La communauté mondiale baha'ie et son action
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6. Développement économique et social

6.1. Introduction

Bien que limitée en nombre et en moyens si on la compare aux autres religions beaucoup plus anciennes, la communauté mondiale baha'ie a déployé ces dernières années, des efforts considérables pour essayer de résoudre les problèmes du sous- développement et de la dégradation de l'environnement dans le monde. Ces efforts sont significatifs non pas tant par leur ampleur que par leur aspect novateur et l'espoir qu'ils apportent au monde. Selon le dernier recensement, la communauté baha'ie gère plus de 1 300 projets de développement dans le monde. Ces activités vont de simples centres d'alphabétisation à des travaux de reboisement, de la gestion de dispensaires à celle de centres de recherche environnementale. La plupart de ces projets sont entrepris dans des pays en voie de développement.

Ce qui distingue l'approche baha'ie, c'est l'intégration des principes spirituels, sociaux et administratifs énoncés par Baha'u'llah il y a un siècle. Dans chaque domaine particulier, qu'il s'agisse de spiritualité, d'idéal social ou de méthode d'administration, les enseignements de Baha'u'llah offrent une approche et une perspective nouvelles.

Vu globalement, l'impact est multiplié: les baha'is pensent que les enseignements de Baha'u'llah offrent des instruments complets pour mener l'action sociale collective dont l'humanité a besoin pour survivre et prospérer aujourd'hui.

Les enseignements spirituels de Baha'u'llah soulignent l'importance de l'autonomie et de l'autosuffisance et font l'apologie d'une approche globale et holistique pour comprendre les problèmes sociaux et leurs causes sous-jacentes. En particulier, ils relient les éléments les plus profonds de la nature humaine - éléments spirituels par essence - et font ainsi appel aux capacités de motivation de l'esprit humain.

Les enseignements sociaux de Baha'u'llah contiennent un ensemble de règles en matière d'action sociale et de conduite morale qui sont non seulement conformes aux idéaux les plus nobles de la société moderne mais aussi à ses aspirations les plus profondes. Ils incarnent la justice et ont des conséquences directes et pratiques sur la recherche de solutions aux problèmes sociaux.

Par exemple, on ne peut essayer d'éliminer la pauvreté sans mener en même temps une action en faveur de l'égalité des femmes. La grande majorité des pauvres dans le monde est constituée de femmes et d'enfants. Dans de nombreux pays en voie de développement, en particulier en Afrique, ce sont les femmes qui cultivent la terre. Les baha'is pensent que l'action menée pour garantir la sécurité alimentaire dans ces pays dépend, pour une large part, de l'amélioration de la condition féminine. Les problèmes de développement et de l'environnement sont également liés aux problèmes de racisme, de l'analphabétisme et des conflits religieux.

L'Ordre administratif conçu par Baha'u'llah représente également une nouvelle méthode d'action sociale. La structure du réseau mondial d'Assemblées baha'ies locales, nationales et internationale, propose un nouveau modèle d'administration décentralisée. C'est particulièrement vrai des Assemblées spirituelles locales qui peuvent être considérées comme des organes de décision, à la base, capables de comprendre les choix qui s'imposent en matière de développement et de faire ces choix. Par ailleurs les procédures de consultation employées par les baha'is sont applicables à de nombreux autres cadres pour stimuler la coopération et le développement social.

Sur un plan historique, la religion a été l'un des moteurs les plus puissants du changement d'attitude et de comportement de l'homme. Elle a toujours défini la nature de nos objectifs et de nos relations. Et c'est sur ce point - celui de la lutte pour changer les attitudes et le comportement humains - que l'approche baha'ie des problèmes d'éducation, de développement et de conservation de la nature offre peut-être les plus grands espoirs.

Étant donné que les ressources de la communauté baha'ie sont limitées, l'ampleur de son action est souvent limitée à la localité immédiate. Néanmoins, la méthode de conception et de mise en oeuvre de ces projets est typiquement baha'ie. Tous renforcent, directement ou indirectement, l'unité de l'humanité. Nombre d'entre eux mettent l'accent sur l'amélioration de la condition féminine ou cherchent à servir les intérêts des populations minoritaires qui ont fait l'objet d'une discrimination. Dans la plupart des cas, on fait largement appel à la consultation pour impliquer ceux à qui les projets tentent d'apporter une aide. Il en découle, globalement, un nouveau modèle de développement social et économique bien intégré et complet.

(Les Baha'is, pp. 63-65)


6.2. Point de vue baha'i

6.2.1. PARTICIPATION "POPULAIRE"


Malgré des milliards de dollars d'aide, des centaines de milliers d'heures de travail, et un océan de bonnes intentions, de nombreux pays sont dans une plus mauvaise situation qu'il y a 30 ou 40 ans, avant le début des programmes de développement intensifs de type occidental.

Les spécialistes du développement économique et social se sont donc tournés vers d'autres solutions. Parmi les idées nouvelles les plus prometteuses, on trouve celle de la participation des masses ou pour utiliser un terme largement adopté aux Nations unies, la participation "populaire".

L'élan en faveur de la participation de la population locale vient du fait que les programmes traditionnels de développement échouent fréquemment parce que la population elle-même n'a pas été consultée ou invitée à participer. Sans cette participation, les efforts se détachent de la réalité locale. Les gens deviennent de simples objets du développement, n'ayant aucune influence sur leur propre destin. Et donc ils ne perçoivent pas d'intérêt à poursuivre cet effort.

La théorie naissante de la participation des populations locales indique que si l'on encourage les masses à participer elles-mêmes, leurs besoins en matière de développement seront mieux satisfaits. L'effort international sera donc davantage appuyé par la population locale et sa réussite sera beaucoup plus probable.

L'élan de ce nouveau mode de pensée est lié au respect croissant des droits universels de l'homme et à la reconnaissance du fait que chacun, quel que soit son niveau d'éducation, de développement social ou de situation financière, a droit, dans le cadre des lois, à un statut et à un traitement égal.

Mais, dans l'optique baha'ie, la vraie participation de la population viendra lorsque les peuples du monde - à la fois ceux en voie de développement et ceux qui sont développés matériellement - intègreront à leur réflexion plusieurs notions qui dépassent le cadre actuel des droits de l'homme.

