Le courage
d'aimer
Shoghi Ghadimi
5. L'amour et la science
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5.8. Qui nous dira la vérité ?
On raconte qu'arrivé à Babylone, Alexandre
Le Grand, convoqua les chefs religieux de son époque.
- "Dites-moi, leur demanda-t-il, comment appelez-vous l'Être Suprême?"
- "Brahama, dit le prêtre indien, ce qui signifie le grand."
- "Hormoz, dit le prêtre zoroastrien, ce qui signifie la Lumière."
- "Jehovah, répond le prêtre juif, ce qui signifie, Il était, Il est, Il doit
venir."
- "Maintenant vous n'avez qu'un roi et vous n aurez qu'un seul Seigneur et vous
l'appellerez Zeus."
Les prêtres furent consternés. Alors un vieux sage intervint et dit:
- "Comment appelez-vous le soleil?"
Et chacun dit le nom sous lequel on désignait le soleil
"Et si dorénavant vous l'appelez du même nom Hélios, le soleil ne continue-t-il
pas de vous donner sa lumière?"
Alexandre fut confus de cette remarque et dit:
- "Que chacun appelle son Seigneur comme il l'entend."
Cette histoire est instructive en ce sens que s'il y a une différence entre
les NOMS, ce n'est pas une raison pour qu'il y ait un différend entre NOUS,
nous qui sommes les créateurs des noms et les noms restant nos créations. Est-il
concevable que le créateur se laisse tromper par sa création?
Non, nous avons un même soleil qui nous donne sa lumière et sa chaleur. Et nous
avons et aimons un seul Dieu, notre Père à tous, qui nous dispense Ses bienfaits.
Restons donc réunis, comme les membres d'une seule famille.
Un seul Dieu, une seule famille.
Voilà toute la vérité, qu'une fois de plus doit se rappeler l'humanité.
je dis bien "se rappeler" car cette Vérité, on la connaît depuis l'antiquité,
mais on l'oublie, raison pour laquelle Dieu nous la rappelle d'âge en âge, par
Ses Messagers connus sous le nom de différents Livres. Or tous ces Livres ne
sont, en réalité, qu'un seul et même Livre avec différents chapitres. C'est
ce que nous allons voir.
Prenons, par exemple, ces deux livres qui sont connus sous les noms Ancien Testament
et Nouveau Testament (vous voyez c'est toujours "Testament", testament qui est
renouvelé) Nos ancêtres ont uni ces deux livres ensemble pour leur donner un
seul nom la Bible, qui, traduit en français, veut dire Le Livre. Et ceci en
dépit du fait qu'au point de vue des lois concernant l'aspect matériel de la
vie, ces deux livres se contredisent. Ainsi, par exemple, pour l'un, l'inobservance
du sabbat est un cas de condamnation à mort pour l'autre le sabbat est aboli.
Pour l'un, l'incirconcision est un autre cas de condamnation à mort, pour l'autre
"la circoncision étant de coeur" est purement et simplement abolie. Mais comme
du point de vue spirituel (exhortation au pardon, à l'amour, à la charité ...)
ils sont identiques (et c'est cela qui est essentiel en religion) nos ancêtres
les ont considérés comme deux chapitres d'un même livre et les ont unis ensemble
sous forme d'un seul livre, la Bible, qui comme je l'ai dit, signifie Le Livre.
Notons que chez les Musulmans leur livre, le Qur'an est également appelé EL
KITAB ce qui veut dire Le Livre. Ceci nous amène à nous demander s'il ne serait
pas juste de considérer le Qur'an comme le troisième chapitre du LIVRE DE DIEU.
Et pourquoi ne pas prendre en considération le livre des Bouddhistes, par exemple?
Afin de répondre à ces questions, nous allons comparer le christianisme avec
le bouddhisme et l'islam.
Ce qui caractérise le christianisme avant tout c'est la loi du pardon qui remplace
la loi du talion.
Bouddha aussi a prêché le pardon. Et si jésus parle de l'enfer si on ne pardonne
pas, Bouddha nous invite plutôt à. raisonner. Voilà, par exemple, ce que nous
lisons dans les Écrits bouddhistes:
Ayant appris que Bouddha prêche de rendre le mal par le bien, un homme vient
auprès de lui et se met à l'insulter. Bouddha reste placide devant toutes ces
injures qui lui sont adressées. Mais lorsque l'offenseur cesse de l'injurier,
Il lui dit:
- "Mon fils, lorsqu'un homme décline l'offre qui lui est faite, à qui appartient
cette offre?"
