration de rouvrir son dossier. Mais ses papiers avaient été perdus dans le bureau d’immigration et atteignirent seulement sur le bureau du fonctionnaire en place alors que le bateau de Lidia était parti. Le fonctionnaire, rapporta Mc Daniel, était sympathique mais refusait de faire quelque changement. Cependant, le fonctionnaire de l’immigration suggéra à Lidia de ne pas aller en Pologne mais en France ou même Cuba et faire une demande de retourner aux Etats-Unis pour six mois ou une année en tant que résident conférencier. En tant que conférencier, elle devrait être exempté de la loi couvrant “le contrat de travail étranger” et elle pourrait recevoir une compensation pour ses cours d’espéranto. Mais c’était trop tard. Lidia était sur le chemin de la Pologne, et c’est improbable qu’elle aurait changer d’avis. Lorsque le “Pilsudski” s’arrêta à Halifax, Nouvelle-écosse, Lidia écrivit à Roan: “Merci, merci pour vôtre amour, beaucoup plus grand que je ne le mérite”. Elle posta aussi une lettre à Della: “Je veux encore vous remercier - , écrivait-elle, “merci pour tout ce que vous avez fait pour moi du début à la fin, pour tout vôtre travail, souvent si plein de difficultés”. Elle demanda à Della de remercier tous ceux qui avaient envoyés des télégrammes d’adieu au bateau, qui touchèrent beaucoup Lidia. Jusqu’ici, le voyage avait été calme, dit-elle à Della, et l’océan calme. Il y avait quelques voyageurs dans la classe touriste, et elle avait la cabine entière pour elle-même. Il semblait qu’il n’y avait pas beaucoup qui étaient désireux de voyager en Pologne durant ces jours hivernaux de 1938. Une raison du manque de passagers sur le bateau était probablement car beaucoup de ceux qui étaient venus aux Etats-Unis avec des visas de visiteurs étaient restés là-bas en tant que réfugiés. Après les pogroms de “La nuit de Cristal”, à la mi-novembre, le président Roosevelt avait annoncé que les réfugiés déjà aux Etats-Unis pour des visas de visiteurs ne seraient pas obligés de retourner dans des pays où il pourrait faire face à des persécutions. En dépit du sentiment anti-étranger étendu aux Etats-Unis à cette époque, quelques 2000 personnes furent capable de tirer avantage de ce relâchement temporaire dans la politique d’immigration américaine. Mais Lidia Zamenhof n’était pas l’un de celles la. Pendant qu’elle était en Amérique, Lidia avait écrit une longue dissertation intitulé: “Les chemins de Dieu”. Elle laissa le polycopié de cela avec Della Quinlan, lui demandant de le traduire en anglais et de le soumettre pour “L’ordre mondial”. Della ne fit apparemment jamais cela, et le fragment ne fut jamais publié. L’essai parlait de la signification de la souffrance. Clairement, en écrivant cela, Lidia avait puisé sur ses propres expériences. “Les difficultés habituelles et les souffrances de nôtre vie quotidienne sont augmentées dix fois aujourd’hui par les circonstances de l’époque sans précédent dans laquelle nous vivons”, commença Lidia. “En ce jour, les coeurs humains et les esprits se tournent vers la Source de tout et dirigent vers cette éternelle Source une question désespérée: pourquoi tant de souffrances ? Pourquoi Vous, qui êtes appelé Dieu et le Compatissant, Vous nous envoyés de la souffrance ? Pourquoi Vous qui façonnez la création afin qu’il y ait une place dans elle pour la souffrance, Vous qui êtes appelé Perfection, Vous qui avait pu créer toute chose dans l’état de constance et de perfection intouchable ?”. Si cela plaît à Dieu, expliquait-elle, «Il aurait pu faire la création dans un état de perfection statique. “Mais Il décida à la place cet éternel mouvement, autant physique que spirituel, puisse gouverner dans l’univers, que tous puissent évoluer constamment, puissent progresser et croître, que des formes puissent se décomposer afin que les éléments libérés fusionnent toujours dans de nouvelles combinaisons et participe toujours dans les royaumes les plus hauts de la création. Dans l’ordre existant, l’homme naît comme un petit et faible enfant, grandit, mûrit, jusqu'à ce qu’il atteigne la plénitude de sa destinée terrestre... “Dieu aurait pu créer l’homme parfait depuis le début. Mais Il fit un choix qu’Il savait être meilleur. Il donna à l’homme des perfections potentielles et le dota avec cet attribut qui appartient à Lui-même: un libre arbitre et une conscience, à travers lesquels l’homme s’élève vers le haut sur le chemin de sa destinée. Baha’u’llah écrit: “Tout ce que vous pouvez posséder potentiellement, cependant, sera manifester seulement par le résultat de vôtre propre volonté”. “...Devrions nous exiger, alors”, continua Lidia, “que cela aurait été plus parfait si Il nous avait crée dans l’état de perfection imposée, perfection sans volonté, sans le plus petit effort, sans aucun mérite de nôtre part ?”. Mais pourquoi la souffrance et la douleur aurait à être une partie du développement de l’homme ? A travers les oppositions et les déficiences, nous apprenons à juger la valeur de toute chose”, expliquait-elle. “Adam Mickiewicz, le grand poète polonais, commença son “Pan Tadeusz” ainsi: “Lithuanie, ma patrie, un lithuanien réalise, comme avec sa santé, ce grand prix ayant été perdu. “En fait, devons nous reconnaître et apprécier la valeur de la santé lorsque nous sommes bien ? D’ordinaire, le respect pour la santé vient seulement avec la maladie. Nous réalisons la valeur de la vue lorsque nous sommes aveugles...nous apprenons la valeur de l’ouïe lorsque nous ne pouvons plus écouter de la musique et converser avec nos amis. Nous réalisons la valeur de la paix lorsque la guerre pèse au-dessus de nos têtes. Nous réalisons la douceur de la maison lorsque les cendres couvrent la maison de l’âtre ou que le sort nous force à le quitter... Même la proximité de nôtre chers, nous apprenons habituellement seulement d’évaluer lorsque la séparation arrive. “Dans l’existence arrangée comme elle est, il y a une place pour la souffrance. Cela nous semble incompréhensible, injuste ; et nous reprochons encore à nôtre Créateur. Mais une court réflexion est suffisante pour nous rendre conscient que souvent la souffrance est nôtre gardien. Cela nous avertit contre ce qui est mauvais. Un mal de dent est certainement déplaisant, mais cela nous fait aller chez le dentiste afin qu’il puisse prendre soin du mal de dent avant qu’il devienne incurable ou empoisonne le corps tout entier. Si nous mettons nos mains dans le feu, nous sentons la terrible douleur d’une brûlure. Mais cette souffrance nous avertit du danger et nous fait retirer nôtre main... L’envie st dure à porter, mais cela nous fait retourner à l’objet de nôtre amour et ainsi devient la cause de bonheur... “Souvent nous sommes la cause de nôtre propre souffrance, mais au lieu d’examiner et de reconnaître avec courage ce fait, qui nous mènerait à l’amélioration de nôtre propre comportement, nous blâmons les autres. Si nous mettons nos mains dans le feu, nous sommes nous-mêmes coupables pour la brûlure. Si nous traitons mal les autres, nous récoltons les mêmes sentiments et les mêmes comportements en retour, qui nous font souffrir. Si nous agissons contre la loi, que ce soit une loi de la nature ou une loi judiciaire ou spirituelle, nous amenons la réaction de cette loi sur nous-mêmes... Et la souffrance nous rends conscient de nôtre méfait, qu’autrement nous n’aurions pas remarqué”. Mais nos méfaits ont un effet non seulement sur nous personnellement... L’homme est une petite cellule d’un grand organisme. Le fonctionnement de cette cellule influence les autre cellules et est influencé par elles. La maladie d’un membre cause la maladie dans le corps entier, et, de même, ce membre, même bien qu’il soit en bonne santé lui-même, doit souffrir de la maladie générale, même si elle est amenée par des causes complètement en dehors de lui-même. “Et une telle relation, une telle souffrance à cause des autres, nous rends conscients que ces autres sont nos semblables, nos frères, et que nous n’avons pas le droit de protester, comme Caïn, “Suis-je le gardien de mon frère ? et de rejeter nôtre responsabilité sur les autres. Car en fait, nus sommes les gardien de nos frères”, tout comme une cellule dans l’organisme est le gardien d’une autre cellule”. Pour le croyant, sentait Lidia, la souffrance a une fonction spéciale. “Ceux qui suivent la vraie Vérité sont fidèles à elle jusqu’au dernier souffle, quel que soit ce qu’ils puissent recevoir en retour pour leur fidélité - la critique, la moquerie, la haine, la persécution, la mort. “Epreuves et tribulations”, écrit Baha’u’llah, “ont été de temps immémorial le lot des élus du seul Dieu et Ses bien-aimés, et tels que Ses servants sont détachés de tout sauf de Lui...Béni sont ceux qui sont restés fermes, ceux qui sont patients sous la maladie et les difficultés, qui ne se lamentent pas sur les choses qui leur tombent dessus, et qui marchent sur le chemin de la résignation”. “Ô mon Dieu”, dit encore Baha’u’llah’, ”Sans les tribulations qui sont éprouvées dans Ton chemin, comment Tes vrais amoureux pourraient-ils être reconnus... ? Les compagnons de tous ceux qui T’adorent sont les larmes qu’ils versent, et les consolations de ceux qui Te cherchent sont les gémissements qu’ils poussent, et la nourriture de ceux qui se hâtent pour Te rencontrer sont les fragments de leurs coeurs brisés”. ================================ Chapitre 18: “Maintenant n’est pas leurs temps” Le voyage de Lidia à travers l’Atlantique, qui avait commencé doucement, commença à devenir plus agité. Depuis plusieurs jours, le “Pilsudski” était ballotté sans merci par de terribles tempêtes. Deux jours avant que le bateau n’arrive en Pologne, Lidia commença une lettre à Shoghi Effendi. Elle lui expliquait ce qui s’était passée en Amérique et pourquoi elle avait été forcé de partir. Elle lui dit que, quel que soit ce que l’avenir puisse lui apporter, elle avait confiance qu’elle serait guidée par Baha’u’llah. Lidia avait presque terminé sa traduction en polonais de “Baha’u’llah et l’Ere nouvelle” ; elle demanda à Shoghi Effendi que faire avec elle, de même que ses autres traductions une fois que la guerre va commencer. Lidia dit aussi au Gardien qu’elle avait l’intention de rester en Pologne pour seulement quelques semaines, puis elle essayerait de partir pour la France ou un autre pays. Lorsque le bateau entra au port polonais de Gdynia, autour du 9 décembre, Lidia était si fatiguée qu’elle eût à prendre un hôtel là-bas pour la nuit, au lieu d’y aller par le train pour Varsovie. Lorsqu’elle arriva finalement à la maison, elle était trop faible pour ne pas sortir du lit pendant deux jours. Varsovie semblait étrange à Lidia après New York, et cela lui prit quelque temps de s’habituer à nouveau aux conditions là-bas. A sa surprise, Lidia trouva que certaines rues de Varsovie avaient même de noueaux feux, comme en Amérique, mais ils travaillaient seulement jusqu'à 10h du soir, “et le dimanche”, écrivait-elle à un ami, “ils se reposaient”. “Les plus hauts gratte-ciel dans Varsovie, de qui la ville st si fière, car il a 17 étages, ne peut plus m’impressionner du tout. En Amérique, j’étais toujours “petite” - ici je suis à nouveau “de taille moyenne”. Et même les taxis semblent quelque peu lilliputiens”. Noël arrivait, mais pour Lidia, cela semblait “un temps mort spirituellement lorsqu’il est dur de faire quelque chose”. Elle expliquait à Della: “Chacun pense seulement à ses propres intérêts, l’arbre de Noël, les cadeaux, etc..., ainsi seulement après la Nouvelle Année, je commencerais à voyager”. Lidia planifia de rendre visite à plusieurs personnes dans le sud-ouest et le sud-est de la Pologne, qui avaient montré un certain intérêt dans la foi baha’ie. Ce mois de décembre 1938, “La Praktiko” rapporta une histoire satirique que Lidia avait évidemment écrite pendant qu’elle était aux Etats-Unis. Cela s’appelait “Le Soleil revient à la nuit terrestre”. Dans celle-ci, Lidia parlait d’un pays nommé terre de nuit , où le soleil ne s’était pas levé depuis si longtemps qu’il avait été presque oublié. En l’absence du vrai soleil, les lampes devinrent des objets très importants et “beaucoup d’attention était dévolue à elles. Des professions spéciales se développaient même, et les hommes qui s’occupaient eux-mêmes de la lumière étaient généralement appelés “Eclaireurs”. Ils avaient des rangs divers. Il y avait des hauts lampistes, des lampistes, des bas lampistes, des lanternistes, et des hommes bougies. Parfois, divers éclairagistes guerroyaient