La première notion - clef permettant d'encourager une véritable participation de la population implique que l'on reconnaisse l'unicité de l'humanité. Cette reconnaissance exige un changement d'attitude de la part de tous les peuples - à la fois de ceux qui sont aidés et de ceux qui souhaitent aider.

La deuxième notion est la reconnaissance que les êtres humains sont, de par leur essence, des créatures spirituelles. En tant que tels, tous les hommes et toutes les femmes sont créés avec une noblesse intrinsèque et possèdent des capacités spirituelles, intellectuelles et physiques insoupçonnées. Le véritable développement intervient lorsque ces capacités latentes sont mises en valeur.

En 1975, la Communauté internationale baha'ie a soumis à la Commission du développement social des Nations unies une déclaration à ce sujet. En voici un extrait :

"... la participation de la population, si indispensable au développement économique et social, exige une modification fondamentale des valeurs et des attitudes de la part de chaque individu et de son groupe social, [modification] ayant pour origine une conviction bien enracinée de l'unicité organique de l'humanité. Pour réaliser un développement réussi, il faut admettre avant tout que chaque personne est inséparable de l'ensemble de l'humanité..."

Au fur et à mesure que les spécialistes du développement examinent de plus en plus près la notion de participation de la population, et qu'ils recherchent des moyens pour mettre en oeuvre cet idéal, ils pourront trouver utile l'expérience de la communauté baha'ie mondiale.

Malgré leur racine religieuse, les institutions baha'ies ont également comme mission d'assumer le bien-être social et économique de l'humanité. Tant au niveau local que national ou international, ces institutions fonctionnent suivant un modèle comprenant des mécanismes visant à encourager la participation de toute la population aux fins indiquées ci-dessus.

Plus que de la technologie ou des fonds, le véritable développement exige, du point de vue baha'i, de nouvelles méthodes pour l'organisation des affaires humaines, fondées sur ce type de "participation de la population", où l'on tient compte de tous les points de vue et où tous les hommes sont traités avec le même respect.

Les succès des peuples et des nations "développés" ne reposeront pas sur les connaissances techniques, les ressources naturelles ou même l'accumulation de capitaux. Le développement découlera du degré de respect dû à la personne humaine et de l'évolution sociale qui en résultera.

(One Country n°4, pp.2-3)


6.2.2. LA PRISE DE DÉCISION EN GROUPE

La caractéristique la plus intéressante du système administratif baha'i, du point de vue du développement économique et social, réside dans le processus de consultation qui l'anime. Parmi les principes qui guident ce processus - tous émanant des Écrits de Baha'u'llah - on trouve l'effort vers le consensus, l'utilisation de la méditation et de la prière pour se préparer à la résolution des problèmes, la responsabilité qu'a chaque individu d'exprimer sa propre opinion selon sa conscience, la modération et la courtoisie dans l'expression, le détachement par rapport à ses propres idées une fois qu'elles ont été proposées, et l'obligation pour tous de travailler à la réussite des projets qui ont été adoptés lors de la décision de l'assemblée.

Résultat important : au fur et à mesure que la Foi baha'ie s'établissait à travers le monde, un grand nombre de personnes ont pris part à l'apprentissage pratique de cette méthode de prise de décision. Du fait que le fonctionnement baha'i comporte aussi une consultation régulière de l'assemblée locale avec l'ensemble des membres de la communauté, il est exact de dire que la plupart des membres de la Foi baha'ie sont, à un degré ou à un autre, des étudiants de ce processus de consultation et de ses implications. C'est à ce phénomène, plus qu'à autre, que les baha'is attribuent le caractère d'autonomie d'une grande part de leur travail de développement.

(Développement économique et social, p.3)


6.3. Actions baha'ies

6.3.1. ÉCOLE ANIS ZUNUZI : UN MOTEUR DU DÉVELOPPEMENT - LILAVOIS, Haïti


Ces enfants de l'école primaire viennent des régions semi-rurales qui entourent le site de l'école Anis Zunuzi (nom d'un jeune babis martyrisé en 1850 en compagnie du Bab, l'un des deux fondateur de la foi baha'ie. L'école Anis Zunuzi met l'accent sur l'éducation morale et l'éducation.

Desanges Exama a quitté l'école après la sixième année mais il en sait autant sur le travail de développement - et pourquoi il n'a pas toujours abouti à Haïti - que n'importe quel spécialiste occidental arrivé dans l'île dans le cadre de programmes d'aide, disposant de budgets multimillionnaires en dollars.

A 53 ans, M. Exama travaille pour l'école baha'ie Anis Zunuzi.

Il est convaincu que le meilleur chemin vers le développement est l'éducation, surtout lorsque celle-ci enseigne des valeurs morales et des méthodes de coopération. "Si l'on apprend à travailler ensemble", dit-il, "tout devient possible".

Cette philosophie est partagée par tous ceux qui travaillent à l'école Anis Zunuzi, un groupe de bâtiments blancs, propres et agréables, situés à environ 15 km de Port-au-Prince, la capitale d'Haïti.

L'école privée Anis Zunuzi est progressivement devenue un institut aux multiples facettes, qui lance et soutient des projets de développement à la base dans tout Haïti. Ces projets comprennent des écoles maternelles, des cours sur l'organisation de la communauté et des efforts locaux de reboisement. Un fil conducteur relie toutes ces activités entre elles : apprendre à coopérer et à décider en tant que groupe est plus important pour un développement à long terme que l'aide matérielle.

Ribentrop Louis, 23 ans, membre du comité de développement de la communauté baha'ie haïtienne, rappelle: "A l'époque , on faisait subir aux esclaves des choses absolument terribles. Pour forcer les gens à obéir, on les battait, on leur coupait les bras, on les enterrait vivants. Cette mentalité de "oui-chef" existe toujours chez beaucoup et on la retrouve à tous les niveaux de la société, rendant de nombreuses personnes incapables d'agir par elles-mêmes."

