La communauté mondiale baha'ie et son action
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8. Education

8.1. Introduction

Étant donné que l'humanité est jugée capable de progrès et de perfectionnement considérables, l'éducation a une place particulière. "Considère l'homme comme une mine riche en joyaux d'une valeur inestimable" a écrit Baha'u'llah. "Seule l'éducation peut révéler ses trésors enfouis et permettre à l'humanité d'en bénéficier." L'éducation devrait donc être universelle et intégrer des valeurs spirituelles et de vraies attitudes morales. Baha'u'llah a la vision d'un avenir dans lequel "l'éducation de base" elle-même signifie plus que l'apprentissage mécanique et l'enseignement de compétences simples. Il faut donner aux étudiants des moyens adéquats pour analyser la situation sociale, participer à la planification et à l'action communautaire et chercher la vérité par soi-même. Dans l'enseignement baha'i, l'unité de l'humanité est un aspect essentiel de chaque programme.

(Les Baha'is, p. 29)


8.2. Point de vue baha'i

8.2.1. LA CITOYENNETÉ MONDIALE


La citoyenneté mondiale - formelle, non-formelle et informelle - est indéniablement le moyen le plus efficace de modeler les valeurs, les attitudes, les comportements et les connaissances qui équiperont les peuples du monde dans leurs actions pour l'intérêt à long terme de la planète et de l'humanité dans son ensemble. Les Nations unies, les gouvernements et les institutions éducatives devraient chercher à inclure le principe de la citoyenneté mondiale dans l'éducation de base de chaque enfant.

Les détails des activités et des programmes d'éducation incorporant ce principe varieront beaucoup dans chaque nation et d'une nation à l'autre. Cependant, afin que la citoyenneté mondiale soit comprise comme étant un principe universel, tous les programmes devront avoir certains aspects communs. Basés sur le principe de l'unité de la race humaine, ils devraient cultiver la tolérance et la fraternité, en valorisant la richesse et l'importance des divers systèmes culturels, religieux et sociaux du monde et en renforçant les traditions qui contribuent à une civilisation mondiale durable. Ils devraient enseigner que le principe de "l'unité dans la diversité" est la clé de la force et de la richesse aussi bien des nations que de la communauté mondiale. Ils devraient encourager une éthique de service pour le bien commun et faire comprendre les droits ainsi que les responsabilités qu'entraîne la citoyenneté mondiale. Ces programmes et activités devraient s'appuyer sur les efforts positifs du pays et mettre en valeur ses succès tangibles dans le domaine de la création de modèles d'unité raciale, religieuse, nationale et ethnique.

(Citoyenneté mondiale, pp.3-4)


8.2.2. ENTRE PROGRÈS SOCIAL ET MORALE INDIVIDUELLE

Les enseignements de Baha'u'llah sur une morale individuelle partent du principe qu'il n'existe qu'un seul Dieu. Même si les enseignements religieux se modifient selon les besoins et sont adaptés à l'époque où ils sont révélés, certains enseignements de base d'ordre moral sont communs à toutes les religions. Les baha'is, convaincus que le bien-être et le bonheur de l'espèce humaine dépendent du respect de ces lois fondamentales, ne modifient rien sur ce point.

Le code moral des dix commandements qui condamne le meurtre, l'adultère, le vol, le mensonge, la convoitise et le manque de respect à l'égard des parents, se trouve dans toutes les religions; de même, les commandements qui définissent la relation individuelle avec Dieu reviennent constamment dans les révélations divines successives.

Baha'u'llah a réaffirmé ces lois et les a expliquées. Il a non seulement condamné le meurtre et le mensonge mais il a aussi particulièrement réprouvé la médisance, les jeux de hasard, la violence et la violation du domicile. La consommation d'alcool et de drogues - sauf prescription médicale - est interdite.

Baha'u'llah loue l'honnêteté et la loyauté.

"La loyauté est la voie royale pour la tranquillité et la sécurité des peuples, en vérité, la stabilité de toute affaire dépend et dépendra effectivement d'elle."

Bien que le contexte moral sans cesse changeant ait entraîné nos contemporains à rejeter ou modifier certains éléments du code moral traditionnel légué par Dieu, les baha'is pensent qu'une étude objective de la situation actuelle débouche immanquablement sur la conclusion que la société souffrira si la morale n'est pas renforcée. La corruption généralisée, tant dans les affaires qu'au sein des gouvernements, l'épidémie des maladies sexuellement transmissibles et la dissolution des familles fournissent des exemples concrets de la nécessité de revenir à un code de conduite individuel élevé.

(Les Baha'is, p. 31)


8.2.3. EDUCATION ET APPRENTISSAGE

Éducation et apprentissage sont les ingrédients de base du succès économique d'une entreprise. Le potentiel humain, infini et varié, ne peut se concrétiser qu'au moyen d'une éducation libérale, universelle et dynamique. Aucune nation ne peut réussir si tous ses citoyens ne sont pas éduqués.

Un penseur économique a décrit la connaissance et le savoir comme le "vrai capital" et "la principale ressource à créer des ressources". Les écrits baha'is comparent le développement des ressources humaines au travail dans une mine de pierres précieuses :

"Considérez l'homme comme une mine riche en gemmes de valeur inestimable. Seule l'éducation pourra en révéler les trésors et en faire profiter l'humanité."

La définition de l'éducation doit être élargie jusqu'à inclure le développement des valeurs morales, une attitude au travail et un esprit de service très différents de ce que nous connaissons aujourd'hui.

(Valeurs nouvelles pour une économie mondiale, p.10)


8.3. Actions baha'ies

8.3.1. UN SIÈCLE D'EFFORT


Depuis longtemps, l'éducation est une des priorités de l'activité baha'ie. Conformément aux priorités indiquées dans les écrits du fondateur de la Foi, les baha'is se sont intéressés tout spécialement à ceux et celles laissés de côté par les institutions scolaires traditionnelles, telles que les femmes et les personnes qui vivent dans des zones rurales.

A travers le monde, les baha'is ont fondé plus de 600 écoles et centres pédagogiques. La majorité de ces établissements se trouvent dans les pays en voie de développement et un fort pourcentage des élèves sont des femmes.

L'attention portée à l'enseignement par les baha'is va plus loin que combler les lacunes d'autres centres ou promouvoir une idéologie ou un programme spécial.

Les baha'is voient l'enseignement comme un levier pour le développement du potentiel humain tant sur le plan de l'individu que sur celui de la société. Ils sont convaincus que l'unification rapide de l'humanité ouvre la voie à de profonds changements dans le comportement des hommes, et ils conseillent de repenser la théorie et la pratique de l'éducation. L'accent, dans l'éducation, est mis sur l'individu tout entier, sur ses rapports avec la communauté et la société et sur la nécessité d'une formation morale, éthique et spirituelle pour créer une société juste et en paix.

"Considère les hommes comme des mines riches en joyaux d'une valeur inestimable", écrivait Baha'u'llah, le fondateur de la Foi. "Seule l'éducation peut en révéler les trésors et permettre à l'humanité d'en profiter."

Dans les années qui ont suivi 1880, les communautés baha'ies d'Iran ont mis au point des programmes scolaires et dans les cinquante années suivantes, ils ont construit plus de 40 écoles pour filles et garçons, écoles qui furent les premiers établissements d'enseignement modernes de ce pays. Dans les années 1950-1955 ces communautés sont parvenues à s'alphabétiser presque complètement grâce à une campagne qui mettait l'accent sur l'éducation des femmes et des populations des régions rurales.

A l'heure actuelle, l'attention portée à l'éducation des jeunes filles et des personnes vivant en milieu rural ou dans d'autres régions défavorisées continue à caractériser l'effort d'éducation. L'accent est mis aussi sur l'organisation communautaire et la participation de la base à la construction et au fonctionnement des établissements d'enseignement.

Un autre trait spécifique de l'éducation baha'ie sous-tend ces efforts : une formation morale et spirituelle qui engendre un sentiment de citoyenneté mondiale et qui aide les hommes et les femmes à comprendre leurs rôles respectifs dans la fondation d'une civilisation universelle.

La consultation-méthode spécifique pour résoudre les problèmes de groupes sans créer de conflit-est la méthode préférée pour la prise de décision et la gestion des activités. Un grand nombre d'écoles et de centres pédagogiques forment leurs élèves à la consultation, afin d'aider à les préparer à une société mondiale dans laquelle le changement est rapide et souvent menaçant.

Les écoles baha'ies ont pour but de développer chez leurs élèves la capacité d'analyser les conditions sociales et de découvrir les forces qui les sous-tendent, de prendre part à la planification et aux actions de la communauté, et de rechercher eux-mêmes la vérité.

A ces programmes s'ajoute également une formation pratique pour l'action sociale, telle que l'hygiène individuelle et collective, l'agriculture et la production des aliments, et les questions forestières et d'environnement, selon les besoins locaux.

(One Country n°2, pp.4-5)


8.3.2. RÉSEAU DE SOINS DE SANTÉ PRIMAIRE EN AFRIQUE


Au Tchad, les baha'is ont établi un réseau de premiers soins de santé qui touche certains des villages les plus reculés de ce pays. Basé à Sarh, le réseau se compose d'autochtones formés aux techniques élémentaires des premiers soins de santé: comment vacciner, donner les soins de première urgence, soigner les diarrhées infantiles mortelles et que faire en cas de poussée de paludisme.

Le projet s'appuie sur l'effectif relativement important de baha'is de la région; par l'intermédiaire de leurs conseils administratifs baha'is locaux appelés : Assemblées spirituelles locales, ils constituent le réseau de communications nécessaire pour mener à bien le projet. Les agents sanitaires de villages baha'is travaillent eux-mêmes à titre bénévole après avoir été sélectionnés par leur communauté locale.

Ils ont appris non seulement à donner les premiers soins, mais aussi que servir les autres est une forme de prière.