- "A celui qui l'a faite": répond l'homme.
- "Tu m'as adressé ces insultes et je ne les accepte pas. C'est donc à toi-même
qu'elles reviennent. Reprends-les." Lui dit Bouddha.
Quant à l'Islam on a tort de croire qu'il prêche la vengeance. Sur le plan personnel,
le Prophète Muhammad prêche le pardon comme Ses prédécesseurs. Non seulement
Lui-même Il pardonnait ceux qui l'offensaient, mais Il exigeait que Ses adeptes
en fassent autant. L'histoire suivante illustre bien jusqu'à quel point Muhammad
insistait sur la nécessité de pardonner.
L'oncle de Muhammad était un guerrier arrogant et orgueilleux. Un jour, rentrant
de la chasse il apprend que son neveu, Muhammad, a été maltraité en son absence.
Bien que n'étant pas d'accord avec la doctrine de son neveu, il décide de se
venger. Impatient, il demande à Muhammad les noms de ceux qui L'ont insulté.
Calmement Muhammad lui dit qu'il ne les aura pas à moins qu'il ne prononce la
formule "Je témoigne qu'il n'y a pas d'autre dieu que Dieu et que Muhammad est
Son Messager". Précipitamment son oncle Hamzih répète cette formule (formule,
par la prononciation de laquelle on devient musulman).
Et alors Muhammad lui dit que celui qui prononce ces paroles (autrement dit
celui-ci est un musulman) ne se venge pas.
A une autre occasion, Il disait: "Veux-tu goûter en ce monde de tout ce qu'il
y a de plus doux aux yeux de Dieu? Rends la colère par la douceur".
Non seulement Muhammad insiste sur le devoir de pardonner et le plaisir de pardonner
en ce monde, mais Il promet le paradis de l'au-delà à ceux qui pardonnent: "Le
paradis est destiné à ceux qui maîtrisent leur colère et à ceux qui pardonnent
aux hommes (leurs offenses)" Qur'an 3/128.
Et Il recommande le pardon comme moyen pour se faire des amis et des protecteurs:
"Rends le bien pour le mal et tu verras ton adversaire se changer en protecteur
et ami" dit encore le Prophète Muhammad.
Mais là où Il n'admet plus le pardon c'est lorsqu'il s'agit de combattre la
tyrannie. je m'explique.
Pour les Arabes, contemporains de Muhammad, le moyen d'exister le plus courant
était le pillage et le vol. Peut-on pardonner aux voleurs et aux brigands leurs
crimes? Ni Jésus ni Bouddha ne l'auraient jamais admis.
A l'issue des massacres continuels entre eux-mêmes, ceux qui sortaient vainqueurs
emmenaient les femmes et les enfants comme esclaves destinés à la vente.
Peut-on pardonner aux barbares sanguinaires leur sauvagerie? Jésus ou Bouddha
l'auraient-ils fait?
Il y avait parmi les Arabes des tribus qui enterraient vivants les nouveau-nés
si c'étaient des filles.
Quel crime plus abominable que de tuer les enfants, Quelle serait l'attitude
de jésus face à de tels crimes contre les enfants, Lui, qui citait les enfants
comme exemple pour les grands. Ce jésus qui n'a pas pu supporter la vue des
tables de marchandises installées dans le temple et qui a chassé les marchands
à coups de fouet.
Mais ce n'est pas seulement le pardon que prêchent le bouddhisme et l'islam
comme le fait le christianisme. Il en est de même en ce qui concerne toutes
les vertus. A titre d'exemple, nous allons en citer quelques-unes.
Si jésus dit: "Heureux sont ceux qui sont doux, car ils hériteront la terre"
Bouddha dit de son côté: "Bienheureux ceux qui disent ce qu'ils savent avec
douceur, et qui gagnent leur vie sans blesser aucun être vivant".
Si jésus dit: "Heureux les pacifiques, car ils seront appelés fils de Dieu"
Bouddha dit: "Bienheureux ceux dont la conduite est pacifique".
Jésus dit: "Heureux les miséricordieux car ils obtiendront la miséricorde",
Bouddha dit: "Bienheureux ceux qui ont compassion d'autrui".
Toutes ces vertus sont exaltées dans de nombreux versets du Qur'an qui insiste
surtout sur la PATIENCE, vertu pour laquelle la récompense est illimitée: "Quant
aux patients, leur récompense est illimitée" (Qur'an 39: 13).