M. Louis affirme que la conception baha'ie du développement est unique à Haïti parce qu'elle tend à dépasser cet héritage en apprenant aux citoyens à coopérer entre eux, plutôt que simplement se partager l'aide venue de l'extérieur. L'école Anis Zunuzi contribue grandement à cette éducation, grâce à ses divers programmes : primaire, secondaire, technique, classes d'adultes, instituts, le tout sous la responsabilité de l'Assemblée nationale baha'ie.

a) Enseigner des valeurs morales

En dépit de l'interdiction officielle des châtiments corporels, dans la plupart des écoles d'Haïti, assurer la discipline consiste à battre et à fouetter les élèves : autre héritage d'un lourd passé. A l'école Anis Zunuzi, il est depuis toujours interdit de frapper un élève. Pour un observateur extérieur ce détail peut paraître insignifiant, mais il place cette école à part, la différencie des autres écoles et donne aux élèves un sens rare de responsabilité pour leurs propres actions.

Un autre détail caractéristique de cette école, c'est son usage du créole dans l'apprentissage de la lecture. "Commencer à lire en créole permet aux élèves d'apprendre à penser par eux-mêmes", déclare Hans-Jürgen Thimm, ancien proviseur de l'école. "Si vous commencez par le français, ils n'apprennent qu'à répéter comme des perroquets. C'est en fait une profonde réforme."

Mais la vraie différence de l'école c'est son effort pour insérer des valeurs morales, ou dites "spirituelles", selon les baha'is, dans les programmes.

Les premiers livres, écrits en créole à l'école même, sont utilisés au début de la scolarité. Ils contiennent de courtes histoires pour illustrer les différents mots nouveaux et les sons. Dans le premier livre de lecture, la lettre "O" est illustrée par l'histoire d'un garçon qui aide son père et apprend les vertus du travail. Une autre histoire parle d'une femme qui raccommode laborieusement une robe de mariée, bien qu'elle soit fatiguée et préfèrerait laisser le travail inachevé.

b) Un moteur du développement

Les instituts pour adultes à Anis Zunuzi insistent aussi sur les valeurs morales et, particulièrement, sur une méthode de décision de groupe sans perdants, que les baha'is appellent la "consultation". Les individus, qui connaissent les principes de la consultation et d'autres techniques de coopération communautaire, organisent à leur tour, et encadrent l'administration de projets de développement dans leurs propres régions.

Le programme extra-scolaire de l'école, établi en 1983, reçut à ses débuts une somme de 60 000 dollars de l'Agence canadienne de développement international (ACDI). Cependant, aujourd'hui, la communauté baha'ie haïtienne a pris sa part de responsabilité financière, aidée par d'autres communautés baha'ies du monde.

A présent, quatre écoles maternelles ont été établies en plus de celle d'Anis Zunuzi et elles sont supervisées par les conseils baha'is élus localement.

Trois autres écoles primaires, comprenant la maternelle et les quatre premières années et comptant une centaine d'élèves, existent dans les villes de Liancourt, Pont Benoît et Pitimi. Elles sont aussi supervisées par le conseil baha'i local de chaque ville. Une petite pépinière a été aménagée à Liancourt, dans le cadre d'un projet national de reboisement.

A l'école Anis Zunuzi, on trouve plusieurs autres projets extra-scolaires de développement. On y voit une pépinière et un service de distribution de jeunes arbres aux fermiers locaux.

c) Un processus évolutif

Bien que l'école Anis Zunuzi fut créée en 1980, grâce à un don extérieur de 250 000 dollars et d'abord supervisée par un conseil international, progressivement, l'école évolua et devint une institution qui tire son soutien et sa direction de la population locale.

Aujourd'hui, l'école est dirigée par un comité de membres du conseil local et cette année, le proviseur, américain d'origine, a laissé la place à un éducateur haïtien, M. François Lhorrisson-Fils.

"A Haïti, en général, nous manquons d'espoir, de rêves, et c'est le plus grand obstacle à notre développement, dit M. Lhorrisson-Fils. Pour surmonter cet obstacle, chaque enfant doit acquérir une vision de son propre avenir et en être conscient à un degré tel que cela deviendra contagieux et affectera les autres. Voilà ce que nous essayons de faire."

(One Country n°4, pp.1, 4-8)


6.3.2. PROTECTION DE LA FORÊT - LILAVOIS, Haïti

La pépinière de l'école Anis Zunuzi produit plus de 120000 plants par an. Cette pépinière collabore au projet de reboisement de la Fondation pan-américaine du développement.

A la saison des pluies, l'on dit que d'immenses rivières de boue brune s'éloignent des côtes de l'île pour se perdre dans les eaux céruléennes de la mer des Caraïbes. La cause en est le déboisement massif du pays, un des pires de l'hémisphère Ouest, qui laisse les pluies raviner le sol, entraînant le précieux humus à la mer.

"Les estimations oscillent entre 50 et 60 millions d'arbres coupés chaque année", affirme Arlin Hunsberger, Directeur du projet de développement agro-forestier d'Haïti de la Fondation pan-américaine de développement (FPAD) l'un des principaux organismes de reboisement d'Haïti. "Malheureusement, on estime à seulement 6,7 millions le nombre d'arbres replantés l'an dernier par les fermiers."

La pauvreté d'Haïti en arbres remonte au début du 19e siècle, lorsqu'au cours de révoltes d'esclaves, des régions entières furent brûlées. Une grande partie de la population chercha refuge dans les montagnes, construisant des fermes qui réduisirent d'autant la forêt. L'exploitation commerciale incontrôlée du bois en accéléra le déclin qui fut entretenu par l'utilisation du charbon de bois et le déboisement par les fermiers. Sur une île qui fut jadis verdoyante, il ne reste que 5 % de forêt.

Pendant des dizaines d'années, les appels du gouvernement pour protéger la forêt restèrent lettre morte. Malgré les efforts de nombreuses organisations d'aide internationale pour remplacer les arbres dans l'une ou l'autre partie du pays, la tendance ne put être renversée.

En dépit de cela, M. Hunsberger est optimiste quant au résultat du projet de la FPAD, qui s'attaque au problème d'une manière originale. "Notre but, dit-il, est de travailler avec les organisations volontaires privées, comme la communauté baha'ie haïtienne et d'autres groupes religieux, pour changer la manière dont les paysans perçoivent les arbres."

"Nous voulons que les fermiers fassent pousser leurs propres arbres et qu'ils comprennent qu'on doit récolter le bois comme on récolte le maïs ou les haricots : on ne peut récolter le maïs de quelqu'un d'autre, de même ne devrait-on pas couper les arbres des autres."