parmi eux-mêmes car certains disaient aux autres: “Nos lampes sont les meilleurs, et les vôtres donnent simplement de la suie”. L’histoire illustrait le principe baha’i que la révélation divine était renouvelée de temps en temps à travers les Manifestations de Dieu qui apparaissaient à un moment où la religion avait dégénérée dans des formes vides. Bien que l’histoire fut rédigée en mode allégorique, c’était le prétexte de Lidia aux espérantistes pour examiner la foi baha’ie. “Cher lecteur !”, concluait elle, “Si dans le temps de nuit noire, vous entendriez que le soleil est revenu, ne vous détournez pas de ces nouvelles”. Levez-vous vers les hauteurs, vers les sommets de montagnes, et regardez”. Les plans de Lidia de rester en Pologne quelques semaines puis ensuite d’aller en France rencontrèrent des difficultés. A Lyon, Emile Borel essayait d’arranger pour Lidia d’enseigner en France ; elle attendait d’apprendre si un contrat de travail qu’il avait établit serait approuvé par le Ministre français du travail. Sans cela, elle ne pourrait travailler là-bas. Ce n’était pas clair si c’était une nouvelle exigence ou si, après son expérience malheureuse en Amérique, Lidia était devenue plus consciente du besoin de déclarer de tels règlements d’avance et avait avertit Monsieur Borel de faire des enquêtes. Un correspondant en France avait écrit à Lidia exprimant son opinion de pourquoi il avait été forcé de quitter L’Amérique si soudainement. Lidia répondit: “Vous dites que c’est, comme c’était, à cause d la loi de l’Antéchrist que je ne pouvais pas travailler plus longtemps en Amérique. Bien , Dieu est plus fort que l’Antéchrist, même si Il permet à l’Antéchrist de gouverner. Si j’ai quitté l’Amérique, c’était peut-être parce que Dieu préférait que je travaille dans un autre pays. Et dans le choix de Dieu, le facteur décisif n’est pas ma satisfaction, ni mon plaisir, ni même ma sécurité - mais le travail que je peux et que je dois faire”. A ces objections pour l’Amérique, elle répondit avec ses impressions. “J’ai vu une nation différente de celle de l’Europe”, observa elle. “Une nation non décomposée - jeune, forte, avec de l’espoir pour l’avenir”. Le correspondant avait dit qu’il pensait que l’Amérique était affaiblie par un excès de complaisance dans les danses et les jeux vidéo. Lidia répondit: “Aucun...jeu n’est ni un péché ni un mal. L’homme a le droit à un certain plaisir, car il a été crée pour être heureux, et non malheureux, car il y a un temps pour crier, mais il y a aussi un temps pour être joyeux, et chacun est joyeux dans sa propre voie. Par conséquent, je ne suis pas d’accord avec vous que danser soit seulement un jeu. Vous savez sûrement que les anciennes danses grecques n’étaient pas seulement un art élevé mais sacré... Moi-même, je ne danse ni ne chante (particulièrement plus tard, je le regrette tout à fait), mais si seulement la chose n’est pas prise à l’extrême, je ne vois pas vraiment et sincèrement quelque chose de mauvais là-dedans”. Les arbres de Noël commencèrent à apparaître à Varsovie. Pensant toujours sur ce qu’elle voyait autour d’elle, et trouvant une grande signification dans les choses ordinaires de la vie, Lidia nota ses réflexions sur la saison dans un essai qu’elle appela: “Pensées sur Noël”. Elle tapa des copies de cela et les envoya à ses correspondants. “L’arbre de Noël est un ancien coutume”, écrivait-elle, ”Autrefois, les minuscules bougies qui éclairaient ses branches étaient faites de cire. Une après l’autre, ils étaient éclairés par celui qui décorait l’arbre. Il avait à se plier, caché parmi les branches les plus basses, ou à grimper pour atteindre les plus hautes. Il avait à pousser sa main à travers les branches et parfois à se piquer ses doigts. Et parfois, les bougies refusaient de brûler et il avait à être patient jusqu'à ce qu’elles prennent feu. Elles ne brûlaient pas longtemps. Leur vie était courte. Elles partaient, laissant sur la branche seulement un morceau de cire dans le porte bougie et certaines partaient en fumée. “Si nous rappelons les mots de Baha’u’llah, que tous les hommes sont les feuilles d’une seule branche, alors l’arbre de Noël devient pur nous un symbole: il représente l’humanité. Les aiguilles sont les hommes. Les brindilles sont les peuples. Les branches sont les nations. L’arbre est l’humanité tout entière. La main qui éclaire l’arbre est la Main de Dieu. Et les bougies avec leurs lumières enflammées sont les porte- lumière de Dieu - ses prophètes. “Chacune des bougies illumine une certaine branche, une partie de l’arbre. Chacun des prophètes s’adresse à un certain groupe humain. D’autres branches de l’arbre humain ne sont pas oubliées, cependant. Une autre bougie est allumée en son milieu, parmi les branches les plus sombres - un autre prophète apparaît pour donner de la lumière à un autre groupe d’hommes, à un groupe qui était à ce moment plus éloigné de la lumière spirituelle. “Ces prophètes n’apparaissent jamais en même temps - une après l’autre, les différentes bougies sont illuminées ; une après l’autre, d’autres branches variées reçoivent la lumière. Et alors qu’une a déjà été allumée, une autre branche était encore dans l’obscurité. Alors qu’une brûle encore, une autre bougie s’est éteinte: les temples sont comme des porte bougies vide sans lumière: la lumière de l’Esprit est parti ; là ne reste rien que la cire des formes externes et la fumée des divisions, les troubles et l’hypocrisie. “Mais aujourd’hui, les arbres de Noël sont éclairés avec des ampoules électriques. Personne n’a besoin de se plier longtemps ou de grimper. Un léger mouvement de la main est suffisant pour allumer la grande lumière - donnant le pouvoir de l’électricité, et toutes les ampoules brillent en même temps. Tout l’arbre de Noël est illuminé de manière égale - et c’est ainsi aujourd’hui avec l’arbre de l’humanité. Finies les incompréhensions, les divisions et l’hypocrisie ; finies les peurs ; laissons la lumière briller: cette lumière ne partira pas. C’est la lumière de Baha’u’llah, qui illuminera toute l’humanité et les cois les plus reculés de la terre, la lumière qui brûlera tout le temps - le cycle du progrès humain sur cette planète, pour un cycle de 500000000 ans. “Lorsque le Verbe de Dieu est révélé... quel pouvoir peut s’opposer à lui ? Qui s’oppose à lui périra et n’arrivera à rien. Les rois, les armées, les nations s’opposeraient-ils encore au Verbe de Dieu - les rois, les armées et les nations périraient. L’avenir proche pourrait être celui de l’opposition et de la destruction. Mais plus tard, pas dans un très grand laps de temps, verra le triomphe du Verbe de Dieu, la gloire du jour de Dieu. Et c’est pourquoi, mes chers amis, quel que soit ce que l’avenir réserve - restons fermes. Les toits sous lesquels nous vivons pourraient tomber sur nos têtes - restons encore fermes. L’air que nous respirons pourrait-il être changé en poison - restons encore fermes. Et soyons heureux et confiants que derrière les nuages les plus denses, le soleil brille, que la Plus Grande Paix viendra...”. Dans les jours sombres de la Grande Guerre, Louis Zamenhof avait prévu qu’il n’y aurait pas de paix jusqu'à ce que les nations de la terre se réunissent dans un gouvernement mondial. Dans son appel aux diplomates qui refaisaient la carte de l’Europe après la guerre, il avait plaidé qu’ils sécurisent les droits de tous les peuples et qu’ils “abolissent à jamais les causes principales de la guerre, la survivance barbare de la plus éloignée de l’antiquité, la domination d’une race sur d’autres”. Ses prédictions s’étaient avérées vraies. Maintenant à la veille d’un autre conflit déchirant le monde, une nouvelle fois sa fille Lidia plaidait pour la justice, l’égalité et l’unité parmi les peuples et les nations. Même maintenant, alors que la guerre mondiale était imminente, elle était convaincue qu’un jour, la paix viendrait. Et tandis que l’attention de la plupart des peuples était fixée sur la haine et la rivalité qui divisaient les nations du monde, Lidia était capable de regarder en avant dans une vision qui dépassait même l’unification de la planète. “Il viendra un temps”, écrivait-elle, “où nôtre planète dépassera sa solitude, où les rêves les plus courageux des courageux deviendront réalité et les où les habitants de la terre prendront contact avec les habitants d’autres planètes. Alors, un nouveau prophète apparaîtra sûrement pour proclamer à toutes les planètes qu’elles sont les arbres d’une seule forêt, les étoiles d’un seul ciel. Mais c’est un jour éloigné... caché derrière le voile de l’avenir. Nôtre jour est le jour de l’humanité. C’est le jour de la naissance de l’humanité à travers le pouvoir tout-puissant du Verbe de Dieu - c’est un nouveau Noël. “Noël - le Verbe de Dieu donne la une nouvelle fois la chair de poule. L’arbre de Noël - l’humanité - est éclairée par la lumière de Celui qui est le Créateur de toute lumière. Ne devrions-nous ne pas être heureux ? Ne devrions-nous ne pas être joyeux ?”. L’année 1939 commençait en solitaire pour Lidia ; les lettres n’étaient pas arrivées des Etats - Unis, et elle se demandait si ses amies en Amérique l’avait oublié. Lidia se souvenait souvent du temps qu’elle avait passé en Amérique - elle avait même rêvé à ce sujet. “Dans mes pensées, je visitais souvent le centre baha’i”, écrivait-elle à Della, “et je me rappelais de mes premières visites là-bas après mon arrivée à cette dernière, inoubliable et sainte nuit, lorsque vraiment le Maître était avec nous”. Les difficultés que Lidia avaient rencontré en Amérique avaient déjà commencé à descendre dans l’oubli ; elle regardait maintenant en arrière sur son voyage seulement avec affection et nostalgie. Dans ses lettres, elle ne citait jamais les ennuis et les déceptions, seulement les amitiés. Bien qu’elle n’avait pas entendu parler de ses amis en Amérique, elle avait reçu une lettre de Haïfa. Le secrétaire de Shoghi Effendi écrivait: “Le Gardien... est en fait heureux de savoir que vous vous sentez tout à fait satisfaite sur les résultats que vous avez accompli durant les 14 mois de vôtre séjour en Amérique. Bien que vos efforts d’obtenir un permis pour une prolongation supplémentaire de vôtre visite aux Etats-Unis ne se révéla pas un succès, vous devriez être néanmoins être remerciée pour l’opportunité que vus avez eu d’entreprendre un voyage si long et si fructueux. Il espère que les expériences que vous avez accumulé durant tous ces mois d’enseignement ininterrompu vous aidera maintenant à travailler plus efficacement pour la propagation de la Cause dans les différents pays que vous visiterez, et particulièrement dans vôtre pays natal, la Pologne, où la Foi est encore pratiquement inconnue, et où il y a un travail considérable de pionnier à faire...”. De sa propre main, le Gardien avait ajouté un post-scriptum: “Chère et estimée collègue: Je suis vraiment fier de ce que vous avez accompli aux Etats-Unis. Les croyants étaient ravis et encouragés. Je crois que le jour n’est pas loin où je vous rencontrerais face à face en Terre sainte et je vous assure en personne de ma profonde estime et gratitude. Puisse le Bien-aimé vous aider à enrichir en Europe les annales de vos services passés remarquables. Vôtre vrai et reconnaissant frère, Shoghi.”