(Les Baha'is, pp. 68-69)


8.3.3. CRÉATION D'UNE ÉCOLE MATERNELLE DANS LES ANDES BOLIVIENNES

Primo Pasci, au centre, avec sa classe d'enseignement préscolaire, dans le village de Laku Lakuni, au sommet des andes bolivienne.

Primo Pacsi vit dans les Andes boliviennes où il cultive des pommes de terre à flanc de coteau, sur une terre qui appartient à sa famille depuis des générations. De la tribu des Aymaras, M. Pacsi n'a pour tout diplôme qu'un brevet d'études, ce qui ne l'a pas empêché de contribuer à l'ouverture d'une école maternelle, sérieux coup de pouce pour les enfants du village pendant les années les plus importantes de leur développement. Il s'est également lancé dans l'installation d'un type nouveau de serre solaire bon marché, ce qui lui a permis, ainsi qu'à ses voisins, de produire diverses variétés de fruits et légumes, chose qui était impossible dans le passé.

Ses efforts et ceux des autres baha'is de Laku Lakuni, village éloigné des Andes, pour ouvrir une petite école maternelle et développer l'utilisation de serres solaires, montre comment les baha'is s'efforcent de servir l'ensemble de la communauté.

L'école maternelle, ouverte à tous les enfants de Laku Lakuni, leur est une aide précieuse. S'il est vrai que le village compte déjà une école primaire publique, les enfants de cette région de haute altitude, pauvre et éloignée, sont souvent négligés pendant ces années préscolaires, considérées pourtant comme primordiales par nombre de spécialistes des sciences de l'éducation. D'où, parfois, des résultats médiocres en primaire qui les font entrer dans un cycle d'échec qui risque de les défavoriser par la suite.

L'école maternelle baha'ie met l'accent sur les activités de groupe - tout simplement le chant, par exemple - et le résultat est significatif. "On constate une différence entre les élèves qui ont fréquenté l'école maternelle et ceux qui entrent directement à l'école primaire publique dit M. Pacsi. Ceux qui ont fréquenté l'école maternelle peuvent comprendre immédiatement l'instituteur. Et celui-ci a remarqué qu'ils apprenaient beaucoup plus vite."

L'école maternelle ne coûte pas cher. M. Pacsi, principal enseignant, occasionnellement soutenu par des dons de parents, travaille bénévolement la plupart du temps. Tenus dans un simple bâtiment en brique, les cours ne durent que quelques heures par jour.

"Au début, les enfants avaient peur de s'y rendre, dit M. Pacsi, qui a adopté la Foi baha'ie au milieu des années 80, ils ne voulaient pas rester en groupe. Aujourd'hui, ils adorent venir et chanter ensemble.

Maintenant, il disent "moi, moi, moi" quand je leur apprends un nombre et pose une question. Tout cela est lié aux enseignements de Baha'u'llah qui nous enjoint d'élever nos enfants et de coopérer."

(Les Baha'is, pp. 9, 12-13)


8.3.4. EDUCATION PRÉSCOLAIRE -HLATIKULU

Des élèves de l'établissement préscolaire baha'i de Piggs Peak (Swaziland) récitent la prière du matin.

Swaziland-Sallinah Makhanye enseignante désigne un gros arbre dressé dans l'enceinte de l'école maternelle de Hlatikulu. Une vingtaine de jeunes élèves forment un cercle autour d'elle et l'écoutent.

"Mes amis," dit-elle en levant vers le ciel ses bras écartés, "cet arbre a de gros membres. Ils ressemblent tous à des bras. Comment les appelle-t-on?"

"Des branches," répondent plusieurs enfants.

Elle désigne ensuite le tronc. "Comment s'appelle cette partie de l'arbre?" demanda-t-elle.

"Le tronc," répond un enfant précoce.

"Bien," dit Mme Makhanye, maîtresse principale de l'école. "Appelons-le le tronc."

"Le tronc," répètent les élèves en écho.

"Et quand mange un arbre?" demande Mme Makhanye.

"Quand l'eau descend," dit un petit garçon.

"Oui," répond-elle. "Quand l'eau descend."

Le plan de la leçon est simple mais les enfants la retiendront pour toute leur vie.

"Les troisième, quatrième et cinquième années sont parmi les plus formatrices et les plus importantes pour le développement d'un enfant," dit Mme Ben Dlamini, responsable de l'orientation pédagogique au Ministère de l'éducation du Swaziland. "L'enseignement préscolaire a donc une importance capitale dans l'éducation d'un enfant."

Malheureusement, les gouvernements n'ont pas toujours les moyens de concevoir et d'appliquer un programme complet d'éducation préscolaire. De ce fait, ce rôle est souvent dévolu à des Organisations non-gouvernementales.

Dans ce minuscule royaume d'Afrique australe, la communauté baha'ie a été à cet égard particulièrement efficace. En utilisant les compétences d'éducateurs bien formés issus de ses propres rangs, en faisant appel à des volontaires dévoués et en s'appuyant sur ses propres règles en matière de coopération et de collaboration, la communauté baha'ie a, au cours de ces dix dernières années, confirmé son rôle dans l'éducation préscolaire au Swaziland. A ce jour, elle a :

* créé trois écoles préscolaires urbaines et conçu trois programmes d'éducation préscolaire destinés à des écoles de village qui, ensemble, desservent quatre grandes régions ;

* contribué à la conception d'un programme national de formation en cours d'emploi destiné aux maîtres de l'éducation préscolaire que la communauté continue à gérer et à utiliser en collaboration avec le Ministère de l'éducation ;

* travaillé avec le Ministère de l'éducation pour élaborer au niveau national un manuel sur le contenu de l'éducation préscolaire répondant plus étroitement aux besoins du Swaziland et de sa population.

a) La question du partenariat

Le point sans doute le plus intéressant, c'est qu'à travers l'expérience de la communauté baha'ie, qui compte dans ce pays 7 500 membres, on mesure l'importance du partenariat pour les projets ou programmes d'éducation.

"En tant qu'ONG, nous offrons les infrastructures, c'est-à-dire que les centres baha'is servent d'écoles," dit Mme Irma Allen, membre de la Commission nationale pour l'éducation des enfants de la communauté baha'ie du Swaziland. "Nous fournissons également du personnel qualifié et nous nous occupons de la coordination." La communauté baha'ie, a ajouté M. Simelane, a joué un rôle particulièrement actif dans l'éducation préscolaire.

b) Une société en mutation

La communauté baha'ie a commencé à s'occuper de l'éducation préscolaire il y a environ dix ans pour répondre au changement rapide de la société swazi et à l'émergence d'un besoin précis. Si l'éducation préscolaire est importante, c'est aussi parce que le Swaziland veut être compétitif dans un monde de plus en plus interdépendant.

c) Centres déjà existants

La communauté baha'ie a pris conscience du fait que trois centres baha'is déjà en place dans les grandes villes du Swaziland pouvaient faire double emploi.

Aujourd'hui, les écoles établies dans les centres baha'is de Mbabane, Piggs Peak et Hlatikulu accueillent une soixantaine d'élèves dans chaque localité. Trois écoles maternelles de villages fonctionnent également grâce à l'appui des communautés baha'ies locales, à Motjane, Mnicini et Mphetseni et accueillent elles aussi 60 élèves supplémentaires. Chaque école est autonome et financée par des frais de cours minimes. Ces centres sont également utilisés pour le programme national de formation en cours d'emploi des maîtres de l'éducation préscolaire qui est coordonné par la communauté baha'ie. Le financement et l'envoi d'experts de la Fondation Bernard Van Leer, assurés par l'intermédiaire du gouvernement, contribuent également au succès de ce programme.

d) Un programme de formation unique

Le programme, qui est conduit en coopération étroite avec le programme gouvernemental d'inspection des établissements préscolaires, offre chaque année six semaines de formation à chaque maître. Il débouche sur un certificat obtenu en trois ans. Fin décembre 1992, plus de 160 élèves ont été diplômés.

Le programme de formation vise également un objectif de développement en offrant davantage de possibilités d'épanouissement aux femmes.

Le programme de formation s'appuie sur un plan d'étude national élaboré avec l'aide de la communauté baha'ie. Ce plan met l'accent sur des activités plus appropriées au Swaziland, comme l'utilisation de matériels pédagogiques locaux et l'intégration d'éléments spécifiques de la culture swazi.

(One Country n°13, pp.8-10)


8.3.5. ECOLE MASROUR, "CENTRE POUR LE BIEN-ÊTRE SOCIAL" - MANAUS, Brésil

Vêtue d'une jupe et d'un chemisier serrés, les lèvres maquillées de rouge, Thérésa, 13 ans, se comporte avec une mondanité déplacée parmi les autres élèves de l'École professionnelle Masrour.

Quand Thérésa est arrivée à Masrour, situé dans la banlieue pauvre et surpeuplée de Manaus, près de Saõ José, elle dit aux instituteurs que son rêve était de devenir propriétaire d'une maison de prostitution. Enfant des rues de cette métropole de plus de 2 millions d'habitants en pleine expansion au coeur du bassin du fleuve Amazone, c'était peut-être la plus haute aspiration qu'elle pouvait avoir.

Cependant, après avoir passé une année à Masrour, où elle suit non seulement un enseignement primaire mais aussi une formation professionnelle, une orientation morale et éthique et où elle prend ses repas, la vision de Thérésa concernant son avenir a quelque peu changé.

Maintenant Thérésa dit qu'elle voudrait être institutrice quand elle sera grande.

"Les instituteurs sont comme des parents pour moi", dit Thérésa (ce n'est pas son vrai nom). "Ils m'apprennent des choses que mes parents ne m'apprennent pas, par exemple comment respecter les autres et comment me tenir bien."

Cette réponse en dit long sur Masrour, qui fait partie d'un plus grand projet conçu pour aider les enfants des rues à devenir des membres à part entière de la société, en meilleur santé et plus consciencieux.