La FPAD encourage aussi les fermiers à planter des arbres à croissance rapide qui ont des usages utiles et pratiques : nourriture animale, amélioration de la qualité du sol, bois de charpente ou production de charbon de bois.

Ce programme cadre bien avec le concept baha'i d'intégration entre environnement et développement. L'école Anis Zunuzi participe à ce projet de la FPAD depuis 1985. Elle commença par construire une pépinière. Aujourd'hui, cette pépinière produit environ 120 000 plants par an qui sont distribués aux fermiers de la région. Une autre pépinière, installée au Nord du pays par le conseil baha'i local de Liancourt, produit environ 80 000 arbres par an.

M. Hunsberger explique : "L'école Anis Zunuzi est un excellent exemple de la manière dont agit la FPAD : nous ne travaillons qu'avec des organisations volontaires privées (OVP) telles que l'école baha'ie, la mission baptiste et d'autres. Environ 70 organisations sont impliquées."

En travaillant avec ces groupes, la FPAD atteint les couches de la société haïtienne où l'éducation sur le reboisement et la plantation d'arbres peut faire la différence. "Les OVP ont tendance à avoir les pieds sur terre, affirme M. Hunsberger, et il est probable qu'elles seront là bien plus longtemps que nous."

Victor Dumay est un des fermiers qui a bénéficié du programme. Il y a quatre ans, il planta des arbres autour de chez lui. Aujourd'hui, ils ont déjà plus de six mètres de haut, donnent de l'ombre et améliorent l'humidité du sol.

"Les arbres augmentent la valeur du terrain" dit M. Dumay dont les arbres furent procurés par Desanges Exama, agent de développement du programme extra-scolaire de l'école Anis Zunuzi. "Une fois que vous avez de bons arbres, vous êtes sûr d'avoir de la pluie, parce que les arbres attirent la pluie."

(One Country n°4, pp.10-11)


6.3.3. LES ÉTABLISSEMENTS HUMAINS

Bien que la Conférence Habitat II semble, dans une certaine mesure, mettre l'accent sur les problèmes techniques des cités et des villes comme la congestion urbaine, le problème du logement et la pollution de l'environnement, les responsables politiques sont de plus en plus convaincus que ces problèmes, tout comme ceux liés à l'urbanisation, ne pourront être résolus qu'en puisant dans les valeurs et les aspirations humaines -ce qui a toujours été la préoccupation première des communautés religieuses.

Dernière née des grandes communautés religieuses, la Foi baha'ie est un système de croyance orienté vers l'action qui propose des enseignements spécifiques se rapportant aux problèmes de la vie moderne et aux thèmes figurant à l'ordre du jour de la conférence Habitat II.

Sur le plan des idées, ces enseignements constituent la base du nouveau système de valeurs qu'il faudra édifier pour que les communautés humaines puissent survivre dans un monde interdépendant. C'est ainsi que depuis plus d'un siècle, les baha'is ont défendu les concepts d'"unité de l'humanité" et d'"unité dans la diversité" . Ces idées vont au delà de simples appels à la tolérance et à la coopération, en tant que telles, et sont de plus en plus reconnues comme essentielles à l'édification de communautés pacifiques et harmonieuses.

Sur le plan pratique, inspirées par les aspects progressistes de leur Foi, les communautés baha'ies du monde entier ont mis sur pied plus de 1.300 projets de développement économique et social qui, tout au moins sur une petite échelle, proposent un grand nombre d'approches et de solutions nouvelles aux problèmes que rencontrent les établissements humains contemporains.

Ces projets vont de la création de centres de formation professionnelle au lancement de campagnes contre le racisme dans les grandes villes, en passant par de modestes acitivités génératrices de revenus limitées au niveau des villages et des initiatives de formation pédagogique qui s'adressent aux régions. Presque toutes ces activités s'inspirent des principes d'unité et d'interdépendance de l'humanité, principes qui sont au coeur des enseignements baha'is; nombre d'entre elles intègrent également sciemment les principes de développement durable, de prise de décision collective et d'entreprise individuelle.

a) Projets locaux et communautaires

L'approche des projets baha'is de développement économique et social s'inspire en partie de leur adhésion à des principes sociaux progressistes, alliée à un haut degré d'autonomie locale et de décentralisation. Qui plus est, la plupart de ces projets mettent l'accent sur l'épanouissement moral et la prise de décision collective, considérant que la meilleure façon de résoudre les problèmes sociaux est de permettre aux individus de révéler leurs capacités latentes tout en les préparant à travailler ensemble en groupes pour des buts communs.

Nombre de ces projets suggèrent d'adopter, au niveau local, selon l'expression utilisée dans l'ordre du jour d'Habitat, les "pratiques les meilleures" susceptibles d'être appliquées à plus grande échelle pour trouver des solutions nouvelles aux problèmes des établissements humains.

- En Colombie, la Fondation pour l'enseignement et l'application des sciences (FUNDEAC), créée à l'initiative des baha'is, a mis au point un nouveau programme d'enseignement rural destiné à offrir de nouvelles possibilités aux personnes qui cherchent un emploi ou veulent créer des entreprises en milieu rural afin d'endiguer la migration urbaine. S'appuyant sur plus de vingt années de recherches, la FUNDEAC a mis au point un programme d'enseignement secondaire adapté aux besoins et aux préoccupations des ruraux et facile à enseigner en dehors des cadres scolaires traditionnels par des enseignants ayant reçu relativement peu de formation. Les manuels et les méthodes conçus par la FUNDEAC ont été massivement adoptés par les gouvernements régionaux et d'autres ONG en Colombie et plus de 15.000 élèves ont reçu un diplôme ou suivent les cours de ce programme.

- En Inde, l'Institut professionnel baha'i pour les femmes rurales organise une série de cours visant à former les femmes rurales à diriger leurs communautés. Ouvert à Indore depuis 1983, l'Institut enseigne la santé, la nutrition, la lecture, l'écriture et le calcul, le développement de l'enfant et dispense un enseignement professionnel de base aux femmes rurales des communautés périphériques. Le programme met l'accent sur l'éducation morale, la protection de l'environnement et le concept d'"unité de l'humanité"; grâce à ce programme, on a observé une diminution des tensions entre étudiants appartenant à des castes différentes.