. “Ces mots sont si gentils”, écrivait Lidia à Della, “que je me sens simplement honteuse ! Mais aussi très reconnaissante et heureuse”. Pendant qu’elle était encore aux Etats-Unis, Lidia en était venue à sentir qu’elle avait un travail important à faire en Pologne: augmenter les croyants en Baha’u’llah. Des années plus tôt, Martha Root avait reconnu combien il serait difficile pour Lidia d’être un baha’ie isolée dans sa terre natale. Mais à présent, la situation était bien pire qu’elle ne l’était en 1920. L’Europe était au bord de la guerre ; la Pologne était dans une frénésie d’antisémitisme. Néanmoins, en ce sombre moment, Lidia tourna ses efforts pour trouver les personnes à qui elle pourrait enseigner la foi baha’ie. Durant cet hiver, tôt en 1939, elle voyagea dans plusieurs villes de Pologne pour visiter des personnes qui étaient intéressés par la foi. Certains de ces personnes devinrent baha’ies. “Nous semons et nous arrosons”, écrivait-elle, “mais seuls les rayons du Soleil divin peut faire pousser les graines et développer les fleurs. Je prie que Baha’u’llah m’amène à ces personnes qui sont consentants à accepter”. L’une des villes que Lidia visita durant cet été était Kremenets, où elle resta quatre jours, donnant quatre discours sur la foi baha’ie devant la société théosophique et le groupe de sept “chercheurs” de Vasyl Doroshenko. Monsieur Doroschenko était un professeur à la retraite et un inspecteur d’école vivant dans le pays près de Krememnets, de ce qui avait été un territoire ukrainien. Dans cette ville, il était “l’esprit mouvant” d’un groupe de “chercheurs” associés avec le groupe théosophique là-bas. ”Parlant de manière figurative”, expliquait-il, ils “allumaient leurs lampes à pétrole et se levaient dans la recherche de la venue du Promis. Nous étudions et examinons différentes revendications de divers mouvements, et si certains de nous se sentaient persuadés qu’il ou qu’elle trouerait ce qu’ils avaient cherché, ils écrivaient et se joignaient au mouvement”. Jamais depuis le congrès espérantiste à Varsovie, il avait correspondu avec Lidia. Vasyl Doroshenko avait trouvé ce qu’il cherchait dans la foi baha’ie et était devenu un croyant, le premier baha’i ukrainien. En Mars, confiné dans un hôpital, Monsieur Doroshenko envoya une note crayonnée à Anne Lynch au bureau international baha’i de Genève. Madame Lynch était aussi de descendance ukrainienne et correspondait souvent avec lui*. “Je bénis le Père céleste pour cette maladie et pour être dans la salle d’hôpital avec les autres malades”, écrivait-il. “C’est une préparation pour une autre vie pour moi, une plus pleine que celle-ci... Ayant reçu justement une longue lettre de Lidia Zamenhof - pleine d’encouragement et d’amour, contenant beaucoup de prières de Baha’u’llah”. *tandis qu’il semblerait plus approprié de considérer Anne Lynch comme la première baha’ie ukrainienne, ce fut Madame Lynch elle-même qui donna la distinction à Vasyl Doroschenko. Lidia avait fini la traduction polonaise de “Baha’u’llah et l’Ere nouvelle” ; qu’elle avait commencé aux Etats-Unis, et maintenant elle le tapait sur la machine à écrire de son frère polonais, qu’elle avait “confisqué” pour l’occasion. “Il est gentil et permet cela”, écrivait-elle, “et parce qu’il n’est pas le type ronchon, il n’est pas ronchon. Enfin pour cela, je devais être en Pologne !”. Il ne semble pas comme si Lidia ne se permettrait pas de quitter bientôt la Pologne. Le gouvernement français avait refusé sa permission de travailler en France. “Je ne me plains pas ni ne me lamente”, écrivait-elle à Della. “J’accepte ce que Baha’u’llah décide. Peut-être j’aurais la chance de faire quelque chose de plus en Pologne. “Elle écrivit à Shoghi Effendi: serait-il possible de visiter Haïfa au printemps ?”. Lidia manqua d’enseigner ses cours, mais elle sentit qu’elle devait dévouer ses efforts, pendant qu’il en était encore temps, à enseigner la foi baha’ie et traduire les écrits. “Oh, mes animaux malheureux crient dans leur petite valise”, écrivait-elle à Roan. “Ils veulent aussi sortir, se tenir sur la table, être montrés, admirés, causer du rire... Ils doivent être silencieux ! Maintenant ce n’est pas leur moment. En Mars 1939, les agences de voyage polonaises annoncèrent des voyages spéciaux à la foire du monde à New York, qui allait ouvrir en Avril. “Je n’irais pas là-bas”, écrivit Lidia tristement, “autant que je l’aurais voulu. Au total, c’est difficile de prévoir ce qui se passera, dans quel état se trouvera le monde”. Hitler vient juste d’occuper le reste de la Tchécoslovaquie et il tournait son attention vers la Pologne, réclamant la ville libre de Dantzig et la bande de territoire appelé le “couloir polonais”.Les nazis utilisaient la même excuse qu’ils avaient utilisés avant de justifier l’invasion - revendiquant que la minorité allemande en Pologne allait être persécutée et devait être secourue. Lidia finissait de taper sa traduction polonaise de “Baha’u’llah et l’Ere nouvelle” et elle écrivit à Shoghi Effendi qu’elle était prête pour l’impression. Bien qu’elle avait espéré la publier à Varsovie, il semblait maintenant que l’impression serait d’un coût trop élevé. Madame Lynch, à Genève, avait suggéré qu’elle pouvait être imprimée en France par une compagnie qu’il utilisait pour les livres allemands. Si les livres étaient imprimés là-bas, ils pourraient être entreposés à Genève. Lidia approuva ; elle craignait pour la sauvegarde de livres entreposés en Pologne dans les jours à venir. Mais qu’en était-il de sa propre sécurité ? Lidia avait reçu un mot de la mort d’un ami en France. Dans une lettre de consolation, elle exprimait ses propres sentiments sur la mort. “Avec une immense tristesse, j’ai reçu les nouvelles de la mort de vôtre chère et inoubliable mère de ce monde,”, écrivait-elle à Madame Faure. “Personnellement, je crois que... la destruction du corps humain ne signifie pas la mort de la personne. Ce corps, composé d’atomes, doit se désintégrer, car toute chose qui est composée doit se décomposer. Mais la plus haute part de l’homme, son esprit, ne consiste pas en atomes ; ce n’est pas une combinaison d’éléments chimiques et il n’est pas sujet à la loi de la décomposition. Je crois que nôtre conscience vit dans des moyens et des conditions que nous, encore vivants dans le corps, ne pouvons imaginer, tout comme le petit enfant dans l’utérus de sa mère est incapable d’imaginer le monde dans lequel il sera et pour quoi il a été préparé. Ces pensées sont une grande consolation pour moi, toutes les fois que la mort physique place une barrière entre moi-même et ceux que j’aime...Vôtre mère est partie dans un autre chemin. Mais je crois profondément et je crois que vous, chère Madame, et tous les espérantistes, ne s’arrêteront jamais pour le travail pour la paix. Ce travail est un noble service à l’humanité et le monument le plus beau pour nôtre bien aimé qui nous a quitté”. Ayant fini la traduction polonaise du livre d’Esslemont, Lidia écrivit à Shoghi Effendi pour demander quel livre il souhaitait qu’elle traduise la prochaine fois. “Je suppose qu’il me demanderait de traduire en polonais ou “Les leçons de Saint Jean d’Acre” ou “Le Livre de la Certitude”, dit-elle à Roan, “et j’étais prête”. Alors qu’elle attendait sa réponse, Lidia sentait une inclination écrasante de traduire en polonais “Les Paroles cachées”, et elle commença ce travail. Elle pensait qu’elle pourrait le finir avant que la réponse du Gardien n’arrive, et en fait, elle finissait la tape à la machine lorsque la lettre de Shoghi Effendi arriva. “Ne savez-vous pas ce qu’il me dit ?”, écrivit-elle à Roan avec excitation. “De traduire en polonais “les Paroles cachées !” Vous pouvez imaginez que je me mis entièrement au travail lorsque je lus cela, et je me sentais très heureux de voir que les mots du Gardien confirmaient ce qui était dans mon coeur et ce que je reconnaissais en tant que guidance divine”. Dans la même lettre, Lidia joint une traduction qu’elle avait faite d’un passage de “La Chronique de Nabil”. A cette époque, Roan travaillait sur sa traduction de ce livre en espéranto. Le passage que Lidia avait envoyé, le discours d’adieu du Bab à Ses disciples, les Lettres du Vivant, arrivèrent juste alors que Roan avait besoin de traduire toutes ces pages dans le livre. La traduction de Lidia de l’épître du Bab fut publiée aux Etats-Unis en 1944 en tant que prospectus. Bien que certains courriers de l’étranger n’étaient pas encore parvenus à Lidia à Varsovie, elle avait entendu parler de Agnès Alexander, qui était retournée à Hawaïï, de May Maxwell et de Roan Orloff. En dépit de la propre situation difficile de Lidia, elle était inquiète du bien-être de ses amies, quand bien même elles étaient toutes en sécurité en Amérique - heureuse d’entendre que Monsieur Kinney allait mieux ; inquiète que Della, qui avait été licencié de son travail, n’avait pas encore trouver une autre situation ; inquiète que Roan travaillait trop dur. Roan écrivit à Lidia qu’elle viendrait à enseigner un cours d’espéranto à Green Acre cet été. “Si vous êtes dans Ole Bull”, répondit Lidia de manière espiègle, “prenez garde que mon esprit ne rampe de dessous les étoiles ou derrière la fenêtre, et ne vous effraye soudainement”. Lidia savait maintenant qu’elle ne quitterait la Pologne avant “la Grande Catastrophe”. Et elle savait que la Catastrophe était proche ; la guerre semblait prête à exploser à tout moment. Encore une fois, l’inquiétude qu’elle exprimait dans ses lettres et dans ses articles n’étaient pas pour sa propre sécurité, mais pour les conséquences de la guerre à venir pour toute l'humanité. En avril 1939, elle écrivit à Roan: “La grande Catastrophe semble extrêmement proche, et ici, où je suis, le tonnerre est inévitable. Nous sommes tous dans les mains de Dieu. Si i ne se passe rien (ce dont je ne crois pas) jusqu'à l’automne, peut-être j’essayerais d’arranger quelques voyages de cours en Pologne. Mais les conditions sont telles que je doute que cela sera possible”. Elle avait commencé à enseigner des cours d’espéranto à Varsovie. Les conditions étant ce qu’elles étaient, elle fut heureuse qu’il y avait encore des personnes qui voulaient apprendre l’espéranto. «je ne sais pas ce que je ferais après les vacances d’été”, écrivait-elle à Roan en Mai. La perception de Lidia du temps de la Pologne qu’elle avait quitté était tout à fait juste: jusqu'à la fin de l’été. Cependant, Joseph Dubin à Philadelphie essayait de faire revenir Lidia aux Etats-Unis à travers une université, et offrait de rassembler de l’argent au congrès de l’association espérantiste de l’Amérique du Nord pour son passage. Lidia sentait que ses plans étaient non réalistes, et tandis qu’elle lui disait qu’elle serait heureuse de retourner aux Etats-Unis, ce serait en tant qu’enseignant salarié ; elle ne pouvait risquer d’y aller sans un plan fixé pour ses revenus. Elle demanda à Monsieur Dubin de ne pas rassembler de l’argent pour elle au congrès. Elle ne voulait pas que les personnes pense que c’était son idée, ou qu’elle demandait de l’argent, même pour sortir de Pologne. Maintenant, il y avaient trois baha’is en Pologne: Lidia, Vasyl Doroshenko l’ukrainien, et une femme nommée Bianka Haas de souche juive allemande qui vivait à Bielsko. Cette petite communauté de croyants démontraient l’utilité pratique de l’espéranto: la langue natale de Monsieur Doroshenko était ukrainienne, Lidia était polonaise, Madame Haas parlait allemand et yiddish. Ils pouvaient communiquer entre eux seulement en espéranto. Lidia continuait ses efforts de parler aux gens de la foi baha’ie. “C’est très difficile d’intéresser les gens ici”, écrivait-elle à Roan. “Certains sont complètement peu disposés à écouter, d’autres sont disposés à écouter - et ils partent !”. Cependant, elle avait trouvé à Varsovie trois nouvelles personnes qu’elle espérait qu’ils accepteraient un jour “la lumière de cette grande Foi”. Elle écrivit à Roan qu’elle avait du temps libre et voulait l’utiliser dans le service à Baha’u’llah. “Maintenant tout le monde ici prend des cours spéciaux tels que sauver des victimes des gaz poisons en cas de guerre, et je pensais même de me joindre aussi à ce cours. Mais cela me prendrait trop de temps, car après on doit passer des examens, et les étudier. J’ai décidé qu’il y avaient suffisamment de personnes pour se spécialiser dans ces services et très, très peu dans mon pays pour servir la foi baha’ie”. Elle avait commencé à traduire “Les Leçons de Saint Jean d’Acre” en polonais, utilisant la machine à écrire qui appartenait à son frère, “qui était très bon et très gentil et la mettais à ma disposition”. Sa propre machine à écrire espérantiste n’avait pas ses propres caractères pour la langue polonaise. Un jour, sur le chemin en donnant un discours sur la méthode Cseh à un club d’espéranto, Lidia tomba et se blessa salement au genou. Cela devint péniblement gonflé et elle ne pouvait se plier, ainsi elle eût à annuler ses classes d’espéranto pour plusieurs jours et de se reposer. “Mais”, écrivait-elle à Roan, “on peut très bien traduire allongée, et pendant ces jours, je traduisais dix pages par jour”. Elle savait que sa traduction de “Les Leçons de Saint Jean d’Acre” ne serait pas publiée bientôt, mais elle espérait qu’elle serait publiée un jour. Elle ne pouvait pas attendre ce “un jour” à venir, ainsi elle tapait laborieusement le texte avec six copies carbones. “Lorsque j’avais assez tapé de copies”, écrivait-elle, “ils peuvent servir à ceux qui sont intéressés”. Pendant que d’autres à Varsovie se préparaient pour la guerre, Lidia continuait tranquillement son travail qu’elle considérait bien plus important. “Ce matin, je savais que j’aurais un après-midi