Le "Centre pour le bien-être social", nom sous lequel le projet est connu, emploie une méthode globale pour atteindre ses objectifs. En complément aux classes de l'École Masrour, le Centre propose un programme spécial de formation professionnelle et morale pour les enfants des rues, un programme d'organisation communautaire qui a comme mission de donner plus de pouvoir aux femmes pauvres du quartier, et des services directs tels que l'approvisionnement en eau potable et des services de santé.

Géré par la communauté baha'ie du Brésil, l'approche du Centre est innovante en ce qu'elle essaie non seulement de fournir une assistance matérielle et scolaire aux enfants et aux jeunes sous sa tutelle, mais aussi de leur fournir des outils intellectuels et spirituels pour transformer leur propre vie, et plus tard, celles des autres.

"Il y a au Brésil beaucoup de groupes qui s'attaquent au problème des enfants des rues", a déclaré Ferial Farzin, le directeur du Centre. "Ce qui rend notre approche unique, c'est que nous essayons de trouver le joyau que nous croyons exister à l'intérieur de chaque être."

"La plupart des autres institutions ne se soucient pas du développement des enfants en tant qu'individus", a souligné Mme Farzin. "Ils savent que les enfants ont besoin d'argent, donc ils leur apprennent à vendre des glaces. Dans les rues, ayant plus d'argent, ils commencent à renifler la colle. Ainsi le problème ne fait que croître. Nous croyons qu'il faut rechercher le potentiel de ces enfants et ensuite travailler avec eux d'une façon dynamique pour intégrer le spirituel au pratique."

Fondé en 1985, le Centre d'aide sociale a débuté dans une maison louée de Manaus et pendant ses premières années, il a fonctionné comme une famille nourricière, s'occupant des enfants abandonnés ou maltraités jusqu'à leur adoption. Avec une capacité de 50, le Centre a aidé plus de 300 enfants entre 1985 et 1992.

En 1988, le Centre a pu acquérir 12 hectares de terrain non exploités dans les faubourgs de Saõ José. A l'aide de dons privés, il a alors construit plusieurs bâtiments et a emménagé ici en 1989. A peu près en même temps, il a commencé à transformer sa mission de famille nourricière pour remplir une mission d'école intégrée et d'aide sociale, nouvelle mission qu'il accomplit fort bien aujourd'hui.

L'école primaire Masrour a une capacité d'environ 240 enfants, 40 pour cent ayant une bourse d'études. Quarante pour cent de ces boursiers suivent une formation professionnelle l'après-midi.

Cette école privée est exceptionnelle, non seulement parce qu'elle s'occupe des enfants les plus pauvres de Saõ José, mais aussi pour son programme original, qui offre aux enfants une instruction morale et spirituelle en plus des sujets traditionnels : la lecture, l'écriture et les mathématiques.

Basé sur les enseignements baha'is, le programme moral et spirituel met en avant l'unité de toutes les religions et de tous les peuples. Ceci aide à donner beaucoup plus de confiance en soi et de respect aux élèves.

"Dans les autres écoles, l'instruction spirituelle était uniquement catholique", a déclaré Christina Ihhamus de Paula, 29 ans, une institutrice à Masrour qui a enseigné pendant quatre ans dans des écoles publiques avant de venir ici il y a un an. "Mais s'il y avait des élèves appartenant à d'autres religions, ils se sentaient tristes et découragés. Ici nous les encourageons à parler de Dieu, le Dieu de tout le monde et ceci les aide beaucoup."

Mme Ihhamus de Paula a ajouté que si l'école n'existait pas pour servir les enfants de la région, "la plupart d'entre eux seraient abandonnés et, comme beaucoup d'autres enfants, ils vivraient dans les rues".

"Beaucoup de ces élèves viennent de la classe la plus pauvre de la société et manquent de soins et de tendresse", a-t-elle déclaré. "Je sens qu'ils ont besoin de mon amour parce que souvent ils n'en reçoivent pas chez eux. Et il y en a qui n'ont pas assez à manger, l'école est donc très importante pour eux."

Le salaire d'à peu près la moitié des instituteurs est payé par le gouvernement - ce qui reflète le grand égard qu'ont les autorités municipales et l'État pour le projet.

Josué Filho, Secrétaire d'État du Ministère de l'Éducation pour l'Amazonie, a déclaré que le gouvernement souhaitait travailler étroitement avec les groupes pour améliorer la qualité de l'instruction. Il a souligné qu'il appréciait particulièrement la philosophie de service aux autres qui est la pierre angulaire du Centre.

a) Engagement dans la communauté

Au-delà des activités habituelles de l'école, le Centre essaie aussi d'aider les adultes et plus particulièrement les femmes de la communauté à devenir mieux développés et organisés.

Par exemple, le Centre a participé à l'organisation d'un groupe de mères dans le quartier à proximité de celui où se déroule le projet.

De nombreuses familles envoient leurs enfants à cette école et à partir de cette association les parents ont évolué lentement pour devenir une force de changement et d'action sociale.

Souvent, on peut voir le soir des membres du groupe des mères en train de se promener ensemble et de rendre visite aux familles en difficulté pour essayer de les soutenir. Mme Farzin se joint souvent au groupe pendant leurs visites. Un soir, il n'y a pas très longtemps, ils ont fait le tour du quartier pour parler du problème de la distribution d'eau.

L'accès à l'eau potable est un problème important dans le bairro. La municipalité ne fournit pas de canalisations à cette partie de Saõ José, donc l'eau potable doit être amenée de l'extérieur ou provenir des puits locaux.

(One Country n°17, pp.1, 4-7)


8.3.6. ECOLE MATERNELLE DE BEUDET À HAÎTI - BEUDET, Haïti

Pour décrire l'importance que prend à ses yeux le fait d'envoyer ses enfants à l'école, Rosanna Petit Frère utilise spontanément une expression créole : "Je'm te vin klere" qui peut se traduire par "mes yeux s'illuminèrent".

Comme de nombreux ruraux haïtiens, Mme Petit Frère vit dans une case au toit de tôle, dans un village d'environ deux douzaines de cases semblables, serrées les unes contre les autres, au milieu des champs que les villageois cultivent avec persévérance.

Mais à la différence de beaucoup de ses semblables, Mme Petit Frère peut envoyer ses jeunes enfants à une école maternelle voisine dans laquelle ils découvrent des idées différentes et nouent des relations sociales que la plupart des autres enfants haïtiens ignorent toujours. Elle en est très reconnaissante. "Pendant très longtemps, je n'ai même pas pensé à envoyer mes enfants à l'école, mais mes yeux s'illuminèrent car aujourd'hui mes enfants se développent vraiment bien, ils sont curieux et ouverts."

Dans ce petit village, l'école maternelle gérée par les baha'is est d'apparence très modeste : un sol de terre battue, des murs-cloisons d'un mètre de haut, un toit de chaume, une pièce ouverte à tous vents. Pourtant, son impact sur la vie de cette petite enclave sans nom, où le prochain repas est toujours un problème et les emplois extérieurs inexistants, est très important.

A l'origine, projet extra-scolaire de l'école baha'ie Anis Zunuzi, de la ville voisine de Lilavois, l'école maternelle de Beudet est aujourd'hui sous la juridiction administrative de l'Assemblée spirituelle baha'ie, le conseil baha'i élu localement. Ainsi, l'école représente un projet de développement à la base au niveau le plus élémentaire : la population du cru paie et soutient un projet géré localement, au service des besoins réels des résidents. On trouve cinq autres écoles semblables dans le pays.

Les parents paient un dollar par mois et par enfant - l'école compte à présent 13 enfants de 3 à 5 ans - et l'Assemblée de Beudet couvre la différence pour payer les 30 dollars mensuels de l'institutrice à mi-temps, Anna Louise Seraphin. L'Assemblée supervise aussi son travail. "Cette école est la seule de la région, explique Mlle Seraphin, et les parents sont contents car les petits enfants n'auraient pas pu aller plus loin."

Mlle Seraphin, qui a reçu sa formation d'institutrice au cours d'un institut d'été à l'école Anis Zunuzi, affirme qu'elle constate un grand changement chez les enfants dont elle s'occupe. "Au début, ils ne répondaient pas, parlaient peu entre eux, ne savaient pas jouer. Maintenant, ils jouent ensemble, parlent plus et les parents eux-mêmes s'aperçoivent qu'ils se développent bien."

(One Country n°4, p.9)


8.3.7. UNIVERSITÉ NUR EN BOLIVIE - SANTA CRUZ, Bolivie

L'université de Nur (SANTA CRUZ, Bolivie) qui compte près de 1000 étudiants est un projet baha'i novateur en matière de pédagogie.

En juillet 1990, lors de la cérémonie de remise des diplômes, les rôles ont été provisoirement inversés et six étudiants de l'université Nur ont remis au recteur de l'université, M. Shoaie, une médaille en témoignage de leur reconnaissance. Elle porte l'inscription : " A l'université Nur, en signe de gratitude pour l'éducation intégrée que nous avons reçue". Cet événement, bien que mineur, reflète la haute considération et l'approbation générale dont jouit cette université.

Créée presque sans budget par un groupe d'enseignants et de spécialistes du développement pratiquement inconnus, Nur a vu ses effectifs passer de 97 étudiants en 1985, à 993 aujourd'hui; elle est ainsi devenue la deuxième université privée de Bolivie.

Elle s'est rapidement distinguée par l'intégration qu'elle accomplit entre études universitaires et études pratiques ainsi que par sa gestion novatrice et sa philosophie remarquable.

a) Fondée par des baha'is

En 1982, un groupe de baha'is, originaires de Bolivie et d'autres pays, qui comprenait des spécialistes de la santé publique et de l'éducation, un biochimiste, un sociologue et un leader indien aymara, créa FUNDESIB, la Fondation pour le développement intégré de la Bolivie.