Autrement dit, pour toute vertu il y a une récompense limitée sauf pour la patience
dont la récompense n'a pas de limite.
Pour résumer, disons qu'au point de vue spirituel il y a identité entre le bouddhisme,
le christianisme et l'islam.
Prenons le cas de ces deux dernières religions. Nous voyons que malgré l'identité
entre leurs enseignements spirituels, il y a eu des guerres entre leurs adeptes.
Pour quelle raison? Pour la même raison qu'il y a eu des guerres et qu'il y
a encore des guerres entre les chrétiens eux-mêmes (et c'étaient les guerres
les plus meurtrières de l'histoire). C'est que les uns comme les autres ont
abandonné l'esprit de leur foi, cet esprit qui consiste en entente et en harmonie.
Ainsi le Prophète Muhammad dit: "Quiconque commet une injustice à l'égard des
Chrétiens sera mon ennemi".
Dans Son livre, le Qur'an, Il présente le peuple chrétien comme le peuple le
plus proche des musulmans, et ceci par son esprit d'amour: "Et tu trouveras
certainement que ceux qui sont les plus proches de ceux qui croient (les Musulmans)
sont ceux qui disent "En vérité, nous sommes chrétiens" (5: 85).
Le Prophète Muhammad fait accepter le Christ par les Arabes, ce que les missionnaires
chrétiens n'ont pas pu faire pendant 6 siècles.
Dans Son livre, le Qur'an, Il attribue au Christ plus de miracles que ne le
font les Evangélistes en affirmant, par exemple, que jésus déjà dans le berceau
savait parler.
Il consacre à l'exposé de la vie du Christ une grande partie du Qur'an.
Mais tout cela passe en second plan en comparaison d'un fait historique capital:
c'est que le Prophète Muhammad a présenté la doctrine chrétienne dans un esprit
que seule la génération actuelle est en mesure d'apprécier, esprit à la fois
conforme à l'Évangile et à la science.
Ainsi par exemple, Muhammad réfute la conception de Dieu personnel, pour Lui,
jésus est l'image de Dieu invisible. Ce qui est conforme au Nouveau Testament.
"jésus est l'image de Dieu invisible" (Colos 1 /15).
Et c'est également conforme à la science, car selon les savants (et plus particulièrement
Einstein) "C'est dans le concept de Dieu personnel qu'il faut voir la principale
source de conflit entre la science et la religion".
De même, pour Muhammad l'expression "Fils de Dieu" doit être comprise dans le
sens spirituel. Car précise-t-il: "Dieu n'a pas engendré. Il n'a pas été engendré".
C'est encore conforme à la Bible. Car si on prend l'expression "Fils de Dieu"
dans le sens littéral ce n'est plus jésus qui est le premier Fils de Dieu. "Ainsi
parle l'Éternel" précise la Bible "Israël est mon fils, mon Premier né" (Exode
4 /22).
Jésus Lui-même n'a-t-Il pas dit que tous les pacifiques sont fils de Dieu?
Selon Muhammad, à partir du moment où l'on accepte le Messager de Dieu on a
Dieu comme Père, on devient fils de Dieu, car précise-t-Il "C'est Dieu qui guide
l'homme qu'Il veut".
N'avons nous pas la même précision dans l'Epître aux Romains: "Tous ceux qui
sont guidés par l'Esprit Saint sont fils de Dieu" (Romains 8 /14).
Et ce qui est non moins important et même vital pour l'humanité c'est le principe
de la Révélation progressive, principe conforme aussi bien à la science qu'à
la Bible.
En effet, Muhammad dit: "En vérité viendront vers vous des Envoyés de Dieu du
milieu de vous" (Qur'an 7 /32).
La science ne confirme-t-elle pas la révélation progressive de toute vérité
(qu'elle soit scientifique ou spirituelle)?
Quant à la Bible, Saint Pierre ne rappelle-t-il pas aux juifs la promesse de
Dieu, disant qu'après Moïse, Il suscitera un autre Prophète?
Moïse a dit: "le Seigneur voire Dieu vous suscitera d'entre vos frères un prophète
comme moi" (Actes 3.22).