de libre, et j’ai prié que Baha’u’llah me guide comment le passer de manière utile pour Sa Cause”, écrivait-elle à Roan. “Au début, je voulais visiter une espérantiste malade à qui j’avais laissé un livre baha’i, mais lorsque je téléphonais, j’apprenais qu’elle n’était pas assez bien pour recevoir ma visite. Ensuite, je pensais aller voir une dame que je connaissais, à qui j’avais déjà parler de la Foi, mais étrangement je ne me sentais pas enclin à faire cela, ainsi j’abandonnais l’idée”. Une lettre était arrivée d’un espérantiste du Portugal avec qui Lidia avait correspondu. “Au lieu d’aller voir quelqu’un, je sentais une inclination forte de répondre à elle immédiatement, et je passais plus de deux heures à ma machine à écrire, écrivant une longue lettre pour elle - sur la Foi. Je plaçais le reste dans les mains de Baha’u’llah... La dernière semaine, j’ai fait deux nouveaux contacts pour la Foi. Plusieurs personnes sont devenus intéressés. On doit “semer et semer”, même si “une centaine de graines sont perdues, mille graines sont perdues”. L’été arriva à Varsovie, et les cours d’espéranto de Lidia étaient presque finis. Après la fin des cours, elle écrivit à Roan ? “Je serais plus libre d’aller et de voir les gens. Et je trouve aussi que la poste est une institution très utile et aide beaucoup le travail spirituel dans cette Ere” ; Lidia était tout à fait touchée de recevoir un câble du congrès espérantiste à New York. Cela “me fit réellement un grand plaisir car je n’imaginais pas que les amis américains se souviendraient de moi,”, écrivait-elle modestement. En Juillet, Lidia écrivit à Roan qu’il y avait un nouveau baha’i en Pologne, une femme de Bielsko que Lidia avait rencontré durant une visite à Madame Haas. Lidia dit plus tard à Roan d’une espérantiste à Varsovie avec qui Lidia marchait dans le parc chaque samedi et qui avait récemment concédée à Lidia qu’elle commençait à croire en Dieu. Lidia rapporta avec joie à Roan qu’à leur dernière réunion, cette femme avait exprimé sa croyance “que Baha’u’llah est le dernier Messager de Dieu”. Elle n’était pas encore complètement convaincue”, écrivait-elle à Lidia, “mais elle semble très enclin à l’accepter”. Quelques semaines plus tard, Lidia écrivait à nouveau à Roan avec de bonnes nouvelles. “Je pense que je vous écris à propos d’une espérantiste de Varsovie avec qui j’ai passé du temps chaque samedi et j’ai parlé de la foi. Hier, elle m’a dit, lorsque j’ai mentionné que j’espérais écrire bientôt au Gardien ; “Dites-lui qu’il y a une nouvelle baha’ie à Varsovie”. Mais je dit: “J’aimerais que vous écriviez cela vous-mêmes “, et elle le fit. “Et maintenant, en comptant l’auteur de cette lettre, il y a en Pologne 5 personnes qui croient en la révélation baha’ie. En fait très peu, et à cause de cela, chaque nouvelle âme est une augmentation importante et une cause de joie”. “On ne peut jamais compter très sûrement sur la poste, particulièrement outremer”, dit Lidia à son amie, “mais je crois toujours que cette lettre vous parviendra à temps, cela signifie pendant que vous êtes encore à Green Acre. Je veux qu’elle soit amenée dans ce lieu bien aimé, béni autrefois par la présence du Maître, mes plus chères salutations et pensées pleines de souvenirs. “je suis étonnée parfois combien le temps passe vite. Nous étions à peine ensemble à Green Acre, travaillant ensemble pour le cours, répétant la scène de la parade le dernier jour, visitant à Boston la station de radio et le coiffeur”, où elle s’était fait une permanente. “Il ne reste même pas une trace de son travail”. Lidia espérait qu’elle puisse aller aux Pays Bas en octobre pour enseigner les classes pendant plusieurs mois. Il semble que les personnes à l’institut Cseh essayaient d’arranger cela pour elle, mais à la mi-août, Lidia n’avait pas encore reçu un permis pour travailler là-bas. En septembre, elle planifiait d’aller au congrès espérantiste polonais à Lvov. “Ils avaient déjà imprimés en lettres grasses sur le programme du congrès que je donnerais un discours”. Elle avait fini de traduire “Les Leçons de Saint Jean d’Acre” en polonais, “et au lieu de se reposer”, dit-elle à Roan, “Je commençais immédiatement “Le Livre de la Certitude”. Elle demanda à son amie de donner ses amitiés à ceux qu’elle avait rencontré l’année dernière. Ce fut la dernière lettre que Roan reçue jamais de Lidia. Août arrivait, et avec cela, comme chaque année, le congrès universel d’espéranto qui allait se tenir en ce fatal été de 1939, à Berne, Suisse. Lidia, incapable de quitter la Pologne, ne pouvait y assister. Le président du congrès, qui était aussi président du 9 ème congrès à Berne en 1913, remarqua dans son discours que le congrès de 1913 avait été le dernier auquel Louis Lazare Zamenhof ait jamais assisté, car l’année suivante, la guerre avait éclaté. Le congrès de 1939 à Berne serait le dernier jusqu'à la fin de la Seconde Guerre Mondiale, parce que dans quelques semaines, la Catastrophe arriva finalement en Europe. ================================ Chapitre 19: “Une vague de mal” Le 1er septembre 1939, après que des troupes S.S en uniformes polonais mirent en scène une fausse attaque contre une station de radio allemande, les armées du troisième Reich envahissaient la Pologne, entraînant l’Europe, et finalement le monde, dans un second conflit mondial. La ville assiégée de Varsovie tint pendant trois semaines. Lorsque le bombardement fut terminé, les zones civiles, particulièrement le quartier juif, avait souffert le plus - les Allemands avaient directement leur feu spécialement à cet endroit de la ville. Pour la seconde fois dans sa vie, Lidia voyait les troupes allemandes marcher dans Varsovie. La première fois était en 1915 lorsqu’elle avait 11 ans. Mais en 1915, l’armée allemande avait voulu gagner le support de la population contre la Russie. Cette fois-ci, ils marchaient pour rendre esclave la population. Une nouvelle fois, la Pologne cessait d’exister en tant que nation indépendante et était divisée, l’Allemagne incorporant une grande partie de territoire dans le Reich, et l’union soviétique s’emparant de presque la moitié du pays dans les premiers jours de la guerre. La partie de la Pologne qui comprenait Varsovie était désignée le gouvernement général et était gouverné par un fonctionnaire allemand. Maintenant, sous les nazis, comme dans le Moyen Age, les Juifs allaient être distingué du reste de la population tout le temps. A Varsovie, cela signifiait devoir porter une bande blanche au bras avec une étoile bleue de David. Les commerces juifs étaient confisqués, les écoles fermées. Les rations étaient coupés. Et les Nazis commencèrent à isoler les Juifs de Varsovie du reste de la population. Tout d’abord, le quartier juif fut mis en quarantaine par des palissades et des fils de fers barbelés. L’armée d’occupation allemande parcourait la ville, soumettant les Juifs à la violence fortuite que les Juifs en Allemagne avaient appris à craindre. Bientôt le quartier juif fut rempli de réfugiés d’autres villes et d’autres provinces polonaises, mais les réfugiés ne trouvaient aucune sécurité à Varsovie. Les Juifs ne savaient jamais quelle sorte de terreur ils pouvaient rencontrer lorsqu’ils sortaient de leurs portes - si ils seraient capturés pour le travail forcé, volés par des bandits polonais, ou tués par des soldats allemands pour aucune raison valable. Après l’invasion, les nouvelles des endroits où était Lidia se faisaient rares et peu sûrs par ses amis en Europe et en Amérique. Dès novembre, plusieurs journaux juifs aux Etats-Unis rapportèrent que Lidia Zamenhof et toute sa famille avaient été arrêtés sous le coup que Lidia était partie aux Etats-Unis pour propager la propagande antinazie. Le même rapport apparut dans “Les nouvelles du quotidien polonais”. Les amis de Lidia en Amérique furent choqués d’apprendre son arrestation. “Les bahai’s américains...”, écrivit Horace Holley à Shoghi Effendi, ”sont profondément inquiets de son sort à Varsovie, bien que nous savons que la pureté et la fermeté de sa foi en Dieu élève son esprit au-delà de l’obscurité de la cruauté humaine... Nous réalisons combien son sort est limité avec les éléments antijuifs et anti-internationaux dans certain pays, et nous pouvons seulement prier qu’elle soit protégée par le pouvoir divin”. Immédiatement les baha’is et les espérantistes en Amérique et en Europe essayèrent d’agir pour l’aider dans la voie qu’ils pensaient être la meilleure. “Nous, aussi bien que les espérantistes avons une lourde responsabilité de faire tout ce que nous pouvons”, écrivait Horace Holley à Allen Mc Daniel. Monsieur Holley projetait “d’exprimer aux Nazis nôtre formel refus de la vérité des charges et nous essayerons aussi probablement de mettre la pression à travers l’ambassade allemande”. Lui et les autres surestimaient tristement leur capacité à “mettre la pression” sur les Nazis par des protestations formelles. Néanmoins, Monsieur McDaniel contacta Ernest Dodge pour essayer de faire usage des contacts au département d’état aux Etats-Unis. Une nouvelle fois, les baha’is et les espérantistes se retrouvèrent eux-mêmes ayant à coopérer à cause de Lidia - , cette fois pour essayer de sauver sa vie. Mais Monsieur Dodge indiqua sagement de “même lui écrire maintenant pour exprimer la douleur et la sympathie des espérantistes ou des baha’is pourrait agir à son désavantage ; depuis que c’était précisément son importance en tant que représentante à la fois des principes espérantistes et de la foi baha’ie, qui avaient provoqué à ceux au pouvoir de la haïr et de la persécuter”. Leurs efforts pour exercer une influence à travers les canaux diplomatiques échouèrent. Lorsqu’il était contacté par les baha’is, le premier secrétaire de l’ambassade polonaise alléguait le désarroi et recommandait d’envoyer une forte protestation à Berlin. Les fonctionnaires du département d’état des Etats-Unis dirent qu’ils voudraient prendre aucune action officielle tant que Lidia n’était pas citoyenne américaine. Officieusement, ils dirent à Allen McDaniel qu’ils étaient prêts à faire ce qu’ils pourraient pour offrir conseil dans le but de garantir sa libération. Monsieur McDaniel présenta l’affaire à la légation suédoise à Washington, et le conseiller de la délégation approuva de transmettre à Stockholm les protestations des associations espérantistes et des assemblées spirituelles nationales, mettant en avant avec évidence “en insistant sur l’absence de toute propagande antinazie durant son séjour aux Etats-Unis”. Cependant, Monsieur McDaniel et peut-être même Monsieur Dodge ne réalisaient pas qu’envoyer comme ils en avaient l’intention, une quantité de “programmes et de publicité dans les journaux... qui indiqueraient que les activités étaient largement confinées à la lecture, à des conduites de ours et d’autres activités se rapportant à la propagation de l’espéranto parmi les gens des Etats-Unis et du Canada” pourrait seulement rendre les choses pire pour Lidia si un tel matériel venait dans les mains de la Gestapo. S’engager dans des activités espérantistes était presque déterminé agir contre l’état en Allemagne. Tout ce que la principale Gestapo à Varsovie avait besoin serait une copie de l’un des articles américains se moquant de Hitler, tel que le premier qui était apparut dans le “Philadelphie Record” - si ce n’était pas presque un document complet. Le bureau étranger suédois envoya un mot que ce n’était pas possible de faire quelques démarches en faveur de Lidia, tant que le gouvernement allemand ne permettait pas à la Suède d’exécuter la tâche de s’occuper des intérêts des citoyens polonais en Allemagne, avec lesquels le gouvernement polonais avait été chargé. L’inquiétude pour les Zamenhof grandissait lorsque des lettres envoyées au 41 rue Krolewska revenaient avec un tampon du bureau de poste de Varsovie disant que la famille n’habitait plus à cette adresse, et la nouvelle adresse était inconnue. Des rumeurs commencèrent immédiatement à circuler. Il fut rapporté que Lidia avait été envoyée dans un camp de concentration en Allemagne. Puis, dès 1940, il fut annoncé que Lidia vivait en France, et ses amies poussèrent un ouf de soulagement. Mais les semaines passaient, et aucune lettre ne venait de France. Lidia n’était pas là-bas ; la rumeur était fausse. Ses sources furent pistées à une femme du sud de la France qui avait revendiqué avoir reçu la permission du gouvernement français pour Lidia de la visiter - mais c’était tout. En Février 1940, une lettre cryptée de Lituanie atteignit les fonctionnaires de l’association universelle d’espéranto à Genève: “Mes cousins à propos de qui vous demandez sont malades, dans un situation très mauvaise et je ne peux absolument pas en ce moment vous donner leur adresse car leur ancienne maison est détruite. Si le paquet qui venait à vôtre adresse pouvait être utile pour eux, envoyez le à l’un de leurs parents, par exemple à Monsieur Félix Zamenhof...”