Incorporant dans sa charte des principes baha'is, FUNDESIB avait pour but d'encourager le développement par la base, en insistant sur l'individu et son rôle au sein de la société. M. Eloy Anello, conseiller en matière de santé publique et de développement international, et l'un des fondateurs de FUNDESIB déclare : "Notre démarche consiste, grâce à l'éducation et à une formation appropriée, à développer chez l'individu certaines capacités qui lui permettent d'aborder les problèmes auxquels il est confronté."

"Nous sommes partis de l'idée de lancement de projets à échelle réduite dans les domaines de l'éducation et de l'alphabétisation", a déclaré M. Martin, sociologue de formation " mais, ensuite, nous avons commencé à envisager la création d'une nouvelle université".

A l'origine, c'est donc un projet de développement rural visant à améliorer les techniques agricoles et l'hygiène parmi la population rurale de Bolivie qui donna naissance à cette université urbaine avec pour principal rôle la formation d'une nouvelle génération de dirigeants pour la Bolivie. Ceux-ci, espère-t-on, retourneront à la campagne afin d'aider à son développement.

Bien qu'elle ne soit gérée ni par la Foi baha'ie ni par l'une de ses institutions, l'université Nur voit sa philosophie en matière d'éducation et d'administration découler de principes de cette Foi. La pédagogie de Nur plaide en faveur de "l'intégration" du savoir traditionnel à l'expérience pratique et à l'enseignement de certains principes moraux de base, principes mettant particulièrement en relief le service communautaire, la justice sociale et le respect de la diversité humaine.

Administrateur de Nur où elle enseigne aussi l'histoire, Mme Sarah Garcia de Bétancourt déclare: "Ce qui différencie l'université Nur, c'est ce cursus intégré. Non seulement l'université enseigne à un niveau académique, mais elle tente également d'apporter un enseignement relatif à des principes essentiels de vie tels que la recherche indépendante de la vérité, l'élimination des préjugés et l'égalité entre l'homme et la femme."

Les principes qu'elle mentionne, ainsi que d'autres, sont l'objet d'une série de cours dits "d'études générales" suivis par tous les étudiants.

Selon M. Shoaie "l'orientation du programme d'études générales de Nur est unique en son genre car fondée sur des principes sociaux, éducatifs et humanitaires à caractère universel, qui favorisent la paix et l'intégration sociale. Le programme d'études générales couvre cinq domaines : le développement de l'individu, de la communauté et de la civilisation, les sciences humaines, et la formation aux responsabilités ".

Les cours dispensés dans le cadre de ces études générales s'attachent en particulier à transmettre à l'étudiant un sens de l'histoire culturelle, du rôle de la religion dans l'histoire et de l'interdépendance entre les peuples.

Le recteur précise : "Nous demandons aux étudiants d'effectuer une recherche sur de nombreuses religions parmi lesquelles figurent l'Islam, le Bouddhisme, le Christianisme et la Foi baha'ie. Ils doivent rechercher la contribution apportée par la religion à la civilisation et présenter un mémoire."

b) Une position apolitique

Une autre particularité de l'université Nur est qu'elle met l'accent sur la libre recherche et s'attache à conserver un caractère non partisan, ce qui est important dans le contexte bolivien.

Il est difficile au lecteur de saisir la complexité de la vie dans les universités d'État en Amérique latine où, bien souvent, l'engagement politique prend le pas sur l'enseignement. Selon une estimation, il faut en moyenne huit ans au lieu de cinq pour obtenir un diplôme, simplement parce que des grèves et des troubles d'origine politique absorbent beaucoup de temps sur le campus.

Trop souvent l'accent est mis sur la théorie politique et cela au détriment de la formation pratique. En conséquence, les étudiants diplômés sont parfois mal préparés à assumer des rôles positifs dans la société.

" Pour moi, ce qu'il y a de plus important ici, c'est la liberté idéologique. Même si Nur est fondée sur des concepts baha'is, on n'y impose aucune philosophie baha'ie. Dans cette université, la règle c'est la liberté de religion et la liberté de pensée", déclare M. Fernandez, étudiant en communication, 22 ans, originaire de Cochabamba.

c) Une priorité : servir

Un autre trait prédominant à Nur, c'est l'importance accordée au service communautaire.

Comme il a été dit, les programmes et les cours sont conçus de manière à répondre aux besoins de la société bolivienne. En outre, les étudiants sont tenus d'accomplir au moins 200 heures de travail à l'extérieur, sur des projets communautaires qu'ils ont bien souvent conçus eux-mêmes.

Actuellement une vingtaine d'étudiants sont impliqués dans un projet d'alphabétisation des citadins illettrés. Les étudiants organisent eux-mêmes des cours et dispensent leur enseignement tant à l'intérieur de l'université qu'en dehors, dans huit localités différentes. Ce projet a permis d'apporter à plus de 200 personnes des notions de base pour la lecture, l'écriture et le calcul.

"Nur se distingue des autres universités par la place qu'elle accorde à la notion de service communautaire. Selon nous, l'université doit jouer un rôle très actif dans la vie communautaire", déclare M. Jeremy Martin, directeur du développement institutionnel et l'un des fondateurs de Nur.

d) Les chiffres

A l'heure actuelle, environ un tiers des étudiants est aidé par des bourses d'études ou des remises qui, pour les diplômés de l'école publique, vont de 20 à 50% des frais d'inscription, en fonction des besoins de chacun.

L'effectif actuel d'environ 1000 étudiants est encore inférieur de plusieurs centaines aux prévisions et on prévoit une poursuite de la croissance. Nur a connu un développement si rapide qu'elle a déménagé trois fois depuis sa création.

Cependant, Nur fonctionne actuellement avec un déficit d'environ 100.000 francs français par an. Aussi l'université vient-elle de lancer une campagne internationale en vue de recueillir des fonds et espère pouvoir bientôt établir un campus permanent.

Parallèlement à Nur, FUNDESIB continue ses activités et vient de lancer de nouveaux projets, notamment le parrainage d'un programme de développement en matière d'environnement, qui opère sur le haut plateau bolivien.

(One Country n°7, pp.12-14)


8.3.8. LE CHAR DE LA PAIX - État d'UTTAR PRADESH, Inde du Nord

Un "Char de la Paix", tiré par deux boeufs, transporte un magnétoscope, un groupe electrogène et un téléviseur de chaque côté afin que les femmes puissent accéder à l'information . Ainsi équipé, le véhicule autonome sert à présenter, de villages en villages, des programmes vidéo en langue locale répandant des messages clefs sur l'éducation, les mesures sanitaires de base, le reboisement et l'organisation sociale des populations coupées de la vie moderne. Des films en hindi de l'OMS (Organisation mondiale de la santé) ont pu ainsi être diffusés.

Tiré par deux boeufs, le char, vu à distance, ressemble à une glacière plutôt désuète ou, peut-être, à un nouveau type de caravane européenne.

L'inscription apposée sur le côté proclame en hindi et en anglais l'arrivée d'un "Shanti Rath" ou, en français, un "Char de la paix".

Malgré sa noble appellation, le char vise un but très terre-à-terre. Poursuivant actuellement sa route à travers les villages de ce lointain État du Nord de l'Inde, le "Char de la paix" cherche, par une association unique de techniques très différentes, à répandre des messages- clefs sur l'alphabétisme, l'hygiène, le reboisement et l'organisation sociale dans une population qui est, pour l'essentiel, coupée de la vie moderne.

Le char, avec ses parois métalliques et ses pneus, contient un ensemble de postes de télévision, d'unité vidéo et de groupe électrogène permettant la présentation de bandes vidéo orientées vers le développement.

Et, en dépit de l'apparente discordance des techniques employées, l'utilisation de boeufs comme force motrice joue un rôle essentiel dans la mission dévolue au véhicule, selon M. Stephen Waite, chef du département "Développement socio-économique et éducation" de l'Assemblée spirituelle nationale des baha'is de l'Inde.

"Au village, l'horaire idéal est le soir entre 19 h et 23 h", déclare M. Waite. "Un char tiré par des boeufs ne peut se déplacer rapidement, mais ceci garantit du moins que les programmes vidéo seront disponibles aux heures où les villageois, eux aussi, sont disponibles."

D'autres concessions importantes ont été faites à la vie culturelle et sociale de la population de l'Uttar Pradesh. Le char, qui stationne au centre du village pour une période d'une semaine ou plus lors de chaque passage, est équipé de deux écrans de télévision - un de chaque côté du véhicule.

"Si l'on disposait d'un seul écran, les femmes seraient désavantagées", dit M. Waite. "Elles seraient obligées de monter sur les toits pour regarder le programme TV." Dans cette partie de l'Inde, explique-t-il, les hommes et les femmes ne se rassemblent pas en groupes. "Le fait de disposer de deux écrans permet aux hommes de visionner d'un côté du char tandis que les femmes ont la possibilité de regarder de l'autre côté."

La nature du programme vidéo continue à évoluer. L'accent est mis sur des bandes de caractère éducatif qui favorisent l'alphabétisation, l'hygiène individuelle et les mesures sanitaires de base.

Un programme en hindi d'une durée de huit heures, produit par le gouvernement et destiné principalement aux femmes, a été récemment présenté par le char. On utilise également la version en hindi d'un film de l'OMS (Organisation mondiale de la santé) intitulé "La santé pour tous en l'an 2000".

L'idée est d'établir un programme très souple. Pendant la journée, par exemple, le char à boeufs peut être utilisé à l'école du village pour y présenter aux enfants des programmes éducatifs. Des groupes spécifiques, tels que les cultivateurs, peuvent aussi être invités à regarder un programme d'une heure consacré à l'agriculture. Ensuite, dans la soirée, des programmes d'intérêt général pourront être présentés.

Étant donné que de nombreux habitants de la région sont des baha'is récents, des programmes éducatifs sur les principes et les enseignements de la Foi baha'ie sont également présentés.