- A Macao, l'École des Nations, qui se situe dans un environnement très urbanisé, dispense un enseignement général et professionnel à tous les citoyens. Le programme est bilingue et met l'accent sur l'éducation morale, la protection de l'environnement, et le concept de "citoyenneté du monde" dans le but de former de futurs dirigeants et citoyens responsables.

- Au Brésil, les problèmes qui affligent ceux que l'on nomme les "enfants de la rue" font l'objet d'un projet à Manaus, ville en rapide expansion de la région amazonienne. Le Centre d'action sociale dirigé par des baha'is cherche à faire de ces enfants des membres productifs, conscientieux et en bonne santé de la société, en combinant l'école élémentaire et un programme spécial de formation professionnelle et morale. Associée à une campagne d'organisation communautaire à l'intention des femmes pauvres du voisinage, cette méthode permet non seulement de fournir une assistance matérielle et scolaire aux enfants, aux jeunes et aux mères à qui elle s'adresse, mais aussi à les doter d'outils intellectuels et spirituels qui leur permettront de transformer leurs vies et en dernière analyse, d'être à même d'aider les autres.

(Dossier de Presse du Bureau d'Information Publique de la Communauté Internationale Baha'ie)


6.3.4. PROJETS LOCAUX ET COMMUNAUTAIRES

Malgré son petit nombre et ses ressources limitées, comparés à ceux de nombreuses autres organisations religieuses, sans compter ceux des gouvernements et des institutions internationales, la communauté mondiale baha'ie a lancé au fil des ans un certain nombre de projets et de programmes à caractère économique et social, qui se distinguent par leur approche inédite des problèmes sociaux et une perspective holistique propre.

Les communautés baha'ies gèrent plus de 1300 projets locaux en matière de développement économique et social de par le monde. Leurs efforts portent autant sur la gestion de simples centres d'alphabétisation, l'organisation de campagnes anti-racistes dans les villes, la mise en oeuvre de modestes projets villageois générateurs de revenus que sur des initiatives de formation des enseignants à l'échelle régionale.

Outre ces projets spécifiques, l'expérience d'ensemble de cette communauté qui intègre et unit quelque 5 millions de membres de milieux extrêmement divers, issus de presque toutes les nationalités, les groupes ethniques, les origines religieuses et les classes sociales, est digne d'examen dans la mesure où elle présente un palmarès unique des possibilités d'intégration sociale dans une ère d'interdépendance planétaire.

L'approche des projets baha'is de développement économique et social s'inspire en partie de leur adhésion à des principes sociaux progressistes, alliée à un haut degré d'autonomie locale et de décentralisation. Qui plus est, la plupart de ces projets mettent l'accent sur l'épanouissement moral et la prise de décision collective, considérant que la meilleure façon de résoudre les problèmes sociaux est de permettre aux individus de révéler leurs capacités latentes tout en les préparant à travailler ensemble en groupes pour des buts communs.

L'institut de développement New Era à Panchgani, en Inde, à quelque 150 km au sud-est de Bombay, sert de centre de formation au développement rural et de centre d'expérimentation directe pour l'amélioration des techniques agricoles, l'éducation à la santé et la viabilité économique des villages alentours. Au travers de ses activités de formation, l'institut vise la création d'un corps de "médiateurs du développement communautaire", soit des individus capables d'aider leurs villages à organiser et à mettre en oeuvre par eux-mêmes des projets. Des jeunes de tous les coins de l'Inde, filles et garçons, y viennent pour suivre un programme d'un an, pendant lequel on leur enseigne non seulement des matières techniques du type éducation des adultes, formation à l'alphabétisation, promotion de la santé et développement agricole, mais aussi des valeurs et des principes spirituels dont dépend le succès de tout effort de développement. En prônant notamment l'égalité entre femmes et hommes et le besoin de se défaire de toute forme de préjugés, l'institut cherche à relever les défis sociaux sous-jacents en Inde, comme l'oppression des femmes et le système des castes. Il fournit aussi une formation professionnelle en matière de "technologie agricole", savoir-faire approprié et utile à la vie rurale en Inde, qui a donné lieu à la création d'un certain nombre de petites entreprises.

Les problèmes qui affligent ceux que l'on nomme les "enfants de la rue" au Brésil font l'objet d'un projet à Manaus, ville en rapide expansion de la région amazonienne. Le Centre d'action sociale dirigé par des baha'is cherche à faire de ces enfants des membres productifs, conscientieux et en bonne santé de la société, en combinant l'école élémentaire et un programme spécial de formation professionnelle et morale. Associée à une campagne d'organisation communautaire à l'intention des femmes pauvres du voisinage, cette méthode permet non seulement de fournir une assistance matérielle et scolaire aux enfants, aux jeunes et aux mères à qui elle s'adresse, mais aussi à les doter d'outils intellectuels et spirituels qui leur permettront de transformer leurs vies et en dernière analyse, d'être à même d'aider les autres.

En Afrique, les baha'is gèrent un large éventail de projets de développement allant de simples groupes de travail dirigés à des efforts de promotion de la condition féminine à l'échelon régional. Parmi les projets les plus réussis, il y a un effort de longue haleine pour former des éducateurs dans le domaine de la santé des collectivités. Mené dans un certain nombre de pays, dont le Tchad, le Kenya et la Zambie, ce projet se sert du système des Assemblées spirituelles locales baha'ies comme réseau prêt à l'emploi pour soutenir et organiser les éducateurs des villages des régions éloignées. Choisis par les communautés où ils seront appelés à exercer leurs compétences, ceux-ci travaillent bénévolement, consacrant une partie de leur temps toutes les semaines à promouvoir la vaccination, l'allaitement maternel, l'hygiène et les techniques de premiers soins de secours comme la réhydratation par voie orale.