. En mars, plus de nouvelles arrivèrent de Stéphane Zamenhof, le cousin de Lidia. Il était à New York ; il était allé de la Foire du monde et il était là-bas lorsque la guerre éclata. De son frère Mieczyslaw, qui était maintenant en Russie, il avait appris que toute la famille avait été arrêtée immédiatement après l’occupation de Varsovie. Personne n’était autorisé à les voir. Bien que l’espéranto avait été interdit en Allemagne depuis trois ans, et en Autriche depuis l’Anschluss, les S.S et la Gestapo avaient continué de considérer le mouvement comme une menace au Reich. Un compte rendu interne de onze pages en 1940 disait montrer “une connaissance détaillée” du docteur Zamenhof et de sa philosophie de l’homaranisme. Après la guerre, le colonel S.S Joseph Meissinger, à la tête de la police de sécurité à Varsovie, admis qu’il avait reçu des ordres spéciaux de Berlin, probablement de Reinhard Heydrich lui-même, lui ordonnant d’emprisonner les Zamenhof. Adam fut arrêté le premier. Les Allemands le capturèrent à l’hôpital juif, où il était le chef ophtalmologiste et était devenu directeur de l’hôpital après que son directeur précédent s’enfuit. Le même jour, Wanda, la femme de Adam et sa soeur Sofia furent aussi arrêtées à l’hôpital. Henryk Minc, le beau-frère de Wanda, et Lidia furent arrêtés au domicile de Minc. Henryk Minc fut pris, c’était à peine croyable, au lieu du fils d’Adam, Louis, parce que le garçon était malade et il était craint qu’il puisse avoir le typhus. Enfin, à travers la Croix Rouge internationale, un message de Lidia fut passé à Mabelle Davis à Détroit. C’était: “Toute la famille en prison. Nôtre maison brûlée”. Durant le bombardement de Varsovie, le 25 septembre, une bombe incendiaire avait touché leur maison. Tout était détruit: tous leurs biens, mais le pire de tout, le petit lieu sacré qui était le bureau d’étude de Louis Zamenhof - la grande bibliothèque espérantiste, les manuscrits et les lettres, la vieille machine à écrire sur sa table de chêne, le petit presse papier brisé en forme de chien. Selon le fils de Louis, Adam Zamenhof, Lidia et Sofia furent libérées après plusieurs mois dans la prison Pawiak. Mais la nouvelle qu’ils avaient été libérées n’atteint pas l’étranger avant mars 1940. Et il n’y avait aucune nouvelle à propos du sort de Adam dans la prison Danilowiczowska. Une petite carte postale en allemand (comme cela l’exigeait à présent) arriva aux Isbrückers aux Pays Bas. Elle révéla que Lidia et Sofia vivaient à rue Ogrodowa, dans le quartier juif. La carte postale disait seulement: “Chers amis, merci pour vôtre carte postale. Comment nous nous sommes probablement connus. Wanda et Louis vivent au 6-3 Foch (le domicile de Minc), mais nous n’avons aucune nouvelles d’Adam. Sincères salutations de Sofia et Lidia”. Maintenant c’était Hans Jakobs, le directeur de la vieille association universelle d’espéranto à Genève, qui était capable de prendre contact avec les Zamenhof et d’approcher la tête du Conseil juif, le corps gouvernant du ghetto de Varsovie, pour les aider. La Ligue rivale espérantiste internationale, avec ses quartiers en Angleterre, à présent en guerre avec l’Allemagne, ne pouvait rien faire pour intervenir. U.E.A planifia d’envoyer des colis de nourriture aux Zamenhof et espérait que Joseph Dubin à Philadelphie pourrait se procurer une position d’enseignant en Amérique - et avec cela un visa - pour Lidia. Un fond fut établi pour aider la famille Zamenhof si l’un d’entre eux étaient capables de quitter la Pologne. Certains des colis de nourritures passaient, mais les efforts d’obtenir un visa à Lidia échouèrent. L’une de celle qui était capable d’envoyer de la nourriture régulièrement à Lidia et à sa famille était Madame Gigi Harabagiu de Bucarest, Roumanie. Elle obtint la permission du gouvernement roumain d’envoyer mensuellement des colis aux Zamenhof en Pologne, et en retour, elle recevait des cartes postales en Allemagne d’eux, la remerciant pour les paquets. Habituellement, Madame Harabagiu envoyait un kilo de sucre, de matières grasses, de farine, de fruits secs et de saucisses. Une fois, elle fut intriguée lorsque Lidia lui écrivit de ne plus lui envoyer du tout de pain. Sachant que le colis pouvait mettre longtemps avant d’arriver, Madame Harabagiu n’avait jamais envoyer de pain. Apparemment, un officier des douanes avait volé le saucisson dans le paquet, le remplaçant par un kilo de pain. En mai, une enquête atteignit Adam Czerniakow, chef du conseil juif de Varsovie, de “l’union espérantiste”, demandant si les espérantistes pouvaient transmettre de l’argent à la famille Zamenhof. Il nota encore dans son journal du 8 mai que les espérantistes de Genève offraient d’aider les Zamenhof. Czerniakow “demanda à Sztolcman (un membre du Conseil juif de discuter de la chose avec Messing un officier allemand) dans le bureau du chef de district, “mais il ne cita pas encore la chose”. Les deux organisations, les U.E.A et les I.E.L avaient des difficultés à coordonner leurs efforts pour aider la famille. “Le schisme dans nôtre mouvement”, commenta amèrement “Espéranto”, “s’étend ainsi aussi à cet endroit”. Il priait les espérantistes de ne pas laisser la division “jouer son méchant rôle” dans cette affaire et empêcher les efforts pour aider la famille Zamenhof. “C’est le devoir sacré des espérantistes de coopérer...Ne laissons pas la famille du Maître périr !”. C’était trop tard. Le docteur Adam Zamenhof avait déjà été tué. A la fin de janvier, il avait été tué parmi une centaine d’autres intellectuels et de personnes professionnelles qui avaient été arrêtées et avaient été détenus comme otages. Mais ce ne fut pas avant le 30 juillet que Adam Czerniakow nota dans son journal: Par les S.S, je fus informé que le docteur Zamenhof, son beau-frère, et Minc étaient morts” (plus tard, le fils d’Adam remarqua que c’était une erreur de la part de Czerniakow. Le docteur Minc était le beau-frère d’Adam). Et seulement le 18 Août, il remarqua que son bureau était “assiégé” par les familles des otages morts, “qui venaient juste d’être notées” et étaient “demandant plus d’informations”: parmi elles, Madame Zamenhof et Madame Minc”. Néanmoins, la famille d’Adam gardait espoir que quelque part, il puisse encore être en vie. Le 16 novembre 1940, une partie du quartier juif fut cerné du reste de Varsovie par des murs et des rues et des fenêtres murées. Là, dans le ghetto de Varsovie, dans une surface d’environ 100 bloc de villes carrés, un demi million de personnes seraient emprisonnées, comprenant des Juifs de Varsovie aussi bien que des réfugiés et des déportés de partout en Pologne et certains d’autres parties de l’Europe. Après la fermeture du ghetto, seuls ceux avec des permis spéciaux pouvaient passer les gardes. Même les docteurs qui travaillaient dans l’hôpital juif, en dehors des limites du ghetto, avaient des difficultés à obtenir des permis. Durant les jours de la clôture du ghetto, plus de 200000 personnes - des Polonais vivants à l’intérieur des limites du ghetto, et des Juifs vivants en dehors de ses limites - furent forcés de quitter leurs domiciles et leurs affaires, et de partir. La rue Ogrodowa, où Lidia et Sofia vivaient avec des parents, était dans l’aire qui avait été désigné pour le ghetto. Mais la rue Krolewska était en dehors des murs, fermée à eux pour toujours. Cela n’avait plus d’importance ; rien ne restait là-bas que de la pierre. Maintenant, Lidia était incapable d’envoyer à ses amis plus qu’une carte postale écrite en allemand. A cause de la censure, elle ne pouvait donner quelques détails des conditions détestables sous lesquelles ils vivaient. Mais plusieurs journaux secrets qui avaient survécu, écrits par des Juifs courageux dans le but d’enregistrer les sinistres événements pour la postérité, de nous donner une image vivante de la vie dans le ghetto. L’historien Emmanuel Ringelblum, l’archiviste du ghetto de Varsovie, enregistra le jour où le ghetto fut fermé. “Le dimanche où le ghetto fut introduit fut terrible”, écrivit-il. “Les gens dans la rue ne savaient pas que c’était un ghetto fermé, ainsi il vint comme la foudre. Des détails d’allemands, de Polonais et de gardes Juifs postés à chaque coin de rue cherchant des passants pour décider si oui où non ils avaient le droit de passer. Des femmes juives trouvaient les marchés en dehors du ghetto fermées à elles. Il y avait un rapide manque de pain et d’autres produits. IL y avait une réelles orgie de prix élevés depuis lors. Il y avaient des queues en face de chaque magasin de nourriture, et toute chose était acheté. Beaucoup d’articles avaient soudainement disparus des magasins...Le premier jour après que le ghetto fut fermé, beaucoup de Chrétiens apportaient du pain de leurs relations juives et de leurs amis... «...Ceux qui sont lents pour ôter leur chapeau devant les Allemands sont forcés de le faire en utilisant des pierres pavées ou des tuiles comme poids. Les Juifs âgés aussi, sont priés de faire des saluts. Ils déchirent du papier en petit, dispersent les morceaux dans la boue, et ordonne aux gens de les ramasser, les battant lorsqu’ils se courbent. Dans le quartier polonais, les Juifs sont ordonnés de s’allonger sur le sol et les Allemands marchent sur eux. ... Une vague de malheur rodait sur toute la ville, comme si en réponse d’un signe de tête de au-delà”. Parce que les nazis considéraient par erreur les Juifs comme une race, tous ceux qui avaient même un grand parent juif étaient traités comme des Juifs, sans égard de la religion qu’ils professaient. Par conséquent, parmi ceux qui étaient rassemblés dans le ghetto pour partager le sort des Juifs se trouvaient des millions de gens qui étaient alors Chrétiens - et du moins une baha’ie, Lidia Zamenhof. Dans les jours précédents la clôture du ghetto, un espérantiste polonais d’ancêtre italien nommé Joseph Arszenik alla voir Lidia. Monsieur Arszenik, un ouvrier du chemin de fer et un espérantiste zélé depuis 1925, était apparemment l’une des personnes à qui Lidia avait enseigné la foi baha’ie. Il offrait bravement de cacher Lidia dans sa maison sur les faubourgs de Varsovie. Toujours depuis que Lidia était retournée en Pologne fin 1938, tout ce qu’elle avait craint s’était avérée exacte, et les événements s’étaient présentés même pire qu’elle aurait pu imaginer - le bombardement de sa maison, l’invasion nazi brutale, le confinement sous des conditions impossibles dans le ghetto. Jusqu'à présent, tous les efforts de ses amis pour la sortir de Pologne pour sécurité avaient échoué. Lorsque Joseph Arszenik alla à Lidia en ces jours sombres de novembre 1940 pour lui offrir un endroit caché, elle doit avoir réalisé que cela pourrait bien être sa dernière chance de fuir. Mais Lidia Zamenhof refusa. Après la guerre, Monsieur Arszenik écrivit à Ernfrid Malmgren, un espérantiste suédois important: “Cette noble femme refusa mon offre de la sauver, disant que moi et ma famille pourraient perdre nos vies, car quiconque cache un Juif périt avec les Juifs qui sont découverts”. En fait, c’était vrai. Monsieur Arszenik avait eu beaucoup de chance: tout Polonais attrapé en train de dissimuler un Juif était exposé à une immédiate exécution. Monsieur Arszenik écrivit à Annie Lynch à Genève que les derniers mots de Lidia à lui furent: “Ne pensez pas à vous mettre vous-mêmes en danger ; je sais que je dois mourir, mais je le sens comme mon devoir de rester avec mon peuple. Dieu accorde que en dehors de nos souffrances, un monde meilleur émergera. Je crois en Dieu. Je suis baha’i et je mourrais en baha’i. Toute chose est dans Ses Mains”. Après la guerre, Joseph Arszenik devint baha’i. Il mourut en 1978 à 80 ans. D’autres récits pour essayer d’aider Lidia à fuir sont évoqués par plusieurs baha’is allemands, comprenant Madame Ursula Mühlschlegel, qui entendit l’histoire de son mari , le docteur Adelbert Mühlschlegel, et Madame Anna Grossmann et son fils le docteur Hartmut Grossman, qui l’apprit du docteur Hermann Grossmann et de Madame Karla Macco, une baha’ie d’Heidelberg. Mais dans ce cas, le sauveur de Lidia serait un soldat allemand nommé Fritz Macco. A la différence de l’élite S.S, l’armée allemande mobilisait les hommes sans regard de leurs points de vue moraux. Résister au service obligatoire signifie la mort. Ainsi, il arrivait que des citoyens allemands dont les visions personnelles étaient contraires à tout ce que les Nazis croyaient pour trouver eux-mêmes une partie de la machine de guerre allemande, comprenant certains espérantistes et certains baha’is. Après l’occupation nazi de la Hollande, un espérantiste recherchant l’état de la maison espérantiste à Arnhem avait été étonné de trouver sur la serrure de la porte un morceau de papier avec un message, évidemment placé là par un soldat allemand. C’était en espéranto et cela disait: “La maison est déserte. Un visiteur ne peut entrer. Puisse ”l’appel puissant” traverser le monde “sans attendre ?”