Comme le nombre des baha'is en Uttar Pradesh dépasse les 250 000 et que la majorité d'entre eux habitent une région comprenant quelque 900 villages dans les districts d'Etawah, de Kanpur et de Furukabad, leur besoin d'information ne peut être satisfait par les seuls enseignants itinérants.

Le programme est considéré comme une grande réussite. Un grand nombre de villageois ont eu accès à des informations importantes, et cela pour une faible dépense. Pour une population peu instruite et peu familiarisée avec la télévision, ce projet ouvre des horizons presque illimités.

(One Country n°3, pp.4-5)


8.3.9. RAPPORT SUR LES PROJETS ÉDUCATIFS BAHA'IS - BONN, Allemagne


Selon un rapport présenté en février à Bonn lors d'une réunion du Groupe d'action international pour l'alphabétisation (GAIA) l'implication des communautés baha'ies dans des activités éducatives dans le monde a considérablement augmenté entre 1988 à 1990.

Dans l'ensemble, le nombre des projets pédagogiques baha'is, tant officiels qu'officieux, s'est accru de 26% depuis 1988, passant de 602 à 759. Ces activités couvrent une grande variété de projets et de programmes, depuis les écoles de village et les cours d'alphabétisation, jusqu'aux internats offrant une scolarité complète et aux programmes de formation professionnelle.

"L'accroissement des activités pédagogiques peut être attribué en partie à l'écho dans les communautés baha'ies du lancement en 1990 par l'ONU de l'Année internationale de l'alphabétisation", déclare M. Daniel Wegener, alors représentant de la Communauté internationale baha'ie auprès du GAIA. "Toutefois, dans la plupart des cas, l'accroissement reflète simplement l'influence qu'exerce sur une communauté baha'ie en rapide expansion l'importance accordée à l'éducation."

Selon le rapport du GAIA, il existe actuellement 62 établissements d'enseignement baha'is, couvrant les études primaires, secondaires et supérieures. Ces établissements vont du lycée "New Era" à Panchgani, Inde, pensionnat international créé en 1947, avec un effectif de plus de 900 élèves des classes primaires à la terminale, jusqu'à l'école primaire "El nuevo Jardin" de Barahona, République dominicaine, ouverte au milieu des années 80, et qui dispense son enseignement à 300 élèves.

Les projets et programmes éducatifs informels, qui comprennent des écoles de village, des centres d'alphabétisation et des maternelles, se sont accrus de 22% entre 1988 et 1990, passant de 573 à 697.

"Les projets informels de ce type émanent principalement des mouvements naturels de base des communautés", déclare M. Wegener qui présentait le rapport baha'i au GAIA.

"Des maternelles, des jardins d'enfants, des écoles de village et des cours d'éducation morale ont été créés dans de nombreuses communautés afin de répondre aux préoccupations et aux besoins locaux", précise M. Wegener. "Bien que les enseignants travaillant dans le cadre de ces programmes soient souvent des bénévoles ou juste rémunérés en nature, ces projets représentent néanmoins une contribution significative au principe de l'éducation pour tous."

Le rapport mentionnait plusieurs exemples spécifiques de tels projets.

• En Inde, un programme de création de centres d'alphabétisation dans des villages proches de Panchgani s'est agrandi de 30 centres en 1984 à 100 dans 60 villages en 1989.

• Au Kénia, une série de brochures destinées aux mères et portant sur l'enseignement des techniques sanitaires et agricoles, des travaux domestiques et sur la morale a été éditée et diffusée dans les communautés baha'ies pour être utilisée dans le cadre de l'alphabétisation. Ces brochures sont en cours de traduction en 26 langues.

• Au Zaïre, depuis 1987, 2.500 élèves ont suivi les cours d'alphabétisation dispensés par la communauté baha'ie. Un des chapitres du projet était notamment destiné à l'ethnie bayanda du nord-est zaïrois, un peuple plus connu sous le nom de "Pygmées" et qui n'avait reçu jusqu'alors que peu ou pas d'instruction formelle.

En plus des projets à long terme, le rapport énumérait un certain nombre d'initiatives spécifiques et de programmes à court terme proposés dans le cadre de l'Année internationale de l'alphabétisation, dont :

• Au Panama, les 23 et 24 avril, organisation par la communauté baha'ie d'un séminaire de deux jours sur l'alphabétisation, en coopération avec le Ministère panaméen de l'éducation.

• En Ouganda, les baha'is ont présenté une exposition, le 8 septembre 1990, dans le district de Kamuli, à l'occasion de la célébration de l'Année internationale de l'alphabétisation.

• En Espagne, la conférence annuelle de l'Association pour les études baha'ies, qui s'est tenue à Saragosse, a concentré son débat sur l'éducation : les communications présentées comportaient notamment un exposé sur le rôle de l'alphabétisation dans l'élimination des préjugés.

Le GAIA fut créé en 1987 pour soutenir les activités de l'Année internationale de l'alphabétisation, par 35 Organisations internationales non-gouvernementales (ONG), dont la Communauté internationale baha'ie.

(One Country n°8, pp.12-13)


8.3.10. ECOLE RABBANI EN INDE - SUSERA, Madhya Pradesh, Inde

M. C. Khanna, proviseur de l'école Rabbani (Gwalior, Inde) devant un ba^timent de l'école qui servit jadis de pavillon de chasse à un prince des lieux, le Maharadj Scindia.

En 1969, des bandits locaux kidnappèrent deux élèves de l'école Rabbani, pensionnat géré par des baha'is et situé dans ce petit village à 15 km au nord de Gwalior, importante cité de l'Inde centrale. Les bandits, connus dans cette région sous le nom de dacoïts, exigeaient une rançon pour leur libération. Cependant, ils ramenèrent les enfants sans aucune compensation lorsqu'ils apprirent que l'école était surtout destinée aux familles pauvres des villages.

"Ils avaient pensé qu'un internat ne recevait que des élèves aisés et qu'ils pourraient obtenir une bonne rançon", dit le Major Khanna, proviseur de l'école.

Cet incident illustre bien ce qui distingue Rabbani : l'école était alors et demeure le seul établissement de ce type, dans la région, dont le but est d'offrir aux jeunes garçons de familles pauvres l'éducation de qualité normalement accessible aux seules classes moyennes et supérieures en Inde.

Grâce à un système nouveau d'antennes régionales et de bourses, environ 75% des élèves de Rabbani sont issus de villages pauvres situés dans un rayon de 30 km. Autrement, la plupart d'entre eux n'aurait aucune chance d'être scolarisés dans un internat.

"Nos cours commencent en 6ème mais la majorité de ceux qui s'inscrivent ici sont à peine du niveau de la 3ème année du primaire", nous dit le Major Khanna qui dirigeait le département linguistique de l'Académie militaire de l'Inde avant de rejoindre Rabbani en 1986. "Ces enfants ne seraient admis dans aucun autre internat", précise-t-il.

Malgré leur niveau médiocre avant leur admission, les élèves de dernière année à Rabbani ont obtenu l'an dernier le meilleur score d'ensemble aux examens organisés par le gouvernement pour tous les élèves de fin d'études dans l'État de Madhya Pradesh. "Tous nos candidats ont réussi leur examen terminal", déclare le Major Khanna. "Or, en moyenne, 45% seulement des élèves d'autres écoles de l'État ont été reçus."

a) Un engagement envers la communauté

Le Major Khanna et d'autres responsables de l'établissement déclarent que l'efficacité dont fait preuve leur école dérive en partie de sa philosophie de l'engagement communautaire qui permet aux élèves d'intégrer à leur vie quotidienne l'aspect pratique de leur travail de classe.

"Nous croyons qu'une école doit être bien plus qu'un enclos et quelques bâtiments", nous dit le Major Khanna. "L'école est un élément de la société dans son ensemble et doit répondre à ses besoins. Ceci exige une interaction très étroite entre l'école et la communauté. Les baha'is pensent que servir la société est le but le plus noble. A Rabbani, nous croyons que les enfants doivent pouvoir saisir toute l'importance du service lorsqu'ils sont jeunes, afin de grandir comme des êtres attentionnés et bienveillants pour qui servir leurs semblables est la plus grande priorité dans la vie."

Cette philosophie de l'éducation s'applique dans le programme de développement entrepris à l'extérieur de l'école. Une vingtaine de villages proches ont été "adoptés" par l'école et l'on attend des élèves qu'ils consacrent une partie de leur temps à travailler pour leur développement. Ces efforts se portent notamment sur des projets de plantation d'arbres, sur la promotion de poêles économiques en combustible et non polluants et sur des programmes concernant la santé et l'hygiène. L'école soutient également, pour la formation et l'administration, un certain nombre de cours pratiques gérés localement, dans les villages. Elle offre aussi aux cultivateurs une formation technique concernant le défrichement et l'agriculture.

"Lorsqu'il est temps de procéder aux travaux de sylviculture, c'est à dire pendant la mousson, les enfants recueillent des jeunes plants dans la pépinière de l'école et se rendent dans les villages pour aider à les repiquer", déclare M. Chaurasia, chef du département de développement socio-économique. Il ajoute par ailleurs : "Lorsque le Ministère de la santé lance un programme de vaccinations, nous envoyons nos élèves dans les villages où ils identifient les enfants à vacciner. Leurs noms et adresses sont ensuite communiqués aux services gouvernementaux."

Selon M. Giakwad, inspecteur adjoint de l'enseignement pour la région, il est tout à fait inhabituel qu'une école soit aussi nettement impliquée dans le développement communautaire socio-économique.

b) Un prix national de l'environnement

En 1986, pour ses réalisations en matière de plantations d'arbres et de défrichement, l'école Rabbani s'est vue décerner par le Ministère indien de l'environnement et des forêts, le prix "Indira Priyadarshin Vrikshamitra" institué en mémoire du Premier ministre Gandhi, conjointement avec 20 autres organisations et personnalités ayant apporté une importante contribution à la protection de l'environnement en Inde. Le programme de reboisement de l'école Rabbani était qualifié d'"exemple réconfortant de la contribution d'une école à la sylviculture sociale", dans le discours de remise du prix où il était dit aussi : "Conduits par leurs professeurs, les élèves s'avancent par groupes, portant leurs jeunes arbres, en direction des villages environnants, et cela chaque samedi en saison, et procèdent à la plantation des arbres. Les enfants ont réussi à persuader les parents et les anciens des villages de planter des arbres sur leurs propres terrains. Des milliers d'arbres ont déjà été plantés grâce à l'action stimulante de Rabbani." Depuis 1985, les élèves ont planté 250 000 arbres.