Les communautés baha'ies des Etats-Unis, d'Afrique du Sud et d'autres pays multiraciaux ont été à l'avant-garde des efforts dans le domaine de la lutte contre l'animosité raciale. Aux Etats-Unis, les baha'is ont cherché à promouvoir une nouvelle vision de l'unité en organisant de multiples séminaires, ateliers et colloques en faveur de l'entente raciale. En Afrique du Sud, bien avant la fin de l'apartheid, la communauté baha'ie de ce pays, composée de membres issus de tous les groupes ethniques et raciaux, était pleinement engagée à faire la preuve de la réalité de l'unité du genre humain. De fait, plus de 90% des 10 000 membres de cette communauté est non-blanche - proportion qui correspond grosso modo à celle de la population générale de ce pays.

a) Expériences d'intégration sociale de par le monde

D'un point de vue général, l'expérience des baha'is d'Afrique du Sud, bien qu'extrême, permet de se faire une idée du genre de résultats obtenus par les communautés baha'ies du monde pour montrer qu'il existe plusieurs voies possibles vers l'intégration sociale.

Composée d'hommes et de femmes issus de presque toutes les origines nationales, ethniques et religieuses, dont plus de 2100 groupes tribaux et raciaux différents, la communauté mondiale baha'ie est néanmoins fermement unie par un engagement commun à un programme planétaire de progrès social, spirituel et moral. Ce programme se caractérise par le soutien aux principes suivants: l'abandon de toute forme de préjugés; l'égalité pleine et entière entre femmes et hommes; la réduction des extrêmes, de richesse, et de pauvreté; la reconnaissance de l'unité essentielle des grandes religions mondiales et de la nature spirituelle de la personne humaine; l'éducation pour tous; des critères élevés de comportement individuel; l'harmonie entre science et religion; un équilibre entre protection de la nature et développement; enfin l'établissement d'un système fédéral mondial fondé sur la sécurité collective et la citoyenneté mondiale.

Dans l'ensemble, cette communauté incarne dans sa vie de tous les jours, par son engagement à des principes communs, et ses activités d'aide à l'humanité toute entière, une organisation planétaire unique en son genre, disposant d'un vaste réservoir d'expériences en matière de cohésion sociale, souvent contre toute attente. Son oeuvre s'appuie sur une certaine vision de l'unité de l'humanité et la croyance dans la valeur authentique et la dignité spirituelle de tout habitant de la planète.

(Dossier de presse du Bureau d'Information Publique de la Communauté Internationale Baha'ie)


6.4. Coopération

6.4.1. REMPLACEMENT DU "JIKO" TRADITIONNEL - MOMBASA, Kenya


Dans sa nouvelle conception, le poêle "juko" offre une solution au problème de déboisement en Afrique orientale. Vincent Wanagara, cordinateur du projet de nouveau poêle à charbon (appelé "Jiko" en langue swahili) pour la communauté baha'ie de Mombasa (Kenya), montre 3 modèles qui permettent de consommer moins de combustible que les poêles traditionnels.

A Mombasa comme dans les autres grandes villes du Kenya, chaque foyer ou presque est équipé d'un simple brasero, le jiko, qui fonctionne au charbon de bois.

Malheureusement cette tradition, si elle n'est pas maîtrisée, va dénuder les forêts du Kenya. Le combustible ligneux - charbon de bois et bois de chauffage - représente environ 75% des besoins énergétiques de base du Kenya; c'est là une donnée statistique qui a peu de chance de se modifier sensiblement dans l'avenir, étant donné le coût de l'importation de combustibles fossiles. Or, une grande part du charbon de bois qui rentre dans cette équation est utilisée comme combustible dans les jikos.

Une association de groupements écologiques kenyans, connue sous le nom d'"Organisations écologiques non-gouvernementales du Kenya" (KENGO), a lancé un programme national visant à remplacer le jiko traditionnel par un modèle rénové, consommant peu d'énergie. Bien que les jikos perfectionnés soient plus onéreux, ils permettent à la ration journalière de charbon de bois de durer deux fois plus longtemps. La chaleur étant concentrée au-dessous de la casserole, la nourriture cuit deux fois plus vite, et l'on réalise ainsi une économie de temps et de combustible.

Depuis quelques années, la communauté baha'ie de Mombassa participe à ce programme. "KENGO incite la population à utiliser le nouveau modèle de jiko et c'est ainsi que nous avons commencé à le fabriquer dans le cadre d'un effort communautaire", dit Vincent Wanjara, coordinateur baha'i du projet jiko. "Ils ont invité les baha'is à participer à ce projet, et cela a été une expérience enrichissante pour nous. "

"Bien qu'il s'agisse d'un projet à petite échelle réalisé depuis une arrière-salle du centre baha'i de Mombassa, le projet jiko baha'i illustre cependant bien le genre d'initiative adopté par des communautés locales baha'ies pour s'attaquer aux problèmes de l'environnement et du développement", déclare M. Lawrence Arturo, directeur du Bureau de l'environnement crée par la Communauté internationale baha'ie.

Cet état d'esprit a impressionné bien des kenyans. "Lorsque je pense aux baha'is, ce n'est pas la dimension de leurs entreprises qui compte, mais l'impact qu'ils exercent", dit M. Jimoh Omo-Fadakah, directeur général du Réseau africain d'ONG écologiques (AFEN). "Sans exagérer, ils constituent l'un des principaux groupes ici."

Selon M. Omo-Fadakah, même les projets de développement les plus modestes, tels que l'initiative baha'ie pour la fabrication des nouveaux poêles jiko, contribuent non seulement au mouvement écologique, mais aussi à la cause de la paix. "La paix est la condition préalable à toutes sortes de développements humains", dit-il. "La paix peut être trouvée au sein de toutes les communautés locales et, dans la manière dont les individus communiquent entre eux."

"Ceci me semble être l'essence même de la philosophie baha'ie, et il se trouve que je suis d'accord avec cette idée: éveiller la population à l'importance de la paix, et au fait qu'il est essentiel d'agir de la manière qui lui est propre, dans les communautés locales, et sans hostilité envers quiconque", ajoute M. Omo-Fadakah.

La communauté baha'ie de Mombassa a appris la fabrication des nouveaux jikos grâce à des cours de formation dispensés à l'Institut de formation des agriculteurs, dépendant du gouvernement local qui participe au programme élaboré par KENGO pour les groupements et organisations locaux.

Les nouveaux jikos possèdent plusieurs caractéristiques qui les rendent plus efficaces. Tout d'abord, ils ont un revêtement en vermiculite ou en argile et environ 2,5 cm de ciment au fond, sur lequel est allumé le feu sous le charbon de bois, afin de conserver la chaleur.