. Gardez courage, bien tôt un autre temps viendra ! Longue vie à l’espéranto ! - un espérantiste allemand”. Fin 1930, alors qu’il devenait clair que la guerre était inévitable, les baha’is allemands qui étaient en âge de servir voyaient le dilemme qui approchait. En tant que baha’is, ils étaient tenus d’obéir a leur gouvernement ; aussi en tant que baha’is, ils ne voulaient pas se battre. Il était clair que l’armée allemande ne tolérerait aucun objecteur de conscience de porter des armes. Selon Hartmut Grossmann, une lettre fut écrite à Shoghi Effendi de la part de plusieurs jeunes baha’is, qui s’inquiétaient de quoi faire. Le Gardien répondit en substance à cet effet que si leurs désirs de ne pas prendre la vie était sincère, Dieu les assisteraient à y parvenir. Les jeunes hommes allèrent dans l’armée, mais tous moururent durant la première semaine de la guerre sauf pour l’un d’entre eux, l’homme de 24 ans, Fritz Macco. “Il ne comprenait pas pourquoi il était épargné”, se rappela le docteur Hartmut Grossmann. Les lettres de Fritz à sa mère étaient pleines de culpabilité: pourquoi avait-il survécu seul ? Avait-il fait quelque chose de mal ? N’avait-il pas été assez sincère ? L’un des garçons qui avait été tué était son frère. En tant qu’ambulancier dans l’armée allemande, Fritz Macco fut envoyé à Varsovie. Il semblait que par chance, il fut capable d’obtenir la fonction de non combattant. Selon les Grossmann et Madame Mühlschlegel, Fritz Macco fut capable de trouver Lidia et de lui rendre visite, probablement deux fois, pour amener de la nourriture et d’essayer de la persuader de fuir. Hartmut Grossmann entendit par la mère de Fritz, Karla Macco, que le jeune soldat en était venu à croire qu’il avait été épargné justement pour cela: “Que c’était sa tâche particulière, de rentrer en contact avec Lidia... “Mais, disait-il, elle refusait de fuir et disait qu’elle “voulait rester avec son peuple”. Fritz Macco survécu jusqu’en 1944, alors qu’il avait été capable d’intervenir avec la Gestapo de la part de sa mère, qui avait été emprisonnée pour ses activités baha’is. Ses efforts la sauvegardèrent d’être envoyé dans un camp de concentration. Mais en septembre 1944, Fritz Macco fut tué sur une île de la Vistule, en Pologne, probablement par des troupes russes qui envahirent le nord-est de la Pologne durant les offensives d’été de l’Armée rouge. Il semble que personne encore en vie n’ait entendu cette remarquable histoire de Fritz Macco lui-même. Mais le fait qu’un nombre de personnes connaissaient l’histoire du soldat allemand d’essayer de sauver Lidia Zamenhof, et aient fourni des versions indépendantes, est suffisant pour le rendre digne d’être enregistrer. * A moins que plus d’informations viennent à la lumière, il n’est pas possible de connaître toute l’histoire. Comme l’a dit Hartmut Grossmann, “Ce qui s’est réellement passé, nous ne le savons pas”. Cependant, Louis, le fils d’Adam, qui était en étroit contact avec Lidia jusqu'à Août 1942, n’a jamais entendu parler de cet épisode. ================================ Chapitre 20: “Cela ne sera pas oublié”. Les habitants du ghetto de Varsovie savaient que leur seul espoir tenait en la proche victoire de L’Angleterre. Mais alors que le temps s’éternisait et que les Alliés libérateurs ne venaient pas, la situation dans le ghetto s’aggravait. Les Nazis avaient l’intention de faire mourir de faim les Juifs, et leur autorisait des rations de nourritures plus petites qu’ils ne donnaient aux Polonais. En fait, le petit morceau de pain, les pommes de terre et les matières grasses de chaque personne ne permettait pas de fournir assez de nourriture: mais avec la viande de contrebande de l’autre côté, les occupants du ghetto essayaient de s’accrocher à la vie. La punition pour la contrebande était la mort: mais chaque jour, des personnes de tout âge risquaient leurs vies pour se traîner à travers un trou ou un égout pour ramener une tranche de pain. Beaucoup de contrebandiers étaient des enfants, car ils étaient agiles et ils pouvaient passer à travers de petites ouvertures dans le mur. Ils étaient aussi plus susceptibles d’inspirer de la pitié si ils étaient attraper par la police. Comme les Allemands coupaient les rations à venir, la contrebande devint virtuellement la seul source de nourriture dans le ghetto, et le coût de la nourriture s’éleva de manière drastique. Beaucoup de personnes, particulièrement les réfugiés, n’avaient les moyens de manger. Des soupes de charité ne pouvaient nourrir tous ceux qui avaient faim, et les gens commençaient à mourir de faim. “Vous voyez d’innombrables enfants en haillons mendiant toute la journée dans la rue”, se souvient Emmanuel Ringelbaum dès le début 1941. “Descendant la rue Leszno, à chaque pas, vous traversiez des personnes allongés au coin d’une rue, gelé, mendiant”. Aux funérailles d’un nombre de petits enfants d’un orphelinat, avait-il raconté plus tôt, les autres enfants de l’endroit placèrent une couronne sur le monument inscrit: “Aux Enfants qui sont morts de faim des Enfants qui ont faim”. Depuis l’occupation, les gens avaient été capturés en nombre croissant pour le travail forcé. “Les nouvelles des camps de travail devenaient de plus en plus alarmants, alors que les récits de la mort des résidants des camps atteignaient le ghetto. Dans son journal secret, Emmanuel Ringelbaum enregistra une scène déchirante: un jour, des travailleurs forcés juifs retournant au ghetto furent descendus du wagon lorsque leur gardien leur ordonna de chanter. L’un parmi eux, qui était chanteur de profession, se leva sur l’auto et commença à chanter. La rue se remplit de personnes l’écoutant. Il chantait en hébreu une prière du service mémorial, “Dieu, plein de compassion”. Il devenait clair aux personnes dans le ghetto que si la guerre ne finissait pas bientôt, ils mouraient tous de faim. “Le nombre de morts à Varsovie augmentait de jour en jour”, écrivait Emmanuel Ringelbaum en mars 1941. “Dans la maison où je vivais, un père, une mère et son fils moururent tous de faim au cours de la journée. En avril, même les cartes de rations ne permettaient pas d’obtenir du pain et des pommes de terre. Les gens mourraient dans la rue. Des professionnels comme les Zamenhof étaient dans la pire des situations. “Les professionnels”, écrivit Ringelbaum, “sont désespérés dans les rues. A présent, tout ce qu’ils avaient avait été perdu ou vendu ; leurs corps sont gonflés par la faim”. En juillet: Dix maisons sont vides 7 rue Wolynska. Tous les résidents sont décédés. En général, la mort de familles entières au cours d’un ou deux jours est un fait très banal”. “Pourquoi sont-ils tous si tranquilles ? Pourquoi le père meurt, et la mère et chacun des enfants sans un signe de protestation ? Pourquoi n’avons nous pas fait les choses quand nous étions menacés il y a un an ? ... Il y a un grand nombre de réponses possibles...” écrivait-il. “L’un est que les forces d’occupation allemande avaient tellement terrorisés la population juive que les gens étaient effrayés de lever leurs têtes. La peur que des représailles massives soient la réponse à tout débordement des masses affamées avait obligé les éléments les plus sensibles à une passivité destinée à ne pas provoquer quelque commotion que ce soit dans le ghetto”. Les espérantistes continuaient d’envoyer des paquets de nourriture aux Zamenhof, mais tout ce qu’ils envoyaient n’arrivait pas. En juin 1941, Lidia reçut un mot à Hans Jakob à Genève qu’elle avait reçu deux colis de Porto, Portugal, et l’un de Göteborg, Suède. “Je vous remercie du fond du coeur pour vôtre peine”, écrivait-elle. Mais en juillet, elle écrivit aux Isbrückers aux Pays-Bas: “Merci de pardonner mon long silence. J’ai reçu vôtre carte et je suis heureux de vous savoir en bonne santé. Cependant, je ne pouvais recevoir ce que vous vouliez m’envoyer... Je vous souhaite tout le bonheur. Je ne peux rien vous dire de nouveau sur nous. Au sujet d’Adam, il n’y a plus de nouvelles du tout. J’ai reçu il y a longtemps une carte de Ponti (Dick Ponti, aux Pays-Bas) mais je ne pouvais répondre. Merci de lui envoyer mes salutations...”. Sa carte postale ne pouvait dire que très peu de l’extérieur, car elle devait passer la censure. Elle ne pouvait pas dire à ses amis que tous les courriers n’atteignaient pas les occupants du ghetto et que les colis étaient souvent confisqués. Elle ne pouvait pas non plus révéler ce qu’elle pourrait avoir eu à faire en dehors pour leur envoyer une carte postale: on devait soudoyer le postier pour envoyer ou recevoir un courrier, spécialement des colis. Peut-être elle ne pourrait pas se payer le prix qui allait être demandé pour le colis qu’ils avaient essayé d’envoyer. Le nom Zamenhof était venue à nouveau à l’attention des autorités nazis. En février 1941, la rue Zamenhof à Varsovie fut changé en rue Dzika.* *Elle fut à nouveau changée en rue Zamenhof après la guerre. Les amis de Lidia en Amérique ne l’avait pas oublié, mais leurs efforts n’étaient pas suffisants pour la sauver. Les lettres de protestation de l’Assemblée spirituelle nationale n’avaient eu aucun effet. ; en 1941, l’Assemblée spirituelle nationale rapporta que les baha’is américains s’étaient “proposés pour financer le coût du transport de Lidia Zamenhof et de lui garantir son soutien dans ce pays ; mais en dépit des efforts déployés à travers chaque canal officiel disponible, les endroits et la condition de Mademoiselle Zamenhof ne sont pas précisément connus ni il n’a été encore possible de trouver un arrangement pour elle pour voyager en Amérique à travers les autorités en charge de son pays... La surface du ghetto de Varsovie diminuait, pourtant de plus en plus de réfugiés se déversaient. Maintenant un nombre formidable de personnes s’entassaient dans les vieux immeubles du ghetto, et la menace de maladie augmentait. Avec cela arriva une autre menace encore plus terrible. Des rumeurs commençaient à se propager que les Juifs, que les Nazis blâmaient pour la propagation du typhus, allaient être supprimés entièrement du ghetto. “Après la faim, “écrivait Emmanuel Ringelbaum, “le typhus ... était devenu la question brûlante du moment... Les docteurs calculent que des juifs seront malades du typhus en hiver. Par conséquent, des rumeurs persistantes s’étaient propagées sur la possible déménagement des Juifs de Varsovie. Il était dit être considéré comme un moyen possible de supprimer le péril du typhus”. Pour certains, le déménagement dans un camp, quelles que soient les dures conditions là-bas, semblaient infiniment préférables à une autre solution: “L’affaire Pomiechowek, dans laquelle 800 personnes furent exterminées parce qu’ils étaient malades, causa au peuple juif du ghetto de trembler’, écrivit Emmanuel Ringelbaum, “car cela démontrait ce à quoi on pourrait s’attendre à ce qui arrive ici si la tentative d’arrêter la propagation de la maladie à l’intérieur du ghetto échouait”. En novembre, les premières gelées étaient apparues et la population dans le ghetto “était en train de trembler à la perspective d’un hiver froid. La vision la plus effrayante est celle des enfants gelés. De petits enfants pieds nus, aux genoux dénudés, et des vêtements déchirés, se tiennent silencieusement dans la rue, pleurant”. Cet hiver, les Juifs du gouvernement général eurent l’ordre d’abandonner leurs manteaux de fourrure aux Allemands. Bien que le décret fut “un coup de vent sévère pour les gens pauvres, qui parfois n’avaient rien d’autre qu’un vieux manteau en fourrure en guenilles à porter”, certains brûlaient leurs manteaux plutôt que de les donner aux Nazis. Le 12 janvier 1942, Lidia essaya d’envoyer une carte postale aux Isbrückers en Hollande. Elle les remerciait pour une lettre et pour leur souvenir. “Nous pensons souvent à vous et nous aimerions vous voir à nouveau. Sofia et Wanda travaillent en tant que docteurs. Louis, qui aura 17 ans, travaille dans un bureau. Nous sommes content de voir que vous allez bien et nous vous souhaitons ainsi qu’à Monsieur Cseh tout le bien pour 1942...”