Dans le cadre d'un projet similaire au sein des vingt villages "adoptés", les élèves de Rabbani ont eu la responsabilité de la promotion de la fabrication de poêles non polluants. Des tuyaux spéciaux, fournis par une entreprise énergétique locale subventionnée par le gouvernement indien, sont distribués à bas prix par les élèves aux villageois. Les élèves montrent aussi aux usagers la manière d'utiliser les tuyaux dans la fabrication d'un poêle amélioré dont l'efficacité est de 30 % supérieure à celle des modèles traditionnels.

M. Sanjeev Madan, ingénieur à la "Madhyar Pradesh Energy Corporation" qui distribue ces tuyaux au niveau national, a déclaré que le mérite de la réussite du programme à Gwalior revenait principalement à Rabbani qui avait distribué plus de mille poêles. "Rabbani est l'une des principales organisations non-gouvernementales oeuvrant à la distribution de poêles non polluants dans cette région", a-t-il dit.

La participation des élèves à des projets locaux de développement ne reflète qu'une partie du programme de l'école Rabbani. Son côté académique est rigoureux comme le prouvent les résultats aux examens d'État. Une de ses autres caractéristiques est l'accent qu'elle met sur l'éducation morale.

Le Major Khanna déclare : "Un quart de nos élèves appartient aux castes inférieures, dites "intouchables". Au début, certains de ceux des castes supérieures refusaient de s'asseoir avec des enfants de castes inférieures. Mais nous insistons sur l'importance d'un traitement égalitaire. Et, après qu'ils aient passé quelque temps dans notre école, grâce à l'atmosphère de tolérance et au programme d'éducation morale, leurs préjugés disparaissent."

Les élèves confirment cette observation. "Certains d'entre nous, à l'école, appartiennent à des familles d'intouchables, mais nous sommes tous des amis et ces camarades sont bien traités", dit Ued Narayan Gachhadav, élève originaire du Népal. Environ 20 % des élèves sont baha'is, le pourcentage dans la population rurale est identique.

"Nous ne faisons aucune distinction entre les élèves baha'is et ceux d'autres religions", précise le Major Khanna. "Notre programme d'éducation morale s'appuie largement sur les enseignements baha'is, mais comprend aussi l'histoire et les principes de toutes les religions."

L'an dernier, l'école avait un effectif de 275 élèves. Bien que la plupart des écoles baha'ies favorisent largement l'éducation mixte, Rabbani est une école de garçons. "En Inde, les habitants des villages n'accepteraient pas l'idée d'un internat accessible aux garçons et aux filles", précise le Major Khanna.

Le programme de l'école insiste également sur l'importance de la formation professionnelle. Chaque élève reçoit une formation en agriculture et élevage. L'apprentissage empirique est favorisé. Les élèves passent une partie de leur temps dans les champs et en compagnie des animaux. La presque totalité des 29 ha. de l'école est constituée de labours ; deux bâtiments sont réservés à l'élevage de la volaille et à la production des oeufs ; on envisage en outre la construction d'une étable.

Il en résulte de bonnes connaissances pratiques et aussi une certaine auto-suffisance pour l'école. Son budget opérationnel annuel s'élève à quelque 1,7 million de roupies, soit environ 600.000 FF. dont 39.000 proviennent de la vente de l'excédent agricole.

"Pour le riz et l'huile de senneh, non seulement nous suffisons à nos besoins, mais nous avons un excédent", déclare le Major Khanna. "Nous produisons 40% de nos propres besoins en froment. Et nous couvrons totalement nos besoins en légumes. En tenant compte de la production et de la vente des produits agricoles ainsi que des revenus de l'enseignement, nous sommes presque auto-suffisants."

Officiellement, les frais de scolarité sont de 4.500 roupies par an et par élève, montant encore inférieur au tarif moyen exigé par d'autres internats de la région.

"Il nous arrive parfois de renoncer à la totalité des frais de scolarité", explique le Major Khanna. "Mais généralement nous insistons, peut-être avec un petit pincement au coeur, pour que les parents des élèves payent quelque chose car nous croyons qu'il faut un élément de sacrifice de la part des familles afin que cette éducation revête sa pleine signification."

(One Country n°8, pp.4-6)


8.4. Coopération

8.4.1. OUVERTURE D'UN SECRÉTARIAT INTERNATIONAL : "LE RÉSEAU DE L'EDUCATION POUR TOUS" - NEW YORK


Une nouvelle association d'organes des Nations unies, d'Organisations internationales et non-gouvernementales (ONG), le réseau de l'Éducation pour tous, a ouvert un petit secrétariat international. Son objectif est ambitieux : améliorer la communication intersectorielle quant aux nouveaux modèles et aux moyens propres à garantir une éducation élémentaire pour chacun sur la planète.

"Nous appelons cela un "réseau de réseaux"", déclare Daniel Wegener, alors membre du Comité international de coordination du réseau et représentant de la Communauté internationale baha'ie auprès de Nations unies. "Nous ne cherchons pas à créer encore une organisation-monstre et pleine de formalités. Nous voyons plutôt dans le réseau un moyen d'aider les spécialistes de tous les secteurs de l'éducation à se parler et à échanger leurs expériences."

Le secrétariat a été confié à Anele Heiges, soeur dominicaine ayant une large expérience dans l'éducation et avec les ONG, depuis la base communautaire villageoise jusqu'aux grandes villes, seule personne à plein temps, engagée en qualité de responsable des communications internationales.

"Ce projet représente quelque chose d'important", dit-elle "car, si nous sommes réellement en mesure d'atteindre nos buts, nous aurons la possibilité de toucher bien des personnes qui, sans ce réseau, seraient laissées de côté. Je pense que nous réussirons car ce projet réunit des groupes différents de ceux que l'on touche d'habitude dans les milieux internationaux de l'éducation".

Entre autres, sont membres du réseau le Fonds des Nations unies pour l'enfance (UNICEF), le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO), la Banque mondiale, et plus de soixante-dix ONG nationales, régionales et internationales.

A Jomtien, Thaïlande, en mars 1990, la Conférence mondiale sur l'éducation pour tous a réuni les représentants de 155 gouvernements, organes des Nations unies, Organisations inter-gouvernementales et ONG, afin d'avoir une "vision très large" des besoins des enfants, des jeunes et des adultes en matière éducative et de parvenir à un consensus global sur l'action à mener.

"Mais en fait, après la conférence, aucun mécanisme international n'existait qui soit susceptible de maintenir les relations nécessaires au développement de solutions innovatrices en réponse au défi d'une éducation élémentaire universelle", continue M. Wegener. Selon lui, le bureau de New York demeurera petit, afin de mettre l'accent sur l'importance des activités régionales qui se rapprochent du type de projets locaux que le réseau souhaite promouvoir.

L'organisation de conférences régionales figure parmi les priorités du réseau. "Nous voudrions ensuite développer des politiques et des stratégies régionales pour faire progresser dans chaque région l'éducation pour tous", ajoute Daniel Wegener.

L'adhésion au réseau Éducation pour tous est ouvert aux ONG à tous les niveaux, régional, national et international.

(One Country n°10, p.9)


8.4.2. ECOLES PUBLIQUES GÉRÉES PAR LES BAHA'IS - LES ILES MARSHALL

A la demande du gouvernement local de l'Atoll Majuro, la communauté baha'ie des Iles Marshall a été chargée de l'administration et de la gestion de cinq écoles publiques de l'Atoll.

Un accord entre les deux partenaires a été signé le 26 novembre 1993 et la communauté baha'ie a commencé à gérer les écoles qui comprennent 30 pour cent des élèves des Iles Marshall, au début de l'année 1994.

L'aide de la communauté baha'ie a été recherchée grâce à son excellente réputation dans le domaine de l'éducation. La communauté a élaboré un projet pour améliorer le programme en se concentrant sur l'éducation morale, l'instruction bilingue en anglais et dans les langues des Iles, et le développement d'une conscience mondiale.

(One Country n°17, p.10)


8.4.3. GROUPE D'ACTION INTERSECTORIELLE POUR L'ANNEE INTERNATIONALE D'ALPHABETISATION - NEW YORK

Pour un quart de la population adulte de la planète, l'écriture se résume à un ensemble de symboles inintelligibles. Selon des estimations établies par l'Organisation des Nations unies pour l'Éducation, la Science et la Culture (UNESCO), près d'un milliard d'êtres humains adultes ne savent pas lire, et c'est là une des causes et des conséquences de la misère sociale et économique à l'échelle du monde.

Dans le but de faire échec à l'analphabétisme, 27 Organisations internationales non-gouvernementales - dont la Communauté internationale baha'ie, - ont formé le Groupe d'action intersectorielle pour l'année internationale d'alphabétisation (ITFL), destiné à promouvoir et à soutenir les efforts visant à mettre fin à l'analphabétisme. L'ITFL envisage une action, décennale à partir de 1990, année désignée par les Nations unies comme Année internationale de l'alphabétisation (ILY).

Coordonnée par l'UNESCO, cette initiative, qui couvrira les dix années à venir, impliquera notamment une action accrue, de la part des Etats-membres de l'ONU en faveur de l'élimination de l'analphabétisme, en particulier grâce à l'éducation des jeunes filles et des femmes parmi les populations déshéritées et dans les zones rurales pauvres et les bidonvilles urbains. Des efforts seront tentés également par diverses Organisations internationales pour sensibiliser davantage la population au problème de l'analphabétisme, pour accroître la coopération entre les organismes pédagogiques et pour encourager les nouveaux projets d'alphabétisation, parmi les groupes bénévoles, communautaires et autres, à l'échelon local.