Jésus, Lui-même n'a-t-Il pas prié pour l'avènement d'un autre Consolateur après
Lui: "Et moi je prierai le Père et Il vous enverra un autre Consolateur" (jean
14/16),
Dans un cas comme dans l'autre malgré la clarté des textes parlant de la succession
des Messagers de Dieu, le clergé judaïque s'obstina dans son rejet de jésus
en disant que Moïse est le dernier, de même que le clergé chrétien continue
de dire que jésus est le dernier.
Et par une ironie du destin, le clergé islamique, tout en reprochant aux juifs
et aux Chrétiens leur attitude, continue d'agir exactement comme eux en reniant
la Révélation baha'ie promise par Moïse, jésus et Muhammad.
Après cette parenthèse que j'ai pris la liberté d'ouvrir, revenons à notre sujet,
à savoir la comparaison des religions. Et cette fois du point de vue de la civilisation
qu'elles ont fondée.
Il est admis unanimement que jésus (aussi bien que Bouddha et Muhammad, chacun
à son tour) a fondé une nouvelle civilisation.
Afin d'être aussi bref que possible, je laisse l'exposé de la civilisation fondée
par Bouddha pour une autre fois.
Quant à la civilisation chrétienne, vous la connaissez merveilleusement bien.
Mais ce qu'on ne connaît pas assez en Occident, c'est le rôle de l'Islam dans
l'histoire des civilisations.
Et c'est là-dessus que je vais dire juste quelques mots. Pour ce faire ne serait-ce
pas mieux de nous référer aux ouvrages des auteurs occidentaux.
David Hofman écrit dans "la Renaissance de la Civilisation": "les Arabes devinrent
les maîtres du monde en médecine, en mathématique et en astronomie, ils exécutèrent
d'importantes opérations chirurgicales, se servant de l'alcool comme anesthésique,
tandis que les Chrétiens, plongés encore dans les ténèbres de l'ignorance, payaient
les incantations des prêtres, qui devaient guérir leurs malades. Les Arabes
inventèrent le système numérique moderne sans lequel les calculs modernes seraient
impossibles (que le lecteur essaie de calculer ses impôts avec les chiffres
romains!)
Les Arabes créèrent une forme d'architecture qui se classe parmi les plus belles
du monde; ils étendirent leur culture à l'ouest jusqu'en Espagne et à l'est
jusqu'aux Indes.
Baghdad devint le centre du monde, grâce non seulement à ses richesses, mais
aussi à ses arts et à sa culture. Ils réunirent, dans une étroite fraternité
des peuples aussi dissemblables que les Arabes, les Turcs, les Hindous, les
Egyptiens, les Maures et les Persans. Ils préservèrent la culture et la philosophie
grecques que l'Église primitive avait voulu détruire.
Ce fut aussi les Arabes qui se firent les gardiens de la science classique pendant
le Moyen Age; ils ajoutèrent beaucoup à sa richesse avant de la rendre au monde
occidental par l'intermédiaire des universités arabes (telle celle de Cordoue),
des croisades et des marchands et donnèrent aux Chrétiens ce nouvel élan que
nous appelons la Renaissance et qui marqua le début de notre civilisation".
L'auteur de l'ouvrage intitulé "The Arabs" (Princeton 1943) écrit entre autre
que les savants de Cordoue (Centre Culturel Islamique) avaient 17 bibliothèques
dont l'une contenait plus de 40000 livres.
Et l'on sait que la première université européenne fut établie en Sicile islamique
au 9e siècle.
Nombreux sont les ouvrages sur la civilisation islamique, pour plus de renseignements
vous pouvez vous y référer.
L'étude de l'histoire des civilisations nous amène donc à reconnaître qu'à l'origine
de toute nouvelle civilisation, se trouve la naissance d'une nouvelle religion
ou plus exactement un stade nouveau dans l'évolution de la religion, car comme
nous l'avons dit il n'y a qu'une religion, la religion de Dieu et un Livre,
le Livre de Dieu.
Or en présence des signes de l'effondrement de la civilisation actuelle, tout
le monde parle de la nécessité d'une nouvelle civilisation. Si c'est ainsi,
pourquoi ne pas profiter de l'expérience du passé et chercher les bases de cette
nouvelle civilisation dans le stade actuel de l'évolution de la religion, j'entends
la Foi baha'ie qui, une fois de plus, invite les hommes à revenir à la pureté
primitive de la religion, à l'esprit de la religion, cet esprit qui s'exprime
en deux mots un seul Dieu, une seule famille, la famille humaine.
N'est ce pas en cela que réside cette Vérité que chacun accepte sans hésiter?