. Lidia appelait sa soeur et son neveu “Sofio” et “Ludoviko”, la forme espérantiste de leurs noms. C’était quelque chose qu’elle n’avait jamais oser faire auparavant. Dans sa carte, Lidia ne disait rien de quel travail elle était en train de faire - enseigner l’anglais. Tout d’abord, sous l’occupation, les écoles et les classes avaient été réduites. Plus tard avec une permission, certains cours professionnels étaient autorisés. D’autres écoles et d’autres cours existaient secrètement, au lycée où même à un niveau universitaire. Mais enseigner l’anglais était au contraire sanctionné par les Allemands - c’était la langue de l’ennemi. Néanmoins, beaucoup de personnes dans le ghetto étaient désireux d’apprendre l’anglais. Cela leur donnait de l’espoir. ”Chacun est assidu en étudiant l’anglais”, relate Emmanuel Ringelbaum dans son journal, “en vue pour l’immigration après la guerre”. Le printemps 1942 amena la terreur de la déportation. La rumeur atteignit les habitants du ghetto de Varsovie que des Juifs d’autres ghettos en Pologne étaient en train d’être liquidés. Des millions de personnes - tout d’abord les jeunes et les vieux, mais plus tard tout le monde, sans regard de l’âge ou de la capacité à travailler - étaient enfermés dans des trains de marchandises et disaient qu’ils avaient été replacés dans des camps de travail à l’est. Mais à présent, beaucoup savaient que l’on allait pas dans un camp pour travailler, mais pour mourir. “Le replacement à l’Est” était l’euphémisme des Nazis pour la destruction. Certaines personnes, tuméfiés et apathiques par la faim, saluaient la mort, car cela leur apportait la fin de la souffrance. Lorsque les Allemands offraient des rations de pain et de confitures à ceux qui s’offraient pour “le déplacement”, cela entraîna un si grand nombre que certains jours, ils excédaient leurs quotas. En juillet 1942, l’ordre terrible arriva à Varsovie. Tous les Juifs du ghetto de Varsovie allaient être déportés “à l’Est”. Leur destination était un camp appelé Tréblinka. On demanda à Adam Czerniakow, chef du Conseil juif, de fournir un quota de 5000 personnes par jour. Les S.S demandèrent que le quota soit élevé à 7000 personnes, et bientôt à 10000 personnes. Il réalisa finalement que les Nazis avaient l’intention ni plus ni moins que l’extermination de tous les Juifs de Varsovie, et il se suicida. A la place Umschlag ou “la place commerçante”, les gens étaient entassés par millions dans des trains de marchandises, jusqu'à 150 personnes dans un wagon. Lorsque le quota journalier n’était pas rempli, des personnes étaient capturés au hasard dans la rue. Les environs étaient bouclés et tous les habitants emmenés dans les trains. Plusieurs millions furent tués directement durant l’opération: ceux qui n’espérait pas survivre au voyage étaient tout simplement tués. La place Umschlag était un cauchemar. Pourtant, “pour les Juifs croyants, la conviction que leur sacrifice était exigé comme un témoignage du Dieu Tout-Puissant était plus réconfortant que l’hypothèse qu’Il les avait tous abandonné”, écrit Lucie Dawidowicz dans “La guerre contre les Juifs”. La morale était soutenue par les rabbins et les Juifs pieux qui, par leur propre résolution et leurs phases exaltées, fournissaient un modèle de comment les Juifs devaient rencontrer la mort. Sur la place Umschlag en ce mois d’août, un vieux Juif pieux exhorta les masses découragées, noyées dans la misère et la saleté de leur entourage: “Juifs, ne désespérez pas ! Ne réalisez-vous pas que nous allons rencontrer le Messie ?”. En août 1942, les Zamenhof étaient emmenés vers la place Umschlag. En blouse de docteurs, Wanda et sa soeur Janine Minc s’échappèrent avec le fils de Wanda, Louis. Changeant leur nom en Zaleski, la femme d’Adam et son fils furent capable de survivre en dehors du ghetto jusqu'à la fin de la guerre. Mais Sofia ,la soeur de Lidia , alla délibérément dans l’un de ces sinistres trains., rapporta Louis, le fils d’Adam plus tard. Elle était “convaincue”, écrivait-il, “que la population déportée aurait besoin d’aide médicale qu’elle leur fournirait. Lidia la suivit plusieurs mois plus tard”. Le train les emporta à 120 kilomètres de Varsovie à Tréblinka. En avril 1943, la liquidation physique du ghetto de Varsovie commença, mais les Nazis rencontrèrent une résistance armée d’une courageuse bande de jeunes hommes et de jeunes femmes juifs. Bien qu’ils étaient grandement dépassés en nombre, les combattants du ghetto de Varsovie tinrent tête aux troupes S.S bien équipées durant avril et mai parmi les pierres. Finalement, ils furent vaincus, mais des résidus éparpillés de l’organisation combattante persista, dans les tunnels et les égouts du ghetto jusqu'à la fin de la guerre. L’un des derniers tués parmi les ruines était l’historien Emmanuel Ringelbaum avec sa femme et son fils âgé de 12 ans. Près du hameau de Tréblinka, il y avait un petit camp de travailleurs forcés avec des occupants polonais pour la plupart, mais à l’été 1942, un nouveau et un différent sorte de camp avait été construit à quelques kilomètres d’une forêt et de collines sablonneuses. Ce n’était pas un camp de concentration où des occupants survivaient en tant que travailleurs forcés, mais un camp d’extermination où tous allaient à la mort. Le camp de la mort de Tréblinka couvrait seulement 50 acres et était entouré de barrières antitanks et de fils de fer barbelés, avec des miradors de chaque côté. Dans le camp inférieur se trouvaient le carré pour l’appel et les quartiers de vie pour les S.S et les gardes ukrainiens et les “Juifs travailleurs” qui triaient les biens capturés des victimes. A la fin du côté nord-est du camp inférieur était une enceinte de fils de fer barbelés. Elle contenait un immeuble en maçonnerie gris blanc avec tout d’abord 10 chambres hermétiques, reliés à une pièce où une machine diesel générait des vapeurs mortelles de monoxyde de carbone. Le gaz était conduit dans les chambres à travers de faux tuyaux de douches. Au-delà des chambres à gaz se trouvait les fosses communes, où les corps des morts étaient dans un premier temps détruits par de la chaux, plus tard brûlés sur de grands tiroirs en fer. Lorsque les Nazis se préoccupèrent que la masse des tombes puisse être découvertes, les corps qui avaient été enterrés durant les premiers jours de l’opération des camps furent exhumés et brûlés. Dans la campagne autour de Tréblinka en cet été, les villageois voyaient les transports remplis arrivés de Varsovie. L’un de ceux qui pris des notes spéciales était Franciszek Zabecki, le superintendant de la circulation de la station de chemin de fer de Tréblinka. Il observa toute l’opération du camp de la mort et donna des rapports à l’armée polonaise domiciliée, à laquelle il appartenait. Lorsque les trains approchaient de la gare, il voyait que les gardes lithuaniens assis sur les toits des trains de marchandises portaient des armes. “Ils regardaient comme si ils allaient tués ; comme si ils avaient eu leurs mains en sang et alors ils les lavaient avant d’arriver”, dit-il plus tard à Gitta Sereny, auteur de “Dans cette obscurité”. “Le train était plein - incroyablement plein semblait-il. C’était une journée chaude mais, à nôtre étonnement, la différence de température entre l’intérieur des trains et l’extérieur était manifestement telle qu’une sorte de brouillard apparaissait et entourait le train...”. Certains paysans polonais du village - et même certains cheminots allemands - prenant en pitié les Juifs qui hurlaient vers eux, amenèrent de l’eau aux trains, “jusqu'à”, se rappelle Monsieur Zabecki, “que les Allemands commencent à les mettre à l’écart...”. Bientôt la pitié tourna en “peur cinglante” que quiconque qui voyait ce qui se passait à Tréblinka serait tué. Les forêts de pins agréables et tranquilles avaient été transformés en une place d’horreur. Le relent de la mort et la fumée des feux incessants du camp s’étendait au-delà de la région. Les “nuages brumeux et sombres qui nous surplombait, recouvrait le ciel en ce été chaud et beau, même durant les jours les plus lumineux”, se rappelle Monsieur Zabecki, créa “une obscurité presque sulfurique amenant avec elle cette odeur pestilentielle”. Le bruit martelant constant des mécaniques qui creusaient les fosses communes réverbérait à travers la campagne à des kilomètres, jour et nuit. Les fuyards s’orientaient eux-mêmes dans les bois dans la nuit par son bruit régulier et infernal. Lorsque les trains arrivèrent au camp, les gens étaient brutalement sortis des trains. Les hommes et des femmes étaient séparés et envoyés aux baraquements sans vêtements. Là, ils étaient obligés de se déshabiller, même de leurs membres artificiels et de leurs lunettes, et sommés de poser les objets de valeur à la fenêtre. Les femmes et les filles avaient leurs têtes tondues ; leurs cheveux étaient embarquées vers une usine en Allemagne pour être utilisés dans la tapisserie Puis, fouettés sans ménagement par les gardes ukrainiens, les personnes étaient obligés de courir à travers un étroit couloir d’une centaine de mètres, avec des hautes clôtures de fils de fers barbelés de chaque coté. A la fin du couloir, que les gardes S.S appelaient de manière facétieuse la rue (himmel, la “route du Paradis”, les personnes, poussés par ceux de derrière, escaladaient de petits escaliers en bois pour entrer dans l’immeuble gris blanc. A l’intérieur, les chambres ressemblaient à des douches, avec des tuiles blanches à mi-hauteur des murs, un sol glissant. Mais il n’y avait aucune eau, et les entrées étaient bizarrement rapprochées, afin que les gens puissent seulement passer un par un. Sous le fouet d’un garde S.S, ils étaient entassés dans les chambres, des centaines e personnes se pressaient ensemble à l’étroit. Les portes se fermèrent. Franciszek Zabecki comptait les transports qui arrivaient dans sa gare, d’abord de Varsovie, puis d’autres villes polonaises et de neuf autres pays. Par ses calculs, 1200000 Juifs moururent à Tréblinka. Bien qu’en 1943, les S.S démolirent le camp et essayèrent d’effacer les traces de ce qui avait été perpétrées là-bas, cela ne sera jamais oublié. Parmi les cendres dans le sol à Tréblinka, il y a ceux de Lidia Zamenhof. ================================ Epilogue: “En dehors de l’abîme” Le 14 avril avait toujours été un jour solennel pour les espérantistes lorsqu’ils se réunissaient au cimetière juif rue Okopowa à Varsovie pour marquer l’anniversaire de la mort de Louis Zamenhof. En 1946, ce jour arriva avec une tristesse ineffable. Miraculeusement, le cimetière juif n’avait pas été détruit durant la guerre. Comme un symbole, le monument de granit superficiel de la tombe de Zamenhof tenait encore debout ; il avait échappé aux bombes incendiaires et à la liquidation du ghetto. Le reste du quartier juif était une vaste et silencieuse étendue de décombres. Comme souvent, lors d’autres anniversaires à cette date, les espérantistes s’étaient lamentés de la mort prématuré du Maître. A présent, ils l’appelait une bénédiction qu’il n’ait pas vécu après la Grande Guerre pour voir une autre guerre mondiale même plus dévastatrice dans ses effets, pour voir les profondeurs de sauvagerie à laquelle les haines entre les races pouvaient aiguillonner les êtres humains, pour voir le meurtre brutal de ses propres enfants. Aurait-il vécu, réalisèrent-ils, qu’il serait lui-même mort dans une chambre à gaz nazi. Cette année, ils étaient beaucoup plus à pleurer. Tant que l’oratoire de Leo belmont résonnait dans l’air d’avril, assurant à la réunion solennelle des amis que le don de Louis Zamenhof triompherait ; Leo Belmont était mort en 1941. Des millions d’espérantistes Juifs avaient été assassinés en Allemagne et les pays occupés ; beaucoup d’autres espérantistes non juifs étaient tombé au combat ou avaient été tué en tant que subversifs. Emile et le fils de Marie Borel avaient été arrêtés par la Gestapo en tant que résistant et ils moururent en 1944 durant le transport au camp de concentration de Dachau. Dans les années d’après guerre, le mouvement espérantiste se réunifia, les deux organisations éloignées, U .E.A et I.E.L, fusionnant sous le nom de l’Association universelle d’espéranto, qui en 1954 accomplit un statut consultatif avec l’UNESCO. Le problème de la langue continua à tourmenter les nouvelles Nations Unies, qui se trouvait elle-même chargée de grandes dépenses pour la traduction et une liste croissante de fonctionnaires et de langues de travail. Pourtant les efforts pour encourager les Nations Unies à considérer l’affaire de la langue auxiliaire internationale, ou de la persuader de la valeur de l’espéranto, rencontra un sort similaire aux premiers efforts à la Ligue des nations. Une déclaration portant presque un millions de signatures, présenté par U.E.A à l’UNESCO, résultant d’une résolution reconnaissants les idéaux communs de l’espéranto et de l’UNESCO, mais une seconde proposition soumise aux Nations Unies au milieu des années 1960, avec des signatures de presque un million d’individus de 74 pays aussi bien que de 4000 organisations représentant presque 73 millions de membres, ne se déplaça jamais au-delà du secrétariat. Le centre du mouvement espérantiste restait en Europe, mais le mouvement continua à être toléré dans des pays avec des orientations politiques différentes. Aux Etats-Unis, cependant, durant l’époque de la “guerre froide”, le secrétaire de l’association espérantiste de l’Amérique du Nord examina la propagation de l’espéranto dans des pays communistes avec peur et commença une campagne d’attaques contre U.E.A et la Ligue espérantiste pour l’Amérique du Nord, qui avait été formée de membres de la Ligue espérantiste de l’Amérique du Nord déçus de leurs dirigeants. Au moment où la Ligue espérantiste de l’Amérique du Nord allait être exclue d’U.E.A en 1956, elle démissionna de sa qualité de membre. Elle avait été alors supplantée en tant qu’organisation officielle espérantiste par la Ligue espérantiste de l’Amérique du Nord, qui était affiliée avec U.E.A. Partout dans le monde, le nombre significatif de membres du mouvement espérantiste au japon et un récent regain d’intérêt dans la langue en Chine - avec la programmation du 71ème congrès universel d’espéranto à Shanghaï en 1986 - contient l’intérêt et la promesse pour l’avenir. De manière incroyable, le monde qui émergeait des décombres de la Seconde Guerre mondiale n’avait pas encore appris ses mortelles leçons. Beaucoup de murs étaient tombés, mais les murs entre les peuples divisés étaient encore puissants. Et avec la fin de la guerre vint une nouvelle terreur: la guerre nucléaire. Même lorsque l’humanité encore debout “secoué dans son âme”, avant l’étendue de la catastrophe, “remarqua Heroldo dans ses premières éditions après la guerre, le 14 avril 1946, “une même calamité encore plus vaste... menace si les moyens et les significations ne sont pas trouvés pour sauver nôtre culture de la complète destruction dans une troisième guerre mondiale... L’invention de la bombe atomique se trouve au-dessus de nôtre planète comme un affreux avertissement...”, Dix années plus tôt, Lidia avait écrit du terrible “Concert” que le musicien Mort offrait à l’humanité après son “Prélude” de la Première Guerre mondiale. L’humanité était restée pour le Concert, et avait payé un fort prix. Maintenant, ce même spectre nous offre une autre représentation - un vrai “final”. Parce que Lidia, Adam et Sofia Zamenhof avaient disparus sans une trace, certains espéraient encore, contre toute logique, qu’ils puissent avoir survécu et qu’ils puissent retourner un jour avec les prisonniers étourdis et effrayés qui seraient libérés des camps de concentration par les troupes alliée . L’espoir pour Lidia fut allumé lorsque, au début de 1946, la radio tchécoslovaque annonçait plusieurs fois qu’elle était encore en vie “quelque part en Russie”. Mais finalement une modeste plaque fut mise en place sur la tombe de Klara Zamenhof avec les noms de Lidia et de Sofia. Elle disait: “Assassinées en 1942. Puisse la mémoire d’eux durer à jamais”. Wanda Zamenhof ne perdit jamais espoir pour son mari Adam. Elle mourut dans un accident de voiture à Varsovie en 1954. Louis devint ingénieur et vécu en France. Aujourd’hui, il n’y a aucun Zamenhof en France. D’autres baha’is avaient partagés le sort de Lidia. Ces Allemands et ces Autrichiens que les Nazis avaient étiqueté comme Juifs, comprenant la plupart des baha’is de Vienne, furent déportés dans les camp de la mort pour ne jamais être revus. De la petite communauté de baha’is en Pologne, aucun ne semble avoir survécu. Après que l’Est de la Pologne fut envahie par l’Union soviètique tout de suite après la guerre, la communication fut coupée et aucune rumeur ne fut à nouveau jamais entendue du baha’i ukrainien souffrants, Vasyl Doroshenko. Rien n’est connu du sort de Bianka Haas ; Bielsko vit de brutaux “pogroms éclairs” dans les premiers jours de l’occupation nazi. Les traductions de Lidia en espéranto et en Polonais, à laquelle elle avait donné tant d’efforts et tant d’amour, continuaient de travailler, longtemps après la mort de leur traductrice. Avant le déclenchement de la guerre, elle avait envoyé certains de ses manuscrits, comprenant sa traduction polonaise de “Baha’u’llah et l’Ere nouvelle” à Genève. Sur les instructions de Shoghi Effendi, Madame Lynch fit un appel pour des fonds aux baha’is américains pour les publier, mais l’argent collecté n’était pas suffisant. Néanmoins, du temps de la direction de Shoghi Effendi, des arrangements furent faits avec un imprimeur en France, juste de l’autre côté de la frontière de Genève. Le déclenchement de la guerre fit des ravages avec le taux de change, et lorsque les fonds qui avaient été collectés furent convertis en francs français, ils couvraient largement le coût d’impression. Le neveu polonais né de Madame Lynch était dans un camp d’internement avec son unité d’armée polonaise près de Berne. A la demande de Madame Lynch, les autorités militaires suisses lui permirent de faire la correction et l’indexation du livre. Des parties du manuscrit et des preuves firent leur chemin entre Genève, le camp d’internement et l’imprimeur en France, jusqu'à ce qu’à l’hiver 1940, des millions de copies du livre imprimé furent délivrées au Bureau international baha’i. Madame Lynch distribua des copies aux 73 camps d’internement polonais en Suisse. “Des lettres touchantes de gratitude furent reçues”, écrivait-elle,” mais aussi quelques lettres de critique hostile d’aumôniers de l’armée polonaise”. Après la guerre, Madame Lynch polycopia les traductions de Lidia en espéranto de “Le but d’un nouvel Ordre mondial” et “l’Avènement de la justice divine” de Shoghi Effendi, aussi bien que 20 chapitres de “Les Leçons de Saint Jean d’Acre”, et elle commença à les utiliser “comme des moyens à venir d’enseignement pour des pays où aucune littérature baha’ie n’existait, principalement ceux de l’Europe de l’Est”. En septembre 1947, le bulletin du bureau international baha’i rapporta “un intérêt vivant dans les Enseignements baha’is se développe en Pologne. Chaque semaine, nous recevons de nouvelles demandes de littérature baha’ie”, et en novembre, “les nouvelles baha’ies” rapportent: “Il y a 9 personnes en Pologne qui étudient la foi baha’ie à travers la correspondance ; mais juste un utilise l’espéranto. L’un de ceux est celui qui offrit de cacher Lidia Zamenhof chez lui...” - Joseph Arszenik. En octobre 1950, il y avaient des baha’is dans 7 villes de Pologne, mais la communication avec eux n’était “pas possible longtemps” Madame Lynch écrivait que “Presque tous les baha’is de Pologne étaient attirés et confirmés dans la foi à travers les moyens de ces efforts d’enseignements en espéranto”. Lidai Zamenhof avait seulement 38 ans lorsqu’elle mourut. Sa mort avait stupéfait ses amis, même ceux en Europe qui avaient vu beaucoup de morts. “Oh, nôtre pauvre et chère Lidia !”, écrivit le Père Cseh à Roan Orloff. “Selon les informations reçues, elle a eu une terrible mort. Comment Dieu ne punit-il jamais les coupables ? Leurs crimes excèdent vraiment jusqu'à présent la dimension connue”. Martha Root n’avait pas survécu pour apprendre la mort de sa “fille spirituelle”. Elle mourut d’un caner à Honolulu le 28 septembre 1939. L’Assemblée spirituelle nationale des Etats-Unis et du Canada écrivirent à Shoghi Effendi suggérant qu’un hommage mémorial international soit tenu en l’honneur de Lidia. Shoghi Effendi câbla en retour: “prouve chaleureusement l’observance internationale pour l’intrépide Lidia Zamenhof, ses services remarquables, sa ténacité, sa modestie, et sa dévotion constante mérite un haut tribut des croyants américains”. Les commémorations se tinrent la semaine du 25 octobre 1946. L’Assemblée nationale avait demandé au Gardien si Lidia devrait être considérée comme un martyr baha’i, comme les millions d’Iraniens baha’is tués par les Musulmans pour leurs foi. Shoghi Effendi répondit, “Vous déconseille... que vous la désignez comme une martyre”. Ceux qui tuèrent Lidia ne savaient pas qu’elle était baha’ie. Ils l’avait tué à cause de sa “race”. Mais Lidia Zamenhof était morte, comme elle avait vecu, pour ce qu’elle croyait. Elle aurait pu éviter de retourner en Pologne, mais elle était partie parce qu’elle sentait que c’était son devoir. Elle aurait pu permettre à d’autres de la cacher, mais elle avait refusé de leur permettre de se mettre en danger eux-mêmes. En avril 1946 de la part de Shoghi Effendi, sa femme Amatu’l Baha Ruhiyyih Khanum (servant comme sa secrétaire) écrivit à Roan Orloff lui demandant d’écrire une note nécrologique “sur nôtre chère soeur baha’ie” pour le volume 10 du “Baha’i World”. “Elle mérite certainement qu’on se rappelle d’elle pour ses services à la Foi et sa loyauté et pour sa dévotion !”, écrivit Ruhiyyih Khanum. “Sa mort est une grande perte, car elle était capable aussi bien de servir et d’enseigner dans différentes langues et dans divers pays. Il semble si terrible de contempler quel a pu être sa fin”. Des mots de Shoghi Effendi: “Ses services remarquables, sa ténacité, sa modestie et son dévouement sans trembler...” résument bien les qualités qui distinguaient la vie de Lidia Zamenhof. Dans une lettre aux baha’is d’Iran en 1923, le gardien écrivit: ”Combien souvent le bien-aimé Maître disait: Puisse chacun des amis prendre la responsabilité de prendre en charge, dans toute ses implications et dans toute son intégrité, seulement l’un des enseignements de la foi, avec dévotion, avec détachement, avec constance et avec persévérance et l’appliquer dans tous ses actes et ses buts dans la vie, le monde deviendra un autre monde et la face de la terre reflétera au loin les splendeurs du Paradis d’Abha”. Il aurait pu être question de Lidia Zamenhof. Lidia avait toujours cherché la signification caché de l’ordinaire, la signification de ce qui semblait sans sens - la bénédiction qui était dissimulée en tragédie, la leçon de consolidation dans l’épreuve, la providence dans la calamité. Elle croyait que la mort n’était pas réellement une fin, mais un commencement ; ainsi, le but de la vie était , de nature, de se préparer pour ce moment. Elle croyait que cela importait peu de quelle épreuve on faisait face ; il importait seulement de voir comment on faisait face au test. Le combat était tout. Comme la langue à laquelle elle dédia sa vie, le message de sa vie était un message d’espoir, d’espoir et de foi - qu’une seule personne peut faire la différence ; qu’à travers les efforts tranquilles de beaucoup donnant leur “widow’s mite) pour la cause de la paix, les peuples de la terre viendront ensemble dans la fraternité et parleront les uns les autres dans une langue universelle. Aucune importance quelles terreurs et quelle destruction l’avenir immédiat pourrait avoir, “le futur, l’avenir qui n’est pas si éloigné verra le triomphe du Verbe de Dieu, la gloire du jour de Dieu... Soyons heureux et confiants ”, avait-elle it, ”ue derrière les nuages les plus denses , le soleil brille, que la Plus Grande Paix viendra”. La Foi, avait-elle appris, pourrait être seulement un fil de la vierge, mais il pourrait triompher sur toutes les forces obscures. Ainsi, comme la minuscule araignée au seuil du tombeau, “qui peut encore trouver en son coeur un simple rayon de foi, aussi délicat et minuscule qu’une toile d’araignée, ne périra pas dans l’abîme mais même si tous les pouvoirs de ce monde se lèvent pour combattre contre lui pour le chasser, même dans la chute, il s’arrêtera, et par rayon, comme par l’échelle biblique, même en dehors de l’abîme, il atteindra le paradis”.