Pour honorer sa contribution, la Communauté internationale baha'ie fera appel à ses cinq millions de membres, répartis à travers le monde, pour promouvoir une série d'activités visant à favoriser l'éducation pour tous, et comprenant notamment :

• La création de réseaux d'établissements pédagogiques sur trois continents - Asie, Afrique et Amérique du Sud - afin de développer la théorie et la pratique de l'éducation de base. Actuellement, les baha'is gèrent plus de 340 écoles et centres d'enseignements en Asie, et plus de 460 en Afrique.

• Organisation - individuellement ou en coopération - de diverses conférences, à l'échelle régionale ou nationale, sur l'alphabétisation et l'éducation pour tous.

• Lancement d'une campagne d'information destinée à inciter les 151 institutions nationales baha'ies à entreprendre des activités dans le cadre de l'Année internationale de l'alphabétisation.

• Aide à la création d'organisations nationales chargées de favoriser, à l'échelle nationale, les activités d'alphabétisation.

"L'alphabétisation et l'éducation pour tous sont des éléments essentiels de notre programme global", a déclaré M. Daniel Wegener, alors représentant de la Communauté internationale baha'ie auprès des Nations unies et de ITFL. "Dans le monde entier, nous nous sommes engagés dans des activités éducatives très variées et, en particulier, dans l'alphabétisation. L'accès universel à l'éducation est un des principes de base de notre Foi."

"Les campagnes d'alphabétisation entreprises en marge d'un développement humain global se sont avérées inefficaces", a ajouté M. Wegener. "Les hommes et les femmes ont besoin d'une raison valable pour vouloir s'instruire - une raison découlant des réalités mêmes de la vie de tous les jours.

"Ainsi, nos efforts en matière d'éducation s'attaquent à la situation dans son ensemble et font appel à toute la gamme des potentialités de l'humanité. Ils découlent de notre conviction que le développement spirituel est aussi essentiel au progrès social que la formation des autres aspects de la conscience humaine." Certains de ces programmes d'alphabétisation mettent l'accent, par exemple, sur l'utilisation des langues locales.

"On apprend mieux dans sa propre langue surtout lorsqu'il s'agit d'apprendre à lire et à écrire", a encore déclaré M. Wegener, "Ensuite les connaissances acquises peuvent être utilisées dans une seconde langue. Ceci est d'ailleurs cohérent avec notre conviction qu'il est nécessaire d'encourager la diversité des cultures".

(One Country n°2, pp.1,3)


8.4.4. PROGRAMME "DES FAITS POUR LA VIE" - GENÈVE

Dans le cadre d'une coopération globale, la Communauté internationale baha'ie s'est associée aux 70 autres organisations à vocation médicale ou consacrées aux enfants, dans le programme "Des faits pour la vie", que lancent en ce moment l'UNICEF, l'OMS et l'UNESCO. Ce programme est fondé sur la diffusion d'une brochure simple et facile à comprendre, présentant des informations de base sur les soins à donner aux enfants, en particulier l'importance de l'allaitement, des vaccinations, de l'hygiène domestique et du traitement de la diarrhée.

Grâce à un réseau de programmes sanitaires, éducatifs et/ou de développement dans 41 pays, les communautés baha'ies nationales participantes diffuseront ces brochures et encourageront leur utilisation dans les groupes de femmes, les écoles baha'ies, les activités pour les jeunes, les programmes d'alphabétisation des adultes et les conférences régionales.

"La stratégie mondiale de l'OMS pour "La santé pour tous en l'an 2000" est, pour une large part, un élément des buts que poursuivent nos communautés à travers le monde", nous a déclaré M. Giovanni Ballerio, représentant de la Communauté internationale baha'ie auprès des Nations unies à Genève.

"L'engagement croissant de nos communautés au niveau local, dans des projets relatifs à la santé en est un exemple, comme d'ailleurs l'action de notre communauté internationale, qui participe au programme "Des faits pour la vie". Depuis de nombreuses années, les baha'is ont également oeuvré au sein des Nations unies dans le cadre de conférences internationales sur la santé."

Les communautés nationales baha'ies gèrent une gamme de projets d'éducation sanitaire. Des stations de radios d'Afrique et d'Amérique du Sud émettent régulièrement des programmes d'information en matière de soins sanitaires. C'est ainsi qu'une station de Bolivie, "Radio baha'ie Caracolla", diffuse des programmes éducatifs sur la santé, tels que celui de l'UNICEF intitulé "Révolution dans la santé infantile", et elle a collaboré à la création de 35 centres d'écoute locaux pour la discussion de ces programmes.

(One Country n°3, pp.10-11)


8.4.5. PRÉVENTION DE LA TOXICOMANIE ET DE L'ALCOOLISME

Le Dr Ghairian (à gauche, fondateur de l'agence internationale baha'ie de la santé) rencontre le Ministre de la santé du Suriname au cours de sa visite dans sept pays, destinée à promouvoir la prévention de la toxicomanie.

En 1989, le Dr. A.M. Ghadirian s'est rendu dans sept pays d'Amérique latine afin de rencontrer des responsables des gouvernements et des services de santé sur le thème de "La prévention de la toxicomanie et de l'alcoolisme : une vision globale". Professeur de psychiatrie à l'université Mc Gill de Montréal, le Dr. Ghadirian a travaillé avec des adolescents dans le cadre de programmes de prévention de la toxicomanie au Canada. Il est aussi l'un des membres fondateurs de l'Agence internationale baha'ie de la santé, conseiller auprès de la Communauté internationale baha'ie pour les questions de prévention de l'alcoolisme et de la toxicomanie. Au cours de la dernière décennie, le Dr. Ghadirian a participé à plusieurs importantes conférences internationales, sous l'égide des Nations unies, sur la toxicomanie, et a dirigé de nombreux séminaires sur la prévention de l'alcoolisme et de la toxicomanie en Europe et dans les Amériques. Il est l'auteur d'un ouvrage intitulé "En quête du Nirvana : une nouvelle perspective sur la dépendance de l'alcool et des drogues" (Édition George Ronald, Oxford, 2ème édition, 1989).

ONE COUNTRY a interviewé le Dr. Ghadirian sur sa visite en Amérique latine et ses opinions en matière de prévention de la toxicomanie.

Question : Il est clair que la question de la drogue est devenue un problème national dans les pays d'Amérique du Nord et d'Europe. Avez-vous rencontré des problèmes similaires en Amérique centrale et en Amérique du Sud ?

Dr. Ghadirian : Dans les pays que j'ai visités - parmi lesquels Belize, Le Costa Rica, le Venezuela, la Trinité, la Guyane, le Suriname et la Guyane française, - j'ai constaté une préoccupation croissante quant aux problèmes de la consommation de drogue et d'alcool. Les drogues en provenance de pays d'Amérique du Sud tels que la Bolivie et la Colombie transitent par nombre de ces pays, en route vers l'Amérique du Nord.

Lorsque j'étais au Suriname, par exemple, un avion privé a atterri, et plus de 100 kilos de cocaïne ont été saisis - la plus forte saisie jamais réalisée dans ce pays. Les autorités se montraient fort surprises; elles ne pensaient pas qu'il existait dans ce pays un problème de toxicomanie aussi étendu.

Du fait de ce transit de la drogue, la jeunesse commence à être de plus en plus affectée. Dans certains pays, on cultive aussi la marijuana. Ainsi, l'accès à la drogue et sa disponibilité jouent ici un rôle certain. La consommation de drogue n'est pas aussi répandue qu'en Amérique du Nord et en Europe, mais elle a tendance à s'accroître.

Question : Les gouvernements s'attaquent-ils à ces problèmes ?

Dr. Ghadirian : Oui. Les autorités que j'ai rencontrées - parmi lesquelles le Premier ministre de Guyane et le Président de Trinité et Tobago, - se disaient très préoccupés. Les ministres surinamiens de la santé et de l'éducation m'ont déclaré que le gouvernement allait mettre en oeuvre un programme éducatif dans l'enseignement secondaire afin de prévenir la toxicomanie. Il aura pour but d'éduquer les enfants quant aux effets nocifs sur le cerveau des drogues illicites. Il y a bien des idées fausses sur la drogue parmi les jeunes, car ceux-ci ne connaissent pas toutes les données du problème. A travers le système éducatif, l'on devrait tout leur dire et leur fournir une vision claire de la prévention de la toxicomanie.

(One Country n°3, pp.12-13)


8.4.6. CONFÉRENCE MONDIALE SUR L'ÉDUCATION POUR TOUS - JOMTIEN, Thaïlande

La Conférence mondiale sur l'éducation pour tous intitulée : "Satisfaire aux besoins fondamentaux en matière d'éducation", qui s'est tenue du 5 au 9 mars 1990 sous l'égide conjointe du PNUD, de l'UNESCO, de l'UNICEF et de la Banque mondiale, a adopté à l'unanimité une déclaration et un plan d'action appelant tous les pays du globe à fournir, en l'an 2000, une éducation fondamentale à tous les citoyens.

La conférence mondiale, à laquelle participaient 1500 délégués représentant des gouvernements, des organismes intergouvernementaux et des Organisations non-gouvernementales (ONG), a également mis l'accent, dans ses résolutions finales, sur les besoins en matière d'éducation des femmes et des handicapés, sur le problème de l'aménagement de la dette extérieure et de l'ajustement structurel, sur le rôle des enseignants et la mission vitale des ONG dans l'amélioration du système éducatif à travers le monde.

M. Daniel Wegener, alors représentant de la Communauté internationale baha'ie auprès des Nations unies, a été choisi par les 130 ONG présentes à la conférence comme le représentant des ONG au sein du bureau qui présidait les sessions plénières.