Chaque jiko est également équipé d'une petite porte latérale avec loquet, où est introduit le papier destiné à faire prendre le feu. Cette porte bloque la chaleur à l'intérieur du poêle.

En outre, le nouveau modèle dure plus longtemps. Les anciens poêles sont rapidement rongés par l'action corrosive de la cendre des hautes températures; il faut les remplacer tous les six mois, alors que le nouveau jiko peut durer jusqu'à quatre ans.

(One Country n°5, pp. 6-7,15)


6.4.2. SYMPOSIUM SUR LA CRISE ALIMENTAIRE EN AFRIQUE - NATIONS UNIES


En termes si ponctués et délibérés qu'ils en devenaient presque hypnotiques, Mme Eremina Mvura a exposé les défis auxquels sont confrontées les femmes rurales en Afrique. Les auditeurs, réunis dans le confort climatisé de l'auditorium de la bibliothèque Dag Hammarskjöld pour un symposium d'une journée sur la crise alimentaire en Afrique le 5 septembre 1991, étaient subjugués. "C'est l'estomac qui nous a conduits ici aujourd'hui", déclare d'emblée Mme Mvura. "Cet estomac-là a des besoins fondamentaux. Et les femmes travaillent jour et nuit pour satisfaire ces besoins."

"La femme rurale doit parcourir des kilomètres pour rapporter de l'eau", ajoute Mme Mvura qui est cultivatrice et travaille pour le développement communautaire dans les zones rurales du Zimbabwe. "Si elle revient sans eau, c'est son bébé qui va pleurer ! Elle a besoin de nourriture pour sa famille, et cette nourriture doit être cuite. Il lui faut donc de l'eau, et aussi du combustible." Les doléances de Mme Mvura ne se sont toutefois pas terminées par un appel en faveur d'une aide extérieure accrue. Bien au contraire, comme l'ont fait d'autres orateurs lors du symposium , elle a demandé que les donateurs internationaux et les organismes de développement soutiennent les femmes en tant que petits producteurs de récoltes vivrières au lieu de concentrer les efforts sur les agriculteurs-hommes, les cultures de rente et l'aide humanitaire. Mme Mvura et d'autres femmes devaient affirmer qu'avec ce soutien l'Afrique ferait un pas de plus vers l'auto-suffisance.

"Avec une aide appropriée, les femmes d'Afrique peuvent produire suffisamment", dit-elle. "Nous n'avons pas besoin d'être nourries à la cuillère. Nous n'avons pas besoin d'être prises en charge... Nous cherchons un appui moral et motivant... Nous avons besoin de matériel, par exemple des brouettes." Ce symposium était le sixième d'une série de conférences annuelles au sujet des femmes rurales africaines, patronné par l'organisation Défenseurs de la sécurité alimentaire en Afrique qui siège à New York et regroupe des organisations intergouvernementales et non-gouvernementales (ONG) et des organes des Nations unies. L'importance des agricultrices s'affiche dans cette simple statistique : on estime que les femmes contribuent à hauteur de 80 % à la production alimentaire en Afrique. Malgré cela, elles sont ignorées lors de la définition des politiques alimentaires, problème auquel Défenseurs cherche à s'attaquer.

a) Enquête auprès des ONG

Cette année, l'intérêt des informations fournies au cours du symposium s'est accru avec la publication d'une enquête récente auprès des ONG du continent africain. Patronnée par Défenseurs de la sécurité alimentaire en Afrique, l'enquête souligne un grand nombre des préoccupations exprimées par Mme Mvura et d'autres. Par exemple, elle suggère que la dégradation accrue de l'environnement, le manque de programmes d'alphabétisation et de formation technique pour les agriculteurs des petites exploitations, en particulier pour les femmes, ainsi que l'application inadéquate de l'aide alimentaire, sont parmi les causes principales de l'aggravation de la situation alimentaire en Afrique.

"Même si de nombreuses ONG reconnaissent l'importance de l'aide humanitaire, elles aimeraient la voir s'accompagner d'efforts pour améliorer les moyens et accroître la capacité des Africains à produire leurs propres ressources alimentaires", remarque Alasebu Gebre Sélassié, sociologue éthiopienne et conseiller en développement, qui analysait les résultats de l'enquête.

Sur les 94 réponses de l'enquête qui portait sur plus de 500 ONG africaines, 65% précisent que l'ensemble de la situation alimentaire en Afrique a empiré depuis 1986, au cours des six années qui suivirent le lancement du Programme d'action des Nations unies pour le redressement et le développement économique de l'Afrique dont la révision finale est actuellement en cours.

"Ce qui est significatif dans cette enquête, c'est qu'elle interrogeait des organisations africaines locales, sur les causes de la pénurie alimentaire en Afrique", déclare Mary Power, représentante auprès des Nations unies de la Communauté internationale baha'ie, une des organisations fondatrices et celle qui préside Défenseurs de la sécurité alimentaire en Afrique. "Cette enquête n'était pas basée sur les évaluations d'organisations donatrices ou d'experts techniques occidentaux, mais plutôt sur l'expérience réelle des groupes qui travaillent actuellement sur le terrain afin d'aider les leurs."

Les organisations interrogées ont suggéré que la situation alimentaire en Afrique pourrait s'améliorer en portant l'effort sur les infrastructures agricoles dans les zones rurales, avec un retour à des programmes de formation intégrée privilégiant la préservation de l'environnement et la culture biologique et avec des possiblilités de crédits et de prêts aux petits exploitants.

"Tout programme d'action destiné à garantir la sécurité alimentaire en Afrique doit être entièrement conçu, exécuté, contrôlé et modifié par ceux qui sont concernés", écrit Mme Sélassié dans la conclusion de l'enquête. "Les décideurs du pays devraient établir leurs plans en tenant compte des expériences des petits exploitants au niveau familial et de celles des gros producteurs."

Ces idées formulées dans l'enquête ont été défendues par les orateurs du symposium qui a réuni plus de cent représentants d'organismes de développement, d'ONG et de bureaux des Nations unies.

b) Femmes en première ligne

"Les femmes rurales africaines sont en première ligne pour la production alimentaire", a déclaré Alex Ashiabor, administrateur du Groupe de travail pour l'Afrique de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement. "Elles sont en position de voir les problèmes pointant à l'horizon. Bien souvent, elles peuvent offrir des solutions. Toutefois, la tradition, les usages culturels et les lois en vigueur qui donnent la priorité aux hommes dans tout ce qui concerne l'accès aux ressources et même dans le processus de prise de décisions les empêchent d'atteindre leur but."