D'après M. Wegener, que les ONG se soient vues accorder le statut de délégués à part entière leur a permis de participer activement aux sessions plénières, aux commissions de rédaction, et de contribuer largement aux résultats de la conférence.

"Cette conférence représente un niveau inédit de coopération internationale et intersectorielle sur un problème qui intéresse le monde entier", a dit M. Wegener. "Le degré d'engagement de la part de tous les participants fut impressionnant. Les événements mondiaux qui ont coïncidé avec la tenue de la conférence ajoutaient encore à la perception de tous selon laquelle de nobles idéaux peuvent réellement se transformer en actes: nous devrions ignorer les obstacles au développement de l'éducation qui, récemment encore, paraissaient insurmontables."

(One Country n°5, p. 13)


8.4.7. CHAIRE BAHA'IE POUR LA PAIX MONDIALE À L'UNIVERSITÉ DE MARYLAND - COLLEGE PARK, Maryland, Etats-Unis

La communauté baha'ie des États-Unis et l'université de Maryland, unissant leurs efforts en vue de la recherche d'approches et d'alternatives nouvelles en matière de paix, ont créé la "Chaire baha'ie pour la paix mondiale".

Créée sous les auspices du "Center for International Development and Conflict Management" (CIDCM) (Centre pour le développement international et la solution des conflits), cette chaire de l'université a pour but de développer la recherche interdisciplinaire, et d'organiser des cours et des séminaires sur la paix et les études baha'ies.

Elle favorise également les débats publics sur les questions que pose la solution des conflits et les problèmes internationaux exposés dans La promesse de la paix mondiale, une importante déclaration baha'ie sur les conditions requises pour réaliser la paix.

Lors des cérémonies qui eurent lieu à College Park, le 26 janvier 1990, la communauté baha'ie des États-Unis a remis à l'université de Maryland un chèque de 300 000$ destiné à ouvrir le fonds de dotation de la nouvelle chaire.

Pour l'université, cette chaire constitue un élément important du programme du CIDCM, a déclaré Murray Polakoff, doyen du Département de psychologie du comportement et des sciences sociales de l'Université de Maryland, qui supervise le Centre du développement international et de la solution des conflits. Le centre a déjà créé la chaire Anouar Sadat, qui traite de la gestion des conflits par rapport aux problèmes politiques, ainsi que la chaire Khalil Gibran consacrée à la paix et à la littérature.

"Malgré tout l'intérêt que présentent ces deux chaires", a dit M. Polakoff, "nous n'avions pas réellement une chaire qui traite de l'impact des valeurs spirituelles sur la paix, et c'est bien ce que nous apporte la chaire baha'ie. Nous avons pensé qu'elle méritait d'être créée".

C'est la première chaire baha'ie au monde, déclara le juge Dorothy Nelson, présidente du Conseil baha'i national des États-Unis, l'instance dirigeante de la communauté baha'ie américaine.

"L'Université de Maryland a déjà une vision planétaire des problèmes actuels", dit-elle. "Et elle a pour but d'aider les étudiants diplômés à consacrer leur vie à promouvoir la paix et à découvrir les principes spirituels qui nous permettront de la réaliser. Nous sommes donc extrêmement heureux de pouvoir contribuer à ce processus."

Le programme fut initialement proposé, par M. Edward Azar, directeur du CIDCM qui, après avoir lu La promesse de la paix mondiale, estima que ce document présentait des concepts "essentiels à la prise de conscience de l'interdépendance planétaire, à l'intensification du développement international et à la promotion de la survie collective".

Dans une lettre adressée à l'instance internationale de la communauté mondiale baha'i, en décembre 1988, M. Azar écrivait notamment : "J'ai été étudiant et professeur de polémologie et d'études pour la paix aux États-Unis ces vingt-cinq dernières années, et je suis persuadé que les principes que vous présentez si bien dans ce document sont plus valables que certains des modèles et des valeurs que nous dispensons aujourd'hui dans les universités américaines."

(One Country n°5, p.14)


8.4.8. CONFÉRENCE SOUS LES AUSPICES DE LA FONDATION ELIE WIESEL POUR L'HUMANITÉ - HAIFA, Israël


Dans tout le Moyen-Orient, des dissensions profondes et persistantes entre des groupes nationalistes ou religieux ont depuis longtemps provoqué l'animosité et la défiance, souvent avec des résultats violents.

Un groupe peu commun de personnalités internationales s'est réuni à Haifa dans l'espoir de trouver des solutions à ce problème. Les participants représentaient presque toutes les religions de la région : chrétiens, juifs, musulmans, druzes et baha'is, ainsi que des chercheurs, des universitaires, des auteurs et des journalistes de diverses nationalités et de diverses formations. Leur but était de discuter d'un nouvel instrument contre la haine : l'éducation, et de forger cet instrument.

La conférence, organisée du 2 au 5 juin 1990 sous les auspices de la Fondation Elie Wiesel pour l'humanité, s'intitulait : "L'éducation contre la haine : impératif de notre temps". Et, à l'issue de cette réunion de trois jours, il est certain que des étapes ont été franchies.

La conférence n'a pas eu de conclusion officielle, mais ce qui est important c'est qu'une réunion de personnalités aussi diverses ait eu lieu dans une région si souvent enflammée par la haine.

"La haine est un problème qui domine notre vie et qui, avec la technologie actuelle, peut conduire à la destruction du monde", a déclaré Sigmund Strochlitz, homme d'affaires américain. "Au cours de ces trois journées nous nous sommes enrichis en partageant le point de vue les uns des autres et nous partirons avec de nouvelles perspectives sinon des solutions."

Au cours de sept réunions, on a exploré, entre autres, le rôle de l'éducation, de la religion, de la littérature et des médias, dans le contexte de la haine.

a) La religion et la haine

Selon certains participants "la religion est une grande force pour la détermination des valeurs humaines et un élément majeur pour la compréhension de la haine".

D'autres ont fait remarquer que la religion elle-même est une cause de haine et qu'il pourrait être nécessaire de disloquer certains pouvoirs religieux pour y mettre fin. "Cela implique, dans beaucoup de cas, un renversement de la religion", a déclaré Blu Greenberg, écrivain et présidente de "Jewish Women Leaders Consultation".

Le Professeur Robert McAfee Brown, du "Pacific School of Religions" de Californie aux États-Unis, a souligné le rôle de l'amour, de la justice et du pardon pour ce qui est de la suppression de la haine. "Ce n'est pas la qualité des rapports rédigés ni la profondeur des débats qui détermineront la réussite ou l'échec de notre conférence, mais plutôt la mesure dans laquelle ses participants parviendront à comprendre ceux qui jusqu'ici pouvaient être les cibles potentielles de leur haine", a-t-il déclaré.

Pour Farid Wajdi Tabari, Cadi de Haifa et membre de la Cour suprême musulmane, c'est surtout l'égoïsme ou l'égocentrisme qui engendreraient la haine et les principales religions du monde offriraient "un baume efficace ou un élixir pour surmonter la haine et encourager l'amour".

M. Robert Henderson, Secrétaire du cconseil baha'i national des États-Unis, a fait valoir que ce comportement de plus en plus haineux et agressif qui caractérise le monde n'est pas intrinsèque à la nature humaine.

"Dieu nous a créés riches et nobles ; il nous a donné la capacité d'être bons, justes, aimants et de refléter ses propres attributs de Créateur", a-t-il déclaré. "Ces principes spirituels sont le fondement de la période de transition que nous devons traverser, transition qui, inéluctablement, fera passer l'humanité d'un groupe de "nations fragmentées et en guerre" à une confédération de nations unifiées, ayant pour seule frontière la planète."

"L'humanité est à un moment critique de son évolution en tant qu'espèce", a ajouté M. Henderson, "son destin est d'avancer inexorablement vers l'unité, vers la réalisation d'un monde uni".

b) Le rôle des médias

Le lauréat du prix Nobel, Elie Wiesel, qui était présent à toute la conférence, a souligné l'importance des mots à la fois pour créer la haine et pour la combattre. Il a qualifié l'acte d'écrire comme un acte moral. "Les mots peuvent tuer, les mots peuvent guérir, les mots peuvent devenir prières, les mots peuvent être transformés en propagande bon marché, incitant à la haine."

M. Vitaly Korotich, rédacteur en chef de "Ogonyok", une des revues ex soviétiques les plus libres d'expression, a invité les médias à reconnaître leur propre rôle dans la création de l'image de l'ennemi haï, qui conduit au résultat logique de la guerre. Il a invité les journalistes à reconnaître leur responsabilité lorsqu'ils attisent les flammes de la haine et a exhorté la presse à renouveler son sens de l'éthique. Il a également souhaité une coopération accrue entre la télévision, la radio, la presse écrite et les éditeurs de manuels scolaires, afin d'oeuvrer à l'élimination de la haine et de la suspicion.

M. Korotich a ajouté que la télévision joue un rôle important dans la démocratisation mondiale et que les pays ne peuvent pratiquement plus contrôler les images. Ainsi, la destruction du mur de Berlin est un exemple spectaculaire d'un événement qu'a pu voir, partout dans le monde, le grand public. Les images télévisées pulvérisent les murs entre les peuples, les murs qui permettent à la haine de s'implanter et de s'accroître, mais ces images ne sont pas suffisantes pour mettre fin à la haine. M. Korotich a souligné qu'il fallait des efforts systématiques, en particulier la réécriture de l'Histoire et l'enseignement à partir de ces nouveaux textes.

C'était la troisième d'une série de conférences internationales, sous l'égide de la Fondation Elie Wiesel, sur le sujet de "L'anatomie de la haine et ses conséquences". Les deux premières ont eu lieu à Paris et Boston, la quatrième clôturait le cycle fin août de la même année, à Oslo, en Norvège.

(One Country n°7, pp.18-19)


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