M. Ashiabor cite un expemple en Gambie où un projet sur 20 ans, visant à améliorer la production de riz par la transformation de 2.400 ha. de marécages en champs irrigués, a échoué parce que les femmes, "qui assurent la plus grande partie des travaux de déblaiement, transplantation, semis et récolte, se sont vues refuser le droit à la propriété et n'ont pas été pleinement impliquées lors de la conception du projet".

Selon M. Ashiabor, des désaccords sont apparus et nombreuses sont les femmes qui ont cessé de travailler la terre. Même si des facteurs d'ordre technique ont contribué à cet échec, les facteurs sociaux-culturels et, en particulier, l'attitude des hommes envers les femmes ont exercé une influence encore plus grande.

c) Valeur des aliments locaux

M. Ashiabor a également préconisé une intensification de la recherche sur la valeur nutritive, la production, la préparation et la conservation des aliments locaux."La valeur diététique de nombreux aliments africains est connue des femmes mais n'est pas largement diffusée", précise-t-il avant d'ajouter qu'"une meilleure connaissance de leur valeur nutritive favoriserait l'accroissement de la consommation des produits locaux plutôt que des variétés importées".

Ruth Bamela Engo-Tjega, chargée de liaisons au comité d'orientation du secrétariat du Groupe de travail pour l'Afrique et l'une des fondatrices de Défenseurs de la sécurité alimentaire en Afrique, déclare que la guerre, la dégradation de l'environnement et l'"absence de stratégies alimentaires nationales" figurent parmi les principales causes de l'aggravation de la situation alimentaire en Afrique.

Selon Mme Engo-Tjega, d'autres efforts dans le domaine du développement s'avèreront inutiles si le problème de la production alimentaire n'est pas traité en premier lieu. "La nourriture doit avoir la priorité car elle est, en fait, la source de toute vie", dit-elle. "Cette année encore, Défenseurs aborde le problème avec la conviction que les simples citoyens sont les bâtisseurs des nations et que les populations sous-alimentées ne peuvent assurer le développement d'un pays, pas plus qu'un oiseau sans ailes ne peut prendre son envol."

(One Country n°10, pp.1, 8, 12-13)


6.4.3. SOINS DE SANTÉ - GENÈVE

Bien que les efforts en matière de santé au niveau régional et villageois, tels que le programme de soins élémentaires à Sarh, au Tchad, aient été réalisés en grande partie par des activités à la base, l'action baha'ie, nationale et internationale, dans le domaine des soins élémentaires se développe, elle aussi, rapidement.

Ainsi par exemple, en 1989, la Communauté internationale baha'ie a entamé des relations de travail avec l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Dans les deux années à venir, diverses formes de coopération vont être explorées telles que : le patronage conjoint d'une association pour les questions de santé publique au Burkina Faso, la reproduction de documents techniques de l'OMS dans les publications baha'ies, et un effort général des communautés baha'ies visant à promouvoir la stratégie de l'OMS "La santé pour tous".

Dans le cadre de cette coopération globale, la Communauté internationale baha'ie s'est associée aux 70 autres organisations à vocation médicale ou consacrées aux enfants, dans le programme "Des faits pour la vie", que lancent en ce moment l'UNICEF, l'OMS et l'UNESCO. Ce programme est fondé sur la diffusion d'une brochure simple et facile à comprendre, présentant des informations de base sur les soins à donner aux enfants, en particulier l'importance de l'allaitement, des vaccinations, de l'hygiène domestique et du traitement de la diarrhée.

Grâce à un réseau de programmes sanitaires, éducatifs et/ou de développement dans 41 pays, les communautés baha'ies nationales participantes diffuseront ces brochures et encourageront leur utilisation dans les groupes de femmes, les écoles baha'ies, les activités pour les jeunes, les programmes d'alphabétisation des adultes et les conférences régionales.

"La stratégie mondiale de l'OMS pour "La santé pour tous en l'an 2000" est, pour une large part, un élément des buts que poursuivent nos communautés à travers le monde", nous a déclaré M. Giovanni Ballerio, représentant de la Commuanuté internationale baha'ie auprès des Nations unies à Genève.

"L'engagement croissant de nos communautés au niveau local, dans des projets relatifs à la santé en est un exemple, comme d'ailleurs l'action de notre communauté internationale, qui participe au programme "Des faits pour la vie". Depuis de nombreuses années, les baha'is ont également oeuvré au sein des Nations unies dans le cadre de conférences internationales sur la santé."

Les communautés nationales baha'ies gèrent une gamme de projets d'éducation sanitaire. Des stations de radios d'Afrique et d'Amérique du Sud émettent régulièrement des programmes d'information en matière de soins sanitaires. C'est ainsi qu'une station de Bolivie, "Radio baha'ie Caracolla", diffuse des programmes éducatifs sur la santé, tels que celui de l'UNICEF intitulé "Révolution dans la santé infantile", et elle a collaboré à la création de 35 centres d'écoute locaux pour la discussion de ces programmes.

Au Pérou, une troupe théâtrale itinérante patronnée en partie par la station radio de Puno, a joué une pièce écrite spécialement pour la circonstance et qui montre de manière saisissante comment de simples mesures, telles que l'immunisation et la réhydratation orale peuvent sauver le petit enfant des "ravisseurs d'enfants".

Cette production a été filmée par l'UNICEF pour être utilisée dans le cadre d'autres projets de formation sanitaire. La radio baha'ie du Liberia a participé à la réalisation d'un programme sur les soins de santé, diffusé en cinq langues.

L'information sur les problèmes sanitaires est également distribuée par les soins de l'Agence internationale baha'ie de la santé, créée en 1982, en Amérique du Nord, par des professionnels de la santé. Le cercle de ses membres s'est agrandi depuis lors puisqu'il englobe désormais des médecins, des infirmiers et du personnel de santé disséminés à travers le monde. L'Agence internationale baha'ie de la santé publie un bulletin trimestriel et organise une conférence annuelle.

(One Country n°3, pp. 10-11)


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